Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par des requêtes enregistrées le 11 juin 2015 sous le n°1504911 et le 10 mars 2017, sous le n°1702208, M. D... P..., agissant également en qualité de représentant légal de la jeune G... P..., et M. F... P... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de La Faute-sur-Mer, l'Etat et l'association syndicale de la Vallée du Lay (ASVL) à leur verser solidairement une somme de 4 344 625,64 euros en réparation des préjudices subis par eux du fait de la tempête Xynthia survenue au cours de la nuit du 27 au 28 février 2010.
Par un jugement n° 1504911-1702208 du 6 juillet 2018 le tribunal administratif de Nantes a fait droit à sa demande en condamnant in solidum l'Etat, la commune de La Faute-sur-Mer et l'association syndicale de la Vallée du Lay à verser la somme globale de la somme de 20 000 euros à la succession de Mme M... P..., la somme de 20 000 euros à la succession de Mme C... P..., la somme globale de 40 000 euros à la succession des jeunes Camil et Ismaïl P..., la somme globale de 647 722,78 euros à M. D... P..., ainsi que la somme globale de 82 042 euros à M. F... P....
Procédure devant la cour :
I- Par une requête enregistrée le 18 juillet 2018 sous le n° 18NT02734 et un mémoire du 26 octobre 2018, la commune de la Faute-sur-Mer, représentée par Me K... conclut :
1°) à l'annulation du jugement du 6 juillet 2018 ;
2°) à titre principal, au rejet de la demande indemnitaire présentée par les consorts P... ;
3°) à titre subsidiaire, à la condamnation solidaire, ou de l'un à défaut de l'autre, de l'ASVL et de l'Etat à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre.
Elle soutient que :
- à titre principal, que la requête indemnitaire de première instance était irrecevable comme tardive ;
- à titre subsidiaire, que l'ASVL, débiteur de l'obligation d'entretien de la digue Est n'apporte pas la preuve d'un entretien normal ; que l'Etat a manqué à ses obligations en matière de mise en oeuvre des politiques de prévention, étant tenu d'une obligation de conseil dans le cadre de l'instruction des permis de construire ; que le risque de submersion marine, bien que connu, a été sous-estimé.
- elle n'entend pas remettre en cause le montant des sommes allouées aux victimes.
Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2019, M. D... P..., agissant également pour le compte de la jeune G... P..., et M. F... P..., représentés par Me J..., concluent :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement du 6 juillet 2018 en tant qu'il a limité leur indemnisation à la somme de 809 765,78 euros ;
3°) à la mise à la charge de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- aucune tardiveté de leur demande de première instance ne peut être constatée ;
- ils s'en rapportent à justice quant à la contribution respective de l'Etat, de la commune et de l'ASVL au règlement des indemnités dues en réparation des préjudices subis ;
- le préjudice d'angoisse de mort de Mmes M... et C... P... s'évalue à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice d'angoisse de mort des jeunes Camil et Ismaïl P... s'évalue à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié aux décès de Mme M... P... s'évalue pour M. D... P..., son fils, pour la jeune G... P... et M. F... P..., ses petits-enfants, à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié aux décès de Mme C... P... s'évalue pour M. D... P..., son époux, et pour chacun des deux enfants survivants, à 100 000 euros ;
- le préjudice moral lié aux décès des jeunes Camil et Ismaïl P... s'évalue à un montant global de 200 000 euros pour M. D... P..., leur père ;
- le préjudice corporel et le préjudice moral lié à l'anxiété et à la peur ressentie pendant la nuit de la tempête s'évalue pour M. P... et la jeune G... P..., présents dans l'habitation la nuit de la tempête, respectivement à 25 000 euros chacun et 50 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié à l'anxiété et à la peur ressentie pendant la nuit de la tempête s'évalue pour M. F... P..., absent de la résidence secondaire, à 25 000 euros ;
- le préjudice moral lié à la perte, dans la résidence secondaire, de nombreux effets personnels et souvenirs s'évalue à 10 000 euros pour M. P... et à 5 000 euros chacun pour la jeune G... P... et M. F... P... ;
- le préjudice financier de M. D... P... lié à la perte de revenus professionnels depuis la date de l'accident jusqu'au 31 décembre 2016 et celui lié à la perte de revenus futurs s'évaluent respectivement à un montant global de 273 464,26 euros et à un montant global de 620 560,73 euros ;
- le montant du préjudice financier du foyer lié à la perte des revenus de Mme C... P... s'élève à 1 195 310,18 euros pour M. D... P..., à 101 392,67 euros pour la jeune G... P... et à 58 897,80 euros pour M. F... P... ;
- ces sommes doivent être majorées des intérêts légaux et de leur capitalisation.
Par un mémoire enregistré le 14 février 2019, la SMACL Assurances, représentée par Me H..., conclut à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune de La Faute-sur-Mer.
Elle indique s'associer aux conclusions d'appel de la commune et renvoie aux observations présentées devant le tribunal administratif de Nantes.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 février 2019, l'Association syndicale de la Vallée du Lay (ASVL), représentée par Me O..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à titre principal, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamnée à garantir l'Etat et la commune de La Faute-sur-Mer et, à titre subsidiaire, à la condamnation de la société MMA Iard à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et à la condamnation de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) à la condamnation de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la catastrophe Xynthia présente le caractère d'un cas de force majeure ;
- sa responsabilité doit être écartée dès lors qu'aucune responsabilité pénale n'a été retenue à son encontre ; aucun défaut d'entretien ne peut lui être reproché ; ses missions ne peuvent se superposer avec celles de l'ASMF ; sa responsabilité n'est pas recherchée par les victimes ;
- subsidiairement, elle doit être garantie par la société MMA Iard.
En application des articles R 611-11-1 et R 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction a été prononcée le 11 mars 2019.
Un mémoire présenté pour la société MMA Iard par Me N... a été enregistré le 15 novembre 2019.
II- Par une requête et un mémoire enregistrés le 8 août 2018 et le 20 février 2019 sous le n°18NT03075, l'association syndicale de la Vallée du Lay (ASVL), représentée par Me O... conclut :
1°) à l'annulation du jugement attaqué ;
2°) à titre principal, au rejet de toute demande d'appel en garantie formulée par l'Etat ou la commune de La Faute-sur-Mer et, à titre subsidiaire, à la condamnation de la société MMA Iard à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre et à la condamnation de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) à la condamnation de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la catastrophe Xynthia présente le caractère d'un cas de force majeure ;
- sa responsabilité doit être écartée dès lors qu'aucune responsabilité pénale n'a été retenue à son encontre ; aucun défaut d'entretien ne peut lui être reproché ; ses missions ne peuvent se superposer avec celles de l'ASMF ; sa responsabilité n'est pas recherchée par les victimes ;
- subsidiairement, elle doit être garantie par la société MMA Iard.
Par un mémoire en défense enregistré 26 octobre 2018, la commune de la Faute-sur-Mer, représentée par Me K..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à titre principal, à l'annulation du jugement attaqué et au rejet de la demande indemnitaire et, à titre subsidiaire, à la condamnation solidaire ou à défaut de l'un, l'autre, de l'ASVL et de l'Etat à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre.
Elle soutient que :
- à titre principal, que la requête indemnitaire de première instance est irrecevable comme tardive ;
- à titre subsidiaire, que l'ASVL, débiteur de l'obligation d'entretien de la digue Est n'apporte pas la preuve d'un entretien normal ; l'Etat a manqué à ses obligations en matière de mise en oeuvre des politiques de prévention, étant tenu d'une obligation de conseil dans le cadre de l'instruction des permis de construire ; le risque de submersion marine bien que connu a été sous-estimé.
- elle n'entend pas remettre en cause le montant des sommes allouées aux victimes.
Par un mémoire enregistré le 1er février 2019, M. D... P..., agissant également pour le compte de la jeune G... P..., et M. F... P..., représentés par Me J..., concluent :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement du 6 juillet 2018 en tant qu'il a limité leur indemnisation à la somme de 809 765,78 euros ;
3°) à la mise à la charge de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- aucune tardiveté de leur demande de première instance ne peut être constatée ;
- ils s'en rapportent à justice quant à la contribution respective de l'Etat, de la commune et de l'ASVL au règlement des indemnités dues en réparation des préjudices subis ;
- le préjudice d'angoisse de mort de Mmes M... et C... P... s'évalue à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice d'angoisse de mort des jeunes Camil et Ismaïl P... s'évalue à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié aux décès de Mme M... P... s'évalue pour M. D... P..., son fils, pour la jeune G... P... et M. F... P..., ses petits-enfants, à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié aux décès de Mme C... P... s'évalue pour M. D... P..., son époux, et pour chacun des deux enfants survivants, à 100 000 euros ;
- le préjudice moral lié aux décès des jeunes Camil et Ismaïl P... s'évalue à un montant global de 200 000 euros pour M. D... P..., leur père ;
- le préjudice corporel et le préjudice moral lié à l'anxiété et à la peur ressentie pendant la nuit de la tempête s'évalue pour M. P... et la jeune G... P..., présents dans l'habitation la nuit de la tempête, respectivement à 25 000 euros chacun et 50 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié à l'anxiété et à la peur ressentie pendant la nuit de la tempête s'évalue pour M. F... P..., absent de la résidence secondaire, à 25 000 euros ;
- le préjudice moral lié à la perte, dans la résidence secondaire, de nombreux effets personnels et souvenirs s'évalue à 10 000 euros pour M. P... et à 5 000 euros chacun pour la jeune G... P... et M. F... P... ;
- le préjudice financier de M. D... P... lié à la perte de revenus professionnels depuis la date de l'accident jusqu'au 31 décembre 2016 et celui lié à la perte de revenus futurs s'évaluent respectivement à un montant global de 273 464,26 euros et à un montant global de 620 560,73 euros ;
- le montant du préjudice financier du foyer lié à la perte des revenus de Mme C... P... s'élève à 1 195 310,18 euros pour M. D... P..., à 101 392,67 euros pour la jeune G... P... et à 58 897,80 euros pour M. F... P... ;
- ces sommes doivent être majorées des intérêts légaux et de leur capitalisation.
Par un mémoire enregistré le 14 février 2019, la SMACL représentée par Me H... conclut à ce qu'il soit fait droit aux conclusions d'appel incident de la commune et renvoie à ses observations devant le tribunal administratif.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente dès lors que les fautes commises par M. R... et Mme E... présentent un caractère inexcusable et sont de caractère personnel ;
- la requête est irrecevable comme tardive ;
- aucune responsabilité ne peut être imputée à la commune de La Faute-sur-Mer qui n'a commis aucune faute ;
- des circonstances sont de nature à l'exonérer de toute responsabilité dès lors que la tempête Xynthia présente un caractère de force majeure ; une faute des victimes doit être constatée puisqu'ils connaissaient le risque d'inondation ;
- des exclusions de garantie doivent être appliquées en raison de la faute personnelle de M. R... et de Mme E... ;
- les prétentions indemnitaires des requérants doivent être écartées.
En application des articles R 611-11-1 et R 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction a été prononcée le 11 mars 2019.
Un mémoire présenté pour la société MMA Iard par Me N... a été enregistré le 15 novembre 2019.
III - Par une requête enregistrée le 29 août 2018, sous le n°18NT03302, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la cour d'annuler le jugement du 6 juillet 2018 en tant qu'il a retenu la responsabilité de l'Etat et l'a condamné solidairement avec la commune de La Faute-sur-Mer et l'Association syndicale de la vallée du Lay (ASVL) à prendre en charge 35% des condamnations prononcées.
Il soutient que :
- il n'entend contester ni le principe ni le montant des indemnisations accordées par le tribunal aux requérants mais seulement la répartition de la charge de ces indemnisations entre les personnes mises en cause ;
- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé, notamment en ce qui concerne la faute liée à l'élaboration du plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) ;
- aucune faute lourde ne peut lui être reprochée en ce qui concerne la tutelle sur les associations syndicales, la coordination des actions entre la commune et l'ASVL ou l'approbation du PPRI ;
- aucun lien de causalité n'existe entre les fautes alléguées et les préjudices invoqués ;
- la commune a commis des fautes d'une particulière gravité.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 octobre 2018, la commune de La Faute-sur-Mer représentée par Me K..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à titre principal, à l'annulation du jugement attaqué et au rejet de la demande indemnitaire et, à titre subsidiaire, à la condamnation solidaire ou à défaut de l'un, l'autre, de l'ASVL et de l'Etat à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre.
Elle soutient que :
- à titre principal, que la requête indemnitaire de première instance est irrecevable comme tardive ;
- à titre subsidiaire, que l'ASVL, débiteur de l'obligation d'entretien de la digue Est n'apporte pas la preuve d'un entretien normal ; l'Etat a manqué à ses obligations en matière de mise en oeuvre des politiques de prévention, étant tenu d'une obligation de conseil dans le cadre de l'instruction des permis de construire ; le risque de submersion marine bien que connu a été sous-estimé.
- elle n'entend pas remettre en cause le montant des sommes allouées aux victimes.
Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2019, M. D... P..., agissant également pour le compte de la jeune G... P..., et M. F... P..., représentés par Me J..., concluent :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement du 6 juillet 2018 en tant qu'il a limité leur indemnisation à la somme de 809 764,78 euros ;
3°) à la mise à la charge de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- aucune tardiveté de leur demande de première instance ne peut être constatée ;
- ils s'en rapportent à justice quant à la contribution respective de l'Etat, de la commune et de l'ASVL au règlement des indemnités dues en réparation des préjudices subis ;
- le préjudice d'angoisse de mort de Mmes M... et C... P... s'évalue à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice d'angoisse de mort des jeunes Camil et Ismaïl P... s'évalue à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié aux décès de Mme M... P... s'évalue pour M. D... P..., son fils, pour la jeune G... P... et M. F... P..., ses petits-enfants, à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié aux décès de Mme C... P... s'évalue pour M. D... P..., son époux, et pour chacun des deux enfants survivants, à 100 000 euros ;
- le préjudice moral lié aux décès des jeunes Camil et Ismaïl P... s'évalue à un montant global de 200 000 euros pour M. D... P..., leur père ;
- le préjudice corporel et le préjudice moral lié à l'anxiété et à la peur ressentie pendant la nuit de la tempête s'évalue pour M. P... et la jeune G... P..., présents dans l'habitation la nuit de la tempête, respectivement à 25 000 euros chacun et 50 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié à l'anxiété et à la peur ressentie pendant la nuit de la tempête s'évalue pour M. F... P..., absent de la résidence secondaire, à 25 000 euros ;
- le préjudice moral lié à la perte, dans la résidence secondaire, de nombreux effets personnels et souvenirs s'évalue à 10 000 euros pour M. P... et à 5 000 euros chacun pour la jeune G... P... et M. F... P... ;
- le préjudice financier de M. D... P... lié à la perte de revenus professionnels depuis la date de l'accident jusqu'au 31 décembre 2016 et celui lié à la perte de revenus futurs s'évaluent respectivement à un montant global de 273 464,26 euros et à un montant global de 620 560,73 euros ;
- le montant du préjudice financier du foyer lié à la perte des revenus de Mme C... P... s'élève à 1 195 310,18 euros pour M. D... P..., à 101 392,67 euros pour la jeune G... P... et à 58 897,80 euros pour M. F... P... ;
- ces sommes doivent être majorées des intérêts légaux et de leur capitalisation.
Par un mémoire enregistré le 14 février 2019, la SMACL assurances, représentée par Me H..., conclut à ce qu'il soit fait droit aux conclusions d'appel de la commune.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente dès lors que les fautes commises par M. R... et Mme E... présentent un caractère inexcusable et sont de caractère personnel ;
- la requête est irrecevable comme tardive ;
- aucune responsabilité ne peut être imputée à la commune de La Faute-sur-Mer qui n'a commis aucune faute ;
- des circonstances sont de nature à l'exonérer de toute responsabilité dès lors que la tempête Xynthia présente un caractère de force majeure ; une faute des victimes doit être constatée puisqu'ils connaissaient le risque d'inondation ;
- des exclusions de garantie doivent être appliquées en raison de la faute personnelle de M. R... et de Mme E....
Par un mémoire en défense enregistré le 20 février 2019, l'Association syndicale de la Vallée du Lay (ASVL), représentée par Me O..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à titre principal, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamnée à garantir l'Etat et la commune de La Faute-sur-Mer et, à titre subsidiaire, à la condamnation de la société MMA Iard à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et à la condamnation de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) à la condamnation de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la catastrophe Xynthia présente le caractère d'un cas de force majeure ;
- sa responsabilité doit être écartée dès lors qu'aucune responsabilité pénale n'a été retenue à son encontre ; aucun défaut d'entretien ne peut lui être reproché ; ses missions ne peuvent se superposer avec celles de l'ASMF ; sa responsabilité n'est pas recherchée par les victimes ;
- subsidiairement, elle doit être garantie par la société MMA Iard.
IV- Par une requête enregistrée le 5 septembre 2019, sous le n°18NT03412, M. D... P..., agissant également pour le compte de la jeune G... P..., et M. F... P..., représentés par Me J..., concluent :
1°) à l'annulation du jugement du 6 juillet 2018 en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de leurs demandes d'indemnisation ;
2°) à la condamnation de l'Etat, de la commune de la Faute-sur-mer et de l'ASVL à leur verser la somme de 809 764,78 euros en réparation de leurs préjudices majorée des intérêts de droit capitalisés ;
3°) à la mise à la charge de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat du versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- aucune tardiveté de leur demande de première instance ne peut être constatée ;
- ils s'en rapportent à justice quant à la contribution respective de l'Etat, de la commune et de l'ASVL au règlement des indemnités dues en réparation des préjudices subis ;
- le préjudice d'angoisse de mort de Mmes M... et C... P... s'évalue à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice d'angoisse de mort des jeunes Camil et Ismaïl P... s'évalue à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié aux décès de Mme M... P... s'évalue pour M. D... P..., son fils, pour la jeune G... P... et M. F... P..., ses petits-enfants, à 100 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié aux décès de Mme C... P... s'évalue pour M. D... P..., son époux, et pour chacun des deux enfants survivants, à 100 000 euros ;
- le préjudice moral lié aux décès des jeunes Camil et Ismaïl P... s'évalue à un montant global de 200 000 euros pour M. D... P..., leur père ;
- le préjudice corporel et le préjudice moral lié à l'anxiété et à la peur ressentie pendant la nuit de la tempête s'évalue pour M. P... et la jeune G... P..., présents dans l'habitation la nuit de la tempête, respectivement à 25 000 euros chacun et 50 000 euros chacun ;
- le préjudice moral lié à l'anxiété et à la peur ressentie pendant la nuit de la tempête s'évalue pour M. F... P..., absent de la résidence secondaire, à 25 000 euros ;
- le préjudice moral lié à la perte, dans la résidence secondaire, de nombreux effets personnels et souvenirs s'évalue à 10 000 euros pour M. P... et à 5 000 euros chacun pour la jeune G... P... et M. F... P... ;
- le préjudice financier de M. D... P... lié à la perte de revenus professionnels depuis la date de l'accident jusqu'au 31 décembre 2016 et celui lié à la perte de revenus futurs s'évaluent respectivement à un montant global de 273 464,26 euros et à un montant global de 620 560,73 euros ;
- le montant du préjudice financier du foyer lié à la perte des revenus de Mme C... P... s'élève à 1 195 310,18 euros pour M. D... P..., à 101 392,67 euros pour la jeune G... P... et à 58 897,80 euros pour M. F... P... ;
- ces sommes doivent être majorées des intérêts légaux et de leur capitalisation.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 octobre 2018, la commune de La Faute-sur-Mer représentée par Me K..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement attaqué et à la condamnation solidaire ou à défaut de l'un, l'autre, de l'ASVL et de l'Etat à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.
Elle soutient que :
- la requête indemnitaire est irrecevable comme tardive ;
- l'ASVL, débiteur de l'obligation d'entretien de la digue Est n'apporte pas la preuve d'un entretien normal. L'Etat a manqué à ses obligations en matière de mise en oeuvre des politiques de prévention, était tenu d'une obligation de conseil dans le cadre de l'instruction des permis de construire ; le risque de submersion marine bien que connu a été sous-estimé.
- elle n'entend pas remettre en cause le montant des sommes allouées aux victimes.
Par un mémoire enregistré le 14 février 2019, la SMACL assurances, représentée par Me H..., conclut à ce qu'il soit fait droit aux conclusions d'appel incident de la commune:
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente dès lors que les fautes commises par M. R... et Mme E... présentent un caractère inexcusable et sont de caractère personnel ;
- la requête est irrecevable comme tardive ;
- aucune responsabilité ne peut être imputée à la commune de La Faute-sur-Mer qui n'a commis aucune faute ;
- des circonstances sont de nature à l'exonérer de toute responsabilité dès lors que la tempête Xynthia présente un caractère de force majeure ; une faute des victimes doit être constatée puisqu'ils connaissaient le risque d'inondation ;
- des exclusions de garantie doivent être appliquées en raison de la faute personnelle de M. R... et de Mme E....
Par un mémoire en défense enregistré le 20 février 2019, l'Association syndicale de la Vallée du Lay (ASVL), représentée par Me O..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à titre principal, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamnée à garantir l'Etat et la commune de La Faute-sur-Mer et, à titre subsidiaire, à la condamnation de la société MMA Iard à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et à la condamnation de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) à la condamnation de la commune de La Faute-sur-Mer et de l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la catastrophe Xynthia présente le caractère d'un cas de force majeure ;
- sa responsabilité doit être écartée dès lors qu'aucune responsabilité pénale n'a été retenue à son encontre ; aucun défaut d'entretien ne peut lui être reproché ; ses missions ne peuvent se superposer avec celles de l'ASMF ; sa responsabilité n'est pas recherchée par les victimes ;
- subsidiairement, elle doit être garantie par la société MMA Iard.
En application des articles R 611-11-1 et R 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction a été prononcée le 11 mars 2019.
Un mémoire présenté pour la société MMA Iard par Me N... a été enregistré le 15 novembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des assurances ;
- le code civil ;
- le code de l'environnement ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n°2054-811 du 13 août 2004 ;
- l'ordonnance 2004-632 du 1er juillet 2004 ;
- le décret n° 2006-504 du 3 novembre 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. I...,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- les observations de Mes Saintaman et Denis, représentant les consorts P..., les observations de Me K..., représentant la commune de la Faute sur Mer, les observations de Me O..., représentant l'association syndicale autorisée de la Vallée du Lay, les observations de Me Q..., substituant Me B..., représentant la société MMA IARD, les observations de Me H..., représentant la société mutuelle d'assurances des collectivités locales.
Considérant ce qui suit :
1. Au cours de la nuit du 27 au 28 février 2010, une partie du territoire de la commune de La Faute-sur-Mer, où se trouvait en particulier l'habitation à usage de résidence secondaire, de Mme C... P... et de M. D... P..., son époux qu'ils occupaient cette nuit-là en compagnie de trois de leurs quatre enfants, les jeunes Camil, G... et Ismaïl P..., nés respectivement les 23 janvier 1997, 24 octobre 2002 et 29 mai 2005, et de leur grand-mère paternelle, Mme M... P..., a été inondée consécutivement à la survenance de la tempête Xynthia conjuguée à une submersion de l'ouvrage de protection dénommé " digue Est ". Par des demandes enregistrées sous les n° 1504911 et 1702208 MM. F... et D... P..., ce dernier agissant également au nom de la jeune G... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner solidairement la commune de La Faute-sur-Mer, l'Etat et l'association syndicale la Vallée du Lay (ASVL) à leur verser solidairement une somme de 4 344 626,44 euros en réparation des préjudices subis consécutivement à la tempête Xynthia. Par un jugement n° 1504911-17002208 du 6 juillet 2018 le tribunal administratif de Nantes a fait droit à leur demande en condamnant in solidum l'Etat, la commune de La Faute-sur-Mer et l'association syndicale de la Vallée du Lay à verser la somme de 20 000 euros à la succession de Mme M... P..., la somme de 20 000 euros à la succession de Mme C... P..., la somme globale de 40 000 euros à la succession des jeunes Camil et Ismaïl P..., la somme globale de 647 722,78 euros à M. D... P..., ainsi que la somme globale de 82 042 euros à M. F... P.... Les intérêts échus à la date du 30 décembre 2015 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts. Les parties en cause relèvent appel de ce jugement. La commune de La Faute-Sur-Mer et l'ASVL, d'une part, et les consorts P..., d'autre part, forment un appel incident à l'encontre de ce jugement en tant respectivement qu'il les a condamnés à indemniser ces derniers et qu'il n'a pas fait droit à la totalité de leur demande d'indemnisation.
2. Les requêtes enregistrées sous les n° 18NT02734, 18NT03075,18NT03302, 18NT03412 présentent à juger des questions communes. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la régularité du jugement attaqué :
En ce qui concerne la compétence de la juridiction administrative :
3. La SMACL assurances soutient que la juridiction administrative n'est pas compétente eu égard au caractère personnel des fautes commises par M. R... maire de La Faute-sur-Mer, et par Mme E..., sa première adjointe qui sont détachables du service et que, par suite, seule la juridiction judiciaire est compétente pour connaître de l'action en réparation des préjudices découlant de ces fautes.
4. Comme l'ont rappelé les premiers juges, présentent le caractère d'une faute personnelle détachable des fonctions de maire, des faits qui révèlent des préoccupations d'ordre privé, qui procèdent d'un comportement incompatible avec les obligations qui s'imposent dans l'exercice de fonctions publiques ou qui, eu égard à leur nature et aux conditions dans lesquelles ils ont été commis, revêtent une particulière gravité. En revanche, ni la qualification retenue par le juge pénal, ni le caractère intentionnel des faits retenus contre l'intéressé ne suffisent, par eux-mêmes, à regarder la faute commise par celui-ci comme étant détachable des fonctions, ou dépourvue de tout lien avec elles.
5. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'appréciation portée sur les faits commis par M. R... et Mme E... par la cour d'appel de Poitiers dans son arrêt du 4 avril 2016, que les fautes reprochées aux intéressés, commises dans le cadre de l'exercice des pouvoirs et prérogatives conférés par leur mandat électif n'ont pas été motivées par des préoccupations d'ordre essentiellement privé et ne révèlent pas, en elles-mêmes, un comportement incompatible avec les obligations qui s'imposent dans l'exercice d'un mandat électif. Enfin, et en dépit de la gravité de leurs conséquences, les fautes reprochées ne procédaient pas d'une intention d'exposer sciemment au danger les habitants de la commune de La-Faute-sur-Mer. Dans ces conditions, elles ne peuvent être regardées comme étant détachables du service. Par suite, le moyen tiré par la SMACL Assurances de ce que le tribunal administratif de Nantes a retenu à tort la compétence de la juridiction administrative doit être écarté.
En ce qui concerne la motivation du jugement attaqué :
6. L'Etat soutient que le jugement est insuffisamment motivé s'agissant de l'appréciation des fautes commises par lui au titre de l'élaboration du plan de prévention des risques d'inondation (PPRI) dans la mesure où les éléments factuels mentionnés dans le jugement ne sont pas de nature à établir que les données utilisées pour établir ce document auraient été erronées.
7. Toutefois, il ressort des termes mêmes du jugement que les premiers juges ont relaté avec précision les conditions dans lesquelles le PPRI avait été élaboré et en particulier les carences devant être constatées tant de la part de la commune que de l'Etat. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté. A les supposer même erronés, les motifs sur lesquels le tribunal s'est fondé pour écarter ce moyen ont trait au bien-fondé du jugement et ne sont pas susceptibles d'en affecter la régularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :
8. Aux termes de l'article R 421-1 du code de justice administrative alors en vigueur : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ". L'article R 421-5 du même code prévoit que : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés ainsi que les voies de recours dans la notification de la décision " et aux termes de l'article R 612-1 de ce code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. (...) ".
9. Le maire de La Faute-sur-Mer a rejeté la demande indemnitaire présentée par les consorts P... par un courrier du 19 janvier 2015 qui était assorti de la mention des délais et voies de recours ouverts à son encontre. Le 16 mars 2015, c'est-à-dire dans le délai de recours contentieux de deux mois, ces derniers ont formé devant le maire un recours administratif tendant au retrait de la décision du 19 janvier 2015 qui a ainsi eu pour effet de proroger le délai de saisine de la juridiction. Le rejet par le maire, le 25 mars 2015, de ce recours a été reçu par le conseil des consorts P... le 1er avril suivant. Le 26 mai 2015, soit dans le délai de recours contentieux, les intéressés, ainsi que diverses autres victimes des inondations de La Faute-sur-Mer, ont par une requête qui a été enregistrée au greffe sous le n° 1504933 saisi le tribunal administratif de Nantes d'une requête aux fins d'indemnisation des préjudices dont ils ont été victimes. La recevabilité d'une requête présentée conjointement par ces requérants contre des décisions les concernant individuellement était, par suite, subordonnée à la condition que la solution du litige ne nécessite pas un examen distinct de la situation de chacun des requérants. Dans ces conditions, le tribunal a, le 1er juin 2015, invité les consorts P... à régulariser leurs conclusions dans un délai de 15 jours. Il s'ensuit que la requête qui a été enregistrée au greffe du tribunal le 11 juin 2015 l'a été avant l'expiration de ce délai. La commune de La Faute-sur-Mer et la SMACL ne sont dès lors pas fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a écarté la fin de non-recevoir opposée en première instance et tirée de la méconnaissance des dispositions précitées.
En ce qui concerne l'exception de force majeure :
10. Il résulte de l'instruction ainsi que l'a rappelé la cour d'appel de Poitiers dans son arrêt du 4 avril 2016, que si selon les experts missionnés après la tempête, la probabilité pour que la concomitance d'une forte dépression atmosphérique, de vents violents et d'un coefficient de marée élevé soit réunie était de 0,5 pour mille sur un an, correspondant à un temps de retour de 2 000 ans et que la probabilité pour une personne de 78 ans de rencontrer ce phénomène était d'environ 4 %, les experts avaient ajouté qu'il s'agissait d'" une probabilité loin d'être négligeable ". Par ailleurs, la commune de la Faute-sur-Mer avait connu depuis 1882 des tempêtes majeures, dont la force était, pour celles de décembre 1999 et de janvier 2009 supérieure à celle de Xynthia. En outre, le dossier départemental sur les risques majeurs (DDRM) établi en 1995 par le préfet de la L..., et transmis à la commune, indiquait qu'elle était la seule commune du département à être soumise à trois risques majeurs naturels, l'inondation terrestre, l'inondation maritime et les feux de forêt. L'atlas de submersion marine adressé par le préfet le 30 septembre 2002 aux 38 communes littorales, montrait que la digue Est de la commune de la Faute-sur-Mer était bordée sur 50 m de large par une zone d'aléa fort avec un risque de submersion supérieure à 1 m ou avec une vitesse d'écoulement supérieure à 0,5 m/s. De plus, de précédentes de submersions marines étaient survenues en 1928, 1940, 1941, 1960 et 1989.
11. Enfin, le diagnostic technique de la digue Est, réalisé en juillet 2006 par le cabinet SCE à la suite de l'arrêté de classement de la digue du 7 juillet 2005, faisait état de la nécessité d'un dispositif d'alerte et de vigilance pour traiter les situations de crise en cas de conjonction d'une dépression et d'une forte marée et relevait, en particulier, que les secteurs D et E étaient les plus fragiles.
12. Dans ces conditions, l'association exceptionnelle de ces phénomènes de grande intensité ne peut être regardée comme présentant, sur le territoire de la commune de la Faute-sur-Mer, un caractère imprévisible et irrésistible caractérisant un cas de force majeure exonératoire de toute responsabilité de la commune, de l'Etat et de l'ASVL.
En ce qui concerne la responsabilité sans faute de la commune de La Faute-sur-mer :
13. Le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement.
14. La digue Est a été édifiée durant la seconde moitié du XIXème siècle et la première moitié du XXème siècle pour protéger des terres agricoles exploitées sur la presqu'île sablonneuse initialement rattachée à la commune de la Tranche-sur-mer avant de devenir la commune de la Faute-sur-Mer en 1953. Jusqu'à la tempête Xynthia, les habitations construites à l'abri de cette digue en ont tiré un avantage en ce qu'elle les protégeait des tempêtes et des risques de submersion marine. Les occupants de ces habitations ne peuvent dès lors être qualifiés de tiers par rapport à cet ouvrage. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont écarté la responsabilité sans faute de la commune.
En ce qui concerne la responsabilité pour faute de la commune de La Faute-sur-Mer :
S'agissant des travaux à réaliser sur la digue Est :
15. Par un arrêté du 7 juillet 2005, le préfet de la L... a classé la digue Est de la Faute-sur-Mer comme intéressant la sécurité civile " compte tenu de l'impact sur la sécurité des personnes qu'est susceptible d'entraîner sa rupture ou son dysfonctionnement ". Cet arrêté mettait à la charge du propriétaire de la digue, l'organisation, dans un délai maximal d'un an, " d'une étude permettant de déterminer la durée de retour des risques de surverse et analysant le fonctionnement de l'ouvrage selon divers scénarios " et d'" une étude appuyée notamment sur un diagnostic approfondi permettant d'apprécier les faiblesses de l'ouvrage et de définir les travaux nécessaires à sa remise en état et à son entretien ". Lors de la tempête Xynthia, la commune de la Faute-sur-Mer n'était pas propriétaire de la digue Est, qui appartenait toujours à l'association syndicale des Marais de la Faute-sur-Mer laquelle ne disposait que de moyens matériels, humains et financiers extrêmement limités ne lui permettant de réaliser ni ces études, ni les travaux qui devaient en résulter ; sa dissolution était d'ailleurs envisagée depuis 1994, en vue d'un transfert de ces biens à la commune de la Faute-sur-Mer.
16. Toutefois, la commune, qui disposait de l'appui technique et financier de l'Etat, a fait réaliser un premier diagnostic par le cabinet SCE qui a remis son rapport définitif en septembre 2006 faisant ressortir que la portion de la digue Est couvrant les zones urbanisées était très largement classée en zone de vulnérabilité forte. Une seconde étude a été confiée au cabinet Egis Eau pour déterminer les travaux à réaliser et constituer les dossiers de demande d'autorisation au titre de la loi sur l'eau. Ce rapport a été déposé en septembre 2008 et faisait état de la nécessité de procéder aux travaux de relèvement de la hauteur de la digue Est.
17. Il résulte également de l'instruction que, dans le cadre d'un protocole d'accord conclu entre cette association syndicale autorisée, la commune de La Faute-sur-Mer et l'ASVL, dont les termes ont été approuvés par délibérations du comité syndical de l'ASVL et du conseil municipal de La Faute-sur-Mer prises respectivement le 31 mai 2007 et le 26 septembre 2007, la propriété de la digue Est devait, par suite de la dissolution à intervenir, être transférée à cette commune, l'ASVL devant alors prendre en charge des travaux d'entretien et de confortement de cet ouvrage. Il résulte encore de l'instruction que la commune de La Faute-sur-Mer a décidé de faire réaliser ces travaux et a déposé à cette fin, le 14 septembre 2008, une demande d'autorisation de travaux sur les secteurs E à H de la digue Est. Si elle a obtenu, par arrêté du préfet de la L... du 4 août 2009, l'autorisation d'exécuter les travaux d'exhaussement de la digue en ces secteurs, elle avait, à la date du sinistre seulement débuté l'exécution de ces travaux lesquels n'ont, de surcroît, concerné que les seuls secteurs E et H de la digue alors notamment que le secteur D présentait des risques similaires ; ces travaux n'étaient pas achevés au jour du sinistre.
18. En dépit de l'absence, à cette même date, de transfert effectif de la propriété à la commune de La Faute-sur-Mer de la digue Est, cette commune qui avait reçu des subventions de l'Etat à hauteur de 80 % des dépenses prévues et à laquelle avait été délivrée l'autorisation de réaliser les travaux, devait être regardée comme le maître de l'ouvrage des travaux de rehaussement de la digue dont les riverains bénéficiaient en leur qualité d'usagers de cet ouvrage.
19. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu la responsabilité de la commune de La Faute-sur-mer sur ce fondement juridique.
S'agissant de la faute commise au titre de l'élaboration des plans et documents d'information :
20. Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction en vigueur à la date du fait générateur du dommage : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (...) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que (...) les inondations (...) ou autres accidents naturels (...) de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure (...) ". Aux termes de l'article R. 125-11 du code de l'environnement dans sa rédaction en vigueur à compter du 5 août 2005 : " (...) III. - Le document d'information communal sur les risques majeurs reprend les informations transmises par le préfet. Il indique les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde répondant aux risques majeurs susceptibles d'affecter la commune. Ces mesures comprennent, en tant que de besoin, les consignes de sécurité devant être mises en oeuvre en cas de réalisation du risque. : (...) Le maire fait connaître au public l'existence du document d'information communal sur les risques majeurs par un avis affiché à la mairie pendant deux mois au moins. / Le document d'information communal sur les risques majeurs et les documents mentionnés à l'article R. 125-10 sont consultables sans frais à la mairie. ". Aux termes de l'article 13 de la loi du 13 août 2004, alors en vigueur, de modernisation de la sécurité civile : " Le plan communal de sauvegarde regroupe l'ensemble des documents de compétence communale contribuant à l'information préventive et à la protection de la population. Il détermine, en fonction des risques connus, les mesures immédiates de sauvegarde et de protection des personnes, fixe l'organisation nécessaire à la diffusion de l'alerte et des consignes de sécurité, recense les moyens disponibles et définit la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement et de soutien de la population. Il peut désigner l'adjoint au maire ou le conseiller municipal chargé des questions de sécurité civile. Il doit être compatible avec les plans d'organisation des secours arrêtés en application des dispositions de l'article 14. / Il est obligatoire dans les communes dotées d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé ou comprises dans le champ d'application d'un plan particulier d'intervention. Le plan communal de sauvegarde est arrêté par le maire de la commune (...) : La mise en oeuvre du plan communal ou intercommunal de sauvegarde relève de chaque maire sur le territoire de sa commune (...) ".
21. Si au regard des dispositions précitées de l'article 13 de la loi du 13 août 2004 la commune de la Faute-sur-Mer n'était pas tenue d'élaborer un plan communal de sauvegarde dès lors que le plan de prévention des risques d'inondation prescrit le 29 novembre 2001 n'avait toujours pas été approuvé, au cours d'une réunion qui a eu lieu le 11 mars 2003 en mairie avec les services de l'Etat un compromis a été trouvé. En contrepartie de la réduction de la zone d'inconstructibilité des parcelles soumises à un risque d'inondation, la commune s'était engagée à établir un plan de secours. Le 22 octobre 2007, le préfet a adressé aux maires une circulaire rappelant les obligations des communes en matière d'information au regard de l'établissement du dossier d'information communal sur les risques majeurs (DICRIM) et du plan communal de sauvegarde (PCS). Un canevas de PCS était proposé aux communes sur le site intranet de la préfecture ainsi qu'une assistance technique par les différents services de l'Etat.
22. Il est constant qu'à la date de la tempête, non seulement le plan de prévention des risques d'inondation dont l'élaboration était confiée aux services de l'Etat n'était pas approuvé, en raison notamment de la pression des élus de la Faute-sur-Mer, mais qu'en outre, la commune n'avait réalisé ni DICRIM, ni PCS. De plus, la commune n'établit pas avoir informé, par d'autres moyens, ses administrés sur les risques encourus, ni mis en place une quelconque organisation des secours en cas d'inondation. Si elle soutient qu'il n'existe pas de lien de causalité entre ces manquements et les dommages, il résulte de l'instruction et notamment de l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers, que l'action des pompiers a été " entravée par le fait qu'ils ne disposaient pas d'informations suffisantes sur la situation réelle ni de consignes précises sur l'organisation des secours, à défaut de tout plan de secours communal prévisionnel ". Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la commune avait ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité.
S'agissant de la faute de la commune dans la délivrance du permis de construire :
23. En premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Pour l'application de ces dispositions, l'autorité administrative compétente pour délivrer un permis de construire doit notamment apprécier, au regard des données disponibles à la date de sa délivrance, l'existence d'un risque de submersion marine en prenant en compte notamment le niveau marin de référence, la situation du terrain au regard des ouvrages de défense contre la mer, ainsi que les précédents connus de rupture de digues ou de submersion. Il incombe ainsi au maire, agissant, en l'espèce, au nom de la commune, de vérifier, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise, si le projet de construction ne doit pas être refusé ou n'être accepté que sous réserve d'une prescription spéciale, sur le fondement des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
24. Il résulte de l'instruction que le permis de construire l'habitation de M. P... a été délivré par le maire de La Faute-sur-Mer le 21 décembre 2007. Il résulte également de l'instruction que le territoire de la commune de La Faute-sur-Mer a connu plusieurs épisodes de submersion marine, notamment, en mars 1928, en novembre 1940, en février 1941, en octobre et novembre 1960 ainsi qu'au cours de l'année 1989. Il résulte en outre de l'instruction que le caractère insuffisant de la protection contre les eaux assurée par la digue Est était connu dès l'intervention du diagnostic réalisé sur cet ouvrage au mois de juillet 2006, en application des dispositions de l'arrêté du 7 juillet 2005 pris par le préfet de la L... classant cette digue au nombre des ouvrages intéressant la sécurité civile, notamment dans les secteurs où se trouvaient l'habitation des requérants. Par ailleurs, le rapport d'information du Sénat sur les conséquences de la tempête Xynthia du 10 juin 2010, qui révèle une situation antérieure à la date de délivrance du permis de construire cette habitation, mentionne notamment que "les documents locaux d'urbanisme auraient pu restreindre l'occupation des sols dans les zones à risque, en les déclarant inconstructibles" et que la "mauvaise prise en charge des risques naturels dans l'occupation des sols a résulté d'un enchaînement de décisions prises avec légèreté ou dans l'ignorance". S'il résulte de l'instruction que le permis de construire en cause a été délivré sous réserve du respect d'une prescription édictée sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et imposant de fixer "la côte du plancher du premier niveau aménagé (...) à 0,20m au-dessus de la cote de référence du projet de plan de prévention des risques d'inondations de l'estuaire du Lay approuvé par anticipation le 8 juin 2007", il résulte également de l'instruction que ce projet de plan ne précisait pas cette cote de référence, qui, dans la partie sud de la commune de La Faute-sur-Mer, était égale à "3,70m IGN69" et qu'en outre il reposait sur des données de référence erronées ayant contribué à minorer l'exposition au risque de submersion du terrain proche de la "digue Est", sur lequel a été délivré le permis de construire. Par suite, la délivrance, au nom de la commune de La Faute-sur-Mer, de cette autorisation est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. L'illégalité de cet acte constitue une faute de nature à engager également la responsabilité de cette commune.
En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat :
S'agissant de la faute dans l'exercice de la tutelle sur l'ASVL :
25. D'une part, il résulte de l'instruction que la digue Est était, au moment de la tempête Xynthia, la propriété de l'association syndicale autorisée des marais de la Faute dite des Chauveau fondée en 1863. Ses statuts ont été modifiés d'office le 24 novembre 2008 par le préfet de la L... afin de les mettre en conformité avec l'ordonnance du 1er juillet 2004 et le décret du 3 mai 2006. Selon l'article 4 de ces statuts, l'association a pour objet : " la prévention contre les risques naturels, l'aménagement et l'entretien des cours d'eau, voies et réseaux divers ". Cet article précise en outre que " dans ce cadre, l'association a pour mission l'entretien, le renforcement et l'exhaussement des digues établies ou à établir pour la conservation des terrains inclus dans le périmètre de l'association ". L'article 21 de ces mêmes statuts prévoit par ailleurs que " L'association syndicale autorisée est propriétaire des ouvrages qu'elle réalise en qualité de maître d'ouvrage dans le cadre de son objet statutaire et, à ce titre, en assure l'entretien. Cet entretien pourra être délégué par convention avec des organismes compétents. Cependant l'entretien, le terrassement, le renforcement et l'exhaussement des digues de la rive droite du Lay Maritime situées sur le territoire de la commune de la Faute-sur-Mer assimilées à des ouvrages de défense contre la mer sont assurés par l'Association syndicale autorisée dite " Vallée du Lay ".
26. D'autre part, les statuts de l'Association syndicale de la vallée du Lay, créée en 1931 et couvrant une zone géographique plus large que l'ASMF, ont également été mis à jour le 12 mars 2008. En vertu de l'article 4 de ses statuts : " L'association a pour but l'entretien des ouvrages et l'exécution des travaux en cours ou à entreprendre pour prévenir des graves dangers qu'une rupture du littoral sur le périmètre dont le tracé figure en rouge sur la carte ci-jointe et l'invasion de la mer qui en serait la conséquence feraient courir aux terrains désignés à l'article premier ci-dessus et situés soit sur la rive droite soit sur la rive gauche du Lay entre la côte et le canal du Luçon inclusion faite de la digue Est de La Faute-sur-Mer. ". Il est également prévu que, pour lutter contre les inondations : " En outre, l'association pourra exécuter à l'intérieur de son périmètre tous travaux d'intérêt général de défense contre les inondations. L'association pourra avoir recours à tous moyens adaptés ". Ces statuts précisent enfin, au dernier aliéna de cet article 4, que " A titre ponctuel et marginal, l'association pourra accomplir certaines activités accessoires contribuant à l'accomplissement de son objet principal ou qui en sont le complément naturel. ".
27. Aux termes de l'article 30 de l'ordonnance visée ci-dessus du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires : " L'autorité administrative peut, après mise en demeure de l'association syndicale autorisée restée sans effet dans un délai qu'elle détermine : / 1° Faire procéder d'office, aux frais de l'association, à l'accomplissement des opérations correspondant à son objet, dans le cas où la carence de l'association nuirait gravement à l'intérêt public ; / 2° Constater que l'importance des ouvrages ou des travaux à réaliser excède les capacités de l'association. / Dans le cas prévu à l'alinéa précédent, l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent décider, dans des conditions définies par le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 62, de se substituer, en tout ou partie, à l'association dans ses droits et obligations ". Aux termes de l'article 49 du décret visé ci-dessus du 3 mai 2006 portant application de l'ordonnance du 1er juillet 2004 : " Dans le cas où une association syndicale autorisée interrompt ou laisse sans entretien les travaux entrepris par elle, le préfet fait procéder, par le service compétent, à une vérification de l'état des lieux. / S'il ressort de cette vérification que l'interruption ou le défaut d'entretien peut nuire gravement à l'intérêt public, le préfet indique au syndicat les travaux jugés nécessaires pour pallier ces conséquences et le met en demeure de les exécuter. / Le préfet assigne au syndicat, dans cette mise en demeure, un délai suffisant pour procéder à l'exécution des travaux. Faute pour le syndicat de se conformer à cette injonction, le préfet ordonne l'exécution d'office aux frais de l'association et désigne, pour la diriger et la surveiller, un agent chargé de suppléer le président du syndicat. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 50 du même décret : " Dans le cas où le préfet constate, après mise en demeure de l'association, que l'importance des ouvrages ou des travaux à réaliser dans l'intérêt public excède les capacités de l'association sans que cela remette en cause de manière définitive sa capacité à réaliser son objet, il peut décider, par arrêté, de substituer en tout ou partie à l'association l'Etat ou, sur leur demande, une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales. Cette substitution ne peut intervenir que pour une durée déterminée (...) ".
28. Hors le cas où il s'est substitué à une association syndicale autorisée défaillante, la responsabilité de l'Etat à raison des conséquences dommageables du fonctionnement défectueux des ouvrages publics dont cette association est propriétaire ne peut être engagée qu'en cas de faute lourde dans l'exercice de ses pouvoirs de tutelle sur cette association, qui a le caractère d'un établissement public.
29. L'arrêté du 7 juillet 2005 classant la digue Est de La Faute-sur-Mer comme ayant un intérêt pour la sécurité publique a imposé au propriétaire de la digue de réaliser dans un délai d'un an " une étude permettant de déterminer la durée de retour des risques de surverse et analysant le fonctionnement de l'ouvrage selon divers scénarios " et " une étude appuyée notamment sur un diagnostic approfondi permettant d'apprécier les faiblesses de l'ouvrage et de définir les travaux nécessaires à sa remise en état et à son entretien ". En l'espèce, l'Etat ne pouvait ignorer que l'ASMF, propriétaire de la digue, ne disposait d'aucun moyen en personnel et en matériel, que son budget provenant des redevances annuelles n'excédait pas 30 000 euros et que sa dissolution avait été envisagée dès 1994. En dépit du caractère urgent des travaux de rehaussement de la digue, rappelé dans l'étude réalisée par le cabinet SCE en septembre 2006, l'Etat n'a procédé d'office à une mise en conformité des statuts de l'ASMF que le 24 novembre 2008 alors que les dispositions de l'ordonnance du 1er juillet 2004 modifiée par la loi du 30 décembre 2006 avaient été précisées par un décret du 3 mai 2006. Par ailleurs, le rôle respectif des deux associations syndicales autorisées ne ressortait pas clairement de leurs statuts qui tous deux, prévoyaient des interventions sur la digue Est. Il a fallu attendre le mois de septembre 2008 pour que la commune de La Faute-sur-Mer, qui s'est substituée aux associations syndicales autorisées, dépose une demande d'autorisation au titre de la loi sur l'eau pour la réalisation de des travaux d'exhaussement.
30. Par ailleurs, le préfet ne peut mettre en demeure une association syndicale autorisée d'exécuter des travaux puis le cas échéant, faire procéder d'office à l'exécution de ces travaux que dans l'hypothèse où leur non-réalisation serait susceptible de nuire gravement à l'intérêt public. Il peut également décider de se substituer à cette association lorsque cette dernière n'est pas en mesure de réaliser des travaux d'intérêt public.
31. Il résulte de l'instruction que la commune de La Faute-sur-Mer a connu, depuis la fin du XIXème siècle, de nombreux épisodes de submersion marine ; en particulier les tempêtes Lothar et Martin de décembre 1999 ont été à l'origine de phénomènes de submersion marine sur le littoral vendéen et de Charente-Maritime. Le dossier départemental des risques majeurs établi par le préfet en 1995 mentionne notamment que la commune de La Faute-sur-Mer est soumise à trois risques naturels majeurs, à savoir les inondations terrestre ou maritime ainsi que les feux de forêt. L'atlas de submersion marine réalisé le 30 septembre 2002 par le cabinet Sogreah, pour le compte de la direction départementale de l'équipement, faisait notamment ressortir que la digue Est est bordée d'une zone d'aléa fort. Le 30 novembre 2003, le préfet appelait l'attention du maire sur une étude effectuée par le centre d'études technique maritime et fluvial préconisant une surveillance accrue de la digue Est compte tenu du risque de surverse. Alors même que l'établissement d'un plan de prévention des risques d'inondation a été prescrit par le préfet en novembre 2001, le compte rendu de la réunion ayant eu lieu en mars 2003 en mairie de La Faute-sur-Mer en vue de la finalisation de ce document, mentionne qu'il y avait, notamment, été conclu que la digue de protection devait avoir des caractéristiques dimensionnelles d'une crue centennale et faire l'objet d'un entretien pérenne et d'un contrôle périodique.
32. Dans ces conditions, compte tenu de la connaissance précise qu'avait le préfet de la gravité des risques susceptibles de découler des caractéristiques techniques de la digue Est et de son état d'entretien, en ne clarifiant pas les compétences des deux associations syndicales et en n'exerçant pas son pouvoir de tutelle afin de faire réaliser les travaux d'exhaussement, le plus rapidement possible, l'Etat a commis une faute lourde dans l'exercice de sa mission de tutelle de nature à engager sa responsabilité.
S'agissant de la faute de l'Etat dans l'instruction du permis de construire :
33. Aux termes de l'article L. 422-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Lorsque la commune comprend moins de 10 000 habitants (...), le maire (...) peut disposer gratuitement des services déconcentrés de l'Etat pour l'étude technique de celles des demandes de permis (...) qui lui paraissent justifier l'assistance technique de ces services. Pendant la durée de cette mise à disposition, les services et les personnels agissent en concertation avec le maire ou le président de l'établissement public qui leur adresse toutes instructions nécessaires pour l'exécution des tâches qu'il leur confie ". Aux termes de l'article R. 422-5 du même code : " Lorsque le conseil municipal (...) décide, en application de l'article L. 422-8, de confier aux services de l'Etat l'instruction de tout ou partie (...) des demandes de permis, une convention précise les conditions et délais de transmission et d'instruction des dossiers, les obligations réciproques des parties en matière de classement, d'archivage des dossiers et d'établissement des statistiques. ".
34. Les conventions conclues à titre onéreux et en dehors de toute obligation entre l'Etat et les collectivités territoriales pour confier aux services déconcentrés de l'Etat des travaux d'études, de direction et de surveillance de projets de ces collectivités sont des contrats de louage d'ouvrage dont l'inexécution ou la mauvaise exécution est susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat dans les conditions de droit commun. En revanche, n'ont pas ce caractère les conventions de mise à disposition des services de l'Etat prévues par les dispositions spécifiques des articles précités L. 422-8 et R. 422-5 du code de l'urbanisme, qui sont conclues à titre gratuit et sont de droit lorsque les communes le demandent. Dans la mesure où les services de l'Etat mis à disposition agissent dans le cadre de ces conventions en concertation permanente avec le maire, qui leur adresse toutes instructions nécessaires pour l'exécution des tâches qui leur sont confiées, en vue de l'exercice de compétences d'instruction et de décision qu'il conserve, la responsabilité de l'Etat ne peut être engagée à ce titre qu'en cas de refus ou de négligence d'exécuter un ordre ou une instruction du maire.
35. Il résulte de l'instruction que la demande relative au permis de construire délivré en l'espèce a été instruite par les services de l'Etat dans le département de la L... dans le cadre d'une convention de mise à disposition conclue sur le fondement des dispositions des articles L. 422-8 et R. 422-5 du code de l'urbanisme. Il résulte également de l'instruction que la prescription dont a été assortie la délivrance de ce permis de construire a été insérée dans le projet d'arrêté portant délivrance de ce permis, par les services de l'Etat, dans le cadre des missions qui leur étaient confiées par cette convention. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que l'insertion de cette prescription, qui a été validée par l'autorité municipale ayant signé l'arrêté accordant ce permis, aurait procédé d'un refus ou d'une négligence des services de l'Etat d'exécuter un ordre ou une instruction du maire, qui sont seuls de nature à engager la responsabilité de l'Etat au titre de l'instruction de cette demande de permis de construire. Ainsi, l'Etat n'a commis, dans le cadre de cette mission d'instruction, aucune faute de nature à engager sa responsabilité.
S'agissant de l'élaboration tardive du PPRI :
36. Aux termes de l'article L 562-1 du code de l'environnement, en sa rédaction alors en vigueur : " L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations (...) ". Ces plans ont pour objet de délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de leur nature et de leur intensité, d'y interdire les constructions ou la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages et de prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités.
37. Alors que l'existence et la gravité des risques d'inondation étaient connus depuis de nombreuses années, en particulier par les études effectuées en 2000 et 2002 par la Sogreah, laquelle avait rappelé les submersions déjà survenues et dressé un atlas des zones submersibles, en novembre 2002 par les services de la DDE qui ont dressé une nouvelle carte des aléas ou que le préfet avait classé la digue Est au titre de la sécurité civile le 7 juillet 2005 et bien que le préfet ait prescrit, par son arrêté du 29 novembre 2001, l'élaboration d'un PPRI, qu'il a, par son arrêté du 8 juin 2007, mis en oeuvre par anticipation le projet de plan et qu'il a engagé des négociations avec le maire de La Faute-sur-Mer à compter de 2009 aux fins de finaliser ce plan, il est constant qu'aucun PPRI n'avait été approuvé le jour de la tempête Xynthia.
38. En outre, il ressort du rapport établi par la mission interministérielle sur la tempête Xynthia en mai 2010, que le " PPR appliqué par anticipation depuis 2007, faisait, avant la tempête Xynthia, l'objet d'une actualisation datée de 2009 fixant l'aléa de référence à 3,90 NGF, inférieur au niveau de 4 m pris en compte pour le littoral vendéen en raison de l'influence moindre des houles océaniques sur l'élévation du niveau de l'eau dans l'estuaire du Lay ". La mission interministérielle en a déduit que cette assertion revêtait un caractère erroné. Ainsi, les services de l'Etat ont sous-évalué l'appréciation du risque de submersion et défini de manière insuffisamment précise et pertinente, dans le cadre du PPRI à intervenir, les zones inconstructibles et celles où, sous réserve de prescriptions particulières elles-mêmes minorées, la construction d'immeubles était envisageable.
39. Si ce retard résulte essentiellement, ainsi qu'il ressort en particulier du relevé des conclusions d'une réunion ayant eu lieu le 11 mars 2003 en mairie de la Faute-sur-mer, des réticences de la commune à raison des restrictions aux possibilités de construire des habitations qu'un tel document entraînerait, l'absence d'établissement par l'Etat d'un PPRI et le recours à des données de référence erronées ayant contribué à minorer l'exposition au risque de submersion des terrains protégés par la digue Est, y compris en ce qui concerne les mesures de ce plan appliquées de manière anticipée, constituent des fautes de nature à engager la responsabilité de l'Etat.
En ce qui concerne la responsabilité de l'ASVL :
40. Il ressort clairement des stipulations statutaires citées précédemment que l'ASVL, alors même qu'elle n'avait pas la qualité de propriétaire de la digue Est, était chargée non seulement de son entretien courant mais également des travaux nécessaires à la protection des biens situés à proximité tels que ceux relatifs au rehaussement de la digue Est afin de prévenir de graves dangers d'inondation. Il résulte de l'instruction que si l'ASMF assurait la surveillance de l'état de l'ouvrage et son entretien courant comprenant le fauchage, la vérification des clapets, le nettoyage, le repérage et la réparation des renards hydrauliques et des fissurations, l'ASVL, qui employait deux salariés à temps plein, disposait toutefois d'engins et de matériels de gros-oeuvre et d'un budget plus conséquent que celui de l'ASMF, incluant des activités rémunérées de prestation de service et intervenait pour les travaux plus importants. Alors même que l'ASVL soutient qu'elle n'était ni propriétaire, ni maître d'ouvrage, ni gestionnaire de la digue Est et qu'elle ne pouvait intervenir sur cet ouvrage que sur demande des propriétaires, elle n'établit pas que ses actions devaient être soumises à une autorisation préalable de l'ASMF ou de la commune. Ni ses statuts, ni ceux de l'ASMF, ne le prévoyaient. En outre, si l'ASVL affirme qu'elle ne disposait pas des moyens financiers lui permettant de réaliser des travaux de renforcement de la digue, elle avait néanmoins le pouvoir de suggérer ces travaux tant à l'ASMF, qu'à la commune ou même à l'Etat. Il ne résulte pas de l'instruction qu'elle ait suffisamment attiré l'attention de ces acteurs locaux sur son incapacité à réaliser de tels travaux. Dans ces conditions, l'ASVL a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.
En ce qui concerne la faute exonératoire des victimes :
41. Les carences de la commune en matière d'information de la population sur les risques d'inondations encourus ainsi que l'absence d'établissement par l'Etat, notamment, d'un plan de prévention des risques d'inondation, étaient de nature à conforter les victimes, eu égard à l'absence de mesures spécifiques, dans l'idée que les risques auxquels elles étaient exposées ne présentaient pas une menace réelle de sorte qu'elles étaient ainsi maintenues dans un sentiment illusoire de sécurité. Par suite, aucune faute exonératoire des victimes ne peut, en l'espèce, être constatée.
En ce qui concerne le partage de responsabilité :
42. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le tribunal a condamné solidairement la commune de La Faute-sur-Mer, l'Etat et l'ASVL à réparer le préjudice subi par MM D... et F... P..., la jeune G... P..., et a fixé les parts respectives de responsabilité à hauteur de 50 % pour celle de la commune, de 35 % pour celle de l'Etat et de 15 % pour celle de l'ASVL.
En ce qui concerne les préjudices :
43. M. D... P..., agissant au nom de la succession de chacun des membres décédés de sa famille, demande la réparation du préjudice d'angoisse de mort subi par ces derniers. Agissant en son nom personnel et au nom de la jeune G..., il demande en outre, d'une part, la réparation des souffrances physiques liées à la survenance de la tempête Xynthia, d'autre part, comme M. F... P..., celle du préjudice moral causé par ces décès, du préjudice financier lié au décès de leur épouse et mère respective et procédant de pertes des ressources qu'elle apportait au foyer ainsi que des souffrances morales endurées. M. D... P... demande enfin à être indemnisé de pertes de revenus personnels. Enfin, les requérants demandent la réparation du préjudice moral consécutif à la perte d'effets personnels et de souvenirs dans leur habitation.
S'agissant du préjudice d'angoisse de mort :
44. Le droit à la réparation d'un dommage, quelle que soit sa nature, s'ouvre à la date à laquelle se produit le fait qui en est directement la cause. Si la victime du dommage décède avant d'avoir elle-même introduit une action en réparation, son droit, entré dans son patrimoine avant son décès, est transmis à ses héritiers. Le droit à réparation du préjudice résultant pour elle des souffrances morales qu'elle a éprouvées en prenant conscience de sa mort imminente et inéluctable constitue un droit entré dans son patrimoine avant son décès qui peut être transmis à ses héritiers.
45. Il résulte de l'instruction que le décès, à l'intérieur de leur habitation de plain-pied où l'eau est progressivement montée et dont ils n'ont pu sortir afin d'échapper à cette montée des eaux, de Mmes C... et M... P... ainsi que des jeunes Camil et Ismaïl P... a été provoqué par un syndrome asphyxique compatible avec une noyade. Dans ces circonstances, ils n'ont pu que prendre conscience, avant leur décès, d'une mort imminente et inéluctable à l'origine de souffrances morales dont il sera fait une juste appréciation en fixant à 20 000 euros chacun le montant de l'indemnité due à leurs héritiers.
S'agissant du préjudice moral lié aux décès :
46. En premier lieu, il résulte de l'instruction que M. D... P..., fils, époux et père respectifs de M..., C..., Camil et Ismaïl P..., a subi un préjudice moral à la suite des décès de sa mère, qui vivait à son domicile situé à Fontenay-le-Comte (L...) depuis 1993, de son épouse et de deux de ses fils. Il sera fait une juste appréciation de ces préjudices en évaluant à 8 000 euros le préjudice moral lié au décès de sa mère, à 20 000 euros le préjudice moral consécutif au décès de son épouse et à 15 000 euros le préjudice moral né du décès de chacun de ses deux fils.
47. En second lieu, il résulte de l'instruction que M. F... P... et sa soeur, la jeune G..., ont chacun subi un préjudice moral à la suite des décès de leur mère, frères et grand-mère, avec laquelle ils vivaient. Il sera fait une juste appréciation de ces préjudices en évaluant à 13 000 euros chacun le préjudice moral lié au décès de leur mère, à la somme totale de 20 000 euros pour chacun des demandeurs le préjudice moral consécutif aux décès des jeunes Camil et Ismaïl et à 4 000 euros chacun le préjudice moral né du décès de leur grand-mère.
S'agissant des préjudices corporels et les autres préjudices moraux :
Quant aux souffrances physiques et morales de M. D... P... et sa fille G... :
48. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la nuit de la tempête, l'eau a envahi soudainement et rapidement l'habitation de plain-pied de la famille P.... Seul M. D... P... a pu parvenir à quitter l'habitation pour se réfugier sur le toit de celle-ci après avoir nagé dans une eau glacée et dans l'obscurité. Cherchant le moyen de faire sortir l'ensemble des autres membres de sa famille présents cette nuit-là, M. D... P..., après avoir ôté quelques tuiles de la couverture et percé un trou dans le plafond de la pièce où ils se trouvaient, a pu seulement évacuer sa fille G... de l'habitation. M. P... et sa fille ont été les témoins directs du décès des autres membres de leur famille piégés dans l'habitation dont ils ont notamment entendu les hurlements. M. P... et la jeune G... sont restés respectivement sur le toit et sous les combles jusqu'à l'arrivée des secours au matin.
49. Eu égard aux circonstances décrites au point précédent et notamment au temps passé dans l'eau froide et aux heures passées sur le toit, dans le froid, à attendre l'arrivée des secours, M. P... et la jeune G... doivent être regardés comme ayant chacun enduré des souffrances physiques dont il sera fait une juste appréciation en l'évaluant à 5 000 euros chacun.
50. Compte tenu du niveau atteint par les eaux à l'intérieur de la résidence secondaire de la famille P... et aux conditions dans lesquelles ils ont réussi à se réfugier sur le toit et les combles de cette habitation, M. P... et sa fille G... ont été chacun exposés à un risque de noyade ou de blessures. Dans ces conditions et eu égard également à la douleur morale provoquée par le fait d'avoir vu et entendu mourir respectivement leur épouse et mère, leurs fils et frères ainsi que leur mère et grand-mère, il sera fait une juste appréciation des souffrances morales endurées par M. P... et par sa fille, laquelle a fait l'objet d'un suivi psychologique dès le mois suivant la tempête Xynthia, en l'évaluant à 10 000 euros chacun.
Quant aux souffrances morales de M. F... P... :
51. Si M. F... P..., âgé de 16 ans à la date des faits, n'était pas présent la nuit de cette tempête dès lors qu'il devait passer la nuit chez ses grands-parents maternels, il n'ignorait pas que ses parents, ses frères et soeur ainsi que sa grand-mère se trouvaient dans la résidence secondaire familiale. Dans ces circonstances, il a été exposé à une angoisse liée à l'incertitude quant au sort des membres de sa famille à l'origine d'un préjudice moral dont il sera fait une juste appréciation en l'évaluant à 1 000 euros.
S'agissant du préjudice moral lié à la perte d'effets personnels et de souvenirs :
52. MM. P... demandent la réparation du préjudice moral causé par la perte d'effets personnels et de souvenirs dans la maison qui constituait leur résidence secondaire. Eu égard notamment à la circonstance que, domiciliés à Fontenay-le-Comte, commune située dans le même département que celle de La Faute-sur-Mer, ils se rendaient régulièrement, avec les membres de leur famille décédés, dans leur résidence secondaire lors des week-end et des vacances scolaires, alors même qu'ils se bornent dans leurs écritures à invoquer la perte d'effets personnels et de souvenirs sans en préciser en particulier la consistance, il sera fait une juste appréciation de leur préjudice moral en l'évaluant à 500 euros chacun.
S'agissant des préjudices financiers :
Quant au préjudice financier lié à des pertes de revenus pour M. D... P... :
53. A la date de la tempête Xynthia, M. D... P... exerçait depuis plusieurs années une activité de médecin au service des urgences du centre hospitalier de Fontenay-le-Comte où il assurait régulièrement des gardes lesquelles constituaient une part substantielle de ses revenus. Suite à la tempête, il a été placé en position de congé de maladie pendant une durée de trois mois et à l'issue de celle-ci, a été contraint, eu égard à l'impact des conséquences de la tempête Xynthia sur sa situation personnelle et sur celle de ses enfants, de changer de poste au sein du centre hospitalier de Fontenay-le-Comte afin de réduire de manière substantielle le nombre de gardes qu'il devait assurer. Il résulte également de l'instruction, et notamment des avis d'imposition sur le revenu produits par M. P... que les revenus retirés de son activité de médecin, imposables à l'impôt sur le revenu, s'élevaient respectivement à 117 837 euros et à 99 017 euros pour les années 2008 et 2009, et que, sur les années 2010 à 2016, le montant de ces revenus s'établissait respectivement à 68 356 euros, 53 612 euros, 69 476 euros, 69 522 euros, 73 467 euros, 73 850 euros et 77 240 euros. M. P... justifie ainsi d'une perte de revenus en lien direct avec les conséquences de la tempête Xynthia à partir de l'année 2010. Si M. P... est fondé, eu égard à l'ampleur des conséquences de cette tempête pour lui-même et ses enfants G... et F..., à réclamer une indemnisation au titre des pertes de revenus subis jusqu'à la fin de l'année 2012, soit 2 ans et 10 mois après la tempête, il ne saurait cependant prétendre, comme l'ont relevé les premiers juges, en l'absence de production du moindre élément, notamment de certificats médicaux, de nature à expliquer les raisons pour lesquelles il n'aurait pu retrouver, trois années après les faits en cause, une activité professionnelle, notamment de médecin urgentiste, permettant de lui procurer des revenus équivalents à ceux perçus avant la tempête, à être indemnisé des pertes de revenus subis sur les années 2013 à 2016 ainsi que des pertes de revenus futurs.
54. Pour les mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges au point 56 du jugement attaqué la perte de revenus de M. P... consécutive à la tempête Xynthia sur la période du 1er mars 2010 et le 31 décembre 2012 peut être évaluée à la somme de 126 869 euros.
Quant au préjudice financier lié aux pertes des revenus de Mme C... P... :
55. Le préjudice économique subi par une personne du fait du décès de son conjoint est constitué par la perte des revenus de la victime qui étaient consacrés à son entretien, compte tenu de ses propres revenus. L'indemnité allouée aux enfants de la personne décédée est déterminée en tenant compte de la perte de la fraction des revenus de leur parent décédé qui aurait été consacrée à leur entretien jusqu'à ce qu'ils aient atteint au plus l'âge de vingt-cinq ans. Ce préjudice est déterminé en tenant compte des prestations à caractère indemnitaire susceptibles d'avoir été perçues par les membres survivants du foyer en compensation du préjudice économique qu'ils subissent.
56. Les consorts P... se bornent à reprendre la même argumentation devant la cour que devant le tribunal administratif, sans remettre en cause les calculs opérés au point 58 du jugement, sans apporter d'autres précisions ou documents. Les autres parties ne contestent pas le montant des sommes allouées. Il y a lieu, dans ces conditions, pour les mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges d'évaluer le préjudice financier lié aux pertes de revenus de Mme C... P... ainsi : le préjudice subi par M. D... P... lié à la perte financière dû au décès de son épouse peut être évalué à la somme de 313 168,80 euros et concernant les enfants, le préjudice subi, en capital correspondant au paiement de la somme de 5 629 euros à chacun des enfants jusqu'à vingt-cinq ans, s'élève à 53 042 euros pour F..., né en 1994, et à 91 685 euros pour G..., née en 2002.
57. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de condamner solidairement l'Etat, la commune de La Faute-sur-Mer et l'ASVL à verser la somme de 20 000 euros à la succession de Mme M... P..., la somme de 20 000 euros à la succession de Mme C... P..., la somme globale de 40 000 euros à la succession des jeunes Camil et Ismaïl P..., la somme globale de 657 222,80 euros à M. D... P... en réparation des préjudices qu'il a personnellement subis et de ceux causés à sa fille G..., ainsi que la somme globale de 91 542 euros à M. F... P....
En ce qui concerne les intérêts et la capitalisation des intérêts :
58. Lorsqu'ils ont été demandés, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1231-6 du code civil, courent à compter du jour où la demande de paiement est parvenue au débiteur. Par suite, les consorts P... ont droit aux intérêts au taux légal afférents aux sommes indiquées au point 44 à compter du 30 décembre 2014, date de réception de la demande de paiement du principal au débiteur au sens de cet article.
59. En outre, en application de l'article 1343-2 du code civil, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts présentée par les consorts P... à compter du 30 décembre 2015, date à laquelle les intérêts étaient dus pour au moins une année entière, et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
En ce qui concerne les appels en garantie :
S'agissant des appels en garantie présentés par la commune de La Faute- sur- Mer à l'encontre de l'Etat et de l'ASVL :
60. Eu égard à ce qui précède l'Etat et l'ASVL garantiront la commune à concurrence respectivement de 35 % et de 15 % des sommes mises à sa charge.
S'agissant des appels en garantie présentés par l'Etat à l'encontre de la commune et de l'ASVL :
61. Eu égard à ce qui précède, la commune et l'ASVL garantiront l'Etat à concurrence respectivement de 50 % et de 15 % des sommes mises à sa charge.
S'agissant des appels en garantie présentés par l'ASVL :
62. En premier lieu, eu égard à ce qui précède l'Etat et la commune de La Faute-sur-Mer garantiront l'ASVL à concurrence de 35 % et de 50 % des sommes mises à sa charge.
63. En deuxième lieu, les conclusions présentées par l'ASVL tendant à être garantie des sommes mises à sa charge par Groupama n'ont été présentées pour la 1ère fois que devant la cour. Elles présentent par suite le caractère de conclusions nouvelles qui, par suite, sont irrecevables.
64. En dernier lieu, il ressort des stipulations du contrat conclu avec MMA Iard et prenant effet au 1er janvier 2011 que si cette dernière garantit l'association pour des faits antérieurs à cette date, sont exclues de cette garantie les conséquences pécuniaires des sinistres dont l'assuré avait connaissance à la date de souscription de la garantie. En l'espèce, alors même que l'ASVL n'a pas été poursuivie pénalement, elle ne peut sérieusement soutenir avoir été dans l'ignorance des conséquences humaines et matérielles provoquées par la tempête Xynthia. Il s'ensuit que ses conclusions tendant à être garantie par MMA Iard ne peuvent être accueillies.
65. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de la Transition écologique et solidaire, la commune de la Faute-sur-mer et l'ASVL ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes les a condamnés à indemniser les consorts P.... Les consorts P... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes a limité leur indemnisation à la somme globale de la somme de 20 000 euros à la succession de Mme M... P..., la somme de 20 000 euros à la succession de Mme C... P..., la somme globale de 40 000 euros à la succession des jeunes Camil et Ismaïl P..., la somme globale de 647 722,78 euros à M. D... P..., ainsi que la somme globale de 82 042 euros à M. F... P....
Sur les frais liés au litige :
66. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à la charge de chacune des parties les frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : L'Etat, la commune de La Faute-sur-Mer et l'Association syndicale de la Vallée du Lay verseront solidairement la somme de 20 000 euros à la succession de Mme M... P..., la somme de 20 000 euros à la succession de Mme C... P..., la somme globale de 40 000 euros à la succession des jeunes Camil et Ismaïl P..., la somme globale de 657 222,80 euros à M. D... P... en réparation des préjudices qu'il a personnellement subis et de ceux causés à sa fille G..., ainsi que la somme globale de 91 542 euros à M. F... P.... Les intérêts échus à la date du 30 décembre 2015 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Les sommes mentionnées à l'article 1er porteront intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2014. Les intérêts échus à la date du 30 décembre 2015 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : La commune de La Faute-sur-Mer et l'association syndicale de la Vallée du Lay garantiront l'Etat, respectivement, à hauteur de 50 % et 15 % des condamnations prononcées à son encontre.
Article 4 : L'Etat et l'association syndicale de la Vallée du Lay garantiront la commune de La Faute-sur-Mer, respectivement, à hauteur de 35 % et 15 % des condamnations prononcées à son encontre.
Article 5 : L'Etat et la commune de La Faute-sur-Mer garantiront l'association syndicale de la Vallée du Lay, respectivement, à hauteur de 35 % et 50 % des condamnations prononcées à son encontre.
Article 6 : Le jugement du 6 juillet 2018 du tribunal administratif de Nantes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 7 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et solidaire, à la commune de la Faute-sur-Mer, à M. D... P..., à M. F... P..., à l'Association syndicale autorisée de la Vallée du Lay, à la société MMA IARD, à la Société mutuelle d'assurances des collectivités locales.
Une copie en sera adressée au préfet de la L... et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. A...'hirondel, premier conseiller,
- M. I..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 décembre 2019.
Le rapporteur,
T. I...Le président,
C. BRISSON
Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT02734,18NT03075,18NT03302,18NT03412