Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 février 1994, présentée par M. Gilbert X... demeurant ..., dans le Cher ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) de réformer le jugement n 901411-91628-91629 du 23 novembre 1993 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté en partie ses demandes tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1983, 1984 et 1985 ;
2 ) de prononcer la décharge des impositions en cause ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 1997 :
- le rapport de M. ISAIA, conseiller,
- et les conclusions de M. AUBERT, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.73 du livre des procédures fiscales : "Peuvent être évalués d'office : 1 Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales ... lorsque ces contribuables sont imposables selon un régime du bénéfice réel et que la déclaration annuelle des résultats n'a pas été déposée dans le délai légal ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les redressements ont été notifiés suivant la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article L.73 du livre des procédures fiscales ; que, devant la Cour, le contribuable ne conteste pas qu'il se trouvait en situation d'évaluation d'office pour défaut de déclaration ; que, dès lors, l'administration, qui dans le cadre de cette procédure peut déterminer la base d'imposition à l'aide de toutes les données en sa possession, était en droit d'évaluer les bénéfices industriels et commerciaux en se servant des résultats du contrôle fiscal qu'elle avait opéré en matière de TVA ; que les moyens tirés de ce que le contribuable aurait été privé des garanties attachées à la procédure contradictoire et à la procédure de rectification d'office sont inopérants, lesdites procédures n'ayant pas été utilisées en l'espèce ; que la circonstance que les redressements en matière de taxe sur la valeur ajoutée ne sont pas susceptibles d'être établis suivant la procédure d'évaluation d'office est sans incidence dès lors que cet impôt n'est pas en litige ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L.76 du livre des procédures fiscales : "Les bases ou les éléments de calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination ..." ; que la notification de redressement du 18 décembre 1986 indiquait les motifs du redressement concernant la provision pour dépréciation de stocks et le détail des réintégrations opérées à ce titre ; qu'ainsi elle n'a pas méconnu les dispositions précitées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la procédure d'imposition n'est entachée d'aucune irrégularité ;
Sur le bien-fondé de la réintégration de la provision pour dépréciation de stocks :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : "I. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : ...5 ) Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables ..." ; qu'aux termes de l'article 38 du même code : "3. Les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient ..." ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions, que lorsqu'une entreprise constate que l'ensemble des matières ou produits qu'elle possède en stock ou une catégorie déterminée d'entre eux a, à la date de clôture de l'exercice, un cours inférieur au prix de revient, elle est en droit de constituer, à concurrence de l'écart constaté, une provision pour dépréciation ; que pareille provision ne peut, cependant, être admise que si l'entreprise est en mesure de justifier de la réalité de cet écart et d'en déterminer le montant avec une approximation suffisante ; que, par cours du jour à la clôture de l'exercice au sens des dispositions de l'article 38, il y a lieu d'entendre, s'agissant des marchandises dont une entreprise fait le commerce, le prix auquel, à cette date, cette entreprise peut, dans les conditions de son exploitation, normalement espérer vendre les biens qu'elle possède en stock ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X..., qui exploite une entreprise de vente et réparation de machines agricoles, a constitué à la clôture de chacun des exercices clos en 1983, 1984 et 1985, une provision pour dépréciation des stocks de matériels de toute nature repris à ses clients à l'occasion des ventes ; qu'il est constant que les provisions dont il s'agit ont été calculées en appliquant au prix de reprise de ces matériels des taux d'abattement forfaitaires annuels différents selon leur durée de détention mais identiques pour tous les matériels repris au cours d'une même période ; que l'administration fiscale, estimant que les taux de décote retenus par le contribuable ne reflétaient pas la dépréciation probable subie à la clôture de l'exercice par les matériels en stock a remis en cause les provisions et les a réintégrées dans les résultats imposables ;
Considérant que M. X... ne fait état devant la Cour d'aucun élément précis et tiré de données propres à son exploitation de nature à justifier les taux de décote qu'il a pratiqués pour les matériels repris au cours d'une même année ; que, s'il soutient que la provision a été calculée en fonction de critères définis par la profession, il ressort au contraire des tableaux produits à l'appui de cette affirmation que les matériels repris au cours d'une période ont tous fait l'objet d'un même taux de décote, sans tenir compte de leurs caractéristiques propres ; que le requérant ne saurait justifier la dépréciation pratiquée en se bornant à invoquer l'inadaptation des produits à l'évolution du marché ou leur obsolescence ; qu'ainsi, M. X..., à qui il incombe de justifier les provisions qu'il a constituées, ne peut être regardé comme ayant déterminé, avec une approximation suffisante, l'écart constaté entre le prix de revient théorique de son stock et le cours du jour de ce stock ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a procédé aux réintégrations litigieuses ;
Sur les pénalités :
Considérant que pour obtenir la décharge des pénalités qui lui ont été infligées M. X... fait valoir qu'elles ont été établies sans qu'il ait pu obtenir le rapport de vérification de l'administration et que, par conséquent, elles sont contraires aux stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, les stipulations de cet article, selon lesquelles "toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ... par le tribunal ... qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ...", ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre de procédures administratives d'établissement des pénalités fiscales ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.208 du livre des procédures fiscales :
Considérant que, dans la présente instance, l'Etat n'est pas condamné à un dégrèvement d'impôt ; que, dès lors, les dispositions de l'article L.208 du livre des procédures fiscales ne peuvent, en tout état de cause, trouver à s'appliquer ; que, par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions de M. X... tendant au paiement d'intérêts moratoires et au remboursement des frais exposés pour constituer des garanties devant le Tribunal administratif ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que M. X... succombe dans la présente instance ; que sa demande, fondée sur les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 20 000 F au titre des frais qu'il a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre de l'économie et des finances.