Vu l'ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 7ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de NANTES le dossier de la requête présentée par la société anonyme "EQUIPEMENT MEDICAL ET CHIRURGICAL DE L'OUEST" et par M. Georges PAUL et enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 18 avril 1988 sous le n° 97O73 ;
Vu la requête susmentionnée présentée pour la société anonyme "EQUIPEMENT MEDICAL ET CHIRURGICAL DE L'OUEST", dont le siège social est rue Nominoë, 3574O, PACE, représentée par son président directeur général en exercice, et pour M. Georges PAUL, président directeur général de cette société, demeurant "Domaine de la Glestière", 3574O, PACE, enregistrée au greffe de la Cour sous le n° 89NTOO328 ;
La société "EQUIPEMENT MEDICAL ET CHIRURGICAL DE L'OUEST" et M. Paul demandent que la Cour :
1°) annule le jugement en date du 18 février 1988 par lequel le Tribunal administratif de RENNES a rejeté la demande de la société "EQUIPEMENT MEDICAL ET CHIRURGICAL DE L'OUEST" tendant à la décharge du supplément d'imposition à l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1976 à 198O sur les bénéfices des exercices clos le 31 décembre 1976 et les 3O septembre des années 1977 à 198O et la demande de M. PAUL tendant à la décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 1976, 1978 et 198O ;
2°) prononce la décharge de ces impositions ainsi que des pénalités dont ont été assortis les suppléments d'imposition à l'impôt sur les sociétés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience du 7 février 199O :
- le rapport de M. SALUDEN, conseiller,
- et les conclusions de M. CADENAT, commissaire du gouvernement,
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments présentés devant eux par la société anonyme "EQUIPEMENT MEDICAL ET CHIRURGICAL DE L'OUEST" (E.M.C.O.) et M. PAUL à l'appui de leurs moyens, ont répondu à l'ensemble de leurs conclusions et moyens ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le tribunal administratif a insuffisamment motivé son jugement ;
Considérant qu'ils ne sauraient, dans ces conditions, invoquer, de manière pertinente, le défaut de visa de mémoires en réplique enregistrés respectivement les 9 et 23 octobre 1985 ; qu'en tout état de cause, il résulte de l'examen du dossier de première instance comportant la reproduction manuscrite des visas du jugement attaqué que les premiers juges ont visé ces deux mémoires ;
Considérant toutefois que le Tribunal administratif de RENNES a été saisi de deux demandes distinctes, l'une émanant de la société anonyme "E.M.C.O.", ayant trait au supplément d'impôt sur les sociétés auquel cette société a été assujettie au titre des années 1976 à 198O, l'autre de M. PAUL et ayant trait au supplément d'impôt sur le revenu auquel celui-ci a été assujetti au titre des années 1976, 1978 et 198O ; que, compte tenu de la nature de l'impôt sur les sociétés et de l'impôt sur le revenu, et quels que fussent en l'espèce les liens de fait et de droit entre ces deux impositions, le tribunal devait statuer par deux décisions séparées à l'égard de la société anonyme "E.M.C.O." d'une part et de M. PAUL d'autre part ; que c'est en méconnaissance de cette règle d'ordre public que le tribunal administratif a joint les instances ; que, dès lors, son jugement doit être annulé en tant qu'il a statué sur les impositions de M. PAUL en même temps que sur celles de la société anonyme "E.M.C.O." ;
Considérant qu'il y a lieu, pour la Cour, dans les circonstances de l'affaire, d'une part, d'évoquer la demande présentée devant le Tribunal administratif de RENNES par M. PAUL pour y être statué après que les mémoires et pièces produits pour l'intéressé auront été enregistrés par le greffe de la Cour sous un numéro distinct, et, d'autre part, de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les conclusions de la requête n° 89NTOO328 en tant qu'elles concernent les impositions contestées par la société anonyme "E.M.C.O." ;
Sur les conclusions de la requête en tant qu'elles concernent la seule société anonyme "E.M.C.O." :
Sur la régularité de la procédure d'imposition et la charge de la preuve :
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'oblige l'administration à indiquer, dans la notification d'un avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, la composition de la commission qui a émis cet avis ; qu'il est seulement prescrit à la commission de motiver son avis ; qu'il résulte de l'instruction que l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires d'Ille-et-Vilaine émis dans sa séance du 27 novembre 1981 sur le litige opposant la société anonyme "E.M.C.O." à l'administration est suffisamment motivé ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le moyen tiré de ce que la composition de la commission n'aurait pas été conforme aux dispositions de l'article 1651 du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur en ce que n'aurait siégé à cette séance aucun membre désigné par la chambre de commerce et d'industrie manque en fait ;
Considérant que, les bases des impositions contestées étant conformes à l'avis de la commission départementale, il appartient à la société requérante, en vertu des dispositions de l'article 1649 quinquies A-3 du code général des impôts transféré à l'article L.192 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction, applicable en l'espèce, antérieure à celle issue de l'article 1O-I de la loi n° 87-5O2 du 8 juillet 1987, d'apporter la preuve de leur exagération ;
Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :
Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 2O9 du même code : "le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... : 1° les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre ... Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursement de frais" ;
Considérant que la société anonyme "E.M.C.O.", qui exerce une activité de commerce de matériel et mobilier chirurgicaux, soutient avoir comptabilisé en frais de personnel à la clôture des exercices intervenue les 31 décembre 1976, 3O septembre 1977, 1978, 1979 et 198O, à titre de rémunérations dues . M. PAUL, président directeur général, les sommes s'élevant à 476.349 F, 424.989 F, 6O6.91O F, 739.77O F et 746.772 F ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a admis le caractère déductible de ces versements, conformément à l'avis de la commission départementale, qu'à concurrence respectivement de 33O.OOO F, 247.5OO F, 36O.OOO F, 38O.OOO F et 41O.OOO F ; que la rémunération de M. PAUL, qui détenait seul la majorité du capital de la société et qui en possédait 99,84 % avec son épouse et ses cinq enfants, après avoir été en partie calculée à compter du 1er janvier 1976 à partir du bénéfice net après impôt, a été partiellement déterminée à compter du 1er janvier 1977 à partir du chiffre d'affaires par application d'un pourcentage de 2 % sur les ventes, porté à 4 % à compter du 1er octobre 1978 ; qu'après avoir dégagé d'importants bénéfices en 1976, la société a déclaré des résultats négatifs en 1979 et 198O ; que le chiffre d'affaires réalisé n'a connu qu'une faible progression en francs courants au cours de la période litigieuse ; que les rémunérations versées à M. PAUL constituaient une part importante de la masse salariale de l'entreprise, variant de 3O à 5O % selon les exercices ; qu'elles représentaient plus du double de celles des dirigeants des entreprises choisies comme référence par l'administration ; que ces dernières, qui exerçaient l'activité de commerce de matériel médical et chirurgical, pouvaient être regardées comme comparables à la société "E.M.C.O.", même si leur chiffre d'affaires était inférieur au sien, eu égard notamment au fait que cette différence était devenue peu importante à la fin de la période litigieuse ;
Considérant que le montant non remis en cause par l'administration de la rémunération de M. PAUL s'élevait en 1975 à 396.148 F ; qu'au cours de la même année la société avait réalisé un chiffre d'affaires de 8.88O.121 F et un bénéfice s'élevant à 229.361 F ; que la société "E.M.C.O." n'établit par aucun moyen que l'évolution du chiffre d'affaires ou celle des résultats qui se sont avérés déficitaires en 1979 et 198O justifiât que la rémunération de son président directeur général fût presque chaque année calculée avec effet rétroactif selon des paramètres différents assurant, en toute hypothèse, à son bénéficiaire une rémunération élevée et en constante progression par rapport à l'année précédente ;
Considérant que les rémunérations admises par l'administration tiennent compte de l'activité exercée par M. PAUL tant comme dirigeant de la société que dans le secteur commercial ; que, dans ces conditions, la société "E.M.C.O." n'apporte par la preuve que le service, en fixant le montant des rémunérations déductibles de son président directeur général ainsi qu'il a été dit, a fait une insuffisante appréciation du travail accompli et des services rendus par celui-ci ;
Considérant que, de tout ce qui précède, il résulte que la société anonyme "E.M.C.O." n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de RENNES a rejeté sa demande en décharge du supplément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1976 à 198O ;
Article 1 - Les productions de M. Georges PAUL enregistrées sous le n° 89NTOO328 seront rayées du registre du greffe de la Cour pour être enregistrées sous un numéro distinct.
Article 2 - Le jugement du Tribunal administratif de RENNES du 18 février 1988 est annulé en tant qu'il a statué sur la demande de M. PAUL.
Article 3 - Les conclusions de la requête susvisée, en tant qu'elles concernent la société anonyme "E.M.C.O.", sont rejetées.
Article 4 - Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme "E.M.C.O.", à M. PAUL et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.