Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A...épouse B...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 25 février 2015 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un visa de long séjour, un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1500644 du 4 juin 2015, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 juillet 2015, MmeA..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 4 juin 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'entrée en France le 12 novembre 2012 munie d'un visa Schengen délivré par les autorités néerlandaises le 23 octobre 2012, elle remplissait les conditions requises pour se voir délivrer un visa de long séjour ;
- il méconnait les dispositions du 7 de l'article L. 311-13 du même code et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle est entrée en France pour rejoindre ses deux enfants avec lesquels elle entretient des relations, que son union est sincère, qu'elle justifie de la réalité de la vie commune avant le mariage, qu'elle recherche un emploi et bénéficiait d'une formation qu'elle a dû interrompre en raison de la décision contestée .
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2015, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il s'en remet à ses écritures de première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de Schengen, signée le 14 juin 1985 et complétée le 19 juin 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Piltant, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que MmeA..., ressortissante ivoirienne née le 27 octobre 1957, est, selon ses déclarations, entrée le 13 novembre 2012 sur le territoire français où elle s'est mariée avec un ressortissant français le 27 septembre 2014 ; qu'elle a sollicité le 9 octobre 2014 la délivrance d'une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 25 février 2015, le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme A...épouse B...relève appel du jugement du 4 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, d'une part, que, sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'octroi de la carte de séjour temporaire est subordonné par l'article L. 311-7 de ce code à la production par l'étranger d'un visa de long séjour ; qu'il en va notamment ainsi de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et qui, en vertu du 4° de l'article L. 313-11 du même code, est susceptible d'être délivrée à l'étranger marié avec un ressortissant de nationalité française ; qu'aux termes du sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 de ce code : " Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. " ; qu'il résulte de ces dispositions que la possibilité ouverte par l'article L. 211-2-1 à un étranger conjoint de Français de présenter directement une demande de visa de long séjour à l'autorité administrative compétente pour la délivrance du titre de séjour prévu au 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est notamment subordonnée à la justification d'une entrée régulière sur le territoire français ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 19 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers titulaires d'un visa uniforme qui sont entrés régulièrement sur le territoire de l'une des parties contractantes peuvent circuler librement sur le territoire de l'ensemble des parties contractantes pendant la durée de validité du visa (...) " ; qu'aux termes de l'article 22 de cette convention : " 1. Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités compétentes de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 211-33 du même code : " La déclaration d'entrée sur le territoire français est souscrite auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale. / A cette occasion, un récépissé est remis à l'étranger. Il peut être délivré par apposition d'une mention sur le document de voyage. / L'étranger assujetti à l'obligation de déclaration doit être en mesure de justifier, à toute réquisition des agents de l'autorité, qu'il a satisfait à cette obligation, par la production de ce récépissé. / Les modalités d'application du présent article, et notamment les mentions de la déclaration et son lieu de souscription, sont fixées par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre chargé de l'immigration. " ; que la souscription de cette déclaration est une condition de la régularité de l'entrée en France de l'étranger soumis à l'obligation de visa et en provenance directe d'un Etat partie à cette convention qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire ;
4. Considérant que, si Mme A...déclare être entrée en France le 13 novembre 2012 sous couvert de son passeport muni d'un visa de court séjour établi par les autorités consulaires néerlandaises pour une durée de seize jours valable du 3 novembre au 3 décembre 2012, il est constant qu'elle n'a pas souscrit auprès des autorités françaises la déclaration prévue par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, qui ne peut pas être substituée par le dépôt d'une demande de titre de séjour ; que, par suite, le préfet du Calvados a pu, pour prendre la décision contestée du 25 février 2015, se fonder sur le motif tiré de l'irrégularité de l'entrée en France de MmeA..., dès lors que celle-ci ne pouvait prétendre à la délivrance d'un visa de long séjour sur place au titre de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que, faute du visa de long séjour exigé par l'article L. 311-7 du même code, Mme A...épouse B...ne pouvait davantage prétendre à la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint d'un ressortissant français ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;
6. Considérant que, si Mme A...soutient qu'elle vit avec son conjoint de nationalité française depuis le mois de mars 2014, que deux de ses enfants vivent en France et qu'elle a entrepris des démarches, notamment une formation, en vue d'occuper un emploi, il ressort des pièces du dossier que son mariage célébré le 27 septembre 2014, soit quelques mois avant la décision contestée, est récent, tout comme la vie commune alléguée, à la supposer même établie depuis mars 2014 ; que Mme A...n'établit ni entretenir de relation avec ses deux enfants résidant en France ni disposer en France, de liens affectifs ou familiaux d'une intensité, d'une stabilité et d'une ancienneté suffisantes ; qu'enfin, la requérante n'établit pas être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie en Côte d'Ivoire, où elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dès lors que deux autres de ses enfants y résident ; que, dans ces conditions, et alors même que la requérante aurait entrepris des démarches pour occuper un emploi, le préfet du Calvados n'a pas porté une atteinte manifestement disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de la requête à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A...ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme A...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...épouse B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera adressée au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 8 juillet 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Piltant, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 27 juillet 2016.
Le rapporteur,
Ch. PILTANTLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
Ch. GOY
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N° 15NT02027