Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 juin 2002, présentée pour Mme Jacqueline X, demeurant ..., par Me Herry, avocat au barreau d'Alençon ; Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 01-1131 du 4 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et droits supplémentaires de contribution sociale généralisée, de contribution au remboursement de la dette sociale et de prélèvement social, qui lui ont été réclamés au titre des années 1995, 1996 et 1997 ;
2°) d'ordonner la décharge partielle des impositions contestées ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 762 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2004 :
- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Lalauze, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société Alençon immobilier a comptabilisé dans ses charges, à titre de remboursement de frais de déplacement, à Mme X, associée et directrice commerciale, les sommes de 91 500 F pour 1995, 107 000 F pour 1996 et 67 825 F pour 1997 ; que l'administration, estimant que la réalité de ces frais de déplacement n'était pas démontrée par des justifications probantes, a réintégré dans les bénéfices de chaque exercice les sommes excédant un montant annuel de frais évalué à 30 000 F ; que les sommes correspondantes ont été considérées, sur le fondement de l'article 109 du code général des impôts, comme des revenus distribués imposables à l'impôt sur le revenu au nom de Mme X dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 109-1 du code général des impôts : Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevés sur les bénéfices ; que la prise en charge par la SARL Alençon immobilier, de dépenses relatives à des frais de déplacement engagées par une de ses salariés, dépourvues de justificatifs doit être regardée comme un avantage en nature imposable dans la catégorie des traitements et salaires dès lors qu'il n'est pas soutenu qu'elle aurait eu pour effet de porter la rémunération salariale à un montant excessif ; que, dès lors, c'est à tort que l'administration a regardé les sommes en cause comme des revenus distribués imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement de l'article 109-1 du code général des impôts ;
Considérant toutefois que le ministre demande à titre subsidiaire, par substitution de base légale, que lesdites dépenses demeurent taxées au nom de Mme X dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en tant qu'avantage occulte, sur le fondement des dispositions de l'article 111-c du code général des impôts, aux termes desquelles : Sont notamment considérés comme revenus distribués (...) : c) les rémunérations et avantages occultes ;
Considérant d'une part qu'il n'est nullement contesté que les avantages accordés par la SARL Alençon Immobilier à Mme X, son associée, n'ont pas été inscrits sous une forme explicite dans la comptabilité de la société, en méconnaissance des dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts ; que par suite de tels avantages revêtaient au sens des dispositions du c de l'article 111 du code général des impôts, un caractère occulte, et pouvaient être imposés, au nom de l'intéressée, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que la substitution de base légale ne prive Mme X d'aucune garantie dès lors que la procédure contradictoire lui a été appliquée ;
Considérant d'autre part que Mme X soutient que les montants déduits par la SARL Alençon immobilier correspondent, à hauteur de 85 911 F en 1995, de 99 919 F en 1996 et de 67 825 F en 1997, à des frais de déplacement réellement engagés et rendus nécessaires par son activité d'agent immobilier ; qu'elle produit à l'appui de ses affirmations une copie de ses agendas et ses relevés mensuels de déplacements pour les années litigieuses ; que toutefois ni les agendas, imprécis et ne permettant pas d'identifier des rendez-vous et des déplacements déterminés, ni les relevés de déplacement, qui comportent sans aucun détail une énumération vague de lieux de déplacement et de kilométrages ne permettent d'identifier les déplacements réellement effectués ; qu'il est constant que les relevés de déplacement ont été établis postérieurement aux opérations de vérification ; que l'administration qui fait état de l'impossibilité d'établir une corrélation entre les relevés de déplacements et les dates des remboursements effectués mais a néanmoins admis l'existence de frais de déplacement engagés par Mme X à hauteur de 30 000 F par an doit être regardée dans ces conditions comme établissant l'existence de revenus distribués ;
Sur l'application des intérêts de retard :
Considérant que l'intérêt de retard institué par les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; que dès lors les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts n'entrent pas dans le champ d'application des stipulations de l'article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le moyen tiré de ce qu'elles seraient contraires à ces stipulations ne peut donc qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions de Mme X tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Jacqueline X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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N° 02NT00950
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