Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 19 mars 2004, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) Sorimmo, représenté par son gérant en exercice, dont le siège est ..., par Me Gourvennec, avocat au barreau de Brest ; la SARL Sorimmo demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 00-2169 du 16 janvier 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Brest à lui verser une somme de 5 908 000F (900 669 euros), avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts, en réparation des conséquences dommageables du non-respect par cette même ville de la convention du 5 mars 1983 ;
2°) de condamner la ville de Brest à lui verser une somme de 900 669 euros avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 31 décembre 1968 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 août 2005 :
- le rapport de Mme Buffet, rapporteur ;
- les observations de Me Bernot, substituant Me Gourvennec, avocat de la SARL Sorimmo ;
- les observations de Me Donias, substituant Me Martin, avocat de la ville de Brest ;
- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par jugement du 16 janvier 2004, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de la société à responsabilité limitée (SARL) Sorimmo tendant à la condamnation de la ville de Brest à lui verser une somme de 5 908 000 F (900 669 euros) en réparation des conséquences dommageables du non-respect, par cette même ville, d'une convention du 5 mars 1983 garantissant à ladite société la constructibilité d'un terrain situé rue du Stiff où il est cadastré à la section CR, sous le n° 351, pour une contenance de 4 760 m² ; que la SARL Sorimmo interjette appel de ce jugement ;
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la ville de Brest a conclu, le 5 mars 1983, avec la SARL Sorimmo, une convention aux termes de laquelle : “la ville de Brest, après consultation des services de la ville et de la communauté urbaine intéressés, et après avoir reçu les engagements favorables du groupe de travail chargé de la nouvelle élaboration du plan d'occupation des sols et plus généralement, toute autorité concernée, garantit à la Sorimmo les possibilités constructives minimales énoncées pour les terrains suivants (…) le terrain sis à Brest, rue du Stiff, cadastré à la section CR, n° 351, pour une superficie de 4 760 m², figurant (…) en zone UCB, COS 0,50, du plan d'occupation des sols en cours de révision. (…) la ville de Brest reconnaît que la Sorimmo sera fondée à obtenir des dommages-intérêts en compensation des préjudices pour non-réalisation des programmes prévus sur les terrains objet de la présente convention en fonction de leurs possibilités de constructibilité sus-énoncées.” ; que, toutefois, à la suite de son classement en espace boisé à protéger au titre de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme par le plan d'occupation des sols révisé du 20 janvier 1995 de la ville de Brest, le terrain en cause est devenu inconstructible ;
Considérant que la ville de Brest ne pouvait légalement s'engager à maintenir, au profit de la SARL Sorimmo, les dispositions du règlement du plan d'occupation des sols communal en vigueur à la date du 5 mars 1983 de la convention précitée, selon lesquelles le terrain concerné, alors classé en zone UCB, était constructible, dans la limite d'un coefficient d'occupation des sols de 0,50 ; qu'ainsi, la convention du 5 mars 1983 est entachée de nullité ; que, dès lors, la SARL Sorimmo ne saurait prétendre à une indemnisation sur le fondement du non-respect par la ville de Brest des stipulations de cette convention ; qu'en revanche, la ville de Brest en s'engageant de manière illégale à maintenir au profit de la SARL Sorimmo les dispositions initiales du règlement du plan d'occupation des sols communal classant en zone constructible le terrain litigieux, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de cette société ;
Mais, considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 susvisée : “Sont prescrites au profit de l'Etat, des départements et des communes sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public” ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi : “La prescription est interrompue par : toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (...) ; tout recours formé devant la juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, toute communication écrite d'une administration intéressée dès lors que cette communication a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance (…) ; toute émission de moyen de règlement (...)” ; qu'aux termes de l'article 3 : “La prescription ne court, ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement (...)” ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, le terrain en cause, situé rue du Stiff, est devenu inconstructible à la suite de son classement en espace boisé à protéger au titre de l'article L. 130 ;1 du code de l'urbanisme par le plan d'occupation des sols révisé du 20 janvier 1995 de la ville de Brest ; que les conséquences dommageables de ce classement dont la SARL Sorimmo, qui disposait d'un projet immobilier sur ledit terrain, demande réparation, sont apparues à compter de cette dernière date ; que ladite société ne peut sérieusement soutenir qu'elle ne disposait pas, alors, d'éléments suffisants permettant d'établir que ces dommages étaient imputables à l'engagement fautif pris par le maire de Brest au nom de la commune ; que, dans ces conditions, le délai de prescription prévu par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 a commencé à courir à partir du 1er janvier 1996 ; que, par suite, la créance dont se prévaut la SARL Sorimmo était prescrite à la date du 18 janvier 2000 à laquelle ladite société a présenté sa demande indemnitaire à la ville de Brest ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Sorimmo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Brest à lui verser une somme de 5 908 000 F (900 669 euros) en réparation des conséquences dommageables du non-respect, par cette même ville, de la convention du 5 mars 1983 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que la ville de Brest, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la SARL Sorimmo la somme que cette dernière demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la SARL Sorimmo à verser à la ville de Brest la somme que cette dernière demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Sorimmo est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la ville de Brest tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Sorimmo, à la ville de Brest (Finistère) et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
N° 04NT00321
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