Vu la requête enregistrée le 12 avril 2006, présentée pour la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE (SARL) SYNERGIA, représentée par ses co-gérants en exercice, dont le siège est 55, rue Désiré Le Hoc à Deauville (14800), par Me Eude, avocat au barreau de Bernay ; la SOCIETE SYNERGIA demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 05-0665 du 7 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2005 du maire de Deauville (Calvados) portant réglementation des occupations du domaine public communal pour l'exercice d'une activité commerciale ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;
3°) de condamner la commune de Deauville à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code du patrimoine ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2007 :
- le rapport de M. François, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Artus, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par jugement du 7 février 2006, le Tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE (SARL) SYNERGIA tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2005 du maire de Deauville (Calvados) portant réglementation des occupations privatives du domaine public communal pour l'exercice d'une activité commerciale ; que la SOCIETE SYNERGIA interjette appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'en énonçant “qu'il n'est pas établi que le maire, en édictant les dispositions applicables aux occupations privatives du domaine public pour l'exercice d'une activité commerciale, ait agi dans un intérêt autre que celui de la bonne gestion du domaine public”, le tribunal a suffisamment motivé son jugement en ce qu'il écarte le moyen tiré par la société requérante du détournement de pouvoir ;
Considérant, en second lieu, qu'en relevant que “le règlement en cause n'a, ni pour objet, ni pour effet, d'arrêter ou de modifier l'affectation des propriétés communales utilisées par les services publics municipaux et ne fixe pas le montant de la redevance qui devra être versée par la commune”, et en écartant l'application de l'article L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales invoqué par la société requérante pour la solution du litige, le tribunal n'a pas entaché de contradiction les motifs du jugement attaqué ; que, de même, l'énonciation selon laquelle l'arrêté contesté a été pris en partie “pour des motifs de sécurité”, alors même que les moyens tirés de l'illégalité des mesures de police ont été écartés par les premiers juges, ne saurait davantage caractériser une contradiction de motifs ;
Considérant qu'il suit de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la SOCIETE SYNERGIA, le jugement attaqué n'est pas entaché des irrégularités alléguées ;
Sur la légalité de l'arrêté du 17 janvier 2005 du maire de Deauville :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : “La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1º Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...)” ; que l'article L. 2213-6 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose que : “Le maire peut, moyennant le paiement de droits fixés par un tarif dûment établi, donner des permis de stationnement ou de dépôt temporaire sur la voie publique (...), sous réserve que cette autorisation n'entraîne aucune gêne pour la circulation et la liberté du commerce” ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le maire a compétence pour réglementer les occupations privatives du domaine public de la commune, notamment aux fins d'y permettre l'exercice d'une activité commerciale ; que, par suite, la SOCIETE SYNERGIA ne peut utilement se prévaloir, à l'appui de ses conclusions en annulation de l'arrêté du 17 janvier 2005 du maire de Deauville portant réglementation des occupations privatives du domaine public communal pour l'exercice d'une activité commerciale, ni des dispositions de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales en vertu desquelles le maire peut, par délégation du conseil municipal, être chargé d'arrêter l'affectation des propriétés communales utilisées par les services publics municipaux, ni de celles de l'article L. 2241-1 du même code disposant que le conseil municipal délibère sur la gestion des biens ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté contesté comporte la mention de la qualité de son auteur, dont le nom et le prénom figurent sous sa signature ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 susvisée manque en fait ;
Considérant, en dernier lieu, que si l'arrêté critiqué se réfère au projet d'élaboration d'une zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager sur le territoire de la commune de Deauville, il ne fixe aucune règle à ce titre ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du maire sur ce point est inopérant ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant qu'il appartient au maire, dans l'exercice de ses pouvoirs de gestion du domaine public, de réglementer les conditions de l'utilisation privative de ce domaine, et notamment, de subordonner une telle utilisation à la délivrance préalable d'une autorisation dont il doit alors déterminer les conditions d'obtention ; que cette réglementation doit répondre à des considérations tenant à l'intérêt du domaine public et à son affectation à l'intérêt général ; que les motifs d'ordre esthétique sont également au nombre de ceux qui peuvent justifier les permissions d'occupation du domaine public ;
Considérant que par arrêté du 17 janvier 2005, le maire de Deauville a réglementé les occupations privatives du domaine public communal en les limitant à un ensemble de commerces principalement liés au tourisme balnéaire ;
Considérant, qu'eu égard au caractère touristique et balnéaire de la commune de Deauville et à l'accroissement non contesté de sa fréquentation piétonne, ainsi qu'à la politique de développement des mesures d'embellissement de la ville, le maire a légalement pu restreindre l'occupation privative des voies publiques communales à un ensemble de commerces particulièrement liés au tourisme balnéaire et, en conséquence, limiter cette occupation aux “terrasses traditionnelles de cafés, bars, restaurants, brasseries, salons de thé et glaciers”, ainsi qu'à “la vente de fleurs, de cycles, de la presse, de cartes” uniquement et à la vente d'articles de plage uniquement en front de mer ; que, pour les autres types d'activités commerciales, il a pu légalement limiter cette occupation à la mise en place d'un chevalet publicitaire par commerce, sur le trottoir au droit du magasin ; qu'il ressort, en outre, des pièces versées au dossier qu'antérieurement à la réglementation critiquée, l'implantation de nombreux présentoirs rue Désiré Le Hoc, principale artère commerçante de la ville, où se trouvent dix-huit magasins de vêtements et trois magasins de chaussures, au nombre desquels celui exploité par la société requérante, contribuait à l'encombrement de cette voie, n'y permettant pas, de la sorte, un usage conforme à sa vocation ; que, dans ces conditions, le maire a pu, par son arrêté contesté, apporter les restrictions sus-rappelées aux règles d'occupation du domaine public sans méconnaître le principe d'adéquation aux circonstances de toute mesure de police, ni porter atteinte aux principes d'égalité et de liberté du commerce et de l'industrie ;
Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des éléments du dossier que le maire ait agi dans un intérêt autre que celui de la bonne gestion du domaine public ; qu'ainsi, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE SYNERGIA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2006 du maire de Deauville ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Deauville, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la SOCIETE SYNERGIAX la somme de 2 500 euros que cette dernière demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la SOCIETE SYNERGIA à verser à la commune de Deauville une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature exposés par cette dernière ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE SYNERGIA est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE SYNERGIA versera à la commune de Deauville une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE SYNERGIA et à la commune de Deauville (Calvados).
Une copie en sera, en outre, adressée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
N° 06NT00751
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