Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...et G... D...ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 20 mars 2014 par lequel le maire de Carnac a délivré un permis de construire à la société Lamotte Constructeur, afin de procéder à l'édification d'un foyer de personnes âgées sur les parcelles cadastrées section BD n° 254, n° 255, n° 463 et n° 913 situées au 6, rue du Tumulus à Carnac, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux.
Par un jugement n° 1404442 du 8 avril 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er juin et 4 juillet 2016, M. et MmeD..., représentés par MeC..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 8 avril 2016 ;
2°) d'annuler le permis de construire du 20 mars 2014 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Carnac et de la société Lamotte Constructeur, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en première instance et de 3 000 euros au titre des frais exposés en cause d'appel.
Ils soutiennent que :
- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé et a rejeté à tort leur demande comme irrecevable ; leur demande n'était pas tardive, compte tenu de la manoeuvre qu'a constitué le choix du lieu d'implantation du poteau et de l'omission des voies et délais de recours sur le panneau d'affichage ;
- le permis méconnaît les articles UA3, UA6, UA7, UA10 et UA11 du plan d'occupation des sols.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2016, la société Lamotte Constructeur, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. et MmeD..., sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés en première instance et de 3 000 euros au titre des frais exposés en cause d'appel.
Elle soutient que le jugement attaqué n'est pas entaché de défaut de motivation et que la demande de M. et Mme D...était tardive, ainsi que l'ont apprécié à bon droit les premiers juges ; subsidiairement aucun des moyens de légalité dirigés contre le permis de construire qui lui a été délivré n'est fondé, une éventuelle méconnaissance de l'article UA 10 ne constituant tout au plus qu'une adaptation mineure par rapport aux règles du document local d'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2016, la commune de Carnac, représentée par la SCP Aleo-Lesage, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de
5 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme D...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,
- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,
- et les observations de Me Le Derf-Danielreprésentant la société Lamotte constructeur, et celles de MeE..., représentant la commune de Carnac.
1. Considérant que par arrêté du 20 mars 2014, le maire de la commune de Carnac (Morbihan) a délivré un permis de construire à la société Lamotte Constructeur, afin de procéder à la démolition de maisons individuelles et à l'édification d'un foyer de personnes âgées d'une superficie de 4 268 m², comportant 81 appartements et des locaux d'accueil et de services, sur les parcelles cadastrées section BD n° 254, n° 255, n° 463 et n° 913 situées au 6, rue du tumulus à Carnac ; que M. et Mme D...relèvent appel du jugement en date du 8 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté comme tardive et par suite irrecevable leur demande tendant à l'annulation de ce permis ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : "Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 " ; qu'aux termes de ce dernier article : "Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...)Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage." ; et qu'aux termes de l'article A. 424-16 du même code, pris pour l'application de ces dispositions : "Le panneau (...) indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, la date et le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. Il indique également, en fonction de la nature du projet : a) Si le projet prévoit des constructions, la surface de plancher autorisée ainsi que la hauteur de la ou des constructions, exprimée en mètres par rapport au sol naturel ; (...) d) Si le projet prévoit des démolitions, la surface du ou des bâtiments à démolir" ; qu'enfin aux termes de l'article A. 424-17 : " Le panneau d'affichage comprend la mention suivante : " Droit de recours : / " Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l'urbanisme) " ;
3. Considérant que si la société Lamotte Constructeur a produit devant les premiers juges trois procès-verbaux, établis à sa demande par un huissier de justice les 26 mars, 25 avril et 28 mai 2014, aux fins de constater et d'illustrer, par des clichés, l'affichage du permis de construire litigieux sur le terrain d'assiette, ni les mentions littérales de ces procès-verbaux, ni les photographies qui y sont annexées, illisibles sur ce point, n'attestent de la présence sur ce panneau, dans les formes prévues à l'article A. 424-17 du code de l'urbanisme, des mentions relatives au droit de recours des tiers ; que l'attestation établie pour les besoins du contentieux par le même huissier le 7 novembre 2014, soit plusieurs mois après les faits constatés, n'a pas la valeur probante qui s'attache à un procès-verbal de constat d'huissier et ne peut à elle seule permettre de tenir pour acquise la présence de cette mention, laquelle constitue un élément indispensable pour permettre aux tiers de préserver leurs droits ; que dès lors, le délai de recours contentieux prévu par les dispositions de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme n'ayant pas couru, M. et Mme D...sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté comme tardive leur demande en annulation de ce permis ; que compte tenu de cette irrégularité, le jugement attaqué ne peut qu'être annulé ;
4. Considérant qu'il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme D...devant le tribunal administratif de Rennes ;
Sur les conclusions à fins d'annulation :
5. Considérant, en premier lieu, que le dossier de permis comporte non seulement des vues d'insertion, dont les requérants critiquent l'insuffisance, mais encore des documents graphiques et photographiques, l'ensemble permettant d'apprécier l'impact du projet dans son environnement proche comme lointain, sans préjudice de la description détaillée du programme que donne la notice architecturale ; qu'ainsi le service instructeur a pu apprécier l'insertion du projet dans le site ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que M. et Mme D...ne démontrent nullement que la rue Colary, sur laquelle se situe l'accès automobile du foyer pour personnes âgées en litige, présenterait une largeur de moins de 3,50 mètres, selon ce qu'imposent les dispositions de l'article UA 3 du plan d'occupation des sols ; que ces dernières dispositions ne réglementant que les accès au terrain et non la voirie interne au terrain d'assiette, les requérants ne peuvent utilement invoquer la largeur prétendument insuffisante de l'allée conduisant, à partir de cette rue, au parking de l'ensemble à édifier ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte du dossier de demande, et notamment du plan de masse, qu'en ce qui concerne la façade du terrain donnant sur la rue du tumulus, la société Lamotte Constructeur prévoit de prolonger, sur l'emplacement de la maison à démolir, le mur de pierre adjacent qui borde la voie ; qu'est ainsi assurée la continuité des espaces publics, selon la dérogation autorisée par l'article UA 6 du règlement aux marges de recul imposées par ces dispositions en cas d'implantation des constructions en retrait de l'emprise de la voie publique ;
8. Considérant, en quatrième lieu, que selon les dispositions de l'article UA7 du plan d'occupation des sols les constructions peuvent être implantées, soit sur les limites séparatives, soit en retrait d'une distance égale à la moitié de la hauteur mesurée à l'égout du toit, avec un minimum de 3 mètres ;
9. Considérant que M. et Mme D...ne sont pas fondés à invoquer la méconnaissance de cette règle, s'agissant de la façade donnant sur l'allée des Lucioles, alors que sont seules applicables relativement à cette voie publique les dispositions de l'article UA6 ; qu'en ce qui concerne la façade sud du bâtiment B, elle est implantée, pour l'essentiel, sur la limite séparative avec les parcelles cadastrées BD 579 et 591 et, à l'extrémité ouest de cette façade, en retrait par rapport à la limite séparative avec la parcelle BD 579, à une distance qui, d'après le plan de masse, varie entre 4,20 et 4,60 m ; qu'à cet endroit et d'après le plan PC5(d) Elévation Ouest (2), la hauteur mesurée à l'égout du toit, soit la différence entre l'altitude du terrain naturel 14,53 m et le niveau de cet égout, soit 22,40 m est de 7,87 m ; que la distance minimale de retrait à respecter, qui s'établit en conséquence à 3,94 m, n'est donc pas méconnue ; que la façade Est est implantée en retrait de la limite séparative avec la parcelle BD 961 à une distance qui, d'après le plan de masse, est comprise entre au moins 4,40 m et au plus 10,50 m ; que compte tenu d'une hauteur de cette façade à l'égout du toit n'excédant pas 8,60 m, la distance de retrait minimale à cet endroit, soit 4,30 m, est respectée ; qu'enfin, en ce qui concerne la limite sud de la façade Ouest, le plan de masse montre que la distance avec la limite séparative de la parcelle BD 251 est de presque 12 m, supérieure à la moitié de la hauteur mesurée à l'égout du toit ; qu'ainsi les dispositions de l'article UA7 du règlement du plan d'occupation des sols ne sont pas méconnues ;
10. Considérant, en cinquième lieu, que les requérants ne sont pas fondés à alléguer que la règle issue de l'article UA 11 du plan d'occupation des sols, qui impose une pente de toiture comprise entre 40° et 50°, aurait été méconnue, dès lors qu'ils prennent en compte, dans leur démonstration, la présence de terrassons, alors que ces derniers sont expressément assimilés par les dispositions du plan d'occupation des sols qu'ils invoquent à des égouts de toiture ;
11. Considérant, en sixième lieu, que les terrassons qui couvrent les logements situés au deuxième étage du bâtiment A, et viennent immédiatement en prolongement de la toiture de ce bâtiment, ne peuvent être assimilés aux toitures terrasses ou aux faibles pentes, formant nécessairement des couvertures d'un seul tenant, telles que l'article UA 10 en laisse la possibilité en secteur UAb, tout en en limitant la hauteur à 3,50 m ; que dès lors le moyen tiré du dépassement de cette dernière hauteur ne peut qu'être écarté ;
12. Considérant, en septième lieu, que l'article 10 du règlement du secteur UAb dans lequel se situe le terrain d'assiette du projet fixe la hauteur maximale des constructions à 9 mètres à l'égout de toiture et 13 mètres au faitage ;
13. Considérant que M. et Mme D...soutiennent que la lecture du plan PC5(b) - élévation sud - du dossier de demande fait apparaître dans sa partie droite un terrain naturel à la cote de 13,40 et un égout du toit à la cote 22,49 et un faitage à la cote 26,86, soit des hauteurs respectives de 9,09 et 13,46 mètres méconnaissant la règle posée par le plan d'occupation des sols ; que toutefois ce moyen ne peut qu'être écarté dès lors qu'il résulte de la combinaison de ce plan avec le plan de masse PC2(a) que les niveaux de la construction au faîtage et à l'égout du toit relevés par les requérants sont ceux du bâtiment A du projet, cependant que le niveau du terrain naturel pris en compte par eux est celui applicable à l'extrémité sud du bâtiment B ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à demander l'annulation du permis de construire délivré le 20 mars 2014 par le maire de Carnac à la société Lamotte Constructeur ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Carnac et de la société Lamotte Constructeur, qui n'ont pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demandent M. et Mme D...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme D...le versement d'une somme de 750 euros à la commune de Carnac ainsi que d'une somme de 750 euros à la société Lamotte Constructeur au titre des frais exposés par les défendeurs pour la seule instance devant la cour administrative d'appel, le surplus des conclusions présentées par ces dernières au titre des frais irrépétibles exposés en première instance étant rejeté ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 8 avril 2016 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme D...devant le tribunal administratif de Rennes et leurs conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : M. et Mme D...verseront, d'une part à la commune de Carnac, et d'autre part à la société Lamotte Constructeur, une somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Carnac et la société Lamotte Constructeur au titre des frais exposés en première instance et non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...et G...D..., à la commune de Carnac et à la société Lamotte Constructeur.
Délibéré après l'audience du 21 juin 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Mony, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 juillet 2017.
Le rapporteur,
J. FRANCFORTLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de la Cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°16NT01797