La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/06/2019 | FRANCE | N°18NT01805

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 11 juin 2019, 18NT01805


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Transports d'Eure-et-Loir a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 25 mai 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision du 12 octobre 2015 par laquelle l'inspecteur du travail compétent a accordé à la société l'autorisation de licencier M. C... B...et refusé cette autorisation de licenciement.

Par un jugement n° 1602376 du 22 février 2018, le tribunal administratif d'Orl

éans a annulé la décision du ministre du travail du 25 mai 2016.

Procédure devant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Transports d'Eure-et-Loir a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 25 mai 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision du 12 octobre 2015 par laquelle l'inspecteur du travail compétent a accordé à la société l'autorisation de licencier M. C... B...et refusé cette autorisation de licenciement.

Par un jugement n° 1602376 du 22 février 2018, le tribunal administratif d'Orléans a annulé la décision du ministre du travail du 25 mai 2016.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 avril 2018, M.B..., représenté par la SCP Souchon - Catte - Louis et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 22 février 2018 ;

2°) de rejeter la demande de la société Transports d'Eure-et-Loir devant le tribunal administratif d'Orléans ;

3°) de mettre à la charge de la société Transports d'Eure-et-Loir, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais engagés en première instance et de 3 000 euros au titre des frais engagés en appel.

Il soutient que :

- l'employeur a méconnu la formalité substantielle de consultation des délégués du personnel ;

- en tout état de cause, il a méconnu son obligation en matière de recherche de reclassement si bien que la ministre du travail devait en tout état de cause refuser son licenciement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2018, la société Transports d'Eure-et-Loir, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'elle a repecté tant ses obligations de consultation des délégués du personnel que ses obligations en matière de recherche de reclassement.

La ministre du travail a présenté des observations par un mémoire enregistré le 21 mars 2018.

Elle fait valoir que la consultation de délégués du personnel, prématurée, était irrégulière.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

Considérant ce qui suit

Les faits, la procédure :

1. M. C...B..., salarié de la société Transports d'Eure-et-Loir depuis le 8 mars 1999, exerçait les fonctions de conducteur-receveur de car à temps plein. Il exerçait également, depuis son élection le 19 mai 2012, les fonctions de délégué syndical de l'Union solidaire transports. Après avoir été placé en congé-maladie en novembre 2011, sa pathologie de l'épaule droite a été reconnue comme maladie professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie le 12 janvier 2012. Il a été déclaré inapte à exercer son travail de conducteur-receveur par le médecin du travail le 19 avril 2012. Le 3 février 2015, le médecin du travail a examiné M. B... à la demande de son employeur et conclu à son inaptitude. A l'issue d'une deuxième visite, le 19 février 2015, il a confirmé l'inaptitude de M. B...à exercer ses fonctions. Après avoir consulté les délégués du personnel le 7 avril 2015 la société Transports d'Eure-et-Loir a sollicité l'autorisation de licencier M. B...auprès de l'inspecteur du travail. Ce dernier lui a accordé cette autorisation le 12 octobre 2015. M.B..., licencié le 19 octobre 2015, a adressé à la ministre chargée du travail un recours hiérarchique le 24 novembre 2015. Par décision du 25 mai 2016 la ministre a retiré la décision implicite de rejet née du silence prolongé gardé par ses services sur ce recours, annulé l'autorisation accordée par l'inspecteur du travail et refusé le licenciement de M.B.... Ce dernier relève appel du jugement du 22 février 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a annulé cette décision du 25 mai 2016.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise (...) ". Lorsque le salarié a la qualité de salarié protégé, il résulte de ces dispositions que si, à l'issue de la procédure qu'elles fixent, il refuse les postes qui lui sont proposés et que l'employeur sollicite l'autorisation de le licencier, l'administration ne peut légalement accorder cette autorisation que si les délégués du personnel ont été mis à même, avant que soient adressées au salarié des propositions de postes de reclassement, d'émettre leur avis en tout connaissance de cause sur les postes envisagés, dans des conditions qui ne sont pas susceptibles de fausser cette consultation.

3. Pour annuler l'autorisation de licenciement accordée par l'inspecteur du travail, le ministre a estimé " qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les délégués du personnel, qui ont été consultés le 7 avril 2015, aient disposé des informations nécessaires pour rendre un avis éclairé ; qu'en effet l'employeur a consulté les délégués du personnel sans avoir préalablement sollicité l'avis du médecin du travail sur les postes disponibles ni identifié des propositions individualisées de reclassement ".

4. Il résulte toutefois des dispositions précitées de l'article L. 1226-10 du code du travail qu'au titre de la recherche de reclassement les propositions précises de postes ne peuvent être adressées à l'intéressé qu'après l'avis émis par les délégués du personnel, lesquels doivent se prononcer au vu des indications formulées par le médecin du travail sur l'aptitude du salarié, mais non au vu de l'avis du même médecin sur chaque poste susceptible d'être proposé. Dès lors le ministre n'a pu sans erreur de droit estimer que l'employeur était tenu de saisir les délégués de propositions précises de reclassement, assorties de l'avis du médecin du travail sur leur compatibilité aux restrictions résultant de ses avis.

5. Par ailleurs si M. B...soutient que le ministre devait en tout état de cause refuser l'autorisation de licenciement au motif de l'insuffisance des recherches de reclassement effectuées par son employeur, il ne résulte en tout état de cause nullement de l'instruction que le ministre, qui n'a pas fait valoir cet argument dans son mémoire en observation, aurait annulé l'autorisation de licenciement accordée par l'inspecteur du travail et pris la même décision de refus en se fondant sur cet autre motif.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Dès lors que la société Transports d'Eure-et-Loir n'est pas la partie perdante dans la présente instance, il y a lieu de rejeter la demande de M. B...tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

8. Par ailleurs il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...le versement à la société Transports d'Eure-et-Loir d'une somme au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Transports d'Eure-et-Loir au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., à la société Transports d'Eure-et-Loir et à la ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juin 2019.

Le rapporteur,

J. FRANCFORTLe président,

H. LENOIR

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 18NT01805


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01805
Date de la décision : 11/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Jérôme FRANCFORT
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SCP SOUCHON - CATTE - LOUIS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-06-11;18nt01805 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award