Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté implicitement son recours contre la décision du 14 janvier 2013, par laquelle les autorités consulaires françaises à Dakar ont refusé de faire droit à sa demande de visa de long séjour.
Par un jugement n° 1305436 du 30 septembre 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 2 décembre 2015, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 30 septembre 2015 ;
2°) d'annuler la décision du 14 janvier 2013 et la décision implicite de rejet ;
3°) d'enjoindre aux autorités consulaires françaises à Dakar de réexaminer sa demande et de lui délivrer un visa de long séjour dans un délai de deux mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 111-6, L. 411-4 et L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision consulaire et la décision du 8 mai 2013 sont entachées d'une insuffisance de motivation ;
- elles sont entachées d'une erreur sur la qualification juridique des faits ; il a obtenu le regroupement familial ; cette dernière décision, créatrice de droit, a été retirée illégalement ; l'administration a estimé à tort que sa situation relevait d'une demande de visa ordinaire, alors qu'elle faisait suite à une autorisation de regroupement familial ;
- ces décisions sont entachées d'une erreur d'appréciation, en ce que l'authenticité de sa filiation avec ses parents est établie ;
- ces décisions méconnaissent l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la simple erreur administrative portant sur l'extrait de jugement supplétif de naissance n°352 du 11 février 1999 ne suffit pas à établir le caractère inauthentique des actes d'état civil ;
- ces décisions méconnaissent les articles L. 411-4 et L. 314-11 du même code ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'alinéa 10 du préambule de la constitution de 1946.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- et les observations de MmeF..., dûment mandatée par M. D...pour le représenter à l'audience.
Une note en délibéré a été produite pour M. D...le 13 juin 2017, après l'audience.
1. Considérant que M. D..., ressortissant sénégalais, relève appel du jugement du 30 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté sa demande de visa long séjour ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que les premiers juges ont estimé, à juste titre, que les conclusions de M. D... dirigées contre la décision des autorités consulaires françaises du 14 janvier 2013, à laquelle s'est substituée la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, étaient irrecevables ; que par suite, le requérant ne peut utilement soutenir que le tribunal administratif aurait omis de statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 411-4 et L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, invoqué par l'intéressé à l'encontre de cette seule décision ; que, par ailleurs, contrairement à ce que soutient le requérant, les premiers juges ont examiné le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 111-6 de ce code, notamment aux points 4 et 5 du jugement attaqué ; que, par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que ce jugement serait entaché d'une omission à statuer ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 14 janvier 2013 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une commission placée auprès du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l'immigration est chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires. La saisine de cette commission est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier " ; qu'il résulte de ces dispositions que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France se substitue à celle qui a été prise par les autorités consulaires ; que, par suite, les conclusions du requérant tendant à l'annulation de la décision des autorités consulaires françaises à Dakar du 14 janvier 2013 sont irrecevables, et ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :
4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'article L. 211-2, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur que " par dérogation aux dispositions de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, les décisions de refus de visa d'entrée en France, prises par les autorités diplomatiques ou consulaires, ne sont pas motivées sauf dans les cas où le visa est refusé à un étranger appartenant à l'une des catégories suivantes et sous réserve de considérations tenant à la sûreté de l'Etat : (...) 4° Bénéficiaires d'une autorisation de regroupement familial (...) " ; que si, en vertu de ces dispositions, la décision de refus de visa opposée à M. D..., ressortissant sénégalais bénéficiant d'une autorisation de regroupement familial, devait en principe être motivée, il ressort des dispositions de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 qu'une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation ; que dans cette hypothèse, l'article 5 de la même loi prévoit qu'à la demande de l'intéressé, les motifs de toute décision implicite de rejet doivent lui être communiqués dans le mois suivant cette demande ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant aurait demandé à la commission de recours la communication des motifs du refus implicite de sa demande de visa ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision implicite contestée ne saurait être retenu ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " L'enfant pouvant bénéficier du regroupement familial est celui qui répond à la définition donnée au dernier alinéa de l'article L. 314-11. / Le regroupement familial est sollicité pour l'ensemble des personnes désignées aux articles L. 411-1 à L. 411-3. Un regroupement partiel peut être autorisé pour des motifs tenant à l'intérêt des enfants. " ; qu'aux termes de l'article L. 314-11 de ce code : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; (...) / L'enfant visé aux 2° (...) du présent article s'entend de l'enfant ayant une filiation légalement établie, y compris l'enfant adopté, en vertu d'une décision d'adoption, sous réserve de la vérification par le ministère public de la régularité de cette décision lorsqu'elle a été prononcée à l'étranger. " ; qu'aux termes de l'article L. 111-6 du même code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil (...) " ; qu'aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité " ; qu'ainsi, lorsque le préfet a autorisé la venue d'un étranger en France dans le cadre de la procédure du regroupement familial, l'autorité diplomatique ou consulaire ne peut légalement refuser de délivrer au bénéficiaire de la mesure de regroupement un visa d'entrée sur le territoire français qu'en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur des motifs d'ordre public ; que figure au nombre de ces motifs le défaut de valeur probante des documents destinés à établir le lien de filiation entre le demandeur de visa et le membre de la famille que celui-ci entend rejoindre ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5, que contrairement à ce que soutient M.D..., la seule circonstance qu'il ait été bénéficiaire d'une décision favorable de regroupement familial prise le 1er juin 2011 par le préfet des Yvelines n'implique pas nécessairement la délivrance d'un visa de long séjour ; que dans leur décision du 14 janvier 2013, les autorités consulaires françaises ont explicitement fait référence à la qualité de bénéficiaire du regroupement familial de l'intéressé ; que si la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur le caractère apocryphe des documents d'état civil présentés par M. D... à l'appui de sa demande de visa ainsi que sur l'absence d'élément permettant de caractériser sa filiation par la possession d'état, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle n'aurait pas pris en compte sa qualité de bénéficiaire du regroupement familial ; que d'ailleurs si à l'appui de sa demande de visa de long séjour, M. D... a produit une copie littérale de l'acte de naissance n°316 de l'année 1999 dressé le 5 mars 1999 sur déclaration du jugement supplétif de naissance n°352 du tribunal départemental de Tambacounda du 17 février 1999 ainsi qu'un acte d'authentification du 29 janvier 2013, signé par l'officier d'état civil de la commune de Tambacounda, faisant état de la transcription de cet acte de naissance le 5 mars 1999, le ministre de l'intérieur, après avoir interrogé le consulat général de France à Dakar le 31 juillet 2012, a produit en première instance un extrait des minutes du greffe du tribunal départemental de Tambacounda, daté du 8 août 2012, indiquant que le jugement n°352 a été rendu le 11 février 1999 et non le 17 février 1999 et ne concerne pas M. D... mais M. B... C..., né le 12 mars 1989 ; que si M. D...produit pour la première fois en appel, un extrait du registre des actes de naissance n°316 de l'année 1999 daté du mois de juin 2010 faisant référence au jugement supplétif n°352 de l'année 1999 ainsi qu'un extrait des minutes du greffe du tribunal départemental de Tambacounda, daté du 29 juin 2010, concernant le jugement supplétif n° 352 qui aurait été rendu le 17 février 1999 et qui le concernerait, ces documents ne suffisent pas à contredire sérieusement l'authenticité des justificatifs produits antérieurement par le ministre de l'intérieur ; qu'enfin, aucun élément au dossier ne permet d'établir la filiation de M. E...D...à l'égard de son père allégué par la possession d'état ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée, qui contrairement à ce qu'il allègue n'a pas eu pour effet de retirer illégalement la décision préfectorale du 1er juin 2011, serait entachée d'une erreur sur la qualification juridique des faits, d'une erreur d'appréciation et serait contraire aux dispositions précitées des articles L. 111-6, L. 411-4 et L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en dernier lieu, que M. D...se borne à reprendre en appel, sans apporter plus de précisions ou de justifications, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'alinéa 10 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946 ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens inopérants par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 13 juin 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Buffet, premier conseiller,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2017.
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT03645