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02/05/2014 | FRANCE | N°13NT03287

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 02 mai 2014, 13NT03287


Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2013, présentée pour Mme D... A..., demeurant..., par Me Gambotti, avocat au barreau de Paris ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1110359 en date du 8 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 septembre 2011, par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ;

2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir

;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder la nationalité...

Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2013, présentée pour Mme D... A..., demeurant..., par Me Gambotti, avocat au barreau de Paris ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1110359 en date du 8 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 septembre 2011, par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ;

2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui accorder la nationalité française par réintégration dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

elle soutient que :

- s'agissant du moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte, le tribunal a cru devoir retenir que M. B..., nommé par arrêté du 17 septembre 2008 régulièrement publié au journal officiel du lendemain, bénéficiait d'une délégation de signature en vertu des dispositions du 2° de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 ; en statuant de la sorte, le tribunal a substitué ses propres moyens à ceux soutenus par chacune des parties, et ainsi outrepassé ses pouvoirs ;

- l'auteur de l'acte était bien incompétent ; le tribunal n'a à aucun moment vérifié que M. B... était bien sous-directeur d'un service à compétence nationale mentionné au deuxième alinéa de l'article 2 du décret du 9 mai 1997 ;

- à défaut de considération de fait et d'explication sur les raisons de son défaut d'insertion professionnelle, la décision est insuffisamment motivée au regard de l'article 27 du code civil ;

- s'agissant de la légalité interne de l'acte contesté, le ministre de l'intérieur a manifestement commis une erreur d'appréciation de sa situation, dès lors qu'elle est handicapée et a été reconnue, par décision du 15 septembre 2009 de la Maison départementale des personnes handicapées " dans l'impossibilité de se procurer ou de conserver un emploi " ; elle justifie donc de son inaptitude à exercer un emploi ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 janvier 2014, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- s'agissant des moyens de légalité externe, il y a lieu de rejeter les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte et de l'insuffisance de motivation par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

- s'agissant de la légalité interne, la situation de l'intéressée n'a pas été inexactement appréciée ; l'impossibilité absolue de travailler n'est pas établie, dès lors que le taux d'incapacité de la requérante est inférieur à 80 % ; en outre, il n'a pas opposé à l'intéressée son absence d'activité professionnelle, mais son défaut d'autonomie matérielle, l'essentiel de ses ressources étant constitué de prestations sociales ;

Vu la décision du 24 décembre 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a accordé à Mme A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 modifié relatif à la manifestation de volonté, aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 avril 2014 :

- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que Mme A..., ressortissante malienne, relève appel du jugement en date du 8 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 septembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande d'acquisition de la nationalité française ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 susvisé relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre (...) et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : 1° (...) les directeurs d'administration centrale (...) ; 2° Les (...) sous-directeurs (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les sous-directeurs peuvent signer au nom du ministre l'ensemble des actes relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité ;

3. Considérant que, par un arrêté complémentaire du 2 septembre 2011 publié au Journal officiel du 4 septembre 2011, M. C... B... a été reconduit dans les fonctions de sous-directeur de l'accès à la nationalité française relevant du secrétariat général à l'immigration et à l'intégration au ministère de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ; qu'il était, par suite, compétent pour signer la décision contestée ; qu'ainsi, et alors même qu'il n'aurait mentionné dans son jugement que l'arrêté de nomination initial de M. B..., publié au journal officiel du 18 septembre 2008, en se fondant sur les dispositions à caractère réglementaire du décret précité, le tribunal a pu écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 20 septembre 2011, sans opérer d'office une substitution de motifs ou de base légale, nécessitant l'information préalable des parties ; que le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient méconnu leur office manque en fait ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la décision du 20 septembre 2011 par laquelle le ministre a ajourné à deux ans la demande de naturalisation présentée par Mlle A...mentionne qu'elle a été prise en application de l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 et précise que l'intéressée doit acquérir son autonomie matérielle compte tenu de ce que ses ressources sont actuellement tirées pour l'essentiel de prestations sociales ; qu'elle comporte ainsi les considérations de fait et de droit qui la fondent ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision contestée doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande. " ; qu'en vertu de ces dispositions, il incombe au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le niveau comme l'origine des ressources de la postulante comme élément de son degré d'insertion notamment professionnelle et de son autonomie matérielle ;

6. Considérant que pour ajourner à deux ans la demande de Mme A..., le ministre s'est fondé sur la circonstance que l'intéressée n'avait pas acquis son autonomie matérielle, ses ressources étant actuellement tirées pour l'essentiel de prestations sociales ;

7. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, Mme A..., née en août 1952, n'exerçait aucune activité professionnelle et ne tirait ses revenus que de prestations sociales, notamment de l'allocation aux adultes handicapés, que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de Paris lui a attribuée pour la période du 12 août 2009 au 14 septembre 2012 ; que Mme A... soutient que la décision qui lui accorde le bénéfice de cette allocation est néanmoins motivée par la circonstance " qu'alors même que son taux d'incapacité est inférieur à 80 %, elle a été reconnue dans l'impossibilité de se procurer ou de conserver un emploi " ; qu'il résulte, toutefois, des articles L. 821-2 et D. 821-1 du code de la sécurité sociale que le taux d'incapacité compris entre 50 et 79 % correspond, non à une impossibilité d'exercer un emploi, mais seulement à une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi ; qu'ainsi, en dépit de la restriction pour l'accès à l'emploi qui lui a été reconnue en vue de l'attribution cette allocation, l'intéressée n'établit pas, au regard du motif de la seule décision dont elle se prévaut, qu'elle serait inapte à l'exercice de toute profession ; que, par suite, le ministre de l'intérieur, qui n'a pas opposé à la requérante son absence d'activité professionnelle, a pu, sans commettre ni erreur de droit, ni erreur manifeste d'appréciation, ajourner à deux ans la demande d'acquisition de la nationalité française de Mme A... au motif qu'elle n'avait pas de ressources personnelles lui assurant une autonomie matérielle et ne subvenait à ses besoins, pour l'essentiel, qu'à l'aide de prestations sociales ;

8. Considérant, d'autre part, que la circonstance que la caisse nationale d'assurances vieillesse a attribué à Mme A... une retraite personnelle de 134,99 euros au titre de l'inaptitude à l'emploi à compter du 1er juin 2013 est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, qui s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 septembre 2011 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentée par Mme A... n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au ministre de l'intérieur de lui accorder la nationalité française doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à son avocat de la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle D... A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 23 avril 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 mai 2014.

Le rapporteur,

J-F. MILLETLe président,

B. ISELIN

Le greffier,

C. GOY

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N° 13NT03287


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT03287
Date de la décision : 02/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : GAMBOTTI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-05-02;13nt03287 ?
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