Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 18 mars 2019 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1900933 du 17 juillet 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 août 2019, M. B... C..., représenté par Me Parison, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 juillet 2019 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 18 mars 2019 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- le jugement n'est pas motivé ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté méconnait les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il peut prétendre à un titre de séjour au regard des dispositions de la loi du 29 juillet 2015 sur l'asile dès lors qu'il s'occupe de son enfant depuis sa naissance ;
- l'arrêté méconnait les articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'arrêté viole l'article 371-2 du code civil ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a entaché son arrêté d'une erreur de droit en ne prenant pas en considération sa situation particulière ;
- le préfet a méconnu la circulaire du 28 novembre 2012.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2020, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er octobre 2019.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lambing a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... C..., né en 1980 de nationalité centrafricaine serait entré irrégulièrement en France en 2012 selon ses déclarations. Le 10 décembre 2013, l'intéressé a déposé une demande de titre de séjour en qualité de parent d'enfant français qui lui a été accordé. Son titre de séjour a été régulièrement renouvelé jusqu'au 29 avril 2017. Estimant que l'intéressé ne participait plus effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant, par arrêté du 18 mars 2019, le préfet de l'Aube a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 17 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 18 mars 2019.
Sur la régularité du jugement :
2. Contrairement à ce que soutient le requérant, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments développés par les parties devant lui, ont répondu de façon suffisamment détaillée à l'ensemble des moyens soulevés par lui. Par suite, le jugement attaqué est suffisamment motivé.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
3. En premier lieu, si M. C... soutient que la motivation de l'arrêté litigieux est succincte et stéréotypée, celui-ci mentionne cependant de manière suffisamment précise et détaillée les circonstances de fait et de droit sur lesquelles le préfet s'est fondé. Le préfet a notamment rappelé les conditions de séjour de M. C... depuis son arrivée en France et a mentionné de manière exhaustive les éléments qui lui ont permis de considérer que l'intéressé ne participait plus à l'éducation et à l'entretien de sa fille depuis le déménagement de la mère de l'enfant en Guadeloupe. En outre, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet ne s'est pas contenté de mentionner qu'il ne remplissait pas les conditions de liens personnels et familiaux en France mais a apprécié s'il entretenait des relations avec son frère présent en France et a tenu compte de l'instance de divorce en cours. Le préfet a enfin examiné les attaches que l'intéressé avait encore en Centrafrique. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté. Pour les mêmes motifs, l'arrêté n'est pas entaché d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle du requérant.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ".
5. M. C... a épousé le 13 juillet 2013 Mme A..., ressortissante française, avec qui il a eu une fille née le 30 septembre 2013. Il soutient qu'il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant français au sens du 6° de l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cependant, M. C... ne produit aucun élément de nature à établir qu'il aurait contribué à l'entretien de l'enfant depuis qu'il a quitté le domicile conjugal le 15 décembre 2015 tel que cela ressort de la main-courante qu'il a déposée. L'intéressé est pourtant titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en qualité d'agent de sécurité depuis le 6 juin 2017. En outre, M. C... n'établit pas davantage participer de quelque façon que ce soit à l'éducation de sa fille. Il ne justifie pas lui avoir rendu visite depuis le déménagement de la mère de l'enfant en Guadeloupe en novembre 2016 ou l'avoir accueillie durant des vacances scolaires comme la mère de l'enfant lui proposait dans un courrier du 10 novembre 2016. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté aurait été pris en méconnaissance des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Aux termes de l'article 9 de cette même convention : " Les Etats parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Une décision en ce sens peut être nécessaire dans certains cas particuliers, par exemple lorsque les parents maltraitent ou négligent l'enfant, ou lorsqu'ils vivent séparément et qu'une décision doit être prise au sujet du lieu de résidence de l'enfant (...) ".
7. Si M. C... fait valoir que l'arrêté du préfet de l'Aube méconnaît l'intérêt supérieur de son enfant, de nationalité française, il ressort, cependant, des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 5, que le requérant n'établit pas qu'il participerait effectivement à l'éducation et à l'entretien de son enfant. M. C... n'est donc pas fondé à soutenir que la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 précité. En outre, les stipulations de l'article 9 de la convention internationale des droits de l'enfant créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés. Le requérant ne peut, par suite, utilement s'en prévaloir.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 371-2 du code civil dans sa version applicable au présent litige : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. / Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur. ".
9. En se bornant à alléguer qu'il a appris à s'occuper d'un bébé et à assumer seul l'entretien de son enfant, M. C... ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article 371-2 du code civil au soutien de sa demande d'annulation de l'arrêté contesté.
10. En cinquième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de la loi n°2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile est dépourvu de précisions suffisantes permettant à la Cour d'en apprécier la portée et le bien-fondé. En tout état de cause, M. C... ne peut utilement se prévaloir de cette loi relative aux conditions d'octroi de l'asile.
11. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
12. Il ressort des pièces du dossier que la présence de M. C... est établie en France à compter du 13 juillet 2013, date de son mariage avec une ressortissante française. Par ordonnance de non-conciliation du 10 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Troyes a constaté la séparation des époux et a fixé la résidence habituelle de la fille née de leur union au domicile de la mère. Si M. C... se prévaut des liens qui l'unissent à son enfant, l'intensité de ces liens n'est pas établie comme il a été dit au point 5. En outre, le requérant n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident trois de ses enfants âgés entre 10 et 15 ans à la date de la décision attaquée. M. C... ne démontre pas avoir tissé des liens en France autre que ceux qu'il avait avec son épouse et sa fille. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Aube aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris l'arrêté attaqué. Le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut donc qu'être écarté.
13. En septième lieu, le requérant ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance des orientations figurant dans la circulaire du 28 novembre 2012 commentant l'application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux conditions de délivrance d'un titre de séjour, qui est dépourvue de valeur réglementaire.
14. En dernier lieu, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la jurisprudence du Conseil d'Etat issue de la décision " Distillerie Brabant " du 23 mai 1969 pour arguer que le préfet aurait commis une erreur de droit, cet arrêt ayant trait au pouvoir réglementaire des ministres.
15. Il résulte de tout ce qui précède, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Aube.
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N° 19NC02510