Vu la requête, enregistrée le 14 novembre 2012, présentée pour M. A... B..., élisant domicile..., par Me Pollono, avocat au barreau de Nantes ; M. B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1208430 en date du 7 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 août 2012 du préfet de la Loire-Atlantique portant obligation de quitter le territoire français sans délai avec pour destination la République Démocratique du Congo ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de l'admettre au séjour au titre de l'asile ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle au regard des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet ne pouvait pas prendre une mesure d'éloignement à son encontre dès lors qu'il avait exprimé son souhait de déposer une demande d'asile politique avant la notification de ladite mesure ;
- il aurait dû bénéficier des garanties prévues par les dispositions de l'article 10 de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 ;
- étant mineur, il ne pouvait pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 janvier 2013, présenté par le préfet de la Loire-Atlantique, qui conclut au rejet de la requête ;
il soutient que :
- l'arrêté contesté est suffisamment motivé ;
- il a procédé à un examen de la situation du requérant ;
- l'intéressé n'a entamé aucune démarche pour déposer une demande d'asile politique ;
- il n'a pas méconnu les dispositions du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'examen osseux pratiqué le 29 août 2012 révélait que l'intéressé était majeur ; les pièces produites par M. B... ne permettent pas d'établir sa minorité ;
- le requérant ne produit aucun élément permettant d'établir la réalité des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ;
Vu le mémoire, enregistré le 20 novembre 2013 présenté pour M. B... qui conclut aux fins que la requête ;
Il ajoute que la production de la copie conforme rectifié de son acte de naissance permet de lever le doute sur l'authenticité de son acte de naissance, lequel établit sa minorité, à la date de la décision contestée ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 décembre 2013, présenté par le préfet de la Loire-Atlantique qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;
il ajoute que :
- il n'est pas lié par la décision de mise sous tutelle de M. B... par l'autorité judiciaire ;
- la production de l'acte de naissance comme le passeport de M. B... ne sont pas conformes à la législation congolaise dès lors qu'il ne fait pas référence au jugement supplétif, ni au certificat de non appel qui doit être dressé plus de trente jours après la naissance de l'enfant ;
- les conditions de délivrance du passeport de M. B... établi le 31 mai 2013 ne sont pas précisées par l'intéressé qui a pourtant déclaré lors de son audition du 28 août 2012 avoir perdu ses papiers ;
- les documents produits le 28 août 2012, soit postérieurement à la date de l'arrêté contesté n'ont pas de force probante ;
Vu le mémoire, enregistré le 3 février 2014, présenté pour M. B... ;
Vu la décision de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 18 décembre 2012 admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Pollono pour le représenter ;
Vu l'acte tendant à la régularisation de la demande initiale de M. B... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2014 :
- le rapport de M. Monlaü, premier conseiller ;
-les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;
- et les observations de Me C...substituant Me Pollono, avocat de M. B... ;
1. Considérant que M. B..., ressortissant de la République Démocratique du Congo, relève appel du jugement du 7 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 août 2012 du préfet de la Loire-Atlantique portant obligation de quitter le territoire français sans délai avec pour destination la République Démocratique du Congo ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) " ;
3. Considérant que pour estimer que M. B... était majeur à la date de la décision du 29 août 2012 portant obligation de quitter le territoire français et, qu'en conséquence, il ne pouvait bénéficier de la protection prévue au 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'administration s'est fondée sur un examen radiographique réalisé le 29 août 2012 au centre hospitalier de Nantes révélant que son âge osseux est évalué à 19 ans ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, que l'ordonnance du juge des tutelles du 7 septembre 2012 confiant M. B... à la protection du service d'aide sociale à l'enfance retient une date de naissance du 6 novembre 1995 ; que M. B... a également produit une attestation de perte de pièces d'identité, comportant une photographie portant la mention d'une date de naissance du 6 novembre 1995 ; qu'il a également produit pour la première fois en appel, une copie de son passeport congolais indiquant également cette même date de naissance ; que l'expertise osseuse réalisée selon une méthode scientifique dit de " Greulich et Pyle ", qui ne donne qu'une estimation de l'âge de M. B... à 19 ans comme la circonstance tenant à ce que l'acte de naissance établi par les services d'état civil de Kinshasa faisant état de la naissance le 6 novembre 1995 à Kinshasa de M. B... ne soit pas revêtu de la signature du déclarant ne suffisent pas à remettre en cause la valeur probante et authentique des pièces produites par M. B..., qui sont de nature à établir, qu'à la date d'intervention de l'arrêté en litige, l'intéressé était mineur ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. B... est fondé à soutenir que l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique a été pris en méconnaissance du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et doit être annulé ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
5. Considérant que le présent arrêt n'implique pas qu'il soit enjoint au préfet de la Loire-Atlantique d'admettre au séjour au titre de l'asile M. B... mais implique, sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte, que l'intéressé soit muni d'une autorisation provisoire de séjour, jusqu'à ce que l'autorité administrative procède à un nouvel examen de sa situation, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :
6. Considérant que M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Pollono, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Pollono de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 7 novembre 2012 du tribunal administratif de Nantes et l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique en date du 29 août 2012 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Loire-Atlantique de délivrer à M. B... une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit procédé au réexamen de la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Sous réserve que Me Pollono, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Pollono, de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 6 février 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Monlaü, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 27 février 2014.
Le rapporteur,
X. MONLAÜLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
C. CROIGER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 12NT029592