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19/06/2020 | FRANCE | N°19NT04007

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 19 juin 2020, 19NT04007


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 16 mai 2019 par lequel le préfet du Loiret l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1901889 du 3 juillet 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 octobre 2019 M. C..., représenté par

Me D..., demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 3 juillet 2019 ;

2°) d'annuler l'arrê...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 16 mai 2019 par lequel le préfet du Loiret l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1901889 du 3 juillet 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 octobre 2019 M. C..., représenté par

Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 3 juillet 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Loiret du 16 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative la somme de 1 200 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé, le préfet du Loiret n'ayant pas visé le fondement légal de la mesure d'éloignement ;

- cet arrêté porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 janvier 2020 le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Un mémoire, enregistré le 29 mai 2020, a été présenté pour M. C... et n'a pas été communiqué.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant congolais (République du Congo) est entré en France en dernier lieu le 19 juin 2017. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 mars 2018, confirmée le 12 décembre 2018 par la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 16 mai 2019, le préfet du Loiret l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office. M. C... relève appel du jugement du 3 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté son recours tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

2. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

3. Il ressort du dossier, et notamment de pièces produites pour la première fois en appel, que M. C... entretient depuis 2011 une relation de couple avec une compatriote installée en France depuis 2010, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 10 janvier 2020, avec laquelle il a eu trois enfants en 2012, 2015 et 2019. Il est également établi par les pièces du dossier que M. C..., qui a reconnu par anticipation ses enfants, contribue à leur entretien, ainsi que l'attestent les relevés bancaires qu'il a produits, et participe activement à leur éducation, au moins depuis son installation en France au domicile de sa compagne en juin 2017, comme le confirment notamment les déclarations des directeurs des établissements où sont scolarisés ses deux aînés. Dans ces circonstances, l'arrêté contesté, qui aurait nécessairement pour effet de priver les enfants du requérant de la présence de leur père ou de celle de leur mère, qui a vocation à se maintenir sur le territoire français, est contraire aux stipulations rappelées au point précédent et doit, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, être annulé.

4. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. ".

6. L'annulation pour excès de pouvoir d'une mesure d'éloignement prise à l'encontre d'un étranger, quel que soit le motif de cette annulation, n'implique pas la délivrance d'une carte de séjour temporaire mais impose seulement au préfet, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour et, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Loiret de se prononcer sur le droit de M. C... à un titre de séjour dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, après lui avoir délivré, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser au conseil de M. C... dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1901889 du tribunal administratif d'Orléans en date du 3 juillet 2019 ainsi que l'arrêté du 16 mai 2019 du préfet du Loiret sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Loiret de de se prononcer sur le droit de M. C... à un titre de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans cette attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera au conseil de M. C... la somme de 1 000 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme E..., présidente-assesseure,

- M. A..., premier conseiller,

- Mme Le Barbier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 juin 2020.

Le rapporteur

E. A...La présidente

N. E...

Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT04007


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04007
Date de la décision : 19/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur ?: M. Eric BERTHON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : JANVIER-LUPART

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-06-19;19nt04007 ?
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