Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2011, présentée pour la société Disval/Silor dont le siège est 66, rue Saint Barthélémy à Chateauneuf-sur-Loire (45110) venant aux droits de la société Silor, par Me Matko, avocat au barreau d'Orléans ; la société Disval/Silor demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0704183 du 28 juin 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et à sa contribution additionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2003 et 2004 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 100 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 avril 2013 :
- le rapport de M. Etienvre, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;
1. Considérant que la société Silor, qui a pour objet social, le commerce en gros de produits laitiers, a fait l'objet en 2005 d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service a remis en cause, d'une part, la déductibilité de provisions pour dépréciation de créances douteuses et, d'autre part, pour la valorisation de ses stocks, la déduction, pour la détermination du prix de revient, des commissions dites "marges arrières" versées par ses fournisseurs et calculées en fonction du prix d'achat des produits stockés ; que la société Silor a le 19 novembre 2007 saisi le tribunal administratif d'Orléans d'une demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et à sa contribution additionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2003 et 2004 ; que la société Disval/Silor, qui vient aux droits de la société Silor qu'elle a absorbée le 1er janvier 2009, fait appel du jugement du 28 juin 2011 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande ;
Sur la déductibilité des provisions pour créances douteuses :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...)" ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent par un lien direct aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ;
En ce qui concerne la créance Ben Moussa :
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Silor a constitué, à la clôture de l'exercice 2004, une provision pour créance douteuse d'un montant de 2 920 euros en raison d'un risque de non recouvrement de la créance client Ben Moussa ; que l'administration ne conteste ni la réalité des diligences accomplies par la société auprès de ce client ni l'existence des retards de paiement apparus à compter du mois de septembre 2004 ni enfin et surtout la réalité du rejet du chèque de 2 553,18 euros opposé par l'établissement bancaire auprès duquel ledit chèque a été proposé pour encaissement à la fin du mois de novembre 2004 pour défaut de provision du compte de M. Ben Moussa ; que ces circonstances caractérisent les difficultés financières du client Ben Moussa qui justifiaient la constitution d'une provision à la clôture de l'exercice 2004 ; que la requérante est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a remis en cause la constitution de cette provision et à demander, en conséquence, la décharge des droits et pénalités correspondants ;
En ce qui concerne la créance Thevenot :
4. Considérant que le vérificateur a également remis en cause la déductibilité de la
provision pour créance douteuse que la société Silor a constituée pour un montant de 5 281 euros en raison d'un risque de ne pas recouvrer la créance qu'elle détenait sur le client Thevenot ; que si la requérante se prévaut des retards persistants de paiement de la part dudit client au cours de l'année 2004, de la baisse d'activité subie par celui-ci au cours de cette année et soutient que cette situation a débouché sur un accroissement des créances impayées en dépit d'une négociation des délais de paiement et de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire dans le courant de l'année 2008, ces circonstances ne sont toutefois pas de nature à établir l'existence, à la date de clôture de l'exercice 2004, du risque de non recouvrement de tout ou partie de la créance détenue sur l'entreprise Thevenot et justifiant la constitution d'une provision à la clôture de l'exercice 2004 ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la provision pour créances douteuses ainsi constituée ;
Sur la valorisation des stocks :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : "(...) 2 - Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt (...) L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. 3 - Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient (...)" ; qu'aux termes de l'article 39 du même code : "1 - Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...)" ; et qu'aux termes de l'article 38 nonies de l'annexe III audit code dans sa rédaction applicable au litige : "Les marchandises, matières premières, matières et fournitures consommables, emballages perdus, produits en stock et productions en cours au jour de l'inventaire sont évalués pour leur coût de revient. Le coût de revient est constitué : Pour les marchandises, matières premières, matières et fournitures consommables et les emballages commerciaux achetés, par le prix d'achat augmenté des frais accessoires d'achat. Pour les produits intermédiaires, les produits finis, les emballages commerciaux fabriqués et les productions en cours, par le coût d'achat des matières premières consommées, augmenté de toutes les charges directes ou indirectes de production à l'exclusion des frais financiers" ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les sommes perçues à titre de "marges arrière" par la société Silor, que celle-ci a prises en compte pour la détermination du prix de revient des produits qu'elle a achetés et qui étaient détenus dans ses stocks à la clôture des exercices clos en 2002, 2003 et 2004, sont venues rémunérer des prestations effectuées au profit de ses fournisseurs et ayant pour objet d'assurer la promotion des produits acquis auprès de ceux-ci en exécution de contrats dits "de coopération commerciale" ; que compte tenu de l'existence de cette contrepartie, dont rien ne vient établir qu'elle ait été une condition pour l'acquisition desdits produits, la société Silor n'était pas fondée à intégrer le montant des commissions en litige quand bien même celles-ci ont été calculées en fonction du montant des achats ; que la société Codi-France venant aux droits de la société Disval/Silor, qui ne peut, par ailleurs, utilement invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, une instruction du 30 décembre 2005 et une position formalisée dans le bulletin officiel des impôts du 18 novembre 2008 qui sont postérieures aux exercices vérifiés, n'est par suite pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a extourné du prix de revient des produits détenus en stocks la partie desdites commissions ainsi prise en considération par la société Silor ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Codi-France est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Orléans a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande de décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés et à sa contribution additionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2004 résultant de la réintégration, dans les résultats de la société Silor, de la provision pour créance douteuse qu'elle a constituée pour un montant de 2 920 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la société Codi-France dans le cadre de la présente instance et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés de la société Silor au titre de l'exercice clos en 2004 sont réduites de la somme de 2 920 euros.
Article 2 : La société Codi-France venant aux droits de la société Disval/Silor est déchargée de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et à sa contribution additionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2004 et des pénalités dont elle a été assortie correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 28 juin 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la société Codi-France une somme de 1 000 euros (mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Codi-France et au ministre de l'économie et des finances.
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N° 11NT02120