Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... et Mme E... D..., son épouse, ont chacun demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler les deux arrêtés pris à leur encontre les 3 et 6 août 2019 par le préfet du Loiret, leur faisant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de leur éventuelle reconduite.
Par un jugement nos 1902979, 1903055 du 21 novembre 2019, le président du tribunal administratif d'Orléans, après avoir joint les requêtes, a fait droit à leurs demandes en annulant les arrêtés en litige ainsi qu'en enjoignant au préfet du Loiret de procéder au réexamen de la situation de M. et Mme D... et de leur délivrer dans l'attente des autorisations provisoires de séjour.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 décembre 2019 le préfet du Loiret demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 novembre 2019 du président du tribunal administratif d'Orléans ;
2°) de rejeter les demandes de M. et Mme D....
Il soutient que :
- le droit de se maintenir sur le territoire national de M. et Mme D... avait cessé le 15 octobre 2016, date à laquelle leur ont été notifiées les décisions de la Cour nationale du droit d'asile portant rejet de leurs demandes de réexamen de leurs demandes d'asile ;
- M. et Mme D... ne pouvaient pas utilement soutenir devant le tribunal administratif qu'ils bénéficiaient toujours du droit de se maintenir sur le territoire national.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 juillet 2020 M. D..., représenté par
Me B..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce qu'il soit enjoint au préfet du Loiret, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, le tout dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
3°) à ce que soit mise à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Il fait valoir que :
- l'arrêté contesté méconnaît le droit au séjour provisoire qu'il tire de son statut de demandeur d'asile ;
- en refusant de l'admettre au séjour, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- il peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de renvoi a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
M. et Mme D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 11 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme D..., ressortissants sri-lankais appartenant à l'ethnie tamoule, sont entrés irrégulièrement en France, selon leurs dires, en octobre 2013. Leurs demandes d'asile ont fait l'objet d'un rejet par le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmé par la Cour nationale du droit d'asile. Il en a été de même de leurs demandes de réexamen de leurs demandes d'asile. Par deux arrêtés des 3 et 6 août 2019, le préfet du Loiret leur a fait obligation de quitter le territoire français. M. et Mme D... ont contesté la légalité de ces décisions. Le préfet du Loiret relève appel du jugement du 21 novembre 2019 par lequel le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé ces deux arrêtés.
2. Aux termes de l'article L.743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France (...) bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. ".
3. Pour annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire prises par le préfet du Loiret les 3 et 6 août 2019, le premier juge s'est fondé sur la circonstance que le préfet du Loiret n'apportait pas la preuve de la notification à M. et Mme D... des décisions de la Cour nationale du droit d'asile du 6 octobre 2016 rejetant leurs demandes d'asile, de sorte que les dispositions précitées de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant que le demandeur d'asile dispose du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de cette décision avaient été méconnues par les arrêtés en litige.
4. Toutefois, il ressort des pièces versées pour la première fois devant la cour, en particulier du relevé des informations de la base de données " TelemOfpra ", dont les mentions font foi jusqu'à preuve du contraire en vertu du III de l'article R. 723-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que les décisions de la Cour nationale du droit d'asile ont été notifiées aux intéressés le 29 mars 2016 à l'adresse qu'ils avaient déclarée. Les décisions portant rejet des demandes de réexamen de leurs demandes d'admission au bénéfice de l'asile ont, pour leur part, été notifiées le 15 octobre 2016.
5. Dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal a annulé les arrêtés portant obligation de quitter le territoire pris à l'encontre de M. et Mme D... en raison de la méconnaissance des dispositions mentionnées ci-dessus.
6. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. et Mme D... devant le tribunal administratif d'Orléans.
7. En premier lieu, il ressort des termes mêmes des arrêtés contestés que le préfet du Loiret a exposé de manière précise les motifs de droit et les considérations de fait sur lesquelles il s'est fondé. Cette motivation est ainsi suffisante. Il n'est par ailleurs pas établi que le préfet n'aurait pas procédé à l'examen de la situation personnelle des intéressés.
8. En deuxième lieu, lorsqu'il sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection internationale, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français l'intéressé ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Il appartenait à
M. et Mme D..., à l'occasion du dépôt de leurs demandes d'asile, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'ils jugeaient utiles, et notamment celles de nature à permettre à l'administration d'apprécier leur droit au séjour au regard d'autres fondements que celui de l'asile.
9. En l'espèce, il est constant que M. et Mme D... n'ont pas présenté de demande de délivrance d'un titre de séjour pour un motif autre que celui lié à l'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par le préfet des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à l'admission exceptionnelle au séjour, présente un caractère inopérant et ne peut qu'être rejeté.
10. Pour le même motif que celui énoncé au point précédent, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir de ce que le préfet du Loiret aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle des intéressés ou qu'il aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
11. En troisième lieu, en se bornant à se prévaloir de leur origine tamoule et des persécutions dont ils auraient été victimes au Sri Lanka, sans apporter d'éléments de nature à corroborer leurs allégations, les requérants ne peuvent utilement invoquer la méconnaissance par le préfet des articles L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
12. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Loiret est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé ses arrêtés des 3 et 6 août 2019.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions en annulation des époux D... n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de leur délivrer un titre de séjour ou de réexaminer leur situation doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
14. L'Etat n'étant pas la partie perdante en la présente instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à sa charge la somme que M. et Mme D... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1902979, 1903055 du 21 novembre 2019 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. A... D... et à Mme E... D....
Copie en sera adressée au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme C..., président,
- M. Berthon, premier conseiller,
- Mme Le Barbier, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 janvier 2021.
Le président-rapporteur
C. C... L'assesseur le plus ancien
E. Berthon
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19NT04866