Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 janvier 2002, présentée pour Mme Catherine X, demeurant ..., par Me SIRGUE, avocat au barreau de Bordeaux ;
Mme X demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 98-2582 du 13 novembre 2001 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a condamné le centre hospitalier de Bourges à lui verser une indemnité de 105 000 F, qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice résultant de l'erreur de diagnostic dont elle a été victime à l'occasion d'un examen pratiqué dans ledit centre ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Bourges à lui verser une somme de 170 742,89 euros ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
C CNIJ n° 60-02-01-01-02-01-01
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2004 :
- le rapport de Mme THOLLIEZ, premier conseiller,
- les observations de Me SIRGUE, avocat de Mme Catherine X,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'après avoir estimé que l'erreur de diagnostic commise par un praticien du centre hospitalier de Bourges engageait la responsabilité de l'établissement à l'égard de Mme X et était responsable pour motié de l'aggravation de son état de santé, le Tribunal administratif d'Orléans a condamné, par jugement du 13 novembre 2001, ledit centre hospitalier à verser une somme de 105 000 F à l'intéressée en réparation des troubles de toute nature résultant de cette erreur ; que Mme X demande à la Cour de réformer ledit jugement et de porter à 170 742,89 euros le montant de l'indemnité qui lui est due en réparation de ses préjudices, le centre hospitalier de Bourges, par le biais d'un appel incident, qui, non soumis à des conditions de délai, est recevable nonobstant la circonstance qu'il a été présenté au-delà du délai d'appel, demandant à être déchargé de toute responsabilité et à ce que le montant de l'indemnité allouée à l'intéressée soit réduit ;
Sur les opérations d'expertise :
Considérant que si le professeur Y, expert désigné par le Tribunal administratif d'Orléans n'était pas spécialiste en neuro-radiologie, sa qualité de professeur de médecine, chef de clinique neurologique, expert près de la Cour de cassation permettait au Tribunal administratif de lui confier la mission de procéder à une expertise sur la personne de Mme SOCHARD ; qu'en outre, si le centre hospitalier de Bourges soutient que les observations du praticien mis en cause par la requérante n'ont pas été consignées dans le rapport, il résulte de l'instruction que ce praticien hospitalier avait pu faire part de ses observations au professeur Y à l'occasion d'une précédente expertise qui lui avait été confiée par le Tribunal de grande instance de Blois ; qu'il suit de là que lesdites opérations ne sont entachées d'aucune irrégularité contrairement à ce qu'allègue le centre hospitalier de Bourges qui s'est, au demeurant, abstenu de se faire représenter auxdites opérations ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du deuxième rapport de l'expert désigné par le Tribunal administratif d'Orléans que si les clichés du scanner effectué le 21 octobre 1987 au centre hospitalier de Bourges en raison des symptômes dont se plaignait Mme SOCHARD ont permis d'écarter l'existence d'une hernie discale, ces mêmes images témoignaient de l'existence d'une lésion intra-médullaire ; que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, cette anomalie médullaire pouvait être détectée dès 1987 et devait entraîner la prescription d'autres investigations ; qu'il résulte également de l'instruction que l'erreur de lecture des clichés, qui constitue une erreur de diagnostic fautive, a permis à l'épendymome dont souffrait Mme SOCHARD de se développer à bas bruit jusqu'en juillet 1992, date à laquelle il sera finale-ment diagnostiqué lors d'un examen par imagerie à résonance magnétique ; que la méconnaissance de l'anomalie scanographique présentée doit, dès lors, être tenue pour responsable à hauteur de 50 % de l'aggravation de l'état de santé de l'intéressée, cette aggravation ne pouvant être imputée à la circonstance que Mme SOCHARD a attendu jusqu'en janvier 1993 pour faire pratiquer l'exérèse de l'épendymome dont elle souffrait ;
Sur l'évaluation des préjudices :
Considérant que le Tribunal administratif d'Orléans a fixé l'indemnité due à Mme SOCHARD pour tous les préjudices dont elle se prévalait à la somme de 105 000 F ;
Considérant que Mme SOCHARD, qui éprouve des difficultés à la marche, se plaint d'engourdissements au niveau des membres inférieurs, de brûlures au niveau de la région scapulaire et surtout d'une importante impotence de la main droite, est désormais atteinte d'une incapacité permanente partielle évaluée à 60 %, dont la moitié est imputable selon l'expert à l'erreur de diagnostic dont elle a été victime ; que si elle n'est pas fondée à solliciter l'allocation d'une indemnité au titre de la perte de revenus subie pendant la période d'incapacité temporaire totale, en raison de l'absence d'activité professionnelle, elle est, en revanche, fondée à soutenir que le Tribunal administratif a fait une insuffisante évaluation des préjudices de toute nature et, notamment, des troubles dans ses conditions d'existence, des souffrances endurées et de son préjudice d'agrément résultant de cette incapacité ; qu'il sera fait une juste appréciation de ces préjudices en fixant à 45 000 euros l'indemnité due à Mme SOCHARD ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, qu'il y a lieu de porter à 45 000 euros le montant de l'indemnité due à Mme SOCHARD et, par voie de conséquence, de rejeter le recours incident du centre hospitalier de Bourges ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner le centre hospitalier de Bourges à verser à Mme SOCHARD une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La somme que le centre hospitalier de Bourges a été condamné à verser à Mme Catherine SOCHARD par le jugement du 13 novembre 2001 du Tribunal administratif d'Orléans est portée à la somme de 45 000 euros (quarante-cinq mille euros).
Article 2 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme Catherine SOCHARD et le recours incident du centre hospitalier de Bourges sont rejetés.
Article 4 : Le centre hospitalier de Bourges versera à Mme Catherine SOCHARD une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Catherine SOCHARD, au centre hospitalier de Bourges, à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher, à la mutuelle du Cher et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
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