Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2019 par lequel la rectrice de l'académie de Strasbourg a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle.
Par un jugement n° 2001836 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement les 14 septembre 2021, 30 août 2022, 9 septembre 2022 et 15 juin 2023, Mme A..., représentée par Me Diaby, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 8 juillet 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2019 par lequel la rectrice de l'académie de Strasbourg a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle ;
3°) d'enjoindre à la rectrice de la réintégrer dans ses fonctions de maîtresse contractuelle à l'échelle de rémunération des adjoints d'enseignement ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le signataire de l'arrêté était incompétent pour ce faire ;
- le principe général du droit de la défense a été méconnu en ce que ses observations auraient dû être recueillies préalablement à l'envoi au recteur des plaintes formulées par les élèves et les parents et qu'elles ne soient intégrées à son dossier ;
- l'arrêté en litige a été pris au terme d'une procédure irrégulière en ce qu'il fait suite à l'avis défavorable du jury académique à son intégration en qualité de professeur de lycée professionnel alors qu'un tel avis ne saurait justifier la résiliation de son contrat en qualité de maître contractuel ;
- la rectrice ne s'est pas prononcée sur la possibilité d'effectuer une seconde année probatoire en méconnaissance de l'article R. 914-35 du code de l'éducation ;
- elle a été licenciée à l'issue de son année probatoire en méconnaissance de l'article R. 914-36 du code de l'éducation ;
- il a été pris au terme d'une procédure irrégulière dans la mesure où elle n'a pas été informée de la possibilité de consulter son dossier et d'être entendue par le jury académique ;
- il est entaché d'erreur de fait puisque le sens de l'avis de la commission consultative paritaire est repris de manière erronée ;
- la matérialité des faits qui lui sont reprochés dans le rapport de saisine n'est pas établie ;
- il est entaché d'une erreur de droit en ce que l'arrêté vise l'article 70 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 lequel est inapplicable à sa situation ;
- il est entaché d'une erreur d'appréciation en ce qu'elle a été maintenue de nombreuses années à son poste sans formation adéquate et s'est heurtée à de nombreuses difficultés auxquelles l'administration rectorale n'a pas apporté de solutions ; son insuffisance professionnelle a été appréciée au regard de la non réussite de son année probatoire au cours de laquelle les attentes étaient supérieures à ce qui pouvait être exigé d'elle en qualité de maître contractuel.
Par des mémoires en défense, enregistrés respectivement le 7 juillet et le 5 septembre 2022, la rectrice de l'académie de Strasbourg conclut à titre principal, au rejet de la requête et à titre subsidiaire à l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 17 décembre 2019.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;
- l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mosser,
- les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique,
- et les observations de Me Diaby, représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... est, depuis le 1er septembre 2000, maîtresse contractuelle de l'enseignement privé sous contrat et exerce les fonctions de professeure de lettres et d'histoire géographie. A compter du 1er septembre 2003, elle a été classée dans l'échelle de rémunération des adjoints d'enseignement. Le 1er septembre 2008, Mme A... a été inscrite sur la liste d'aptitude d'accès à l'échelle de rémunération des professeurs certifiés mais son année probatoire n'a pas été validée. A la suite de son admission au concours d'accès à l'échelle de rémunération des professeurs de lycée professionnels au titre de l'année 2018, elle a été nommée professeure de lycée professionnel lettres-histoire-géographie en contrat provisoire et a été affectée, dans le cadre de sa période probatoire, au lycée professionnel Sonnenberg à Carspach. A l'issue de cette année probatoire, Mme A... n'a pas obtenu un contrat définitif dans l'échelle de rémunération des professeurs de lycée professionnel et a été réintégrée dans l'échelle de rémunération des adjoints d'enseignement. Par un courrier du 27 juin 2019, la rectrice de l'académie de Strasbourg a informé Mme A... de ce qu'une procédure de résiliation de son contrat d'enseignement dans l'échelle de rémunération des adjoints d'enseignement allait être initiée pour insuffisance professionnelle. La commission consultative mixte paritaire réunie en conseil de discipline a rendu un avis favorable à ce licenciement le 23 septembre 2019. Par un arrêté du 17 décembre 2019, la rectrice de l'académie de Strasbourg a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle. Mme A... relève appel du jugement du 8 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, la requérante reprend en appel les moyens qu'elle avait invoqués en première instance tirés du vice d'incompétence, de l'erreur de fait et de l'erreur de droit. Il y a lieu d'écarter ces moyens à l'appui desquels la requérante ne présente aucun élément de fait ou de droit nouveau, par adoption de motifs retenus à juste titre par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 914-103 du code de l'éducation : " L'autorité académique peut, d'office ou sur saisine du chef d'établissement, en cas d'insuffisance professionnelle dûment constatée, prononcer, après avis motivé de la commission consultative mixte compétente, la résiliation du contrat ou le retrait de l'agrément. Les dispositions du troisième alinéa de l'article R. 914-102 sont applicables ". Le troisième alinéa de l'article R. 914-102 du même code dispose que : " La procédure devant la commission consultative mixte se déroule selon les règles fixées par le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat, à l'exception de ses articles 10 à 17 ". Le premier alinéa de l'article 1er du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 énonce que : " L'administration doit dans le cas où une procédure disciplinaire est engagée à l'encontre d'un fonctionnaire informer l'intéressé qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel et de tous les documents annexes et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix ". Le premier alinéa de l'article 3 de ce décret prescrit que : " Le fonctionnaire poursuivi peut présenter devant le Conseil de discipline des observations écrites ou orales, citer des témoins et se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix ".
4. Il ne ressort d'aucun texte, ni d'aucun principe que la requérante aurait dû être mise en mesure de présenter ses observations préalablement à la transmission au rectorat d'un courrier de son chef d'établissement rapportant des plaintes de parents et d'élèves à son égard qui a été intégré à son dossier individuel indépendamment de l'édiction de toute décision défavorable prise à son encontre. Par ailleurs, il n'est pas contesté que, le 9 septembre 2019, elle a, conformément aux dispositions précitées, consulté, assistée d'un défenseur, son dossier individuel dans lequel figurait ce courrier et qu'elle a pu présenter des observations concernant ce document devant la commission mixte académique réunie en formation disciplinaire le 23 septembre suivant. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'a pas été mise en mesure de présenter utilement ses observations sur ce courrier.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 914-35 du code de l'éducation : " Les candidats admis qui, à l'issue du stage, ne sont pas déclarés aptes peuvent être autorisés, sur proposition du jury et par décision du recteur, à accomplir une seconde année de stage. / (...) Ceux qui ne sont pas autorisés à renouveler le stage ou qui, à l'issue de la seconde année de stage ou de l'année de prorogation de stage, ne remplissent pas les conditions exigées pour la délivrance du contrat ou de l'agrément définitif perdent le bénéfice de l'admission au concours ". Aux termes de l'article R. 914-36 du même code " Les maîtres qui avaient la qualité de maître contractuel et qui n'ont pas obtenu le certificat d'aptitude aux fonctions d'enseignant dans les établissements d'enseignement privés du second degré sous contrat continuent à bénéficier de leur contrat antérieur et sont replacés dans l'échelle de rémunération qu'ils détenaient ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires : " Le jury entend au cours d'un entretien tous les fonctionnaires stagiaires pour lesquels il envisage de ne pas proposer la titularisation ".
6. Il ressort du dossier d'évaluation du maître en période probatoire que Mme A... n'a pas été admise à l'issue de sa première année de stage dans l'échelle de rémunération des professeurs de lycée professionnel et qu'un avis défavorable à l'octroi d'une seconde année a été émis par le jury académique qui souligne ses " compétences disciplinaires approximatives " et ses " difficultés récurrentes en lien avec la gestion de classe ". En l'absence de proposition du jury en ce sens, Mme A... ne peut utilement soutenir que la rectrice n'a pas pris de décision sur la possibilité de réaliser une seconde année de stage en méconnaissance de l'article R. 914-35 précité.
7. Contrairement à ce qu'indique la rectrice dans les courriers des 27 juin et 12 juillet 2019 adressés à la requérante, il ressort du dossier d'évaluation de Mme A... à l'issue de son année probatoire que le jury académique n'a pas proposé son licenciement. Si ce dossier d'évaluation constitue un élément de fait concernant sa situation, il ne fonde pas la décision de licenciement. Il ressort des pièces du dossier et notamment des rapports d'inspection réalisés en 2009, 2010, 2013 et 2018 que son licenciement pour insuffisance professionnelle en décembre 2019 fait suite à ses difficultés persistantes malgré les trois accompagnements professionnels dont elle a bénéficié en 2009-2010, 2017-2018 et 2018-2019. A l'issue de son année probatoire, Mme A... a d'ailleurs été réintégrée dans l'échelle de rémunération des adjoints d'enseignement. Dans ces conditions, l'intéressée n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée est entachée d'un vice de procédure en ce qu'elle serait la conséquence directe de l'avis défavorable à l'obtention de son contrat définitif en qualité de professeur de lycée professionnel et elle ne peut pas non plus utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 914-36.
8. Enfin, ainsi qu'il a été dit, à la suite de son admission au concours d'accès à l'échelle de rémunération des professeurs de lycée professionnels, Mme A..., adjointe d'enseignement sous contrat, a été nommée, au titre de son année probatoire, professeure en contrat provisoire. L'avis du jury académique se bornait donc à proposer qu'elle obtienne ou non un contrat définitif dans l'échelle de rémunération supérieure à la sienne. Elle ne peut ainsi utilement soutenir qu'elle n'a pas été mise en mesure de consulter son dossier et n'a pas bénéficié d'un entretien avec le jury académique avant l'édiction de l'avis dès lors qu'elle n'était pas fonctionnaire stagiaire et que cet avis n'avait donc ni pour objet, ni pour effet de ne pas proposer sa titularisation. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 6 de l'arrêté du 22 août 2014 doit par suite être écarté comme inopérant.
9. En quatrième lieu, les difficultés professionnelles telles que décrites dans le rapport introductif présenté devant la commission mixte paritaire en formation disciplinaire du 23 septembre 2019 ressortent tant du compte-rendu de rendez-vous de carrière réalisé en 2017-2018 que des avis motivés du chef d'établissement, de l'inspecteur et du directeur de l'institut supérieur de formation et des rapports de sa tutrice pour l'année scolaire 2018-2019. En se bornant à soutenir que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis, Mme A... ne combat pas utilement ces éléments. Elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la décision attaquée reposerait sur des motifs matériellement inexacts.
10. En cinquième et dernier lieu, le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé, s'agissant d'un agent contractuel, que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé. Il ressort à cet égard des pièces du dossier que l'intéressée a des difficultés persistantes d'une part dans le domaine pédagogique dans la construction de ses séquences, l'élaboration de problématiques, l'instauration d'un dialogue constructif avec ses élèves et l'appréhension globale du programme et d'autre part dans la gestion des élèves conduisant certains à se mettre en danger et nécessitant l'intervention récurrente de surveillants pour rétablir le calme dans la classe. S'il n'est pas contesté que Mme A... était confrontée à des publics difficiles, l'intéressée a bénéficié, ainsi qu'il a été dit, de trois accompagnements professionnels. Dans le cadre du suivi mis en place en 2018-2019 à la suite de la réussite de son concours interne pour intégrer l'échelle de rémunération des professeurs de lycée professionnel, elle a été déchargée de neuf heures d'enseignement afin de bénéficier du temps nécessaire pour se former. Lors de ces accompagnements, elle a bénéficié de tutorats par des enseignants expérimentés, a assisté à des cours dispensés par des collègues et à des formations réalisées par l'institut supérieur de formation. Ainsi ces suivis à la fois théoriques et pratiques avaient pour objet de remédier à la fois à ses difficultés dans la gestion d'un groupe et dans la pratique pédagogique. S'il ressort notamment de l'avis de l'inspecteur à l'issue de l'accompagnement en 2017-2018 et de l'appréciation de sa tutrice au terme de l'année scolaire 2018-2019, que l'intéressée a progressé sur certains aspects de sa pratique, des compétences essentielles demeurent insuffisamment maîtrisées. Dans ces conditions, la circonstance que la requérante a été licenciée à l'issue d'une année probatoire est sans incidence sur l'appréciation générale de ses qualités professionnelles qui ont conduit à son licenciement dès lors, qu'ainsi qu'il a été dit, l'insuffisante maîtrise des différentes compétences de Mme A... est constatée de manière récurrente depuis 2009. En outre, il n'est pas démontré que les attentes au cours de cette année étaient différentes ou supérieures à celles de son corps d'origine dès lors que si l'obtention de ce grade lui donnait accès à une autre échelle de rémunérations, elle conservait les mêmes fonctions d'enseignement. Mme A... n'est dès lors pas fondée à soutenir que son insuffisance professionnelle a été jugée à l'aune de son seul échec à l'année probatoire dans le grade des professeurs certifiés. Dans ces conditions, Mme A... ne démontre pas que la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Délibéré après l'audience du 22 juin 2023, à laquelle siégeaient :
M. Agnel, président,
Mme Brodier, première conseillère,
Mme Mosser, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2023.
La rapporteure,
Signé : C. MosserLe président,
Signé : M. Agnel
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
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N° 21NC02487