Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2013, présentée pour la société ERDF, dont le siège social est situé 102 terrasse Boieldieu tour Winterthur à Paris La Défense (92085), par Me A... ; la société ERDF demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 21 mars 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a déclaré que la maîtrise d'ouvrage des travaux d'extension du réseau d'électricité haute tension au profit des clients sollicitant une puissance supérieure à 250 kVA appartient à la société ERDF et que l'expression " clients de plus de 250 kVA " utilisée à l'article 4 de l'annexe 1 au cahier des charges du contrat de concession conclu le 25 novembre 1992 entre Electricité de France, dont elle vient aux droits, et le syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire désigne l'usager final du service public de l'électricité y compris dans les zones d'aménagement concerté et les lotissements ;
2°) d'interpréter le contrat de concession comme stipulant que la maîtrise d'ouvrage des raccordements nécessitant une puissance supérieure à 250 kVA, notamment les raccordements des zones d'aménagement concerté et des lotissements, incombe exclusivement à la société ERDF et que l'expression " clients de plus de 250 kVA " utilisée à l'article 4 de l'annexe 1 au cahier des charges du contrat désigne le demandeur au raccordement ;
3°) de mettre à la charge du syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal administratif ne s'est pas borné à répondre à la demande d'interprétation du contrat dont elle l'avait saisi mais a statué au-delà de ses conclusions en définissant la portée de l'expression " clients de plus de 250 kVA " et en adjoignant ainsi l'argumentation présentée en défense par le syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire ;
- les dispositions législatives lui réservent une compétence de principe pour assurer la maîtrise d'ouvrage de travaux dans le cadre du contrat de concession ; qu'elle exerce cette compétence toutes les fois que le contraire n'est pas expressément stipulé dans le cahier des charges annexé au contrat et ses annexes ;
- la notion de client utilisée par les parties au contrat pour la répartition de la maîtrise d'ouvrage ne peut viser que le demandeur au raccordement et non le client final, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le client final n'étant pas connu au stade de l'aménagement d'une zone d'aménagement concerté ou d'un lotissement et la notion de client final, qui résulte de la transposition en droit interne de la première directive de 1996 relative au marché intérieur de l'énergie, n'existant pas lorsque le contrat de concession a été conclu en 1992 ;
- en application de l'article 1156 du code civil, le contrat doit être interprété par le juge selon la commune intention des parties ;
- les parties ont toujours fondé la répartition de la maîtrise d'ouvrage sur le critère de la puissance de raccordement ainsi que l'attestent les projets réalisés notamment au cours de la période 2004/2012 ;
- le syndicat intercommunal n'a, à aucun moment de l'exécution du contrat de concession, émis la moindre réserve sur sa compétence pour assurer la maîtrise d'ouvrage dans une zone d'aménagement concerté ou un lotissement ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 novembre 2013, présenté pour le syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire, par Me C... ; le syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire demande à la cour :
1°) de rejeter la requête de la société ERDF ;
2°) de mettre à la charge de la société ERDF le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que :
- le juge saisi d'un recours en interprétation du contrat devant se prononcer sur l'interprétation demandée par le défendeur, le tribunal n'a pas statué au delà des conclusions présentées par le demandeur en définissant la notion de client mise en oeuvre pour la détermination de la qualité de maître d'ouvrage ;
- la demande d'interprétation de la société ERDF, qui ne se rapportait pas à un litige né et actuel, ne pouvait donner lieu à elle seule à une interprétation du contrat par le juge et de ce fait, la définition de la notion de client doit être regardée comme ayant nécessairement fait partie de sa demande ainsi que l'attestent ses écritures de première instance et d'appel ;
- " le client de plus de 250 kVA " est l'usager du service public ainsi que l'atteste notamment le fait qu'une demande de raccordement présentée par un aménageur d'une zone d'aménagement concerté ou par un lotisseur doit préciser les besoins de chaque utilisateur individuel ;
- la société requérante a surévalué les besoins à plusieurs reprises afin de pouvoir assurer la maîtrise d'ouvrage des installations ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 janvier 2014, présenté pour la société ERDF qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
elle ajoute que :
- l'existence d'une divergence d'interprétation sur la répartition de la maîtrise d'ouvrage, attestée par l'engagement d'une tentative de conciliation, constitue un litige né et actuel ;
- en reformulant sa question pour y intégrer celle du syndicat portant sur la définition de la notion d'usager, le tribunal l'a dénaturée ;
- la demande de raccordement est présentée par l'aménageur et c'est lui qui assure le paiement des travaux effectués ;
- la surévaluation des besoins dont le syndicat se prévaut n'est pas établie ;
Vu le courrier du 17 janvier 2014 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les informant de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et précisant que l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code ;
Vu le mémoire, enregistré le 20 février 2014, présenté pour le syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire qui maintient ses conclusions en défense ;
il ajoute que :
- la convention mentionne les " clients de plus de 250 kVA " et non les " demandeurs de raccordement de plus de 250 kVA " ;
- l'aménageur ne détermine pas la puissance de raccordement seul mais conjointement avec la société ERDF ainsi que le précise le barème national de tarification des raccordements ;
Vu l'ordonnance de clôture de l'instruction immédiate prise le 4 avril 2014 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2014 :
- le rapport de Mme Aubert, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;
- les observations de Me A...pour la société ERDF ;
- et les observations de Me C... pour le syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire ;
1. Considérant que par un jugement du 21 mars 2013 le tribunal administratif d'Orléans, saisi d'une demande de la société ERDF (Electricité Réseau Distribution France) tendant à l'interprétation de stipulations du cahier des charges annexé à la convention de concession pour le service public de la distribution d'énergie électrique conclue le 25 novembre 1992 par Electricité de France, dont elle vient aux droits, avec le syndicat intercommunal d'électricité d'Indre-et-Loire (SIEIL), a déclaré, d'une part, que la maîtrise d'ouvrage des travaux d'extension du réseau d'électricité haute tension au profit des clients sollicitant une puissance supérieure à 250 kVA appartient à la société ERDF et, d'autre part, que le terme " clients de + de 250 kVA " utilisé à l'article 4 de l'annexe 1 du cahier des charges annexé à cette concession désigne l'usager final du service public de l'électricité y compris dans les zones d'aménagements concerté et les lotissements ; que la société ERDF, qui ne conteste pas le fait que la maîtrise d'ouvrage des travaux d'extension du réseau haute tension au profit des clients sollicitant une puissance supérieure à 250 kVA lui appartient, doit être regardée comme ne demandant l'annulation du jugement qu'en tant qu'il a défini la notion de " clients de + de 250 kVA " et qu'il l'a condamnée à verser à ce syndicat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 9 B du cahier des charges annexé au contrat de concession : " 1) La maîtrise d'ouvrage des raccordements nécessaires à l'alimentation des nouveaux usagers (...) est répartie entre concessionnaire et autorité concédante conformément aux modalités définies à l'article 4 de l'annexe 1 au présent cahier des charges. / 2) Pour la réalisation de ceux-ci les dispositions suivantes sont applicables : - tout demandeur doit verser à celui-ci un prix calculé selon les dispositions de l'article 16 ; / (...) / - lorsque les raccordements concernent une zone à aménager, l'aménageur prend en charge les travaux de desserte intérieure de la zone dans les conditions indiquées aux deux alinéas ci-après. / (...) / 3) Le concessionnaire pourra, dans les conditions précisées au deuxième alinéa de l'article 2, proposer aux nouveaux clients, demandeurs d'un raccordement au réseau concédé, des modes de desserte n'entraînant pas une connexion au réseau existant. " ; que l'article 4 de l'annexe 1 au cahier des charges stipule : " Maîtrise d'ouvrage. Pour l'application de l'article 9 du cahier des charges, la maîtrise d'ouvrage des renforcements de réseaux, des extensions et des branchements est répartie de la manière suivante entre l'autorité concédante et le concessionnaire " ; qu'il résulte du tableau intégré à cet article 4 que la maîtrise d'ouvrage des travaux d'extension haute tension incombe à la société ERDF dans le cas numéro 2 " clients de + de 250 kVA " dans les zones B (régime rural) et C (régime urbain où le SIEIL perçoit la taxe et où il réalise les extensions) et qu'elle incombe au syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire dans " tous les cas sauf le 2 " ;
3. Considérant que, compte tenu de l'objet des travaux de raccordement au réseau de distribution électrique et du moment où ces travaux doivent nécessairement intervenir dans une zone d'aménagement concerté ou dans un lotissement, le titulaire de la maîtrise d'ouvrage doit, à raison de ces travaux, être déterminé par référence à l'aménageur ou au lotisseur qui en sollicite la réalisation et qui doit, par suite, être regardé comme le client au sens de l'article 4 de l'annexe 1 au cahier de charges et non par référence à l'usager final du service public de l'électricité ; que, par suite, la société ERDF a la qualité de maître de l'ouvrage dans tous les cas où la demande de raccordement estimée par l'aménageur ou le lotisseur porte sur une puissance, pour l'ensemble de la zone ou du lotissement, supérieure à 250 kVA ; que le SIEIL exerce la maîtrise d'ouvrage dans les autres cas ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, dans la limite des conclusions dont la cour est saisie, la société ERDF est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a interprété dans un sens différent de celui résultant du point 3 les stipulations de l'article 4 de l'annexe 1 au cahier des charges annexé à la convention de concession pour le service public de la distribution d'énergie électrique conclue avec le SIEIL et, par l'article 2, l'a condamnée à verser à ce syndicat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à que soit mis à la charge de la société ERDF, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement au SIEIL de la somme qu'il demande à ce titre ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du SIEIL le versement à la société ERDF de la somme de 1 500 euros au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il est déclaré que le terme " clients de + de 250 kVA " utilisé à l'article 4 de l'annexe 1 au cahier des charges annexé au contrat de concession conclu le 25 novembre 1992 entre Electricité de France et le syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire désigne, pour les travaux de raccordement au réseau de distribution électrique dans une zone d'aménagement concerté ou dans un lotissement, l'aménageur ou le lotisseur qui sollicite la réalisation de ces travaux.
Article 2 : L'article 1er du jugement du 21 mars 2013 du tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt et l'article 2 est annulé.
Article 3 : Le syndicat intercommunal d'électricité d'Indre-et-Loire versera à la société ERDF la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société ERDF et au syndicat intercommunal d'énergie d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 18 novembre 2014, à laquelle siégeaient :
- M. Bachelier, président de la cour,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M.B..., faisant fonction de premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 décembre 2014.
Le rapporteur,
S. AUBERTLe président,
G. BACHELIER
Le greffier,
N. CORRAZE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13NT01455