Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2101394 du 28 septembre 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 octobre 2021, M. C..., représenté par Me Brener, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 septembre 2021 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 30 avril 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige est entaché d'un défaut de motivation en fait dans la mesure où il fait référence à des éléments sans lien avec sa situation ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où lui et sa famille sont intégrés en France et il dispose d'un promesse d'embauche en qualité de maçon.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2021, le préfet de la Marne conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. C... la somme de 100 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 mai 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., né le 22 juillet 1985 à Vlore (Albanie), de nationalité albanaise, est entré irrégulièrement en France le 17 avril 2019 afin d'y solliciter l'asile. Sa demande a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile le 18 octobre 2019. Le 4 janvier 2021, M. C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 avril 2021, le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... relève appel du jugement du 28 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
2. En premier lieu, l'arrêté attaqué comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Ainsi, le préfet de la Marne, qui n'avait pas à viser toutes les circonstances de fait de la situation de M. C..., a cité les éléments pertinents dont il avait connaissance et qui fondent ses décisions. Si cet arrêté fait référence à la situation de l'emploi en Savoie dans un secteur d'activités qui n'est pas celui du requérant et mentionne, dans le dernier paragraphe de son arrêté, un autre nom, ces mentions constituent de simples erreurs matérielles demeurant sans incidence sur la régularité de la motivation dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Marne a procédé à un examen particulier de sa situation personnelle. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en fait doit être écarté.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
5. Si M. C... se prévaut de deux promesses d'embauche en qualité de maçon et de son travail auprès de particuliers pour des travaux de bâtiments par le biais du chèque emploi service universel (CESU), il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il dispose d'un quelconque diplôme ou d'une expérience professionnelle significative dans ce domaine. Par ailleurs, à supposer que l'emploi de " technicien dans le bâtiment " fasse partie des emplois en tension dans la région Grand Est, il ressort de l'avis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du 5 mars 2021 que l'emploi d'" ouvrier d'exécution du bâtiment " pour lequel il postule ne fait pas partie des métiers reconnus en tension, que dans le département de la Marne, les demandes pour ce types de poste sont supérieures aux offres et que son employeur n'a justifié d'aucune recherche d'emploi auprès d'un organisme de placement. En outre, si M. C... soutient que sa famille est parfaitement intégrée en France, où ses deux enfants ainés sont scolarisés et où le plus jeune est né, et que son épouse et lui-même ont participé à des activités de bénévolat, il ressort des pièces du dossier que son épouse est également en situation irrégulière et que la famille est présente sur le territoire français depuis deux ans à la date de l'arrêté en litige. Il n'est pas non plus démontré que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer en Albanie où ses enfants auraient la possibilité de poursuivre ou commencer leur scolarité. Enfin, si M. C... verse au dossier des témoignages de soutien de la part des camarades de classe de ses enfants et des habitants de la commune dans laquelle sa famille réside, il n'est pas dépourvu d'attaches notamment familiales dans son pays d'origine où demeurent toujours ses frères et sa sœur et où il a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans. Dans ses conditions, M. C... ne justifie ni de " motifs exceptionnels ", ni de " considérations humanitaires " au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'annulation ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par le préfet de la Marne sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le préfet de la Marne sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Marne.
Délibéré après l'audience du 12 mai 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Samson-Dye, présidente,
Mme Lambing, première conseillère,
Mme Mosser, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2022.
La rapporteure,
Signé : C. B...La présidente,
Signé : A. SAMSON-DYELa greffière,
Signé : S. BLAISE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
F. LORRAIN
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N° 21NC02722