Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007, 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1103783 du 19 juin 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, des pièces complémentaires et un mémoire enregistrés les 8 août et 8 septembre 2014 et le 18 décembre 2015, M. et Mme A...B..., représentés par Me Chipot, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 juin 2014 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007, 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif de Rennes, la procédure de rectification est irrégulière dès lors que l'administration fiscale, dont le raisonnement repose sur le caractère fictif de la SCI Ty Kern, aurait dû faire usage de la procédure de répression des abus de droit ;
- en estimant que le bien cédé n'avait pas un usage d'habitation, le tribunal administratif de Rennes a commis une erreur manifeste d'appréciation alors que cet usage n'est pas contestable ; de même, ce tribunal a commis une erreur en estimant que certaines de leurs prétentions n'étaient pas fondées, ce dont il justifie en appel par la production de factures ;
- les biens en cause n'ont pas fait l'objet d'une transformation complète susceptible de caractériser une reconstruction de l'immeuble, étant donné que les dépenses engagées par la SCI Ty Kern dont ils sont les associés n'ont eu d'autre but que de rénover, pour les remettre au goût du jour, les constructions existantes ;
- les bâtiments, acquis par la SCI en janvier 2006 et objets des travaux dont ils demandent la déduction de leurs revenus fonciers, étaient antérieurement affectés à usage d'habitation ; les travaux portant sur le gros oeuvre ont été réalisés par M. B...antérieurement à leur vente à la SCI Ty Kern ; les travaux réalisés sur ces bâtiments après leur acquisition par la SCI n'ont pas abouti à une reconstruction complète des immeubles dés lors qu'aucune modification importante du gros-oeuvre n'a été réalisée ; ces travaux doivent être dissociés des travaux réalisés antérieurement par les épouxB... ; l'administration fiscale ne peut se prévaloir de l'acte de vente de ces bâtiments à la SCI Ty Kern, dont l'état descriptif erroné a été rectifié par attestation notariée du 9 avril 2009 qui indique que les locaux cédés à la SCI étaient à usage d'habitation ; en conséquence, les travaux comptabilisés en charge par la SCI postérieurement aux acquisitions immobilières ne peuvent être regardés, ni au sens de la loi fiscale, ni à celui de la doctrine administrative, comme des travaux de construction, reconstruction ou d'agrandissement ;
- les travaux d'aménagement interne sont des réhabilitations conformes aux conditions modernes de vie ou des dépenses d'amélioration ; la circonstance que le prix de ces travaux dépasse le coût d'acquisition des bâtiments ne saurait caractériser la nature des dépenses engagées ;
- la SCI Ty Kern a été constituée pour éviter les inconvénients de l'indivision en cas de décès d'un des conjoints et n'est pas fictive ; l'administration fiscale ne peut invoquer la confusion de patrimoine quand bien même certaines factures ont été émises aux noms des époux B...et d'autres au nom de la SCI.
Par des mémoires en défense enregistrés les 9 février 2015 et 10 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. et Mme B...n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lemoine,
- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
- et les observations de Me Chipot, avocat de M. et MmeB....
1. Considérant qu'après avoir acquis en 2004 deux immeubles accolés situés au lieu-dit Le Refour à Longaulnay (Ille-et-Vilaine), sur lesquels ils ont effectué une première série de travaux, M. et Mme B...ont constitué une société civile immobilière, la SCI Ty Kern, à laquelle ils ont cédé, par acte notarié du 5 janvier 2006, ces immeubles, destinés à une activité de gîtes, ainsi que l'immeuble constituant leur habitation principale dont était propriétaire Mme B...; que la SCI Ty Kern, qui a donné à bail les trois immeubles à ses associés, a, au cours des années 2007, 2008 et 2009, réalisé d'autres travaux dans les deux immeubles à vocation de gîtes, dont elle a déduit le montant des revenus fonciers tirés de leur location à M. et Mme B...; qu'à l'issue d'une vérification de la comptabilité de cette SCI réalisée en 2010, l'administration fiscale a remis en cause cette déduction, rehaussé les résultats de la SCI Ty Kern et mis à la charge de M. et MmeB..., imposés à l'impôt sur le revenu en leur qualité d'associés d'une société relevant du régime des sociétés de personnes défini à l'article 8 du code général des impôts, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des trois années 2007, 2008 et 2009 ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 19 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ;
Sur la procédure d'imposition :
2. Considérant que si les époux B...soutiennent que la procédure de rectification est irrégulière faute pour l'administration d'avoir mis en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, alors qu'elle aurait estimé implicitement que la SCI Ty Kern avait un caractère fictif et avait été constituée dans un but exclusivement fiscal, il résulte toutefois de l'instruction, et ainsi que l'ont estimé à juste titre les juges de première instance, que le vérificateur ne s'est, dans sa proposition de rectification du 30 novembre 2010, fondé que sur une appréciation factuelle consistant à estimer que, malgré le changement de propriétaire en 2006, les travaux réalisés sur les immeubles litigieux devaient être regardés dans leur ensemble, pour la période allant de 2005 à 2009, comme constituant des travaux de construction, reconstruction ou agrandissement dont le coût n'était pas déductible des revenus fonciers ; que si celui-ci a indiqué également que, faute de tenue des assemblées générales, l'activité sociale de la SCI n'était pas établie et que certaines factures de travaux avaient été établies aux noms de M. et Mme B...et non à celui de la société, de sorte qu'il pouvait exister une certaine confusion de patrimoine, l'administration fiscale n'a pas fondé les rehaussements en litige sur ces appréciations et n'a, à aucun moment, entendu remettre en cause les actes de création de la SCI Ty Kern ou d'acquisition par elle des immeubles concernés ; qu'il en résulte qu'elle n'était pas tenue de recourir à la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, M. et Mme B...ne sont pas fondés à invoquer l'absence de respect des garanties offertes par cette procédure ;
Sur le bien-fondé des impositions :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 31 du CGI : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a. Les dépenses de réparation et d'entretien (...) ; b. Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...) " ; que, dans sa version en vigueur à compter du 29 décembre 2008, ce même article précise, au 1° du I : " b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ainsi que des dépenses au titre desquelles le propriétaire bénéficie du crédit d'impôt sur le revenu prévu à l'article 200 quater " ; que doivent être regardés comme des travaux de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, au sens des mêmes dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que les deux immeubles litigieux étaient à l'état de ruines lors de leur acquisition par M. et Mme B...au cours de l'année 2004 ; que les travaux réalisés par les contribuables sur ces immeubles avant leur acquisition par la SCI Ty Kern le 5 janvier 2006 ont consisté à reconstruire les bâtiments afin de les rendre à l'usage d'habitation qu'ils avaient perdu depuis plus d'un siècle, en procédant à la réfection des murs, toitures, ouvertures et cloisons ; que, si M. et Mme B...soutiennent que les travaux réalisés par la SCI Ty Kern à compter du mois de janvier 2007 doivent être dissociés des travaux de gros oeuvre ainsi réalisés et regardés comme des travaux de réparation et d'amélioration en vue de " remettre les locaux au goût du jour et d'adapter aux conditions modernes de vie les constructions existantes ", ils ne démontrent par aucun des documents qu'ils produisent que les dépenses dont la déduction est contestée correspondraient à des travaux d'aménagement ou de rénovation d'installations déjà existantes et non, comme le fait valoir l'administration, à des travaux d'aménagement intérieurs destinés à compléter et achever les travaux de gros oeuvre réalisés au cours des années 2005 et 2006, par l'aménagement de combles et la création d'un deuxième étage augmentant la surface habitable de 87m² à 170m², des aménagements internes et des créations de cloisons aboutissant à une redistribution intérieure et une augmentation importante du nombre de pièces, une modification de la consistance des locaux, la création de salles d'eau, de sanitaires et de deux cuisines, la création de sept nouvelles ouvertures au rez-de-chaussée et en toiture, le coulage d'une dalle béton sur le sol du rez-de-chaussée, la reconstruction des planchers du premier étage, la création d'un plancher pour le second étage, la reconstruction de deux escaliers, l'installation d'un nouveau système de chauffage et de ventilation, la reprise intégrale du réseau électrique et le ravalement des murs extérieurs ; qu'ainsi ces travaux ne pouvaient qu'être regardés, tant par leur nature que par leur importance, comme indissociables des travaux de reconstruction et de gros oeuvre préalablement engagés et que leur coût ne pouvait être déduit des revenus fonciers par application du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts ;
5. Considérant que si M. et Mme B...ont entendu se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des dispositions contenues dans la fiche n°8 de l'instruction 5 D-2-07 du 23 mars 2007, ces dispositions ne comportent aucune interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à s'en prévaloir ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code justice administrative :
7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 3 mars 2016 à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Gélard, premier conseiller,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 mars 2016.
Le rapporteur,
F. Lemoine
Le président,
I. Perrot
Le greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT02146