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26/06/2015 | FRANCE | N°14NT00080

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 26 juin 2015, 14NT00080


Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2014, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Vovan, avocat au barreau de Paris ; M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-2201 du 19 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 59 547 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2010 en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi à raison de l'illégalité du permis de construire délivré le 11 août 2008 à M. C...par le maire

de Montreuil-le-Chétif ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme glo...

Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2014, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Vovan, avocat au barreau de Paris ; M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-2201 du 19 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 59 547 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2010 en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi à raison de l'illégalité du permis de construire délivré le 11 août 2008 à M. C...par le maire de Montreuil-le-Chétif ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 195 047 euros en réparation de ces mêmes préjudices ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Nantes une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- la faute commise par l'Etat en délivrant à M. C...un permis de construire illégal est de nature à engager sa responsabilité à son égard ;

- cette faute est directement à l'origine d'un certain nombre de préjudices subis par lui et qui n'ont pas été réparés par de précédentes décisions de justices ;

- ainsi, sa maison a subi une perte de valeur vénale qui peut être évaluée à 132 500 euros ; il a également perdu la possibilité de placer durant trois ans le produit de la vente de ce bien, ce qui constitue un manque à gagner de 39 314 euros ; ces deux préjudices patrimoniaux ne pourraient être indemnisés à moins de 80 % de leur évaluation s'il devait être tenu compte d'une simple perte de chance ; son préjudice moral résultant de la délivrance du permis de construire du 11 août 2008 peut être évalué à 8 000 ; l'Etat doit également le garantir, à concurrence de 15 233 euros, des sommes que M. C...a été condamné à lui payer et dont il ne peut s'acquitter du fait de son insolvabilité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la lettre du 28 avril 2015 par laquelle le président de la chambre a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen tiré de l'irrecevabilité des conclusions nouvelles en appel tendant à ce que l'Etat garantisse M. B...du paiement des sommes dues par M. C...;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2015, présenté par le ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, qui conclut au rejet de la requête, aux motifs que :

- M. B...n'établit pas le caractère certain ni direct des préjudices financiers dont il se prévaut ;

- le préjudice moral a déjà été indemnisé ;

- les conclusions tendant à ce que l'Etat le garantisse des condamnations prononcées à l'encontre de M.C..., nouvelles en appel, sont irrecevables ; le préjudice résultant de l'insolvabilité de M. C...est sans lien direct avec la faute commise par l'Etat ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 mai 2015, présenté pour M.B..., qui persiste dans les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2015 :

- le rapport de M. Pouget, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B...relève appel du jugement du 19 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 59 547 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 23 novembre 2010, en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi à raison de l'illégalité du permis de construire délivré le 11 août 2008 à M. C...par le maire de Montreuil-le-Chétif ;

2. Considérant que le maire de la commune de Montreuil-le-Chétif, agissant au nom de l'Etat, a délivré le 18 juin 2001 à M. C...un permis de construire pour l'édification d'une maison d'habitation et de deux hangars à usage d'entrepôt pour le stockage de bois, au lieu-dit " La Touchette " ; que M. C...a entamé en 2003 dans l'un de ces hangars une activité de menuiserie-scierie, non compatible avec la destination de la construction pour laquelle il avait sollicité et obtenu une autorisation d'urbanisme, et génératrice de nuisances sonores excédant, pour M. et MmeB..., propriétaires d'une habitation située à environ 45 m de l'atelier, les troubles normaux du voisinage ; que M.C..., cherchant à régulariser sa situation, a obtenu du maire de Montreuil-le-Chétif, le 11 août 2008, la délivrance d'un nouveau permis de construire portant sur la réalisation d'un bâtiment à usage de scierie artisanale ; que celui-ci a toutefois été annulé à la demande des époux B...par un jugement définitif du tribunal administratif de Nantes du 15 décembre 2009 au motif notamment de l'atteinte portée à la salubrité publique par la construction considérée, en raison de sa proximité avec l'habitation de M. et Mme B...; que par un second jugement du même jour, également définitif, le tribunal a condamné M. C...à payer à M. et Mme B...une somme de 18 000 euros en réparation des troubles de toute nature dans leurs conditions d'existence et du préjudice moral subis par eux du fait de la carence des services de l'Etat à mettre fin, par la mise en oeuvre des pouvoirs de police administrative générale et spéciale, à l'infraction commise par M.C..., en dépit de demandes répétées de leur part dès 2003 ; que, par ailleurs, par des jugements définitifs des 15 décembre 2009 et 5 octobre 2010, le tribunal de grande instance du Mans a condamné M. C...à démolir les constructions illégales et à payer à M. et Mme B...une indemnité de 26 720 euros en réparation des troubles de jouissance subis par eux depuis 2003 ;

3. Considérant que si l'illégalité dont était entachée le permis de construire délivré à M. C...le 11 août 2008, définitivement constatée par un jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 décembre 2009, est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard de M.B..., ce dernier n'est fondé à demander réparation des préjudices résultant de cette faute que dans la mesure où leur matérialité est établie, où ils présentent avec elle un lien direct et certain et où ils n'ont pas été déjà indemnisés ;

4. Considérant, en premier lieu, que M. B...prétend que la présence du bâtiment illégalement autorisé sur le terrain adjacent de sa propriété est à l'origine d'une dépréciation de son bien immobilier et d'un retard à la vente de celui-ci, qui se sont traduits par un manque à gagner total de 171 814 euros correspondant d'une part à la différence entre l'évaluation qui pouvait être faite de ce bien en août 2008 et le prix de sa cession, intervenue le 28 mars 2011, et d'autre part aux intérêts du placement financier de cette somme différentielle ; que, toutefois, par les documents qu'il produit, M. B...ne justifie ni de ce que la mise en vente de sa propriété était liée à la présence voisine de la construction illégale, à tout le moins à compter de la démolition de celle-ci en octobre 2010, ni de ce que la présence de cette construction aurait constitué un obstacle à la vente, alors même que celle-ci est intervenue peu de temps après sa démolition, ni enfin de ce qu'elle aurait effectivement affecté le prix de cession qui pouvait être raisonnablement escompté ; qu'ainsi, M. B...n'établit pas la réalité de préjudices patrimoniaux en lien direct et certain avec le permis de construire illégalement délivré à M. C...le 11 août 2008 ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...ne justifie pas d'un préjudice moral causé par la délivrance du permis de construire du 11 août 2008 qui serait distinct des troubles anormaux du voisinage réparés par l'effet du jugement du tribunal de grande instance du Mans du 5 octobre 2010 ;

6. Considérant, enfin, qu'il n'appartient pas à l'Etat de garantir un administré des condamnations qui ont pu être prononcées au profit de ce dernier à l'encontre d'une tierce personne insolvable ; qu'ainsi, M. B...n'est pas fondé à demander que l'Etat prenne à sa charge les sommes au paiement desquelles M. C...a été personnellement condamné par les juridictions administratives et judiciaires et qu'il n'a pas été en mesure d'acquitter ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'égalité des territoires, du logement et de la ruralité.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- Mme Buffet, premier conseiller,

- M. Pouget, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 juin 2015.

Le rapporteur,

L. POUGET Le président,

JF MILLET

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre de l'égalité des territoires, du logement et de la ruralité, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT00080


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00080
Date de la décision : 26/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Laurent POUGET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : SELARL VOVAN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-06-26;14nt00080 ?
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