Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... B... et Mme D... A... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision implicite du 6 janvier 2019 par laquelle le maire de la commune d'Ergué-Gabéric a rejeté leur demande tendant à la réparation et à l'entretien du mur séparant leur propriété de l'E..., situé sur cette commune et d'enjoindre à la commune d'Ergué-Gabéric de procéder à cette réparation et à cet entretien.
Par un jugement no1900919 du 23 décembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 février et 21 septembre 2022,
M. et Mme A... B..., représentés par Me Collet, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 décembre 2021 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler la décision implicite du 6 janvier 2019 par laquelle le maire de la commune d'Ergué-Gabéric a rejeté leur demande tendant à la réparation et à l'entretien du mur séparant leur propriété de l'E..., situé sur cette commune et d'enjoindre à la commune d'Ergué-Gabéric de procéder à cette réparation et à cet entretien, sous astreinte de 100 euros pour jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Ergué-Gabéric la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- alors même que le mur en litige se situe sur leur propriété privée, ils n'en sont pas propriétaires, ce mur constituant un ouvrage public appartenant à la commune, dès lors qu'il est un mur de soutènement de la voie communale surplombant leur propriété et doit être regardé comme un accessoire de la voie publique ;
- l'entretien de ce mur incombe à la commune en application de l'article L. 2321-2 du code général des collectivités territoriales, dès lors qu'il s'agit de l'entretien d'une voie communale ;
- il existe un défaut d'entretien de ce mur, dès lors qu'il bascule sur leur propriété.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 septembre 2022, la commune
d'Ergué-Gabéric, représentée par Me Prieur, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Catroux,
- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,
- et les observations de Me Marie, représentant M. et Mme A... B..., et de
Me Venet, représentant la commune d'Ergué-Gabéric.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... B... sont propriétaires d'une maison d'habitation et d'un jardin situé F... sur la commune d'Ergué-Gabéric (Finistère) depuis 2006. La maison ainsi que le mur clôturant cette propriété le long de l'F... ont été édifiés en 1978 par les premiers propriétaires. A la suite d'une expertise réalisée le 3 janvier 2018, il a été constaté un basculement de ce mur sur la propriété de M. et Mme A... B.... Par une demande du 5 novembre 2018, reçue le 6 novembre suivant, ils ont demandé au maire de la commune de réparer et d'entretenir ce mur. Cette demande est restée sans réponse, de sorte qu'une décision implicite de rejet est née. Les époux A... B... ont demandé au tribunal d'annuler cette décision et d'enjoindre à la commune de réparer le mur. Par un jugement du 23 décembre 2021, dont M. et Mme A... B... relèvent appel, le tribunal administratif de Rennes, a rejeté cette demande.
2. D'une part, le maître de l'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Lorsque le juge administratif condamne une personne publique responsable de dommages qui trouvent leur origine dans l'exécution de travaux publics ou dans l'existence ou le fonctionnement d'un ouvrage public, il peut, saisi de conclusions en ce sens, s'il constate qu'un dommage perdure à la date à laquelle il statue du fait de la faute que commet, en s'abstenant de prendre les mesures de nature à y mettre fin ou à en pallier les effets, la personne publique, enjoindre à celle-ci de prendre de telles mesures. Pour apprécier si la personne publique commet, par son abstention, une faute, il lui incombe, en prenant en compte l'ensemble des circonstances de fait à la date de sa décision, de vérifier d'abord si la persistance du dommage trouve son origine non dans la seule réalisation de travaux ou la seule existence d'un ouvrage, mais dans l'exécution défectueuse des travaux ou dans un défaut ou un fonctionnement anormal de l'ouvrage et, si tel est le cas, de s'assurer qu'aucun motif d'intérêt général, qui peut tenir au coût manifestement disproportionné des mesures à prendre par rapport au préjudice subi, ou aucun droit de tiers ne justifie l'abstention de la personne publique. En l'absence de toute abstention fautive de la personne publique, le juge ne peut faire droit à une demande d'injonction, mais il peut décider que l'administration aura le choix entre le versement d'une indemnité dont il fixe le montant et la réalisation de mesures dont il définit la nature et les délais d'exécution.
3. Pour la mise en œuvre des pouvoirs décrits ci-dessus, il appartient au juge, saisi de conclusions tendant à ce que la responsabilité de la personne publique soit engagée, de se prononcer sur les modalités de la réparation du dommage, au nombre desquelles figure le prononcé d'injonctions, dans les conditions définies au point précédent, alors même que le requérant demanderait l'annulation du refus de la personne publique de mettre fin au dommage, assortie de conclusions aux fins d'injonction à prendre de telles mesures. Dans ce cas, il doit regarder ce refus de la personne publique comme ayant pour seul effet de lier le contentieux.
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 2111-2 du code général de la propriété des personnes publiques : " Font également partie du domaine public les biens des personnes publiques (...) qui, concourant à l'utilisation d'un bien appartenant au domaine public, en constituent un accessoire indissociable ".
5. L'acte notarié du 15 septembre 2006 portant vente aux requérants de l'ensemble immobilier situé F... mentionne notamment le jardin sur lequel le mur qui borde la propriété des intéressés a été édifié comme mur de clôture par les premiers propriétaires, conformément aux prescriptions du cahier des charges du lotissement en cause. Ce titre leur attribue, dès lors, la propriété du mur en cause, qui ne peut, de ce fait, contrairement à ce que soutiennent les requérants, constituer un ouvrage public relevant du domaine public communal, à supposer même qu'il constituerait également un mur de soutènement de la voie publique. Par suite, la responsabilité de la commune ne peut être engagée en raison des dommages résultant des désordres affectant ce mur.
6. Par ailleurs, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, la réparation des dommages invoqués n'inclut pas l'entretien du mur en litige, dès lors qu'il ne constitue pas une dépendance de la voierie communale et que la réparation de ces dommages ne relève pas des dépenses obligatoires de la commune au titre de l'article L. 2321-2 du code général des collectivités territoriales.
7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Ergué-Gabéric, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. et Mme A... B..., au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme A... B... une somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Ergué-Gabéric, au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... B... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme A... B... verseront à la commune d'Ergué-Gabéric la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B..., à Mme D... A... B... et à la commune d'Ergué-Gabéric.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- Mme Lellouch, première conseillère,
- M. Catroux, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2023.
Le rapporteur,
X. Catroux
Le président,
D. Salvi
Le greffier,
R. Mageau
La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui le concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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No 22NT005382