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30/06/2006 | FRANCE | N°03NT00078

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ere chambre b, 30 juin 2006, 03NT00078


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 janvier 2003, présentée par la SCA X... FRANCE venant aux droits de la SCA SOBEC, dont le siège est ... - BP 38 à Saint André Lez Lille Cedex (59875) ; la SCA X... FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 98-145 et 98-146 en date du 12 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté les demandes de la SCA SOBEC, aux droits de laquelle elle vient, tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles celle-ci a été assujettie au titre des ex

ercices clos aux 30 juin 1990, 1991, 1992 et 1993 et des rappels de taxe ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 janvier 2003, présentée par la SCA X... FRANCE venant aux droits de la SCA SOBEC, dont le siège est ... - BP 38 à Saint André Lez Lille Cedex (59875) ; la SCA X... FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 98-145 et 98-146 en date du 12 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté les demandes de la SCA SOBEC, aux droits de laquelle elle vient, tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles celle-ci a été assujettie au titre des exercices clos aux 30 juin 1990, 1991, 1992 et 1993 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er juillet 1989 au 30 septembre 1993 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2006 :

- le rapport de Mme Gélard, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Hervouet, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales “… Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée.” ; que, contrairement à ce que soutient la société X..., qui vient aux droits de la société Berruyère d'exploitation de chauffage (SOBEC), le vérificateur a clairement indiqué en page 5 de la réponse aux observations du contribuable, en date du 12 avril 1995, que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée étaient maintenus, pour les mêmes motifs que les redressements d'impôt sur les sociétés, lesquels étaient suffisamment motivés, et pour l'ensemble des années ; que dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L.57 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R.256-1 du livre des procédures fiscales : “L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L.256 comporte : …2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard, qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement…” ; qu'il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement du 12 décembre 1996 renvoie expressément pour ce qui concerne les modalités de calcul de l'intérêt de retard applicable aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée à la notification de redressements du 21 décembre 1993 ; que ce document, qui a été reçu par le contribuable le 22 décembre 1993, indique que les rappels litigieux “seront assortis des intérêts de retard prévus aux articles 1727 et 1727 A du code général des impôts” ; que l'article 1727 dont la teneur est reproduite dans la notification, dispose que le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 % par mois, il s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé ; que l'article 1727 A du même livre précise que : “1. L'intérêt de retard prévu à l'article 1727 est calculé à compter du premier jour du mois suivant celui au cours duquel l'impôt devait être acquitté jusqu'au dernier jour du mois de paiement…” ; que la notification de redressements, qui mentionne que l'intérêt de retard sera appliqué sur la base du taux de 31,50 % et représentera une somme de 99 021 F, et par voie de conséquence, l'avis de mise en recouvrement du 12 décembre 1996 qui s'y réfère, sont ainsi suffisamment motivés ;

Sur le bien fondé des impositions :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les résultats imposables de la SA SOBEC le montant des charges acquittées en règlement des factures émises aux cours des exercices clos aux 30 juin 1990, 1991, 1992 et 1993 par les sociétés Auvergne Bourgone Centre Etudes (ABCE) et Frendom ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : “Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (…) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (…)” ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant, en premier lieu, que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie soutient que la seule production d'un protocole d'accord général en date du 15 septembre 1986 aux termes duquel la société ABCE s'engage à assister la société SOBEC dans l'organisation et la constitution de dossiers d'appel d'offres pour l'obtention de marchés, sans fournir des documents matériels tels que rapports techniques, échanges de lettres, correspondances qu'implique cette mission d'assistance, des conventions prises en application de ce protocole, et de la copie de 38 factures mentionnant la nature des prestations effectuées, ne permet pas à la société requérante de justifier que lesdites factures rejetées par le vérificateur correspondent à des prestations réellement exécutées ; que la société X... fait valoir toutefois que les charges facturées correspondent aux honoraires versés à la société SOBEC en exécution du protocole d'accord susmentionné en vue de faciliter l'obtention de marchés, moyennant une rémunération fixée en proportion du coût du marché ; que la réalité de cette entremise commerciale de la société ABCE est corroborée par l'obtention des marchés auxquels se réfèrent les factures produites ; que compte tenu de la nature immatérielle des prestations de la société SOBEC, elles n'avaient pas à donner nécessairement lieu à un rapport d'exécution ; qu'il n'est pas contesté que la société SOBEC a procédé aux règlements des honoraires facturés ; que par suite, l'administration ne saurait être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'absence de contrepartie aux 38 factures produites en appel dont le montant hors taxe s'élève à 1 456 774,08 F (222 083,78 euros), dont 542 267,55 F (82 668,16 euros) au titre de l'exercice clos en 1990, 63 555,11 F ( 9 688,91 euros) au titre de l'exercice clos en 1991 et 850 951,42 F (129 726,71 euros) au titre de l'exercice clos en 1993 ;

Considérant, en second lieu, que s'agissant des autres dépenses dont la déduction a été remise en cause par le vérificateur, la société requérante, qui ne produit pas les factures correspondantes, n'établit pas que les prestations des sociétés ABCE et Frendom auraient permis à la société SOBEC l'obtention de marchés publics ou privés ; que dès lors, elle ne démontre ni l'existence, ni la valeur de la contrepartie qu'elle en a retirée ; que par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré le montant des charges correspondantes dans les bénéfices de la société SOBEC ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la société SOBEC a fait l'objet au titre de la période du 1er juillet 1989 au 30 septembre 1993, l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les factures émises par les sociétés ABCE et Frendom au motif que les honoraires ainsi versés par la société SOBEC ne correspondaient pas à des prestations effectives ;

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271-1, 272-2 et 283-4 du code général des impôts, ainsi que de l'article 223-1 de l'annexe II au même code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucune marchandise ou prestation de services ou qui n'était pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée ; que, dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et se présentait à ses clients comme assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, sans qu'il soit manifeste qu'il n'aurait pas rempli les obligations l'autorisant à faire figurer cette taxe sur ces factures, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir que la société facturière n'avait pas d'activité réelle ou qu'elle n'a pas effectivement fourni de marchandise ou de prestation de services et que les factures qu'elle émettait étaient des factures fictives ou de complaisance ; que, dans ce cas, il revient au redevable de justifier que la facture qu'il a reçue correspond néanmoins à une marchandise réellement fournie ou à une prestation réellement exécutée ;

Considérant, en premier lieu, que les 38 factures établies par la société ABCE, représentant un montant de taxe sur la valeur ajoutée de 271 759,96 F ( 41 429,54 euros), sont régulières en la forme ; qu'il n'est pas contesté que la société ABCE était, à la date de la facturation, régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés ; que l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'absence de prestation en se bornant à faire valoir que la société ABCE n'a pas remis à la société SOBEC de rapport d'exécution relatif à la mission d'assistance commerciale et que cette société n'a pu apporter aucun élément de nature à justifier de la matérialité de la prestation, alors que la société X... fait valoir que les factures litigieuses correspondent à l'exécution d'un protocole d'accord général du 15 septembre 1986 conclu pour une durée indéterminée avec la société ABCE aux fins de lui confier “la mission de l'assister et de la conseiller dans l'organisation et la constitution de dossiers d'appel d'offres” et de conventions particulières prises en application dudit protocole stipulant le versement d'honoraires proportionnels au montant du marché obtenu par la société SOBEC ; que compte tenu de la nature immatérielle des prestations rendues par la société ABCE, la société X... fait valoir que l'activité de la société SOBEC s'opérait par le biais d'entretiens, de réunions ou de conversations téléphoniques qui n'avaient pas à donner lieu à l'établissement d'un rapport d'exécution, et que le protocole d'accord conclu avec la société ABCE lui a permis l'attribution de plusieurs marchés ; que les factures produites font expressément référence aux marchés obtenus par la société SOBEC ; qu'il s'ensuit que l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve, dont elle supporte la charge, de l'absence de prestation effective pour les 38 factures produites ;

Considérant, en second lieu, qu'en l'absence des autres factures litigieuses, la seule production du protocole d'accord et de conventions particulières ne suffit pas à démontrer que les prestations d'assistance commerciale auxquelles ils se réfèrent ont été effectivement exécutées dès lors qu'aucun élément n'établit que la société aurait obtenu des marchés grâce à l'intervention de cette société ;

Considérant, par ailleurs, que la société requérante entend invoquer, sur le fondement de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales, les décisions d'admission partielle notifiées le 29 avril 1987 à la société SOBEC, aux termes desquelles l'administration a abandonné des redressements analogues à ceux en litige au titre des exercices antérieurs ; qu'il résulte de l'instruction que ces décisions non motivées ne comportaient, par elles-même aucune interprétation formelle d'un texte fiscal ; que dès lors, la société X... ne peut utilement s'en prévaloir ; qu'elle ne peut davantage invoquer la violation du principe d'égalité des contribuables devant les charges publiques en se prévalant de dégrèvements qui auraient été accordés à d'autres contribuables, dès lors que les impositions qui ont été assignées à la société SOBEC résultent de l'application de la loi ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : “1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie…” ;

Considérant que la société X... conteste l'application aux redressements litigieux de la majoration de 40 % pour mauvaise foi prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ; que, pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'administration d'apporter la preuve de l'intention du contribuable d'éluder l'impôt ; qu'elle ne saurait être regardée comme rapportant une telle preuve en se bornant à faire valoir que la redevable a déduit en toute connaissance de cause, de manière répétée, des commissions ne correspondant à aucune prestation, alors qu'il est établi que des factures que le service avait écartées du droit à déduction correspondent à des prestations effectives ; qu'il y a donc lieu d'accorder à la société X... la décharge des pénalités de mauvaise foi restant en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société X... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté en totalité sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les bases des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SCA SOBEC a été assujettie au titre des exercices clos en 1990, 1991 et 1993 sont réduites de respectivement 82 668,16 euros (quatre-vingt-deux mille six cent soixante-huit euros seize centimes), 9 688,91 euros (neuf mille six cent quatre-vingt-huit euros quatre-vingt-onze centimes) et 129 726,71 euros (cent vingt-neuf mille sept cent vingt-six euros soixante et onze centimes).

Article 2 : La SCA SOBEC est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie formant surtaxe par rapport à celles résultant de l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : La SCA SOBEC est déchargée à concurrence de la somme de 41 429,54 euros (quarante et un mille quatre cent vingt-neuf euros cinquante-quatre centimes) des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er juillet 1989 au 30 septembre 1993 ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis.

Article 4 : La SCA SOBEC est déchargée des pénalités de mauvaise foi assortissant les rappels d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle demeure assujettie.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SCA X... FRANCE venant aux droits de la SCA SOBEC et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 03NT00078

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ere chambre b
Numéro d'arrêt : 03NT00078
Date de la décision : 30/06/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme MAGNIER
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. HERVOUET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2006-06-30;03nt00078 ?
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