Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... C... et Mme B... C... née E... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 13 avril 2017 par lequel le maire de Bruères-Allichamps leur a délivré un permis de construire modificatif pour la modification des façades du château de Châteaufer, inscrit au titre des monuments historiques, en ce qu'il est assorti de la prescription selon laquelle la restitution du seul entablement au-dessus de la porte centrale est autorisée, sans création d'une porte-fenêtre et d'un balcon d'apparat à l'étage, sur la façade nord du château, et l'accord délivré le 10 février 2017 par le préfet de la région Centre-Val de Loire en ce qu'il n'autorise que la restitution de cet entablement.
Par un jugement n° 1701898 du 26 février 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 23 avril 2019 et les 28 janvier et 19 février 2020, M. et Mme C..., représentés par Me D..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a rejeté leurs conclusions dirigées contre l'arrêté du 13 avril 2017 du maire de Bruères-Allichamps en ce qu'il est assorti de la prescription selon laquelle la restitution du seul entablement au-dessus de la porte centrale est autorisée, sans création d'une porte-fenêtre et d'un balcon d'apparat à l'étage, sur la façade nord du château de Châteaufer ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 avril 2017 du maire de Bruères-Allichamps dans cette mesure ;
3°) d'enjoindre à l'autorité administrative de prendre une nouvelle décision dans un délai à fixer sur le fondement des dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative, au besoin sous astreinte, en application des dispositions de l'article L. 911-3 du même code ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- dès lors qu'il n'est pas contesté que le château était équipé à une époque de son histoire d'un balcon avec une porte-fenêtre, les travaux en cause auraient dû être autorisés ;
- il est démontré qu'il existait à l'origine de la construction une porte-fenêtre et non une simple fenêtre ; la présence d'un balcon d'apparat au milieu d'une façade au premier étage avec accès par une porte fenêtre est courante dans l'architecture du XVIIème siècle ;
- l'appréciation de l'administration est entachée d'une erreur manifeste ;
- la délibération du 20 janvier 2020 du conseil municipal est entachée d'une erreur matérielle en ce qu'elle mentionne que celui-ci se serait réuni le 20 novembre 2020 ;
- le mémoire de la commune ne comporte pas une défense de ses intérêts propres justifiant l'allocation d'une indemnité au titre des frais irrépétibles.
Par des mémoires, enregistrés le 5 décembre 2019 et le 17 février 2020, le ministre de la culture conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme C... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2020, la commune de Bruères-Allichamps, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. et Mme C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code du patrimoine ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., pour M. et Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 26 février 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de M. et Mme C... tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 avril 2017 du maire de Bruères-Allichamps leur délivrant un permis de construire modificatif en ce qu'il est assorti de la prescription selon laquelle la restitution du seul entablement au-dessus de la porte centrale est autorisée, sans création d'une porte-fenêtre et d'un balcon d'apparat à l'étage, sur la façade nord du château de Châteaufer, inscrit au titre des monuments historiques, et de l'accord du 10 février 2017 du préfet de la région Centre-Val de Loire en ce qu'il comporte une telle prescription. M. et Mme C... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté leurs conclusions dirigées contre l'arrêté du 13 avril 2017 du maire de Bruères-Allichamps en ce qu'il est assorti de cette prescription.
Sur la recevabilité du mémoire en défense présenté par la commune de Bruères-Allichamps :
2. D'une part, la commune de Bruères-Allichamps, auteur de l'acte contesté, était présente en première instance où elle était partie en défense. Elle est donc partie en défense dans la présente instance.
3. D'autre part, il résulte des dispositions des articles L. 2122-21 et L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales que le maire ne peut intenter au nom de la commune les actions en justice qu'après délibération ou sur délégation du conseil municipal. Il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 20 janvier 2020, le conseil municipal de Bruères- Allichamps, après en avoir délibéré, a décidé " d'autoriser le maire à défendre les intérêts de la commune dans le cadre de la requête d'appel introduite par les consorts C... devant la cour administrative d'appel de Nantes " et de confier la défense des intérêts de la ville à Me G.... Dès lors, et alors que la date du 20 novembre 2020 figurant sur cette délibération correspond, eu égard aux autres mentions qu'elle comporte, à une simple une erreur matérielle, il n'y a pas lieu d'écarter des débats le mémoire, enregistré au greffe de la cour, le 28 janvier 2020, présenté au nom de la commune de Bruères-Allichamps.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. Aux termes de l'article L. 621-27 du code du patrimoine: " L'inscription au titre des monuments historiques est notifiée aux propriétaires et entraînera pour eux l'obligation de ne procéder à aucune modification de l'immeuble ou partie de l'immeuble inscrit, sans avoir, quatre mois auparavant, avisé l'autorité administrative de leur intention et indiqué les travaux qu'ils se proposent de réaliser. / Lorsque les constructions ou les travaux envisagés sur les immeubles inscrits au titre des monuments historiques sont soumis à permis de construire, à permis de démolir, à permis d'aménager ou à déclaration préalable, la décision accordant le permis ou la décision de non-opposition ne peut intervenir sans l'accord de l'autorité administrative chargée des monuments historiques. / Les effets mobiliers attachés à perpétuelle demeure, au sens des articles 524 et 525 du code civil, à un immeuble inscrit ou à une partie d'immeuble inscrite au titre des monuments historiques ne peuvent en être détachés sans autorisation de l'autorité administrative. /Les autres travaux envisagés sur les immeubles inscrits au titre des monuments historiques ne peuvent être entrepris sans la déclaration prévue au premier alinéa. L'autorité administrative ne peut s'opposer à ces travaux qu'en engageant la procédure de classement au titre des monuments historiques prévue par le présent titre. / Les travaux sur les immeubles inscrits sont exécutés sous le contrôle scientifique et technique des services de l'Etat chargés des monuments historiques ". Aux termes de l'article R. 423-10 du code de l'urbanisme : " Lorsque la demande de permis ou la déclaration préalable porte sur un immeuble inscrit au titre des monuments historiques ou sur un immeuble adossé à un immeuble classé, un des exemplaires de la demande et du dossier est transmis par l'autorité compétente au service départemental de l'architecture et du patrimoine, dans la semaine qui suit le dépôt, pour accord du préfet de région (...) ". Aux termes de l'article R. 425-16 du même code : " Lorsque le projet porte sur un immeuble inscrit au titre des monuments historiques ou sur un immeuble adossé à un immeuble classé monument historique, le permis de construire, le permis d'aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable doit faire l'objet de l'accord prévu par les articles L. 621-27 ou L. 621-30 du code du patrimoine. / Cet accord est donné par le préfet de région ".
5. Pour contester la prescription litigieuse selon laquelle la restitution du seul entablement au-dessus de la porte centrale est autorisée, sans création d'une porte-fenêtre et d'un balcon d'apparat à l'étage, M. et Mme C... font valoir qu'il existait, à l'origine de la construction, au XVIIème siècle, une porte-fenêtre et non une simple fenêtre, que le seul fait que le château a été doté, au cours de son histoire, d'une porte-fenêtre et d'un balcon suffit pour autoriser les travaux et que la présence d'un balcon d'apparat au milieu d'une façade au premier étage avec accès par une porte-fenêtre est courante dans l'architecture de cette époque de sorte qu'en assortissant son accord du 10 février 2017 de cette prescription, le préfet de la région Centre-Val de Loire a commis une erreur d'appréciation.
6. Toutefois, ni le rapport émanant d'un architecte, produit en appel, qui est insuffisamment étayé, ni les autres pièces versées au dossier ne permettent d'établir l'existence, dès l'origine de la construction, d'une porte-fenêtre et d'un balcon d'apparat, ni d'ailleurs que les châteaux édifiés au 17ème siècle auraient, selon un courant architectural dominant, comporté de tels balcons et porte-fenêtres. Si les requérants invoquent, par ailleurs, notamment, la différence de layage entre le layage de l'ensemble du bâtiment et celui de la partie située sous l'actuelle fenêtre au-dessus de la porte centrale du rez-de-chaussée, l'existence de cavités de scellement et de traces d'usure de pierre sur la façade, la présence d'une pièce traversante et usée qui constituerait le seuil de la porte-fenêtre, l'absence de trace de décor peint sur l'allège de la fenêtre située au-dessus de la porte d'entrée, à la différence des cinq autres fenêtres de l'étage, ou la présence d'une lisse de 14 cm d'épaisseur à hauteur de l'appui de la fenêtre actuelle, ces éléments, qui ne sont pas incompatibles avec la présence d'une fenêtre simple, lors de la construction du château, et avec un abaissement et des transformations ultérieurs, ne suffisent pas à établir la présence, à cet endroit, d'une porte-fenêtre depuis l'origine de cet édifice. En outre, le ministre fait valoir, sans être sérieusement contredit, que si une porte-fenêtre avait été présente dans le projet de construction initiale, le château en aurait conservé des traces, notamment des traces de jambages lors du comblement de la partie basse de l'ouverture. Enfin, quelle que soit la date de la porte-fenêtre qui aurait pu exister sur la façade nord du château, et à supposer même, ce qui ne ressort nullement des pièces du dossier, ainsi qu'il vient d'être dit, qu'un balcon aurait été édifié, il n'est pas contesté qu'en l'état actuel de la documentation, il n'est pas possible d'en connaître les éventuelles dispositions originales, en ce qui concerne l'esthétique de ces aménagements, les matériaux et les techniques utilisés. Dans ces conditions, en assortissant son accord de la prescription litigieuse, le préfet de la région Centre-Val de Loire n'a pas commis d'erreur d'appréciation.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. et Mme C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Dès lors, leurs conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Bruères-Allichamps, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. et Mme C... de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. et Mme C... le versement de la somme que demande la commune de Bruères-Allichamps au titre de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Bruères-Allichamps tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C... et Mme B... C..., à la commune de Bruères- Allichamps, au ministre de la culture et au préfet de la région Centre-Val de Loire.
Délibéré après l'audience du 25 mai 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme A..., présidente-assesseur,
- Mme Picquet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 juin 2020.
Le rapporteur,
C. A...Le président,
T. CELERIER
La greffière,
C. POPSE
La République mande et ordonne au ministre de la culture en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT01567