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20/09/2019 | FRANCE | N°19NT01918

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 20 septembre 2019, 19NT01918


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 novembre 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises à Port-au-Prince (Haïti) refusant de délivrer un visa de long séjour au jeune E... C... en qualité d'enfant étranger de ressortissant français.

Par jugement n° 1900078 du 11 avril 2019, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur d

u 16 novembre 2018.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 21 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 novembre 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises à Port-au-Prince (Haïti) refusant de délivrer un visa de long séjour au jeune E... C... en qualité d'enfant étranger de ressortissant français.

Par jugement n° 1900078 du 11 avril 2019, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur du 16 novembre 2018.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 21 mai 2019 sous le n°19NT01918, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 avril 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Nantes.

Le ministre soutient que :

- les documents d'état civil fournis à l'appui de la demande de visa sont contradictoires et présentent un caractère frauduleux ;

- les déclarations de M. C... lors de sa demande de naturalisation, selon lesquelles sont fils était alors décédé, renforcent la conviction de son intention frauduleuse ;

- il n'est justifié d'aucun élément de possession d'état.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2019, M. C..., représenté par Me D... A..., conclut au rejet de la requête du ministre de l'intérieur.

Il soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

II. Par une requête, enregistrée le 21 mai 2019 sous le n°19NT01919, le ministre de l'intérieur demande à la cour d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 avril 2019.

Il soutient, en se référant aux mêmes moyens que ceux développés dans sa requête d'appel enregistrée sous le n°19NT01918, que les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation en estimant que le lien de filiation entre le requérant et le demandeur de visa était établi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juin 2019, M. C..., représenté par Me D... A..., conclut au rejet de la demande de sursis à exécution du jugement.

Il soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par une première requête enregistrée sous le n° 19NT01918, le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 11 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. F... C..., la décision du 16 novembre 2018 par laquelle il a refusé la délivrance d'un visa de long séjour à l'enfant E... C..., prise après la recommandation émise le 27 juillet 2018 par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France de délivrer le visa sollicité. Par une seconde requête enregistrée sous le n° 19NT01919, le ministre demande le sursis à exécution de ce même jugement.

2. Ces deux requêtes présentées par le ministre de l'intérieur sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, il ressort des termes de la décision du 16 novembre 2018 que, pour refuser de délivrer un visa de long séjour à l'enfant E... C... en qualité d'enfant mineur étranger de M. C..., ressortissant français, le ministre de l'intérieur s'est fondé sur le motif que M. C... avait déclaré, dans le formulaire de sa demande d'acquisition de la nationalité française en 2014, que son fils Matcherano C..., né le 3 juillet 2008, était décédé. Cependant, à supposer même que M. C... soit à l'origine de cette déclaration inexacte, alors qu'il soutient qu'à cette date il était sans nouvelle de son fils et que l'agent qui l'a interrogé en aurait déduit qu'il était décédé, cette circonstance n'était, à elle seule, pas de nature à remettre en cause l'existence même du lien de filiation. Ainsi, le motif retenu dans la décision contestée est erroné.

4. En second lieu, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

5. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Cet article pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère. Il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question.

6. En appel, pour établir que la décision contestée était légale, le ministre de l'intérieur invoque un autre motif tiré du caractère frauduleux des documents d'état civil produits à l'appui de la demande de visa par M. C..., en s'appuyant sur la mention de l'heure de naissance de l'enfant qui diffère selon les extraits de l'acte de naissance n° 5736 issus du même registre de la commune de Croix-des-Missions. Toutefois, il résulte de l'instruction, en particulier de la copie de l'acte de naissance originel dont les mentions sont manuscrites, produite dès la première instance et qui n'est pas contestée par le ministre, que l'enfant E... est né le 3 juillet 2008 à " neuf heures 35 du soir ", que la même indication de l'heure de naissance figure sur la copie de l'extrait de l'acte de naissance établie le 15 janvier 2018 et qu'elle est corroborée par le certificat de naissance délivré par l'hôpital où est né l'enfant. En outre, l'ensemble des autres mentions figurant sur les documents et les déclarations de M. C... sont concordantes. Par suite, les seules incohérences relevées par le ministre sur les extraits d'acte de naissance au sujet de l'heure de naissance de l'enfant et du numéro de page du registre des actes de naissance ne sont pas de nature à établir le caractère frauduleux des actes d'état civil établi par les autorités haïtiennes et, par conséquent, à remettre en cause le lien de filiation.

7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 16 novembre 2018 refusant de délivrer un visa de long séjour à E... C....

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement :

8. La cour, statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête du ministre de l'intérieur tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de son recours n° 19NT01919 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont devenues sans objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 19NT01918 présentée par le ministre de l'intérieur est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 19NT01919 présentée par le ministre de l'intérieur.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. F... C....

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, président-assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 septembre 2019.

Le rapporteur,

F.X. B...Le président-rapporteur,

T. CÉLÉRIER

Le greffier,

C. POPSÉ

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 19NT01918, 19NT01919


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT01918
Date de la décision : 20/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. François-Xavier BRECHOT
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : NICOLAS NELSON

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-09-20;19nt01918 ?
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