Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 29 juillet 2005, présentée pour la commune de Donville-les-Bains, représentée par l'adjoint au maire en exercice, régulièrement délégué à cette fin, dont le siège est Mairie, 97, route de Coutances à Donville-les-Bains (50350), par Me Souron, avocat au barreau de Caen ; la commune de Donville-les-Bains demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 04-1207 du 7 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande de Mme X, l'arrêté du 1er juillet 2003 du maire de cette commune accordant à M. Y un permis de construire en vue de l'édification d'une maison d'habitation sur un terrain sis 28, rue Charles ;
2°) de condamner Mme à lui verser une somme de 1 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mai 2006 :
- le rapport de M. Sire, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la commune de Donville-les-Bains (Manche) interjette appel du jugement du 7 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande de Mme X, l'arrêté du 1er juillet 2003 du maire de cette commune accordant à M. Y un permis de construire en vue de l'édification d'une maison d'habitation sur un terrain sis 28, rue Charles ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Donville-les-Bains à la demande de première instance :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 490-7 du code de l'urbanisme : “Le délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire court à l'égard des tiers à compter de la plus tardive des deux dates suivantes : a) Le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées, selon le cas, au premier ou au deuxième alinéa de l'article R. 421-39 ; b) Le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage en mairie des pièces mentionnées au troisième alinéa de l'article R. 421-39. (…)” ; que si la commune de Donville-les-Bains soutient que le permis de construire contesté a fait l'objet d'un affichage en mairie le 1er juillet 2003, elle ne l'établit aucunement ; que l'extrait de la main-courante du 25 juillet 2003 d'un gardien de police municipale qu'elle produit, s'il permet d'attester que le permis de construire contesté était affiché le même jour sur le terrain d'assiette du projet, n'est pas de nature à justifier d'un affichage continu de deux mois sur ledit terrain ; que, dans ces conditions, la commune de Donville-les-Bains n'apporte pas la preuve qui lui incombe d'un affichage conforme aux dispositions précitées de l'article R. 490-7 du code de l'urbanisme ; que contrairement à ce qu'elle soutient, la lettre de protestation du 13 août 2003, qui ne comporte aucune demande de retrait du permis du 1er juillet 2003, par laquelle Mme , concurremment avec d'autres voisins, se borne à attirer l'attention du maire sur ce que “la construction envisagée n'est pas conforme au règlement du POS” et que “le projet n'est pas conforme aux règles de droit civil”, ne présente pas le caractère d'un recours gracieux ayant pu, à partir de cette date, valoir connaissance acquise, par l'intéressée, de l'existence dudit permis de construire ; qu'en outre, la circonstance que Mme ait signé, le 16 septembre 2003, un exemplaire du plan de masse du projet litigieux n'est pas davantage de nature à faire courir le délai de recours contentieux ; qu'il s'ensuit que faute de précision sur la date d'affichage sur le terrain et à la mairie du permis de construire contesté, la demande que Mme a introduite le 27 mai 2004 devant le Tribunal administratif de Caen ne saurait être regardée comme tardive ;
Sur la légalité externe du permis de construire du 1er juillet 2003 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-2-5 du code de l'urbanisme : “Si le maire (…) est intéressé à la délivrance du permis de construire, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune (…) désigne un autre de ses membres pour délivrer le permis de construire” ; qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que M. LEGENDRE, maire de Donville-les-Bains, est l'architecte du projet litigieux, dont il a établi les plans ; qu'il doit, à ce titre, être regardé comme étant intéressé à la délivrance du permis de construire au sens des dispositions précitées de l'article L. 421-2-5 ; qu'ainsi, il appartenait au conseil municipal de Donville-les-Bains de désigner, en application desdites dispositions, un autre de ses membres pour délivrer à M. le permis de construire du 1er juillet 2003 contesté ; qu'il n'est pas établi par la commune que M. Z, adjoint au maire et signataire de la décision contestée, ait été régulièrement désigné à cette fin par une délibération du conseil municipal ; qu'il s'ensuit que, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, le permis de construire contesté a été délivré par une autorité incompétente ;
Sur la légalité interne dudit permis de construire :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme : “(…) les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme ne peuvent faire l'objet d'aucune dérogation, à l'exception des adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes. (…)” ; qu'il résulte des dispositions de l'article UB 7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Donville-Les-Bains, que les constructions doivent être implantées en limite de propriété ou en retrait d'une distance au moins égale à la moitié de la hauteur à l'égout du toit sans pouvoir être inférieure à quatre mètres ; que les adaptations aux règles prescrites par le plan local d'urbanisme ne peuvent être légalement décidées que pour autant qu'elles sont rendues nécessaires par l'une des causes limitativement énumérées par la loi et qu'en outre, elles n'aménagent que de manière limitée les règles normalement applicables ; que si l'arrêté contesté précise dans ses motifs que “le projet envisagé, bien qu'il ne soit pas, en tous points, implanté strictement en limite de propriété nord et sud, peut être autorisé compte-tenu de la nature du sol, caractérisée par une falaise et une forte déclivité du terrain”, il se borne toutefois à indiquer que “le permis de construire est accordé avec (…) une adaptation mineure aux dispositions de l'article UB 7 (…) en vue d'autoriser la construction en retrait des limites de propriété nord et sud (…)” ; qu'ainsi, alors même qu'il justifie suffisamment de la nécessité d'accorder une adaptation à la règle de distance posée à l'article UB 7 précité en raison de la configuration du terrain d'assiette du projet, le permis litigieux, faute de préciser les distances de recul autorisées en limite nord et sud de propriété, ne permet pas d'apprécier le caractère mineur ou non des adaptations ainsi apportées aux règles prescrites par ledit article ; que les plans joints au dossier de la demande de permis de construire déposé par M. ne permettent pas davantage, eu égard à leur imprécision, de déterminer l'implantation du bâtiment projeté par rapport aux limites séparatives de propriété ; que, dans ces conditions, comme l'a à bon droit jugé le tribunal administratif, le permis de construire du 1er juillet 2003 contesté a été accordé en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que Mme , qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la commune de Donville-Les-Bains la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la commune de Donville-Les-Bains à verser à Mme une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par cette dernière ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Donville-les-Bains est rejetée.
Article 2 : La commune de Donville-les-Bains versera à Mme une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Donville-les-Bains (Manche), à Mme Andrée , à M. Roland et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
N° 05NT01158
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