Vu la requête, enregistrée le 29 mars 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant ..., par Me Glon, avocat au barreau de Saint-Brieuc ; M. B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1105060 du 29 janvier 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant retrait de 2 points, 6 points, 3 points et 2 points consécutives aux infractions relevées à son encontre les 13 septembre 2005, 12 novembre 2006, 3 décembre 2008 et 18 mars 2010 et la décision du ministre de l'intérieur en date du 9 mars 2011 constatant la perte de validité de son permis de conduire ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconstituer le capital de points de son permis de conduire ;
il soutient que :
- il n'a pas reçu notification des retraits de points consécutifs aux infractions relevées à son encontre ;
- il n'a jamais reçu, à l'occasion de ces infractions, l'information préalable prévue par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2013, présenté par le ministre de
l'intérieur qui conclut à titre principal à l'irrecevabilité de la requête, et à titre subsidiaire à son rejet, et, à ce qu'il soit mis à la charge de M. B..., la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que :
- la requête est irrecevable en raison de l'absence de production de la décision attaquée ;
- s'agissant de l'infraction commise le 13 septembre 2005 ayant entrainé le retrait de deux points, le requérant a payé de manière différée l'amende forfaitaire le 20 septembre 2005, ce qui établit que l'information préalable lui a été délivrée ;
- s'agissant de l'infraction du 12 novembre 2006, ayant entrainé le retrait de six points, le requérant a fait l'objet d'une condamnation pénale définitive, ce qui rend inopérant le moyen tiré du défaut d'information préalable ;
- s'agissant des infractions commises les 3 décembre 2008 et 18 mars 2010, il ressort des procès-verbaux signés par l'intéressé que ce dernier a reconnu les infractions et reçu les documents comportant l'information exigible ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement (CE) n° 974/98 du Conseil du 3 mai 1998 concernant l'introduction de l'euro ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2014 le rapport de M. Monlaü, premier conseiller ;
1. Considérant que M. B... relève appel du jugement en date du 29 janvier 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant retrait de 2 points, 6 points, 3 points et 2 points consécutives aux infractions relevées à son encontre les 13 septembre 2005, 12 novembre 2006, 3 décembre 2008 et 18 mars 2010 et la décision du ministre de l'intérieur en date du 9 mars 2011 constatant la perte de validité de son permis de conduire ;
Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :
2. Considérant, en premier lieu, que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et, partant, la légalité de ces retraits ; que la notification par lettre simple, prévue par les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 223-3 du code de la route, a pour seul objet de rendre les retraits de points opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont dispose celui-ci pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que la circonstance que le ministre ne soit pas en mesure d'apporter la preuve que la lettre simple portant notification des retraits de points successifs a bien été reçue par son destinataire, ne saurait lui interdire de constater que le permis a perdu sa validité, dès lors que, comme il l'a fait dans la décision contestée, dont M. B... a lui-même produit une copie, il récapitule les retraits antérieurs et les rend ainsi opposables au conducteur qui demeure recevable à exciper de l'illégalité de chacun de ces retraits ; que, dès lors, la circonstance, à la supposer établie, que les retraits de points en litige n'auraient pas été notifiés à M. B... est sans incidence sur la légalité de ces décisions ;
3. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues auxdits articles, lesquelles constituent une garantie essentielle permettant à l'intéressé de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;
En ce qui concerne la décision de retrait de points consécutive à l'infraction commise le 13 septembre 2005 :
4. Considérant que les dispositions portant application des articles R. 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale en vigueur à la date des infractions litigieuses, notamment celles de ses articles A. 37 à A. 37-4 de ce code, issues de l'arrêté du 5 octobre 1999 relatif aux formulaires utilisés pour la constatation et le paiement des contraventions soumises à la procédure de l'amende forfaitaire, prévoient que lorsqu'une contravention soumise à cette procédure est relevée avec interception du véhicule mais sans que l'amende soit payée immédiatement entre les mains de l'agent verbalisateur, ce dernier utilise un formulaire réunissant, en une même liasse autocopiante, le procès-verbal conservé par le service verbalisateur, une carte de paiement matériellement indispensable pour procéder au règlement de l'amende et l'avis de contravention, également remis au contrevenant pour servir de justificatif du paiement ultérieur, qui comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ;
5. Considérant, dès lors, que le titulaire d'un permis de conduire à l'encontre duquel une infraction au code de la route est relevée au moyen d'un formulaire conforme à ce modèle et dont il est établi, notamment par la mention qui en est faite au système national des permis de conduire, qu'il a payé l'amende forfaitaire correspondant à cette infraction a nécessairement reçu l'avis de contravention ; qu'eu égard aux mentions dont cet avis est réputé être revêtu, l'administration doit alors être regardée comme s'étant acquittée envers le titulaire du permis de son obligation de lui délivrer les informations requises préalablement au paiement de l'amende, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre s'être vu remettre un avis inexact ou incomplet ;
6. Considérant, enfin, que si l'intervention de l'arrêté du 5 octobre 1999 ne garantit pas, à elle seule, que des formulaires établis selon un modèle antérieur, où le document comportant les informations requises et celui nécessaire au paiement étaient entièrement distincts, n'aient pas continué à être utilisés pour la constatation des infractions, il résulte tant du règlement du Conseil du 3 mai 1998 concernant l'introduction de l'euro que des mesures législatives et réglementaires prises pour sa mise en oeuvre, s'agissant notamment du montant des amendes, que de tels formulaires, libellés en francs, n'ont pu être employés après le 1er janvier 2002 ; que, pour les infractions relevées avec interception du véhicule à compter de cette date, la mention au système national des permis de conduire du paiement ultérieur de l'amende forfaitaire permet donc au juge d'estimer que le titulaire du permis s'est vu remettre un avis de contravention comportant les informations requises ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction et, en particulier, des mentions du relevé d'information intégral relatif à la situation du permis de conduire de M. B... que l'infraction du 13 septembre 2005 a été constatée après interception du véhicule de M. B... et que celui-ci a ultérieurement payé l'amende forfaitaire correspondante ; qu'il s'est, dès lors, nécessairement vu remettre un avis de contravention libellé en euros comportant les informations requises ; que, faute pour lui de produire ces avis de contravention pour démontrer qu'ils seraient inexacts ou incomplets, la preuve du respect de l'obligation d'information préalable doit être regardée comme apportée par l'administration ;
En ce qui concerne les décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 3 décembre 2008 et 18 mars 2010 :
8. Considérant que, pour justifier de l'accomplissement de l'obligation d'information préalable prévue par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, le ministre de l'intérieur a produit les procès-verbaux, signés par M. B..., afférents aux infractions relevées les 3 décembre 2008 et 18 mars 2010 ; que ces procès-verbaux portent la mention selon laquelle, pour chacune des infractions en cause, " le contrevenant reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention " ; que les mentions figurant sur le volet " avis de contravention " remis au contrevenant répondent aux exigences d'information prévues par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que le ministre doit donc être regardé, pour l'ensemble de ces infractions, comme apportant la preuve, qui lui incombe, qu'a été satisfaite l'obligation d'information prévue par les dispositions précitées du code de la route ;
En ce qui concerne la décision de retrait de points consécutive à l'infraction commise le 12 novembre 2006 :
9. Considérant que lorsque la réalité de l'infraction a été établie par une condamnation devenue définitive prononcée par le juge pénal qui a statué sur tous les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance et que l'auteur de l'infraction a ainsi pu la contester, l'omission de cette formalité est sans influence sur la régularité du retrait de points résultant de la condamnation ; qu'il résulte de l'instruction que la réalité de l'infraction commise par M. B... le 12 novembre 2006 ayant été établie par un jugement du tribunal de police de la Roche sur Yon, prononcé le 23 juillet 2007, devenue définitive le 6 août 2007, le moyen tiré du manquement à l'obligation d'information préalable prévue par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ne saurait, être utilement invoqué à l'encontre du retrait de points correspondant à cette infraction ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de reconstituer le capital de points affecté au permis de conduire de M. B... ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement à l'Etat de la somme que le ministre de l'intérieur demande au titre des frais exposes et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du ministre de l'intérieur tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Bachelier, président de la cour,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Monlaü, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 janvier 2014.
Le rapporteur,
X. MONLAÜLe président,
G. BACHELIER
Le greffier,
C. CROIGER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13NT00919 2
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