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26/12/2018 | FRANCE | N°17NT00476

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 26 décembre 2018, 17NT00476


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2015 par lequel le maire de la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe a délivré à la Société Caennaise de Développement Immobilier (SCDI) La Caennaise, un permis de construire un immeuble comportant vingt-cinq logements et une salle commune au sein de la résidence d'Ardenne située rue Albert Camus à Saint-Germain-la-Blanche-Herbe ainsi que la décision du 29 septembre 2015 par laquelle le maire a rejeté leu

r recours gracieux.

Les parties ont été informées de ce que le tribunal ét...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2015 par lequel le maire de la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe a délivré à la Société Caennaise de Développement Immobilier (SCDI) La Caennaise, un permis de construire un immeuble comportant vingt-cinq logements et une salle commune au sein de la résidence d'Ardenne située rue Albert Camus à Saint-Germain-la-Blanche-Herbe ainsi que la décision du 29 septembre 2015 par laquelle le maire a rejeté leur recours gracieux.

Les parties ont été informées de ce que le tribunal était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans l'attente de la délivrance d'un permis de construire modificatif visant à régulariser le vice tenant à l'absence d'autorisation de l'architecte des bâtiments de France.

La commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe a produit un arrêté du 24 novembre 2016 portant permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1502284 du 15 décembre 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de M. et MmeB....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 février 2017 et le 30 mai 2017, M. et Mme B..., représentés par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 15 décembre 2016 ;

2°) d'annuler les arrêtés du maire de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe du 20 juillet 2015 et du 24 novembre 2016 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le permis de construire modificatif du 24 novembre 2016 n'a pu régulariser le vice dont est entaché le permis de construire du 20 juillet 2015 dès lors que le second avis émis le 23 novembre 2016 par lequel l'architecte des bâtiments de France estime que le projet n'est pas situé dans le champ de visibilité de l'Abbaye d'Ardenne est entaché d'illégalité ;

- l'appréciation portée par l'architecte des bâtiments de France, dans son avis du 23 novembre 2016, quant à l'insertion du projet avec les lieux avoisinants est erronée ;

- les dispositions du 2° de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme ont été méconnues dès lors que la notice du projet architectural ne mentionne pas l'existence d'un édifice protégé ; en outre, le dossier de la demande de permis présente des incohérences s'agissant du nombre de niveaux du bâtiment projeté ;

- l'affichage du permis de construire est irrégulier, la hauteur de la construction projetée n'étant pas mentionnée ;

- l'implantation du projet n'est pas conforme aux dispositions de l'article U7 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- les dispositions de l'article U11 du règlement du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme sont méconnues ;

- le permis aurait dû être assorti de prescriptions visant à ce que la construction ne soit entreprise qu'après l'achèvement des travaux de réhabilitation portant sur les autres bâtiments de la résidence ;

- le projet autorisé ne respecte pas les dispositions de l'article U12 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- la pétitionnaire a, par une manoeuvre frauduleuse, induit l'administration en erreur quant à la destination de la salle prévue par le projet.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 13 avril 2017 et le 30 juin 2017, la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme B...d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le moyen tiré de l'irrégularité de l'affichage est sans incidence sur la légalité du permis de construire ;

- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2017, la SCDI La Caennaise, représentée par la SCP Créance Ferretti Hurel, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme B...d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le moyen tiré de l'irrégularité de l'affichage est sans incidence sur la légalité du permis de construire ;

- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un courrier du 11 octobre 2018, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de surseoir à statuer dans l'attente de la décision de l'architecte des bâtiments de France relative à l'autorisation préalable, prévue par les articles L. 621-31 du code du patrimoine et R. 425-1 du code de l'urbanisme, s'agissant d'un projet situé dans le champ de visibilité de l'Abbaye d'Ardenne, monument classé.

Par des mémoires, enregistrés le 19 octobre 2018 et le 3 décembre 2018, M. et Mme B... concluent aux mêmes fins que précédemment et demandent, en outre, l'annulation du permis de construire modificatif du 6 novembre 2018.

Ils soutiennent que, d'une part, l'avis de l'architecte des bâtiments de France ayant déjà été sollicité et étant entaché d'illégalité, il ne peut être sursis à statuer en vue de la régularisation du permis de construire en litige et que, d'autre part, le permis modificatif du 6 novembre 2018 ne purge pas l'ensemble des illégalités affectant le permis initial.

Par des mémoires, enregistrés le 6 novembre 2018 et le 5 décembre 2018, la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe persiste dans ses précédentes écritures.

Elle fait, en outre, valoir que, le 5 novembre 2018, l'architecte des bâtiments de France a donné son accord au projet et qu'un permis modificatif a été délivré à la société pétitionnaire le 6 novembre 2018 de sorte que le vice éventuel entachant le permis contesté est désormais définitivement purgé.

Par un mémoire, enregistré le 8 novembre 2018, la SCDI La Caennaise conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire.

Elle indique s'associer aux observations présentées par la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe relatives à l'application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du patrimoine ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bougrine,

- et les conclusions de M. Derlange, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe a, par un arrêté du 20 juillet 2015, délivré à la Société Caennaise de Développement Immobilier (SCDI) La Caennaise un permis de construire un immeuble de vingt-cinq logements destinés à la location. Cet arrêté a été contesté par les époux B...devant le tribunal administratif de Caen. Au cours de l'instance et, postérieurement au courrier par lequel le tribunal a invité les parties à présenter des observations sur le principe de l'application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe a versé aux débats un nouvel avis de l'architecte des bâtiments de France, émis le 23 novembre 2016, et un arrêté du maire de la commune du 24 novembre 2016 portant permis de construire modificatif. M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 15 décembre 2016 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes du premier alinéa de l'article L. 621-31 du code du patrimoine, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsqu'un immeuble est adossé à un immeuble classé ou situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques, il ne peut faire l'objet, tant de la part des propriétaires privés que des collectivités et établissements publics, d'aucune construction nouvelle ( ...) de nature à en affecter l'aspect, sans une autorisation préalable. ". Le premier alinéa du I de l'article L. 621-32 de ce code prévoit, dans sa rédaction applicable : " Le permis de construire, le permis de démolir, le permis d'aménager ou l'absence d'opposition à déclaration préalable tient lieu de l'autorisation prévue au premier alinéa de l'article L. 621-31 si l'architecte des Bâtiments de France a donné son accord. ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable : " Lorsque le projet est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques ou dans celui d'un parc ou d'un jardin classé ou inscrit ayant fait l'objet d'un périmètre de protection délimité dans les conditions fixées à l'article L. 621-30 du code du patrimoine, ou porte sur un immeuble adossé à un immeuble classé au titre des monuments historiques, le permis de construire, le permis d'aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 621-31 du code du patrimoine dès lors que la décision a fait l'objet de l'accord de l'architecte des Bâtiments de France. ". D'autre part, aux termes de l'article L. 621-30 du code du patrimoine, dans sa version applicable au litige : " (...) / Est considéré (...) comme étant situé dans le champ de visibilité d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques tout autre immeuble, nu ou bâti, visible du premier ou visible en même temps que lui et situé dans un périmètre déterminé par une distance de 500 mètres du monument. : (...) ". Pour l'application de ces dispositions, la visibilité depuis un immeuble classé ou inscrit s'apprécie à partir de tout point de cet immeuble normalement accessible conformément à sa destination ou à son usage.

3. Dans le cas où l'administration lui transmet spontanément un permis modificatif en vue de la régularisation d'un vice de nature à entraîner l'annulation du permis attaqué, le juge peut prendre en considération ce nouvel acte sans être tenu de surseoir à statuer, dès lors qu'il a préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur la question de savoir s'il permet une régularisation en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme. À cette occasion, il appartient à la partie qui poursuit l'annulation du permis initial, si elle s'y croit fondée, de contester la légalité du permis modificatif, ce qu'elle peut faire utilement par des moyens propres et au motif que le permis initial n'était pas régularisable.

4. Dans son avis du 1er juillet 2015, l'architecte des bâtiments de France a estimé que le projet litigieux n'était pas situé dans le champ de visibilité de l'abbaye d'Ardenne, monument historique classé le 28 août 1918 et le 21 octobre 1947. Il ressort toutefois des pièces du dossier et notamment du constat d'huissier dressé le 25 février 2016 que, tant depuis le mur d'enceinte de l'abbaye, élément protégé, que depuis l'entrée du parc de stationnement destiné au public, les niveaux supérieurs du bâtiment dans le prolongement duquel la construction projetée est située sont visibles. En outre, le terrain d'assiette du projet, lequel présente une hauteur de plus de seize mètres, est séparé de l'abbaye par des parcelles majoritairement non bâties puis par une bande d'habitat pavillonnaire de faible hauteur. Ainsi, la construction projetée, dont il est constant qu'elle est implantée à moins de 500 mètres de l'abbaye d'Ardenne, entre dans le champ de visibilité de ce monument protégé. Il s'ensuit que la délivrance du permis de construire sollicité par la SCDI La Caennaise était subordonnée à l'accord préalable de l'architecte des bâtiments de France. Si ce dernier a, par un avis du 23 novembre 2016, estimé que " compte tenu de ses caractéristiques architecturales et urbaines le projet s'insère sans difficulté dans son environnement ", il ne peut être regardé, alors qu'il a par ailleurs indiqué, dans ce même avis, que le projet n'était pas visible depuis l'abbaye et que " l'accord de l'architecte des bâtiments de France [n'était] pas requis ", comme ayant valablement apprécié les atteintes que le projet serait susceptible de porter à l'abbaye d'Ardenne ni, par suite, comme ayant donné l'autorisation exigée par les dispositions précitées de l'article L. 621-31 du code du patrimoine. Ainsi, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le permis de construire modificatif délivré le 24 novembre 2016, au regard de l'avis de l'architecte des bâtiments de France du 23 novembre 2016, n'a pas eu pour effet de régulariser, au cours de la première instance, l'illégalité dont est entaché le permis de construire contesté du 20 juillet 2015. Toutefois, au cours de l'instance d'appel, par un avis du 5 novembre 2018, l'architecte des bâtiments de France a, après avoir relevé que l'immeuble concerné par le projet était situé dans le champ de visibilité de l'abbaye d'Ardenne, donné son accord. Le maire de la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe a pris, le 6 novembre 2018, un permis de construire modificatif, au vu de cet accord, régularisant ainsi le permis contesté par M. et MmeB.... Dans ces conditions, le moyen tiré de l'illégalité des avis de l'architecte des bâtiments de France du 1er juillet 2015 et du 23 novembre 2016 doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. (...) ".

6. La circonstance que le dossier de la demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

7. D'une part, la commune indique sans être contredite que, le 16 décembre 2014, un premier permis de construire concernant le projet litigieux a été délivré à la SCDI La Caennaise et a fait l'objet d'un recours contentieux formé par M. et MmeB.... A la demande de sa bénéficiaire, ce permis a été retiré en raison de l'absence de consultation de l'architecte des bâtiments de France qu'impliquait la présence, à moins de 500 mètres du projet, de l'abbaye d'Ardenne. Le permis de construire contesté du 20 juillet 2015 a été délivré après l'instruction d'une nouvelle demande au cours de laquelle l'architecte des bâtiments de France a été saisi. Ainsi, alors même que la notice architecturale jointe à cette demande ne mentionne pas la présence dans l'environnement du projet de cet édifice classé, le service instructeur en avait nécessairement connaissance. D'autre part, la mention, dans la notice descriptive, d'" un immeuble de 5 niveaux de logement posé sur un socle comprenant le hall d'entrée, les locaux communs, un ensemble de caves des logements et une salle commune à destination des locataires " ne présente pas de contradiction avec l'indication de six niveaux dans le formulaire de la demande. Au demeurant, les autres pièces du dossier de la demande, notamment les plans de coupe ainsi que les six plans de niveau, permettaient de connaître sans ambiguïté le nombre de niveaux de l'immeuble projeté. L'arrêté contesté fait d'ailleurs état d'un immeuble " sur 6 niveaux ". Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le dossier de la demande de permis de construire est insuffisant et imprécis doit être écarté.

8. En troisième lieu, les conditions dans lesquelles l'existence d'un permis de construire est, au moyen de l'affichage prévu par les dispositions des articles R. 600, R. 424-15 et A. 424-15 à A. 424-19 du code de l'urbanisme, portée à la connaissance des tiers se rattachent à des formalités nécessairement postérieures à son édiction. Par suite, si la méconnaissance des règles relatives à cet affichage est susceptible d'avoir des conséquences sur l'opposabilité de règles relatives à la recevabilité des recours contentieux, notamment celle du délai de recours, elle est en revanche sans incidence sur la légalité même du permis de construire affiché. Dès lors, et à la supposer avérée, la circonstance que la SCDI La Caennaise aurait procédé à un affichage irrégulier du permis de construire qui lui a été délivré le 20 juillet 2015 est sans incidence sur la légalité de cette autorisation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des règles d'affichage ne peut qu'être écarté.

9. En quatrième lieu, les dispositions de l'article U7 du règlement du plan local d'urbanisme sont relatives à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives. M. et Mme B...ne peuvent, dès lors, utilement s'en prévaloir pour critiquer l'implantation du projet par rapport à la sente piétonne qui borde à l'ouest son terrain d'assiette, laquelle constitue une voie publique au sens de l'article U6 du même règlement. La circonstance que cette voie déterminerait une limite de secteur ne saurait conférer à la limite de propriété le caractère de limite séparative au sens et pour l'application de l'article U7 du règlement du plan local d'urbanisme.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article U11 du règlement du plan local d'urbanisme, relatif à l'aspect extérieur des constructions : " Pour tous les secteurs de la zone U (...) les constructions ne devront pas porter atteinte, par leur aspect extérieur, au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ". Les règles que cet article fixe ont le même objet que celui des dispositions, également invoquées par les requérants, de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres. La légalité du permis de construire contesté doit en conséquence être appréciée au regard des dispositions de l'article U11 du règlement du plan local d'urbanisme. Celui-ci prévoit notamment, en ce qui concerne les façades, que " la largeur et la hauteur des percements devront être en cohérence avec celles des constructions environnantes. / La teinte des enduits ou peintures devra se rapprocher le plus possible du ton de la pierre locale. / Toute peinture ou élément coloré distinct de la tonalité générale de la construction, doit être motivé par la disposition des volumes ou des éléments architecturaux. ".

11. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage urbain ou naturel de nature à fonder un refus de permis de construire ou des prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il appartient à l'autorité administrative compétente d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site urbain ou naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

12. Le permis contesté porte sur la construction d'un nouvel immeuble au sein d'une résidence de logements locatifs comportant huit bâtiments édifiés dans les années 1970. Cette résidence est entourée, au nord et à l'est, de pavillons dépourvus d'intérêt particulier et, à l'ouest, d'un ensemble scolaire. Si le projet consiste en la construction d'un immeuble de six niveaux, d'une hauteur de 16,71 mètres, adossé à un des bâtiments existants de la résidence de quatre niveaux, il ressort de la notice descriptive que la conception architecturale du projet a intégré cette différence de niveau en recherchant un " effet de proue ", accentué par la pose du bâtiment sur un socle. Alors même que sa hauteur et sa forme se distinguent de celles des bâtiments de la résidence, le projet n'en affecte pas la cohérence d'ensemble. Il ne porte pas davantage atteinte au caractère de l'habitat pavillonnaire environnant. Par ailleurs, s'il ressort des pièces du dossier que les façades, principalement revêtues d'un enduit " pierre claire ", rappelant le ton de la pierre locale, seront en partie recouvertes d'un enduit de couleurs ocre et grise, ces teintes rappellent celles prévues pour la réfection des façades des bâtiments de la résidence existants, laquelle se traduit notamment par un jeu d'aplats de couleur rouge, des vitrages de balcon oranges ainsi que le revêtement de pignons en gris foncé, couleur se rapprochant de la teinte des couvertures des pavillons avoisinants. En outre, les parties de façade, en retrait, de couleur ocre ont pour objet de matérialiser le lien entre la construction projetée et le bâti existant auquel elle est accolée. L'utilisation des éléments colorés prévus par le projet trouve ainsi une justification dans la disposition des volumes et le parti architectural retenu. Ce dernier, cohérent avec le projet de réhabilitation de la résidence, ne porte, par ailleurs, pas atteinte au caractère des maisons avoisinantes. Enfin, la seule circonstance que le bâtiment envisagé comporte des balcons en saillie contrairement aux autres bâtiments de la résidence ne permet pas de regarder le projet comme non intégré au tissu bâti environnant. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article U11 du règlement du plan local d'urbanisme doit être écarté.

13. En sixième lieu, alors même que, par une délibération du 2 novembre 2013, le conseil municipal s'est prononcé favorablement au projet en litige sous réserve que la SCDI La Caennaise " confirme par écrit à engager les travaux de réhabilitation des bâtiments existants " de la résidence, aucune règle ni aucun principe ne permettait au maire d'assortir l'autorisation de construire sollicitée d'une prescription tenant à l'achèvement préalable de ces travaux de réhabilitation.

14. En septième lieu, aux termes des dispositions de l'article U12 du règlement du plan local d'urbanisme : " (...) / 2- Stationnement des véhicules légers : / (...) / - pour les immeubles d'habitation collective : / une place de stationnement par tranche de 60 m² de surface plancher hors oeuvre nette avec un minimum de une place par logement sur la parcelle. / (...) / - pour les salles de spectacle et de réunion : / des places de stationnement en fonction de la capacité d'accueil ; / (...) ".

15. Le projet prévoit la construction de 25 logements, portant à 209 le nombre total de logements au sein de la résidence ainsi qu'une salle commune destinée aux locataires, d'une superficie de 49 mètres carrés. L'aménagement projeté de 22 places de stationnement, s'ajoutant aux 231 places existantes, permet ainsi d'affecter une place de stationnement par logement et de disposer de 44 places pour la salle commune. Si les dispositions précitées de l'article U12 exigent que le nombre de places de stationnement prévues pour les salles de réunion soit suffisant au regard de la capacité d'accueil, elles n'imposent nullement que ce nombre corresponde exactement au nombre de personnes susceptibles d'être admises. Alors que la salle commune a vocation à être mise à la disposition des locataires de la résidence pour l'accueil d'activités associatives et la tenue de réunions, à l'exclusion de spectacles, les 44 places de stationnement disponibles sont, au regard de la capacité d'accueil de la salle, laquelle devrait accueillir un effectif maximum de 49 personnes, suffisantes. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article U12 du règlement du plan local d'urbanisme doit, par suite, être écarté.

16. En dernier lieu, le fait que la demande de permis ait indiqué que la salle commune était destinée à l'usage des locataires alors que, dans le cadre d'une précédente demande de permis de construire, la pétitionnaire avait désigné cette salle comme une " salle polyvalente " ne permet pas de tenir pour établie l'existence d'une manoeuvre frauduleuse visant à dissimuler la destination véritable de cette salle et d'induire l'administration en erreur.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe, laquelle n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent M. et Mme B...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe ni à celles présentées par la SCDI La Caennaise sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe et celles présentées par la SCDI La Caennaise sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B..., à la commune de Saint-Germain-la-Blanche-Herbe et à la Société Caennaise de Développement Immobilier La Caennaise.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 décembre 2018.

Le rapporteur,

K. BOUGRINELe président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17NT00476


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT00476
Date de la décision : 26/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : SELARL JURIS VOXA

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2018-12-26;17nt00476 ?
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