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03/04/2015 | FRANCE | N°14NT01844

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 03 avril 2015, 14NT01844


Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2014, présentée pour Mme C... B... épouse A..., demeurant..., par Me Bervard-Heintz, avocat au barreau de Draguignan ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 14-1026 du 17 juin 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 19 février 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire national dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ; >
3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une autorisation provisoire de...

Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2014, présentée pour Mme C... B... épouse A..., demeurant..., par Me Bervard-Heintz, avocat au barreau de Draguignan ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 14-1026 du 17 juin 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 19 février 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire national dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation, dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- le préfet a entaché sa décision de refus de séjour d'une erreur de droit au regard du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a également méconnu les dispositions du 7° du même article ;

- le préfet devait saisir la commission du titre de séjour ;

- le refus de titre de séjour viole aussi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la mesure d'éloignement méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le délai de départ volontaire de trente jours est lui-même entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au vu de sa situation médicale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 octobre 2014, présenté par le préfet du Loiret, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir que :

- Mme A... ne remplit pas les conditions d'entrée régulière en France et de visa de long séjour pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour en France et du droit d'asile ;

- elle n'a pas demandé la délivrance d'une carte de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code et il n'était donc pas tenu d'examiner d'office sa situation au regard de cette dispositions ;

- au regard de la situation de Mme A..., le refus de titre de séjour n'a méconnu ni le 7° de l'article L. 313-11 du code, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et il n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- il n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de prendre la décision de refus de titre de séjour ;

- l'obligation de quitter le territoire ne méconnait pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord du 9 octobre 1987 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi;

Vu le code de d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2015 :

- le rapport de M. Pouget, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme B... épouseA..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 17 juin 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Loiret du 19 février 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire national dans un délai de trente jours et décidant son éloignement à destination de son pays d'origine ;

2. Considérant, en premier lieu, que le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit la délivrance de plein droit de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à l'étranger dont la présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public et " ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français " ; que selon les dispositions combinées des articles L. 211-2-1 et L. 311-7 du même code, applicables à la situation de Mme A... en vertu des stipulations de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, l'octroi de la carte de séjour temporaire est subordonné à la présentation d'un visa de long séjour, qui peut être préalablement demandé à l'autorité compétente pour délivrer le titre de séjour par l'étranger entré régulièrement en France, marié avec un ressortissant français et qui séjourne depuis plus de six mois en France avec son conjoint ;

3. Considérant que si Mme A..., qui a épousé le 31 mars 2013 un ressortissant français, soutient qu'elle remplit les conditions fixées par les dispositions précitées pour bénéficier de plein droit d'une carte de séjour " vie privée et familiale " en qualité de conjoint de français, il est toutefois constant qu'elle n'est pas en mesure de justifier être entrée régulièrement en France et être ainsi recevable à se voir délivrer le visa de long séjour dont la présentation est exigée par les dispositions du 4° de l'article L. 313-11 ; que, par suite, le préfet du Loiret, en ne délivrant pas à l'intéressée le titre de séjour qu'elle sollicitait sur le fondement de ces seules dispositions, n'a pas méconnu celles-ci ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "; vie privée et familiale " ; est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) ;

5. Considérant qu'au soutien de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 19 mars 2014, Mme A... fait état de l'ancienneté de sa présence en France, de la stabilité de ses liens familiaux et de sa bonne intégration ; que, toutefois, la requérante, entrée en France en 2010 et dont le mariage et la communauté de vie concomitante avec M. A... étaient récents à la date de l'arrêté contesté, n'établit pas, ni même n'allègue, être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a résidé jusqu'à l'âge de vingt-sept ans, et où il lui sera loisible de solliciter, si elle s'y croit fondée, un visa de long séjour afin de revenir régulièrement en France ; que, dans ces conditions, et alors même que Mme A... tenterait de fonder une famille avec son époux, le préfet du Loiret, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, n'a ni méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission [du titre de séjour] est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ; que, compte tenu de ce qui a été dit aux points 3 et 5, Mme A... n'est pas au nombre des étrangers remplissant les conditions pour se voir délivrer de plein droit une carte de séjour " vie privée et familiale " ; qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir que le préfet du Loiret devait, avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour, saisir la commission du titre de séjour ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que Mme A... ne peut exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé pour soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait dépourvue de base légale ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que pour les motifs exposés au point 5, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la mesure d'éloignement prise à son encontre porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des buts en vue desquels cette mesure a été prise, ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

9. Considérant, enfin, qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours " ;

10. Considérant que, pour contester la légalité du délai de départ volontaire qui lui a été accordé, Mme A... fait valoir que son mari et elle-même sont engagés dans une démarche de procréation médicalement assistée qu'il leur serait difficile de poursuivre dans l'hypothèse de son départ rapide pour le Maroc ; que, cependant, la requérante se borne à produire à l'appui de ses dires une convocation dans un service de gynécologie le 5 mars 2014 ainsi qu'une demande d'assistance à la procréation par insémination intra-utérine datée du 20 juin 2014, postérieures à la décision contestée ; que, dans ces conditions, le préfet du Loiret n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en assortissant la mesure d'éloignement prise à l'égard de la requérante du délai de droit commun de trente jours ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

12. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A..., ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...épouse A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- M. François, premier conseiller,

- M. Pouget, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 avril 2015.

Le rapporteur,

L. POUGET Le président,

JF. MILLET

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT01844


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01844
Date de la décision : 03/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : BERVARD-HEINTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-04-03;14nt01844 ?
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