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28/03/2007 | FRANCE | N°06NT00720

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 28 mars 2007, 06NT00720


Vu l'ordonnance du 8 février 2006 enregistrée le 5 avril 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Nantes, par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de Nantes, la requête présentée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE (SCI) PIKA ;

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés, respectivement, le 27 décembre 2005 et le 5 mai 2006, présentés pour la SCI PIKA, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est 57, rue de Porte Bise à Tiercé (49125), par Me Garreau,

avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la SCI PIKA demande...

Vu l'ordonnance du 8 février 2006 enregistrée le 5 avril 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Nantes, par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour administrative d'appel de Nantes, la requête présentée par la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE (SCI) PIKA ;

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés, respectivement, le 27 décembre 2005 et le 5 mai 2006, présentés pour la SCI PIKA, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est 57, rue de Porte Bise à Tiercé (49125), par Me Garreau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la SCI PIKA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 02-0407 et 02499 du 13 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du 10 octobre 2001 par laquelle le maire de Tiercé (Maine-et-Loire) s'est opposé à la réalisation d'une clôture sur le terrain dont elle est propriétaire 57, rue Porte Bise, d'autre part, de l'arrêté municipal du 4 décembre 2001 portant alignement individuel de la voie communale en bordure de sa propriété ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre à l'administration, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un arrêté d'alignement conforme aux limites de sa propriété et de prendre une décision de non-opposition à sa demande d'édification d'une clôture, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de condamner la commune de Tiercé à lui verser une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de la voirie routière ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2007 :

- le rapport de M. Degommier, rapporteur ;

- les observations de Me Brossard, avocat de la commune de Tiercé ;

- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par jugement du 13 octobre 2005, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE (SCI) PIKA tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 10 octobre 2001 par lequel le maire de Tiercé (Maine-et-Loire) s'est opposé à la réalisation d'une clôture sur le terrain dont elle est propriétaire 57, rue Porte Bise, d'autre part, de l'arrêté municipal du 4 décembre 2001 portant alignement individuel de la voie communale au droit de sa propriété ; que la SCI PIKA interjette appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, d'une part, que les premiers juges ont relevé, notamment, que l'arrêté d'alignement contesté s'est borné à constater que le dédoublement de la rue Porte Bise, qui borde la propriété de la SCI PIKA, est inclus dans la voie communale en ce qu'il correspond à la limite réelle de cette voie au droit de la propriété riveraine ; qu'ils ont, ainsi, en tout état de cause, répondu à l'argument tiré par la SCI PIKA de ce que la limite réelle de la voie s'arrêtait en contrebas du terrain lui appartenant ;

Considérant, d'autre part, que dans son mémoire enregistré le 25 février 2003 au greffe du Tribunal administratif de Nantes, la commune de Tiercé a fait valoir que la décision municipale du 10 octobre 2001 s'opposant à l'édification d'une clôture par la SCI PIKA est également justifiée par la circonstance que, depuis fort longtemps, les tiercéens empruntaient la partie de la voie la plus proche de l'immeuble de cette société pour accéder aux rives de la Sarthe et que le maire devait s'opposer à l'édification d'une clôture faisant obstacle à ce passage habituel des piétons ; que, dans ces conditions, en procédant à cette substitution de motif, le tribunal n'a pas statué sur un moyen dont il n'était pas saisi ;

Considérant qu'il suit de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité ne saurait être accueilli ;

Sur la légalité de l'arrêté municipal du 4 décembre 2001 portant alignement individuel :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 112-1 du code de la voirie routière : “L'alignement est la détermination par l'autorité administrative de la limite du domaine public routier au droit des propriétés riveraines. Il est fixé soit par un plan d'alignement, soit par un alignement individuel. Le plan d'alignement, auquel est joint un plan parcellaire, détermine après enquête publique la limite entre voie publique et propriétés riveraines. L'alignement individuel est délivré au propriétaire conformément au plan d'alignement s'il en existe un. En l'absence d'un tel plan, il constate la limite de la voie publique au droit de la propriété riveraine.” ;

Considérant qu'en l'absence d'un plan d'alignement fixant les limites de la voie communale bordant la propriété de la SCI PIKA, l'alignement ne pouvait être fixé qu'en fonction des limites réelles de cette voie ; qu'il résulte des pièces du dossier et, notamment, des plans et des photographies produits, que l'alignement qui a été délivré à la SCI PIKA a pour effet de comprendre dans l'assiette de la rue Porte Bise, une partie du terrain cadastré section A n° 1556 appartenant à la société requérante ; qu'ainsi, et alors même que cette partie de terrain privé se présente comme un dédoublement de la voie communale et est habituellement empruntée par les habitants de la commune, l'arrêté du 4 décembre 2001 contesté ne s'est pas borné à constater les limites actuelles de la voie publique ; qu'il est, par suite, entaché d'excès de pouvoir et doit être annulé ;

Sur la légalité de l'arrêté municipal du 10 octobre 2001 s'opposant à l'édification d'une clôture :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 441-3 du code de l'urbanisme : “L'autorité compétente en matière de permis de construire peut faire opposition à l'édification d'une clôture lorsque celle-ci fait obstacle à la libre circulation des piétons admise par les usages locaux” ;

Considérant que pour s'opposer, par l'arrêté du 10 octobre 2001 contesté, à l'édification de la clôture faisant l'objet de la déclaration souscrite par la SCI PIKA, le maire de Tiercé s'est fondé, non sur des considérations tenant à la libre circulation des piétons mais, d'une part, sur la circonstance “que la clôture envisagée est implantée pour partie sur le domaine communal faute d'arrêté d'alignement (...)”, d'autre part, sur ce “que la destination de la propriété contrevient en l'état actuel aux dispositions du règlement du plan d'occupation des sols applicable en zone UAa, article UA 2.1” ; que ces motifs, qui ne procèdent pas de considérations tenant à la libre circulation des piétons, ne sont pas de ceux qui pouvaient justifier légalement la décision litigieuse ;

Mais, considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait autre que celui initialement indiqué, également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que, dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée sous réserve, toutefois, qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

Considérant que la commune de Tiercé fait valoir que l'arrêté du 10 octobre 2001 est légalement justifié par la circonstance que depuis fort longtemps, les habitants de Tiercé empruntent la partie de la voie la plus proche de l'immeuble de la SCI PIKA afin d'accéder aux rives de la Sarthe et que le maire devait, ainsi, s'opposer à l'édification d'une clôture faisant obstacle au passage habituel des piétons admis par des usages locaux ; qu'il ressort des pièces du dossier et, notamment, d'attestations d'habitants de la commune, qui ne sauraient être écartées du débat au seul motif qu'elles ne répondraient pas aux exigences des dispositions de l'article 202 du nouveau code de procédure civile, que l'emprise de la parcelle A n° 1556 appartenant à la SCI PIKA, qui présente les caractéristiques d'un dédoublement de la rue Porte Bise, est utilisée de longue date par les piétons pour accéder au site des basses vallées angevines et aux rives de la Sarthe, selon un usage local ; qu'en se bornant à invoquer l'irrégularité formelle de ces attestations sans contester les faits qui y sont rapportés, la SCI PIKA ne conteste pas sérieusement l'existence de cet usage ; qu'il est constant que la déclaration de la SCI PIKA portait sur l'édification d'une clôture qui aurait abouti à fermer l'accès à ce passage et ainsi, à faire obstacle à la libre circulation des piétons admise par les usages locaux ; que le maire aurait pris la même décision s'il s'était initialement fondé sur ce motif, qui était de nature à fonder légalement la décision faisant opposition à l'édification d'une clôture par la SCI PIKA ; qu'il y a lieu, dans ces conditions, de procéder à la substitution de motifs demandée, qui ne prive la SCI PIKA d'aucune garantie procédurale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI PIKA est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2001 portant alignement individuel au droit de sa propriété ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : “Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution” ;

Considérant, d'une part, que l'annulation prononcée par le présent arrêt de l'arrêté du 4 décembre 2001 du maire de Tiercé portant alignement individuel implique que cette même autorité prenne un arrêté constatant la limite de la voie publique au droit de la propriété riveraine de la SCI PIKA ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au maire de Tiercé de prendre cet arrêté d'alignement dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de cent euros par jour de retard ; que, d'autre part, le présent arrêt, en tant qu'il rejette les conclusions de la SCI PIKA dirigées contre l'arrêté du 10 octobre 2001 du maire de Tiercé s'opposant à l'édification d'une clôture, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, le surplus des conclusions à fin d'injonction présentées par ladite société ne peut qu'être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner la commune de Tiercé à verser à la SCI PIKA une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la SCI PIKA à verser à la commune de Tiercé, la somme que cette dernière demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 13 octobre 2005 du Tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la SCI PIKA dirigées contre l'arrêté du 4 décembre 2001 du maire de Tiercé portant alignement individuel de la voie communale au droit de la propriété de ladite société.

Article 2 : L'arrêté du 4 décembre 2001 du maire de Tiercé portant alignement individuel de la voie communale au droit de la propriété de la SCI PIKA est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au maire de Tiercé de prendre un arrêté d'alignement individuel constatant la limite de la voie publique au droit de la propriété riveraine de la SCI PIKA, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros (cent euros) par jour de retard.

Article 4 : La commune de Tiercé versera à la SCI PIKA une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SCI PIKA est rejeté.

Article 6 : Les conclusions de la commune de Tiercé tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE PIKA et à la commune de Tiercé (Maine-et-Loire).

Une copie en sera, en outre, adressée au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 06NT00720

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 06NT00720
Date de la décision : 28/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUPUY
Rapporteur ?: M. Sébastien DEGOMMIER
Rapporteur public ?: M. ARTUS
Avocat(s) : PIWNICA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2007-03-28;06nt00720 ?
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