Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2012 par lequel le maire de Crevin (Ille-et-Vilaine) a délivré à la société civile d'exploitation agricole (SCEA) La Pierre un permis de construire pour l'extension d'une stabulation et d'une nursery et la création d'un appentis de stockage et d'une fumière non couverte sur un terrain situé au lieu-dit " La Renaudais ".
Par un jugement n° 1300390 du 9 octobre 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 8 décembre 2015, 15 décembre 2015 et 26 mai 2016, M.D..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 9 octobre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Crevin du 28 novembre 2012 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Crevin la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la minute du jugement attaqué n'est pas signée, en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- le projet architectural du dossier de demande de permis de construire est incomplet au regard des exigences des articles R. 431-8 à R. 431-10 du code de l'urbanisme ;
- les dispositions de l'article 153.1 du règlement sanitaire départemental d'Ille-et-Vilaine ont été méconnues, dès lors que le dossier de déclaration préalable que prévoit ce texte en cas de création, extension ou réaffectation d'un bâtiment d'élevage ou d'engraissement n'a pas été joint au dossier de demande de permis de construire ;
- l'arrêté contesté a été pris en violation des dispositions de l'article R. 423-52 du code de l'urbanisme, les avis des services et autorités consultés n'ayant pas été joints au dossier de demande de permis de construire, ni visés dans cet arrêté ;
- le permis de construire litigieux méconnaît les dispositions de l'article A 3 du règlement du plan local d'urbanisme de Crevin, dès lors que la voie unique d'accès au projet présente un caractère dangereux pour les usagers ;
- les dispositions de l'article A 4.2.1 de ce règlement ont également été méconnues, la preuve n'étant pas rapportée du raccordement des installations projetées à un dispositif d'assainissement, alors que celles-ci vont nécessairement générer des eaux usées ;
- le projet présente des risques pour la sécurité et la salubrité publiques et aurait dû, dès lors, être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales en vertu des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Par des mémoires en défense enregistrés le 25 avril 2016 et 27 mai 2016, la SCEA La Pierre, représenté par la SCP Depasse - Sinquin - Daugan - Quesnel, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la demande présentée en première instance par M. D...était tardive et, dès lors, irrecevable ;
- les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 mai 2016, la commune de Crevin, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. D...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 4 mai 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 31 mai 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le règlement sanitaire départemental d'Ille-et-Vilaine ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massiou,
- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,
- les observations de MeF..., substituant MeA..., représentant M.D..., et de MeE..., substituant MeB..., représentant la commune de Crevin.
1. Considérant que par un arrêté du 28 novembre 2012, le maire de Crevin (Ille-et-Vilaine) a accordé à la société civile d'exploitation agricole (SCEA) La Pierre un permis de construire pour l'extension d'une stabulation et d'une nursery, ainsi que la création d'un appentis de stockage et d'une fumière non couverte au lieu-dit " La Renaudais " ; que M. D...relève appel du jugement du 9 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, seule la minute du jugement doit être régulièrement signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ; qu'il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement contesté est revêtue de ces signatures ; que, par suite, le défaut de signature de l'ampliation du jugement du tribunal administratif de Rennes transmise à M. D...est sans influence sur la régularité de celui-ci ;
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. " ; que selon l'article R. 431-9 de ce même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 431-10 de ce même code : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. " ; que si la régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents ainsi exigés, le caractère insuffisant du contenu de l'un de ces documents au regard de ces dispositions ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par ces dispositions ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la notice explicative incluse dans le dossier de demande de permis de construire présentée par la SCEA La Pierre comporte des indications quant au site d'implantation du projet et notamment la présence d'habitations au nord ; que cette notice fait état des matériaux qui seront utilisés, du maintien des accès existants et du renforcement de la végétation ; que les documents graphiques et photographiques du dossier permettent également d'évaluer l'intégration du projet dans le paysage ; que les " développements à long terme des travaux et plantations " dont l'absence est soulignée par le requérant ne sont, par ailleurs, pas au nombre des éléments ayant à se trouver dans un dossier de demande de permis de construire en vertu des dispositions précitées ; qu'il ressort, en outre, du plan de masse se trouvant dans ce dossier que le raccordement des installations aura lieu sur le réseau existant, la notice explicative précisant que " les eaux pluviales seront raccordées sur le réseau déjà en place et dirigées vers le milieu naturel. Les raccordements éventuels en eau potable et électricité se feront depuis les bâtiments existants. " ; qu'enfin, le dossier comprend un plan des différentes toitures, ainsi que deux plans de coupe qui, lus en liaison avec le plan de masse, permettent de déterminer quelles façades ils représentent ; que, dans ces circonstances, M. D...n'est pas fondé à soutenir que le dossier de demande de permis de construire présenté par la SCEA La Pierre aurait été incomplet ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que la composition du dossier de demande de permis de construire ne peut résulter que de règles issues du code de l'urbanisme ; que les règlements sanitaires départementaux ne peuvent ainsi édicter des règles de procédure relatives à l'octroi de ces permis ; que, dès lors, M. D...ne peut utilement faire valoir que le dossier de permis de construire n'aurait pas été complet du fait de l'absence du dossier de déclaration préalable prévu à l'article 153.1 du règlement sanitaire départemental d'Ille-et-Vilaine en cas de création, extension ou réaffectation d'un bâtiment d'élevage ou d'engraissement ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 423-52 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente consulte en tant que de besoin les autorités et services publics habilités à demander que soient prescrites les contributions prévues au 2° de l'article
L. 332-6-1 ou à l'article L. 332-9. " ; que ces dispositions n'imposent pas, contrairement à ce que soutient M.D..., que les avis ainsi recueillis soient versés au dossier de demande de permis de construire, ni visés dans l'arrêté accordant ce permis ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ce texte doit, dès lors, être écarté ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article A 3 du règlement du plan local d'urbanisme de Crevin : " 1. (...) Le projet peut être refusé ou subordonné au respect de prescriptions spéciales, si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour les utilisateurs des accès. (...) 2. La réalisation d'un projet est subordonnée à la desserte du terrain par une voie dont les caractéristiques répondent à sa destination et à l'importance du trafic généré par le projet. " ; que si M. D...soutient que l'unique voie d'accès au projet serait dangereuse, du fait de son absence de revêtement, de la visibilité très réduite qu'elle offre et de son étroitesse, il ne le démontre pas par les photos qu'il produit ; qu'il ne démontre pas, par ailleurs, que le projet litigieux aurait pour effet de conduire à une augmentation significative du trafic sur cette voie d'accès ;
8. Considérant, en cinquième lieu, que selon l'article A 4.2.1 du règlement du plan local d'urbanisme de Crevin : " Toute construction ou installation susceptible de générer des eaux usées ne pourra être autorisée que si elle est raccordée à un dispositif d'assainissement conforme aux règles sanitaires en vigueur " ; que si l'augmentation du cheptel justifiant les travaux d'extension autorisés par le permis de construire litigieux est susceptible de générer un surcroit d'eaux usées, il n'est, pour autant, pas établi que le raccordement prévu aux réseaux existants ne permettrait pas de rendre le projet conforme à ces dispositions ;
9. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, dans sa version alors en vigueur : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " ; que M. D...fait état des importantes nuisances sonores, olfactives et visuelles et des risques pour la sécurité qu'il subit du fait de l'élevage exploité par la SCEA La Pierre, qui seront, selon lui, aggravées par l'extension projetée de l'exploitation ; qu'il résulte, toutefois, des énonciations des points 7 et 9 du présent arrêt qu'il n'est pas démontré que la voie d'accès au projet serait dangereuse, ni que les effluents générés par l'exploitation ne seraient pas dirigés vers un dispositif d'assainissement approprié ; que le projet litigieux consiste en une extension limitée de l'exploitation, dans le prolongement des bâtiments existants, pour l'accueil d'un cheptel devant passer de 51 à 70 vaches laitières et de 48 à 68 génisses ; que la fumière non couverte prévue dans le projet doit être implantée à environ 120 mètres de l'habitation de M.D..., dont elle sera notamment séparée par un autre bâtiment ; que dans ces conditions, eu égard à la nature de l'exploitation existante et de la relativement faible ampleur du projet envisagé, il n'est pas établi qu'en délivrant le permis de construire attaqué, le maire de Crevin aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans la mise en oeuvre des dispositions précitées ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de première instance, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2012 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Crevin qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. D...sollicite le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la commune de Crevin et par la SCEA La Pierre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Crevin et de la société civile d'exploitation agricole La Pierre tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à la commune de Crevin et à la société civile d'exploitation agricole La Pierre.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2017, où siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Massiou, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 février 2017.
Le rapporteur,
B. MASSIOULe président,
H. LENOIR
Le greffier,
C. GOY
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N° 15NT03692