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24/02/2017 | FRANCE | N°15NT02105

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 24 février 2017, 15NT02105


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail à lui verser la somme totale de 180 000 euros en réparation du préjudice qu'il soutient avoir subi du fait de la lettre en date du 9 décembre 2005 que lui a adressé l'agence française de sécurité sanitaire des aliments, qui serait à l'origine de son licenciement.

Par un jugement n° 1207278 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Nante

s a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail à lui verser la somme totale de 180 000 euros en réparation du préjudice qu'il soutient avoir subi du fait de la lettre en date du 9 décembre 2005 que lui a adressé l'agence française de sécurité sanitaire des aliments, qui serait à l'origine de son licenciement.

Par un jugement n° 1207278 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 6 juillet 2015 et le 23 juin 2016, M. D...H..., représenté par MeG..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 mai 2015 ;

2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Nantes pour qu'elle soit jugée au fond ;

3°) de mettre à la charge de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier parce que les premiers juges n'ont pas visé ni mentionné la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 dont ils ont fait application pour écarter des débats certaines des pièces produites ;

- l'affaire doit être renvoyée devant le tribunal administratif pour lui permettre de bénéficier d'un double degré de juridiction, au regard notamment des résultats à venir d'instances qu'il a engagées, susceptibles d'avoir une influence sur le règlement du litige ;

- si la cour décide d'évoquer l'affaire, elle doit rendre un jugement avant-dire droit pour lui permettre de présenter ses observations sur le fond du dossier.

Par des mémoires en défense enregistrés le 16 février et le 18 juillet 2016, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête de M.H... ;

2°) à titre subsidiaire, d'évoquer l'affaire, d'écarter des débats les pièces couvertes par le secret professionnel, et de rejeter la demande présentée en première instance par M. H... ;

3°) de mettre à la charge de M. H...la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est pas irrégulier dès lors que les premiers juges ont clairement indiqué faire application des dispositions régissant le secret professionnel qui protège la correspondance entre un avocat et son client ;

- l'évocation de l'affaire ne privera pas le requérant du double degré de juridiction car les premiers juges ont pris position sur le fond du litige ;

- M.H..., qui est l'appelant, a tout loisir de présenter son argumentation sur le fond du litige ;

- elle sollicite, sur le fond du litige, le bénéfice de ses écritures de première instance.

Les parties ont été informées par une lettre du 26 septembre 2016 que l'affaire était susceptible, à compter du 2 novembre 2016, de faire l'objet d'une clôture d'instruction à effet immédiat en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

La clôture de l'instruction a été fixée au 3 novembre 2016 par une ordonnance du même jour en application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions juridiques et judiciaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Bris,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- les observations de Me A...G..., substituant Me B...G..., représentant M. H...et de MeC..., substituant MeE..., représentant l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation et de l'environnement et du travail.

Une note en délibéré présentée par Me G...a été enregistrée le 15 février 2017.

1. Considérant que M. H...a été engagé le 16 mars 1998 par la société coopérative Arco, aux droits de laquelle vient désormais la société coopérative Cooperl Arc Atlantique, en qualité de vétérinaire, titulaire d'un mandat sanitaire délivré par le préfet d'Ille-et-Vilaine ; qu'il a demandé au tribunal administratif de Nantes que l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), aux droits de laquelle vient désormais l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation de l'environnement et du travail, soit condamnée à lui verser les sommes de 150 000 euros et 30 000 euros au titre respectivement des préjudices matériel et moral qu'il estime avoir subis du fait de son licenciement le 30 juin 2006, provoqué selon lui par la communication à son employeur de deux courriers que lui avait adressé l'AFSSA les 9 décembre 2015 et 13 juin 2006 ; qu'il relève appel du jugement du 7 mai 2015 par lequel cette juridiction a rejeté sa demande ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application " ; qu'il ressort des termes du jugement attaqué que pour écarter des débats certaines pièces versées au dossier, le tribunal administratif de Nantes a fait application de l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions juridiques et judiciaires ; que ce texte n'est toutefois mentionné ni dans les visas du jugement ni repris dans ses motifs ; qu'ont ainsi été méconnues les prescriptions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ; que, par suite, M. H...est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;

3. Considérant que, bien que M. H...ait déclaré dans sa requête s'opposer à l'évocation, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, conformément aux conclusions de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation et de l'environnement, et alors que l'intéressé avait tout loisir pour présenter son argumentation au fond, argumentation d'ailleurs développée en première instance et sur laquelle le tribunal s'est prononcée, d'évoquer le litige et de statuer immédiatement sur sa demande présentée devant le tribunal administratif de Nantes ;

Sur la demande de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail d'écarter certaines pièces des débats :

4. Considérant que l'article R. 611-1 du code de justice administrative prévoit que : " la requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes " ; qu'aux termes de l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 : " En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention " officielle ", les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel. " ;

5. Considérant qu'en l'absence de disposition le prévoyant expressément, les dispositions précitées de l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 ne peuvent faire obstacle au pouvoir et au devoir qu'a le juge administratif de joindre au dossier, sur production spontanée d'une partie, des éléments d'information, et de statuer au vu de ces pièces après en avoir ordonné la communication pour en permettre la discussion contradictoire ; qu'il suit de là que si l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation de l'environnement et du travail soutient que plusieurs échanges entre son avocat et lui-même ou des confrères ont été produits par M. H... en méconnaissance de ces dispositions, les conclusions tendant à ce que ces pièces soit écartées des débats doivent être rejetées, alors même qu'elles seraient couvertes par le secret professionnel protégé par les dispositions précitées ;

Sur la responsabilité de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail :

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes le 9 février 2010, confirmé par la Cour de cassation le 5 juillet 2011, que le licenciement de M. H...était justifié par une cause réelle et sérieuse constituée de trois motifs invoqués par son employeur dans son courrier du 30 juin 2006, à savoir, d'une part, son action auprès de plusieurs organismes institutionnels pour que des analyses supplémentaires soient effectuées en vue de démontrer l'existence d'une souche d'une infection de type Nipah dans les élevages de porc dont il avait la charge alors que l'AFSSA lui avait clairement indiqué dans un courrier du 9 décembre 2005, co-signé par cinq responsables, que les tests effectués n'avaient pas mis en évidence ce virus et qu'il n'était pas justifié de poursuivre les investigations en ce sens, d'autre part, son attitude vis-à-vis de ses collègues vétérinaires qu'il a impliqués dans ses démarches sans les en informer, et, enfin, le fait que cinq éleveurs ont demandé, entre février 2005 et avril 2006, à ce que le suivi sanitaire de leur élevage ne soit plus assuré par lui ; que, dans ces conditions et sur la base de ces éléments connus de chacune des parties, la circonstance que dans ses courriers des 9 décembre 2005 et 13 juin 2006, dont elle a adressé copie à l'employeur de M. H..., l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments lui ait rappelé qu'il était important " avant d'alerter de manière inconsidérée de multiples autorités, de bien étayer la démarche diagnostique et épidémiologique ", si elle pouvait effectivement être regardée comme une critique, au demeurant très mesurée, de sa pratique professionnelle, ne saurait en aucune façon être considérée comme étant à l'origine de la procédure de licenciement dont il a fait l'objet et de l'interruption du processus de rupture transactionnelle, plus favorable pour lui, qu'il avait engagé avec son employeur au cours de l'été 2005 ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M.H..., en l'absence de lien de causalité établi entre la faute alléguée et le préjudice résultant de son licenciement, n'est pas fondé à demander la condamnation de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail à l'indemniser des préjudices matériel et moral qu'il estime avoir subis du fait de son licenciement ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, le versement à M. H...de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée au même titre par l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1207278 du tribunal administratif de Nantes en date du 7 mai 2015 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. H...devant le tribunal administratif de Nantes et ses conclusions présentées devant la cour sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail tendant à ce que certaines pièces soient écartées des débats et au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... H...et à l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail.

Délibéré après l'audience du 9 février 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président assesseur,

- M. Gauthier, premier conseiller,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 février 2017.

Le rapporteur,

I. Le BrisLe président,

O. Coiffet

Le greffier,

M. F...

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°15NT02105


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02105
Date de la décision : 24/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: Mme Isabelle LE BRIS
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL PUBLI-JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-02-24;15nt02105 ?
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