Vu la requête enregistrée le 8 février 2010, présentée pour l'UNION DE COOPERATIVES AGRICOLES EPIS-CENTRE NORD, représentée par ses représentants légaux en exercice, dont le siège est 2, rue de la Gare à Aix-d'Angillons (18220), par Me Gravé, avocat au barreau de Paris ; EPIS-CENTRE NORD demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 08-2300 du 8 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 1er février 2008 par laquelle Réseau Ferré de France (RFF), agissant par son mandataire Adyal Grands Comptes, lui a enjoint de procéder à la démolition de divers bâtiments, sur une parcelle du domaine public ferroviaire, en gare de Sainte-Solange ;
2°) d'annuler ladite décision ;
3°) de mettre à la charge de Réseau Ferré de France une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu la loi n° 97-135 du 13 février 1997 portant création de l'établissement public Réseau Ferré de France, en vue du renouveau du transport ferroviaire ;
Vu le décret n° 97-445 du 5 mai 1997 portant constitution du patrimoine initial de l'établissement public Réseau Ferré de France ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2011 :
- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;
- les observations de Me Gravé, avocat d'EPIS-CENTRE NORD ;
- et les observations de Me Falala, avocat de Réseau Ferré de France ;
Considérant que, par décision du 1er février 2008, la société Adyal Grands Comptes, intervenant en qualité de mandataire de l'établissement public Réseau ferré de France (RFF), a informé l'UNION DE COOPERATIVES AGRICOLES EPIS-CENTRE NORD de la résiliation de la convention d'occupation temporaire du domaine public ferroviaire conclue à son profit, avec effet au 1er juillet 2008, et de ce qu'elle devait démolir, en conséquence, les bâtiments et aménagements de stockage et de manutention qu'elle occupait en gare de Sainte-Solange, en vertu de conventions d'occupation temporaire plusieurs fois renouvelées ; que, contestant être tenue à la démolition de ces constructions, édifiées par son prédécesseur, la société Agri-Cher, l'UNION DE COOPERATIVES AGRICOLES EPIS-CENTRE NORD interjette appel du jugement du 8 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision, en tant qu'elle lui enjoint de procéder à la démolition des bâtiments qu'elle occupe sur cette parcelle ;
Considérant, en premier lieu, que si la SOCIETE EPIS-CENTRE NORD soutient que la société Adyal Grand Comptes n'avait pas reçu compétence pour prendre la décision contestée du 1er février 2008, il ressort des pièces du dossier qu'à compter du 1er janvier 1997, la société Adyal Grands Comptes s'est substituée à la Société Nationale des Chemins de fer Français (SNCF) pour gérer une partie du patrimoine foncier dévolu à RFF, selon un marché public conclu le 20 décembre 2006 ; que, par décision portant procuration du 2 janvier 2007, le président de RFF a constitué, comme mandataire, M. Philippe X, président de la société Adyal Grands Comptes, auquel il a été donné pouvoir, pour RFF et en son nom, aux fins d'assurer des missions liées à la gestion de son patrimoine foncier et immobilier, ainsi qu'à la réalisation de cessions, dans les limites prévues par le contrat susvisé ; que la décision du 2 janvier 2007 précise que le mandataire est le signataire des contrats d'occupation et de leurs avenants, et qu'il est habilité à les résilier ; qu'il possède la faculté de déléguer les pouvoirs qu'il tient de la présente procuration à toute personne de son choix au sein d'Adyal Grands Comptes ;
Considérant que si la décision portant procuration du 2 janvier 2007 est intervenue en vertu d'une délibération du 9 juillet 2002 du conseil d'administration de RFF portant délégation de pouvoirs au président, dont il est allégué qu'elle ne serait ni régulière, ni publiée, ladite décision a été prise dans le cadre des pouvoirs propres du président de RFF lui permettant, conformément à l'article 39 du décret susvisé du 5 mai 1997, d'assurer l'exécution du contrat conclu le 20 décembre 2006 entre RFF et Adyal Grands Comptes ; que par suite le moyen tiré de ce que le président de RFF n'aurait pas bénéficié d'une délégation régulière du conseil d'administration est inopérant ;
Considérant, par ailleurs, que si la SOCIETE EPIS-CENTRE NORD soutient que la décision portant procuration du 2 janvier 2007 avait perdu sa validité à la date de la décision contestée du 1er février 2008, dès lors que, par décret du 23 février 2007, M. Y, président de RFF, avait entre temps été remplacé dans ses fonctions par M. du Mesnil, ladite décision doit toutefois être regardée, non comme une délégation de signature mais comme un mandat donné au président d'Adyal Grands Comptes jusqu'au 31 décembre 2011, qui n'était pas susceptible, dans ces conditions, d'être affecté par un changement de présidence au sein de l'organisme délégant ;
Considérant, enfin, que le 30 janvier 2008, le président d'Adyal Grands Comptes a donné délégation à M. Olive, responsable de l'agence Centre-Limousin, à l'effet de signer en son nom la résiliation de la convention du 15 juillet 1991 initialement consentie à la société Agri-Cher, conformément au pouvoir qu'il tirait de la décision portant procuration du 2 janvier 2007 ; que cette délégation habilitait le responsable d'agence à signer la décision litigieuse du 1er février 2008, sans que la SOCIETE EPIS-CENTRE NORD puisse utilement invoquer les circonstances tirées de l'absence de délégation du gestionnaire du patrimoine cosignataire de la décision contestée, et de l'absence de preuve de la transmission de la délégation du 30 janvier 2008 à l'agence Centre-Limousin ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 13 février 1997 susvisée : Les biens constitutifs de l'infrastructure et les immeubles non affectés à l'exploitation des services de transport appartenant à l'Etat et gérés par la société nationale des chemins de fer français sont, à la date du 1er janvier 1997, apportés en pleine propriété à l'établissement public Réseau ferré de France. Les biens constitutifs de l'infrastructure comprennent les voies, y compris les appareillages fixes associés, les ouvrages d'art et les passages à niveau, les quais à voyageurs et à marchandises, les triages et les chantiers de transport combiné, les installations de signalisation, de sécurité, de traction électrique et de télécommunications liées aux infrastructures, les bâtiments affectés au fonctionnement et à l'entretien des infrastructures. / Sont exclus de l'apport, d'une part, les biens dévolus à l'exploitation des services de transport, qui comprennent les gares, les entrepôts et cours de marchandises ainsi que les installations d'entretien du matériel roulant, et, d'autre part, les ateliers de fabrication, de maintenance et de stockage des équipements liés à l'infrastructure, ainsi que les immeubles administratifs (...). Les modalités de détermination de ces biens sont fixées par décret en Conseil d'Etat ; qu'aux termes de l'annexe au décret du 5 mai 1997 susvisé, sont transférés à l'établissement public Réseau ferré de France : D (...) - terrains et bâtiments non liés à l'exploitation des services de transport, à l'exception de ceux affectés au logement social ou au logement des agents de la société nationale des chemins de fer français par nécessité de service et de ceux affectés aux activités sociales ;
Considérant qu'il est constant que la parcelle litigieuse et les bâtiments et aménagements qu'elle comporte n'étaient pas destinés à l'exploitation des services de transport ferroviaires, mais étaient utilisés pour les besoins et les commodités de l'occupant ; que, dès lors, la propriété de cette parcelle a été transférée de plein droit, par l'effet des dispositions précitées de la loi du 13 février 1997 et du décret du 5 mai 1997, à l'établissement public Réseau ferré de France (RFF) ; que RFF a joint au dossier un extrait de la décision d'arbitrage du 31 mars 2005, dont le tableau a été repris en annexe de l'arrêté du 27 novembre 2006, attestant du transfert à l'établissement de la dépendance située en gare de Sainte-Solange, référencée sous le n° UT003528J-lot 2 ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'établissement public Réseau ferré de France, n'était pas propriétaire du terrain d'assiette des bâtiments en litige ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 des conditions générales d'occupation d'emplacements fret, applicables à la convention d'occupation temporaire conclue initialement entre la société coopérative Agri-Cher et la SNCF : 1. Le contrat est conclu pour une durée de 5 ans, avec toutefois faculté pour l'occupant de le résilier à chaque échéance annuelle en prévenant la SNCF 3 mois à l'avance par lettre recommandée AR. 2. Sauf préavis de résiliation, adressé par la SNCF, par lettre recommandée AR, 3 mois avant l'expiration de cette durée, le contrat sera reconduit d'année en année. 3. Il pourra alors être résilié à chaque échéance annuelle par l'une ou l'autre des parties, moyennant un préavis de 3 mois, notifié à l'autre partie par lettre recommandée AR. ; qu'aux termes de l'article 10 des mêmes conditions générales d'occupation : A l'expiration du contrat, (...) 3. La SNCF accède, sans indemnité pour l'occupant, à la propriété des constructions, installations et aménagements réalisés sur l'emplacement occupé à moins qu'elle n'ait exigé par lettre recommandée AR, leur démolition aux frais de l'occupant (...) La SNCF dispose d'un délai d'un mois à compter de l'expiration du contrat pour notifier à l'occupant sa décision sur le sort des constructions, installations et aménagements (...) ;
Considérant que la SOCIETE EPIS-CENTRE NORD soutient qu'elle n'était pas tenue par les stipulations de la convention signée par la société Agri-Cher le 15 juillet 1991, ni par celles de l'article 10 des conditions générales d'occupation des emplacements Fret, qui lui sont jointes, compte tenu de la mise en redressement judiciaire de la société Agri-Cher ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction que, par jugement du 21 juin 1996, le Tribunal de grande instance (TGI) de Bourges a prononcé la cession de cette entreprise au profit de la SOCIETE EPIS-CENTRE, en ordonnant le transfert des contrats en cours, à l'exception de ceux expressément exclus dans les offres de reprise ; qu'il est constant que l'offre de reprise de la SOCIETE EPIS-CENTRE, n'a pas exclu la reprise de la convention d'occupation litigieuse ; qu'en outre, par avenants des 21 novembre 1997 et 5 mars 2004, la SOCIETE EPIS-CENTRE, dans le cadre de l'exécution d'un plan de redressement arrêté par le Tribunal de grande instance de Bourges, puis la SOCIETE EPIS-CENTRE NORD ont été substituées, dans la convention d'occupation temporaire, à la société Agri-Cher ; que si la SOCIETE EPIS-CENTRE NORD invoque la nullité de ces avenants, au motif que leurs signataires seraient des représentants de la SNCF dépourvus d'habilitation pour ce faire, l'exigence de loyauté des relations contractuelles fait, en tout état de cause, obstacle à ce qu'elle puisse utilement se prévaloir de cette prétendue incompétence, alors qu'elle n'a pu se méprendre sur la portée de son propre engagement et ne s'est jamais opposée à l'exécution du contrat ; que, la SOCIETE EPIS-CENTRE NORD venant aux droits et obligations d'Agri-Cher, les stipulations de la convention susmentionnée lui étaient ainsi opposables ;
Considérant, en dernier lieu, que la société Agri-Cher a successivement conclu quatre conventions d'occupation, les 4 février 1980, 3 juin 1981, 6 février 1989 et 15 juillet 1991, sur le fondement desquelles elle a réalisé ou maintenu des magasins de stockage de céréales, une tour de manutention et des boisseaux métalliques de stockage de céréales ; qu'en vertu de l'article 2 de la convention du 3 juin 1981, ainsi renouvelée, le concessionnaire demeurait propriétaire des installations pendant la durée de la convention ; que la SOCIETE EPIS-CENTRE NORD soutient néanmoins que, dès lors que la SNCF n'avait pas exigé au terme de chaque convention la démolition des ouvrages édifiés par Agri-Cher, elle en était devenue propriétaire, de sorte que RFF ne pouvait plus en demander la démolition à son successeur au terme de la dernière convention conclue le 15 juillet 1991 ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte des stipulations de l'article 10.3 de la convention d'occupation temporaire qu'à l'expiration du contrat, la SNCF accède, sans indemnité pour l'occupant, à la propriété des constructions, installations et aménagements réalisés sur l'emplacement occupé, à moins qu'elle n'ait exigé leur démolition ; que si plusieurs conventions se sont succédées dans le temps, l'occupation de la parcelle litigieuse par Agri-Cher, puis par Epis-Centre, n'a jamais cessé ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la SNCF, puis l'établissement public Réseau ferré de France (RFF), aient, antérieurement au 1er février 2008, dénoncé ledit contrat dans les conditions prévues au 2 de l'article 8 précité des conditions générales d'occupation ; qu'ainsi, ni la SNCF, ni l'établissement public Réseau ferré de France, n'avaient accédé à la propriété des constructions et aménagements effectués par Agri-Cher avant le 1er février 2008 ; qu'il suit de là que l'établissement public Réseau ferré de France (RFF) a pu légalement, par la décision litigieuse, enjoindre à l'occupant du domaine public ferroviaire de procéder à la démolition des bâtiments y figurant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'UNION DES COOPERATIVES AGRICOLES EPIS-CENTRE NORD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché d'omission à statuer, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'établissement public Réseau ferré de France (RFF), qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la société requérante de la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, par application des mêmes dispositions, de mettre à la charge d'EPIS-CENTRE NORD le versement à RFF d'une somme de 2 000 euros au titre des frais de même nature qu'il a exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'UNION DE COOPERATIVES AGRICOLES EPIS-CENTRE NORD est rejetée.
Article 2 : L'UNION DE COOPERATIVES AGRICOLES EPIS-CENTRE-NORD versera à l'établissement public Réseau ferré de France une somme de 2 000 euros (deux mille euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'UNION DE COOPERATIVES AGRICOLES EPIS-CENTRE NORD et à l'établissement public Réseau ferré de France.
''
''
''
''
2
N° 10NT00289
1