Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 31 août 2011 par laquelle le préfet des Hauts-de-Seine a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ainsi que la décision du ministre de l'intérieur du 12 avril 2012 rejetant son recours hiérarchique dirigé contre la décision du préfet.
Par un jugement n° 1204951 du 18 février 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 avril 2015, MmeA..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 février 2015 ;
2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 12 avril 2012 ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de faire droit à sa demande de naturalisation.
Elle soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- le ministre de l'intérieur aurait dû lui attribuer la nationalité française dès lors qu'elle remplit l'intégralité des conditions requises par le code civil pour être naturalisée ;
- le ministre a méconnu le sens des exigences fixées par la loi en ajournant sa demande sur le fondement de conditions supplémentaires et notamment en exigeant qu'elle justifie de l'exercice d'une activité professionnelle compatible avec son handicap ;
- la décision contestée est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le ministre a fondé son ajournement sur un arriéré locatif, motif qui ne répond pas à une condition fixée par loi.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Bachelier, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme A...relève appel du jugement du 18 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation la décision du ministre de l'intérieur du 12 avril 2012 rejetant son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 31 août 2011 par laquelle le préfet des Hauts-de-Seine a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant que la décision du 12 avril 2012 du ministre de l'intérieur comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et rappelle notamment les motifs justifiant sa décision d'ajournement ; que, par suite, le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit être écarté ;
3. Considérant, que Mme A...ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la décision litigieuse de ce qu'elle remplit les conditions de recevabilité posées par le code civil, le ministre ayant ajourné sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 48 du décret du 30 novembre 1993 ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...), l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de formuler une nouvelle demande " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le niveau et l'origine des ressources du postulant en tant qu'élément de son insertion dans la société française ;
5. Considérant que, pour rejeter la demande de naturalisation présentée par MmeA..., le ministre s'est fondé sur deux motifs tirés respectivement de ce que l'intéressée n'avait pas de revenus personnels et ne subvenait à ses besoins qu'à l'aide de prestations sociales et qu'elle avait une dette locative envers son bailleur ;
6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, Mme A...ne justifiait pas de l'exercice d'une activité professionnelle et que ses ressources étaient constituées, d'une part, de 711,95 euros d'allocation adulte handicapé et, d'autre part, d'un versement mensuel de 295,11 euros au titre de l'aide personnalisée au logement, soit un montant total mensuel de 1007 euros ; que si la requérante s'est vu reconnaître une incapacité comprise entre 50 et 79% par la commission de l'autonomie des personnes handicapées le 10 août 2009, ce taux d'incapacité correspond en vertu des articles L. 821-2 et D. 821-1 du code de la sécurité sociale, non à une impossibilité d'exercer un emploi, mais seulement à une restriction substantielle et durable de l'accès à l'emploi ; que, par suite, cette reconnaissance du statut de travailleur handicapé n'a eu ni pour objet ni pour effet de déclarer Mme A...inapte à l'exercice de toute activité professionnelle ; que d'ailleurs, il est constant que l'intéressée était inscrite en tant que demandeur d'emploi auprès de Pôle emploi ; que, dans ces conditions, et eu égard au large pouvoir d'appréciation dont il dispose pour accorder la naturalisation, le ministre de l'intérieur a pu, sans commettre d'erreur de droit, retenir sa situation de demandeur d'emploi et se fonder sans erreur manifeste d'appréciation sur ce premier motif pour décider d'ajourner à deux ans la demande de naturalisation présentée par Mme A...afin qu'elle dispose d'un délai nécessaire à l'acquisition de son autonomie matérielle ;
7. Considérant, en second lieu, que la requérante soutient que sa dette locative envers son bailleur d'un montant de 295 euros n'est pas de nature à justifier un ajournement de sa demande de naturalisation ; que toutefois eu égard au large pouvoir d'appréciation dont dispose le ministre et au caractère récent de cette dette, le ministre de l'intérieur a pu, sans commettre d'erreur de droit ou d'erreur manifeste d'appréciation, se fonder aussi sur ce second motif pour prononcer un ajournement à deux ans de la demande de naturalisation présentée par MmeA... ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A...ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 14 octobre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bachelier, président de la cour,
- Mme Buffet, premier conseiller,
- Mme Piltant, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 octobre 2015.
L'assesseur le plus ancien
dans l'ordre du tableau,
C. BUFFETLe président rapporteur
G. BACHELIER
Le greffier,
S BOYERE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT01189