Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2014, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me Vaultier, avocat ;
Mme A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1202537 du 3 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande regardée comme tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision de l'autorité consulaire de France à Oran (Algérie) lui refusant la délivrance d'un visa de long séjour ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son avocat une somme de 2 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- les décisions contestées sont irrégulières dès lors que sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen minutieux, qu'elle a toujours vécu auprès de sa mère et de sa grand-mère qui sont françaises et vivent en France depuis 2012 et 2008, que ses oncles, tantes et cousins, également français, sont installée en France depuis de nombreuses années, qu'elle pourrait également obtenir la nationalité française en tant que fille d'une ressortissante française, qu'elle est totalement isolée en Algérie et souffre de cet isolement, qu'elle souhaite s'établir en France pour s'occuper de sa mère et sa grand-mère qui nécessitent une prise en charge quotidienne ;
- les décisions contestées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaissent les articles 7 et 7 bis de la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 dès lors que sa mère et sa grand-mère sont françaises, qu'elle n'exerce aucune activité professionnelle depuis plus de trois ans, qu'elle ne subvient à ses besoins que grâce à l'aide financière de sa famille, qu'une fois en France, elle continuera à bénéficier de cette aide et sera rémunérée en tant que tiers assistant, que sa grand-mère, qui dispose de l'allocation de solidarité aux personnes âgées et de l'allocation personnalisée d'autonomie, peut la loger et la rémunérer, que sa mère, qui bénéficie également d'allocations, participera à sa prise en charge et qu'elle s'engage à n'exercer en France aucune activité professionnelle soumise à autorisation ;
- les décisions contestées méconnaissent l'article 6.5 de la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que ses attaches familiales sont en France, qu'elle est orpheline de père, que sa mère et sa grand-mère souffrent de pathologies chroniques qui nécessitent des soins quotidiens et que sa mère s'est vu reconnaitre le statut de personne adulte handicapée ;
Vu le jugement attaqué et les décisions contestées ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2014, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;
il fait valoir que :
- le moyen tiré de l'absence d'examen de la situation de la requérante n'est pas fondé dès lors que la requérante n'a pas répondu aux observations du 25 novembre 2013 exposant les éléments de droit et de fait ayant amené l'administration à maintenir sa décision ;
- la requérante ne remplit pas les conditions posées par les articles 7 et 7 bis de la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 dès lors qu'elle ne justifie pas disposer de moyens d'existence propres pour financer un séjour d'une année en France, que l'attestation de prise en charge de la requérante par sa grand-mère est dépourvue de valeur probante, qu'aucun élément n'établit qu'elle pourrait prendre en charge la requérante, que le projet d'emploi en tant qu'assistante de vie n'est étayé par aucun élément et n'est pas compatible avec le statut de " visiteur " qui implique l'engagement de ne pas travailler, qu'il existe un risque de détournement du visa, et que la requérante, si elle veut travailler, doit se conformer à la réglementation relative à l'introduction d'un travailleur étranger en France et notamment au contrôle de ses qualifications professionnelles ;
- la décision contestée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que la requérante est âgée de 33 ans et qu'elle n'établit pas être à la charge de sa mère ou de sa grand-mère ;
- la décision contestée ne méconnait ni l'article 6.5 de la convention franco-algérienne du 27 décembre 1968 ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la requérante, âgée de 33 ans, est en mesure de concevoir sa vie professionnelle et familiale en Algérie où se trouve le centre de sa vie sociale et culturelle et où elle a toujours vécu ;
Vu la décision du 4 août 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a accordé à Mme A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2015:
- le rapport de Mme Piltant, premier conseiller ;
1. Considérant MmeA..., ressortissante algérienne née en 1980, relève appel du jugement du 3 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande comme tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre le refus du consul général de France à Oran (Algérie) de lui délivrer un visa long séjour aux fins de s'établir en France auprès de sa grand-mère maternelle ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'aurait pas procédé à l'examen particulier de la situation de Mme A..., et n'aurait pas examiné les éléments produits par la requérante à l'appui de son recours devant cette commission ; que ce moyen manque en fait et doit, en tout état de cause, être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien susvisé : " Les dispositions du présent article et celles de l'article 7 bis fixent les conditions de délivrance du certificat de résidence aux ressortissants algériens autres que ceux visés à l'article 6 nouveau [l'article 6], ainsi qu'à ceux qui s'établissent en France après la signature du premier avenant à l'accord : / a) Les ressortissants algériens qui justifient de moyens d'existence suffisants et qui prennent l'engagement de n'exercer, en France, aucune activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent après le contrôle médical d'usage un certificat valable un an renouvelable et portant la mention " visiteur " " ; qu'aux termes de l'article 7 bis du même accord : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées (...) au b) : (...) / b) À l'enfant algérien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents, ainsi qu'aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge " ;
4. Considérant que, d'une part, Mme A..., qui déclare être sans activité professionnelle depuis plus de trois ans, ne justifie pas disposer de ressources pérennes et suffisantes lui permettant de subvenir à ses besoins pendant la durée de son séjour en France ; que, d'autre part, Mme A..., qui n'établit pas que sa grand-mère ou sa mère disposeraient de ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins, ni qu'elle serait ainsi à la charge de l'une ou l'autre, ne peut pas être regardée comme étant à la charge d'un ressortissant français ; qu'elle ne peut, dès lors, bénéficier d'un visa de long séjour en qualité d'enfant à charge d'un ressortissant français, au sens des dispositions précitées de l'article 7 bis de la convention franco-algérienne susvisée ; qu'en conséquence, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a ni méconnu les dispositions précitées des articles 7 et 7 bis de l'accord franco-algérien susvisé, ni entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5°) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus "; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ;
6. Considérant qu'il est constant que Mme A..., âgée de 32 ans à la date de la décision contestée, est célibataire et sans enfant ; que, si elle soutient que sa présence en France aux côtés de sa grand-mère est nécessaire en raison de l'état de santé de celle-ci, il ressort des pièces du dossier et des déclarations de la requérante, d'une part, qu'elle a vécu séparée de sa grand-mère depuis 2008, que sa grand-mère vit chez une de ses filles et qu'elle n'est jamais seule et que ses oncles, tantes et cousins vivent en France, sans qu'il soit soutenu qu'ils ne pourraient pas prendre soin de sa grand-mère ; que les certificats médicaux produits sont postérieurs à la date de la décision contestée et que les attestations produites sont dépourvues de valeur probante ; qu'il n'est ni soutenu ni même allégué que les membres de la famille de Mme A... seraient dans l'impossibilité de lui rendre visite en Algérie ; que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée méconnait les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par Mme A... au profit de son avocat à ce titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Piltant, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 avril 2015.
Le rapporteur,
Ch. PILTANTLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
F. PERSEHAYE
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N°14NT01466 2
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