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08/03/2022 | FRANCE | N°19NC03616

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 08 mars 2022, 19NC03616


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme I... F..., M. et Mme E... H... à l'Antoine et M. et Mme J... K... ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 7 août 2017 par lequel le maire de la commune de Le Pasquier a accordé à Mme G... B... un permis de construire pour le changement d'affectation d'un bâtiment de stockage ainsi que pour l'extension d'un bâtiment existant.

Par un jugement n° 1701735 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 7 août 2017 du mair

e de la commune de Le Pasquier.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme I... F..., M. et Mme E... H... à l'Antoine et M. et Mme J... K... ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 7 août 2017 par lequel le maire de la commune de Le Pasquier a accordé à Mme G... B... un permis de construire pour le changement d'affectation d'un bâtiment de stockage ainsi que pour l'extension d'un bâtiment existant.

Par un jugement n° 1701735 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 7 août 2017 du maire de la commune de Le Pasquier.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2019 sous le n° 19NC03616, et deux mémoires, enregistrés le 15 septembre 2020 et le 22 février 2021, Mme G... B..., représentée par Me Brocherieux, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 7 août 2017 ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par M. et Mme F..., M. et Mme H... à l'Antoine et M. et Mme K... ;

3°) de mettre à la charge solidaire de ces derniers une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions à fin d'annulation présentées en première instance par M. et Mme F... et autres étaient irrecevables dès lors qu'ils n'avaient pas intérêt à agir ;

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il n'existait aucun risque d'inondation sur les parcelles intéressant le permis de construire litigieux ;

- les moyens présentés en première instance au soutien des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté litigieux sont infondés.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 27 août 2020 et le 8 janvier 2021, M. et Mme F..., M. et Mme H... à l'Antoine et M. et Mme K..., représentés par Landbeck, demandent à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête d'appel de Mme B... et de confirmer le jugement du tribunal administratif de Besançon ;

2°) à titre subsidiaire, d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Besançon en ce qu'il n'a pas retenu les autres moyens soulevés devant lui ;

3°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- ils ont intérêt à agir ;

- les autres moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés ;

- en toute hypothèse, les moyens soulevés en première instance et tirés, d'une part, de ce que le dossier de demande ne satisfait pas aux exigences des articles R. 431-8 et R. 431-9 du code de l'urbanisme, et, d'autre part, de ce que l'arrêté méconnaît les articles 153-2 et 153-4 du règlement sanitaire départemental, justifient l'annulation de l'arrêté litigieux.

Par une lettre du 28 janvier 2022, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans l'attente de la délivrance d'un permis de construire modificatif régularisant les vices tirés, d'une part, de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et, d'autre part, de la méconnaissance de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura.

Par un mémoire, enregistré le 1er février 2022, Mme B... a présenté des observations en réponse à ce courrier.

Par un mémoire, enregistré le 3 février 2021, M. et Mme F..., M. et Mme H... à l'Antoine et M. et Mme K... ont présenté des observations en réponse à ce courrier.

II. Par une requête enregistrée le 7 février 2020 sous le n° 20NC00333, et un mémoire, enregistré le 30 mars 2021, la commune de Le Pasquier, représentée par Me Lhomme, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 7 août 2017 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme F..., M. et Mme H... à l'Antoine et M. et Mme K... ;

3°) de mettre à la charge solidaire de ces derniers une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions à fin d'annulation présentées en première instance par M. et Mme F... et autres étaient irrecevables dès lors qu'ils n'avaient pas intérêt à agir et encore moins un intérêt commun à agir justifiant le dépôt d'une requête collective ;

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il n'existait aucun risque d'inondation sur les parcelles intéressant le permis de construire litigieux s'opposant à la délivrance du permis.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 27 août 2020 et le 27 juillet 2021, M. et Mme F..., M. et Mme H... à l'Antoine ainsi que M. et Mme K..., représentés par Me Landbeck, demandent à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête d'appel de la commune de Le Pasquier et de confirmer le jugement du tribunal administratif de Besançon ;

2°) à titre subsidiaire, d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Besançon en qu'il n'a pas retenu les autres moyens soulevés devant lui ;

3°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de la commune de Le Pasquier la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- ils avaient intérêt à agir et pouvaient présenter une requête collective pour demander l'annulation du permis de construire litigieux ;

- les autres moyens soulevés par la commune de Le Pasquier ne sont pas fondés ;

- en toute hypothèse les moyens soulevés en première instance et tirés, d'une part, de ce que le dossier de demande ne satisfait pas aux exigences des articles R. 431-8 et R. 431-9 du code de l'urbanisme, et, d'autre part, de ce que l'arrêté méconnaît les articles 153-2 et 153-4 du règlement sanitaire départemental, justifient l'annulation de l'arrêté litigieux.

Par une lettre du 28 janvier 2022, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans l'attente de la délivrance d'un permis de construire modificatif régularisant les vices tirés, d'une part, de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et, d'autre part, de la méconnaissance de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura.

Par un mémoire, enregistré le 1er février 2022, Mme B... a présenté des observations en réponse à ce courrier.

Par un mémoire, enregistré le 3 février 2021, la commune de Le Pasquier a présenté des observations en réponse à ce courrier.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marchal,

- et les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 7 août 2017, le maire de la commune de Le Pasquier a délivré un permis de construire à Mme B... autorisant, d'une part, le changement de destination d'un bâtiment de stockage en six boxes équins, ainsi que, d'autre part, la réalisation d'une extension de 18 mètres carrés à ce bâtiment de stockage pour réaliser deux autres boxes. M. et Mme F... et autres ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler cet arrêté. Par deux requêtes, qu'il convient de joindre, Mme B... et la commune de Le Pasquier font appel du jugement n° 1701735 par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 7 août 2017 du maire de la commune de Le Pasquier.

Sur la recevabilité des conclusions à fin d'annulation présentées par M. F... et autres en première instance :

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme applicables au litige : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. et Mme F..., M. et Mme H... à l'Antoine ainsi que M. et Mme K... sont voisins du terrain d'assiette du projet. Leurs habitations se situent toutes à moins de 80 mètres de la construction projetée. Ainsi, alors que la construction autorisée permettra, compte tenu de sa destination, l'accueil de plusieurs chevaux supplémentaires sur le terrain d'assiette du projet et sera susceptible de générer des nuisances, notamment olfactives, pour les demandeurs de première instance, ces derniers justifient d'un intérêt pour contester le permis de construire délivré à Mme B.... La fin de non-recevoir opposée à ce titre par Mme B... et la commune de Le Pasquier doit donc être écartée.

4. En second lieu, contrairement à ce que soutient la commune de Le Pasquier, la recevabilité d'une requête collective n'est pas conditionnée au fait que les différents requérants justifient d'un intérêt à agir commun, mais uniquement à ce que les conclusions d'une telle requête présentent un lien suffisant entre elles. Les demandeurs ont sollicité l'annulation de l'arrêté délivrant un permis de construire à Mme B..., de sorte que leurs conclusions présentaient bien un lien suffisant. La fin de non-recevoir opposée doit être écartée.

Sur le moyen retenu par le tribunal administratif de Besançon :

5. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

6. Il appartient à l'autorité compétente pour délivrer une autorisation d'urbanisme, si les particularités de la situation l'exigent, de préciser dans l'autorisation, le cas échéant, les conditions d'application d'une prescription générale notamment contenue dans un plan de prévention des risques naturels prévisibles ou de subordonner, en application des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, la délivrance du permis de construire sollicité à d'autres prescriptions spéciales, si elles lui apparaissent nécessaires. L'autorité compétente pour délivrer l'autorisation d'urbanisme peut aussi, si elle estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise et du projet pour lequel l'autorisation de construire est sollicitée, que les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique le justifient, refuser, sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de délivrer un permis de construire, alors même que le terrain d'assiette du projet n'est pas classé en zone à risques par un plan de prévention des risques naturels prévisibles et qu'il n'est pas plus prévu de prescriptions particulières applicables à cette parcelle. Le permis de construire ne peut néanmoins être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.

7. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle d'implantation du projet est située à proximité de la rivière l'Angillon. En raison des risques d'inondation existants, cette parcelle a été classée par la carte communale de Le Pasquier en zone non-constructible, de sorte que seuls des adaptations, des changements de destinations, des extensions de bâtiments déjà existants ainsi que des constructions limitées y sont autorisés. M. F... et autres produisent plusieurs photographies témoignant que le terrain d'assiette du projet subit des inondations en raison de crues de la rivière l'Angillon. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier et notamment de l'étude des risques d'inondation ayant été utilisée pour l'élaboration de la carte communale que les risques d'inondations existant sur la parcelle d'implantation ne concernent qu'une partie de cette dernière. Les constructions projetées s'implantent sur un secteur qui n'est pas soumis à un risque d'inondation identifié par cette étude. De plus, ainsi que le précise le dossier de demande de permis de construire, le projet se situe sur une partie de la parcelle, qui, postérieurement à l'étude des risques d'inondation utilisée pour l'élaboration de la carte communale, a été rehaussée et drainée. Les différentes photographies produites témoignent qu'en dépit des inondations connues par le terrain, l'eau n'atteint pas le bâtiment litigieux. Dans ces conditions, le maire de la commune de Le Pasquier n'a pas entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en accordant le permis sollicité, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges.

8. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. F... et autres devant le tribunal administratif de Besançon, ainsi que devant la cour.

Sur les autres moyens soulevés par M. F... et autres :

9. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / (...) ".

10. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

11. Il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme F... et autres, le dossier de demande de permis de construire de Mme B... comportait une présentation suffisante de l'état initial des lieux. Il était à ce titre notamment versé des plans cadastraux permettant d'apprécier la distance séparant la construction projetée de la rivière l'Angillon et de la mare présente sur la parcelle d'implantation du projet. La seule circonstance que les données altimétriques n'ont pas été mentionnées dans le dossier de demande ne saurait, en tout cas, avoir été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable notamment en matière de risques d'inondation, dès lors que le dossier comportait des indications suffisantes quant à la distance séparant le projet de la rivière l'Angillon et de la marre présente sur la parcelle d'implantation du projet et précisait que terrain d'assiette du projet avait été rehaussé et drainé. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de la notice du projet architectural doit être écarté.

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. (...) ".

13. Il ressort du dossier de demande de permis de construire que ce dernier comportait plusieurs plans du projet côtés dans les trois dimensions. Ces plans, ainsi que les photographies jointes au dossier faisaient apparaître non seulement les différents travaux nécessaires afin de changement de destination du bâtiment de stockage mais également ceux à effectuer pour la réalisation de l'extension de 18 mètres carrés. Le volet paysager permettait d'apprécier le maintien des plantations existantes. Enfin, il n'est pas démontré en quoi la circonstance que le projet ne présente pas les modalités de raccordement aux réseaux publics, compte tenu de la nature du projet, serait susceptible d'avoir faussé l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. Par suite, le moyen ne peut qu'être écarté.

14. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. (...) ". Les règlements sanitaires départementaux, dans la mesure où ils se rattachent à l'un ou l'autre des objets mentionnés à l'article L. 421-6, sont au nombre des prescriptions au respect desquelles est subordonnée la délivrance du permis de construire ou la non-opposition à une déclaration préalable.

15. Aux termes de l'article 153-2 du règlement sanitaire départemental du Jura : " Les bâtiments renfermant des animaux à demeure ou en transit ne doivent pas être l'origine d'une pollution des ressources en eau. / Leur implantation devra satisfaire aux prescriptions générales ou particulières relatives aux périmètres de protection des sources, puits, captages ou prises d'eau. / Elle est, en outre, interdite : / à moins de 35 mètres : / (...) / des berges des cours d'eau et des plans d'eau. (...) ".

16. Il ressort des pièces du dossier et notamment du plan des lieux versé par Mme B... devant les premiers juges, que le projet, qui a certes vocation à renfermer des animaux, se situe à plus de 35 mètres de la rivière l'Angillon et de la mare présente sur la parcelle d'implantation du projet. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 153-2 du règlement sanitaire départemental du Jura doit être écarté.

17. En quatrième lieu, aux termes de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura : " Sans préjudice de l'application des documents d'urbanisme existant dans la commune ou de cahiers des charges de lotissement, l'implantation des bâtiments renfermant des animaux doit respecter les règles suivantes : (...) / stabulation libres : les aires de couchage des stabulations libres ne peuvent être implantées à moins de 50 mètres d'une part, les aires d'exercice et le bâtiment de stockage de fourrage ne peuvent être implantés à moins de 35 mètres d'autre part, des immeubles habités ou habituellement occupés par des tiers, des zones de loisirs ou de tout établissement recevant du public, à l'exception des installations de camping à la ferme. (...) ".

18. Le projet litigieux est situé à proximité immédiate d'un immeuble, dont il est constant qu'il était, à la date de l'arrêté litigieux, habité par M. et Mme D..., soit les parents de Mme B..., ainsi que par M. C... et par sa compagne, Mme A.... A considérer même, ainsi que le soutient la commune de Le Pasquier, que les anciens exploitants agricoles et leurs familles, ainsi que les personnes travaillant pour l'exploitation agricole et leurs familles ne puissent être considérés comme des tiers au sens de l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura, les appelants se bornent, pour justifier de ce que M. C... travaillait pour l'exploitation de Mme B..., à produire une déclaration témoignant de ce que M. D... entendait l'embaucher en mars 2017. Alors que les éléments au dossier témoignent, d'une part de ce que M. D... disposait de sa propre activité agricole et, d'autre part, ce que Mme B... exerçait individuellement son activité d'élevage de chevaux, il n'est pas justifié que l'embauche de M. C... devait le conduire à travailler pour l'exploitation de Mme B... et non exclusivement pour M. D.... Dans ces condition, l'immeuble situé à moins de 35 mètres du projet litigieux doit, en tout cas, être regardé comme habité par un tiers à l'exploitation de Mme B.... Par suite et dès lors qu'il ne ressort pas des termes de l'arrêté que le maire ait entendu faire bénéficier Mme B... d'une dérogation aux règles de distance, le permis de construire litigieux a été délivré en méconnaissance des règles minimales de distance prévues par les dispositions citées au point précédent.

En ce qui concerne l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

19. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

20. Il résulte de ce qui a été dit au point 18 du présent arrêt que le permis de construire litigieux est illégal pour avoir méconnu l'article 153-4 du règlement sanitaire départemental du Jura. Un tel vice peut être régularisé sans apporter au projet un bouleversement tel qu'il en changerait sa nature. Il y a donc lieu de surseoir à statuer sur les présentes requêtes et d'impartir à Mme B... et à la commune de Le Pasquier un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt pour justifier d'un acte destiné à régulariser l'illégalité évoquée précédemment.

D E C I D E :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur les requêtes de Mme B... et de la commune de Le Pasquier.

Article 2 : Mme B... et de la commune de Le Pasquier devront justifier, dans le délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt, de la délivrance d'un acte destiné à régulariser l'illégalité dont est entaché l'arrêté du 7 août 2017.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B..., à la commune de Le Pasquier, à M. et Mme I... F..., à M. et Mme E... H... à l'Antoine, à M. et Mme K... J... et à la ministre de la transition écologique.

N° 19NC03616, 20NC00333 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC03616
Date de la décision : 08/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. SAMSON-DYE
Rapporteur ?: M. Swann MARCHAL
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : BROCHERIEUX - GUERRIN-MAINGON

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-03-08;19nc03616 ?
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