VU la requête présentée par la société civile de moyens LIBERT-SOUCHON ayant son siège ..., représentée par son gérant en exercice ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 20 septembre 1990 ; la société demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 849013 en date du 21 juin 1990 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er mars 1980 au 31 décembre 1982 ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 25 février 1992 :
- le rapport de M. LOTOUX, conseiller,
- les observations de Me LAGARDE, avocat à la cour, pour la société civile de moyens LIBERT-SOUCHON,
- et les conclusions de Mme de X..., com-missaire du Gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 17 mars 1983, applicable en l'espèce, la direction nationale des vérifications de situations fiscales "assure pour l'ensemble du territoire national, conformément aux directives du directeur général des impôts et concurremment avec les autres services des impôts compétents : la vérification approfondie des situations fiscales d'ensemble des contribuables, quel que soit le lieu de leur domicile ; en tant que de besoin, la vérification de la comptabilité des entreprises et des exploitations qui sont dirigées, en droit ou en fait, directement ou par personne interposée et sous quelque forme juridique que ce soit, par ces contribuables ; le contrôle de tous impôts dus par les personnes physiques et morales". ;
Considérant que la société civile de moyens LIBERT-SOUCHON soutient que l'inspecteur de la direction nationale des vérifications de situations fiscales n'avait pas compétence pour effectuer du 22 mars au 9 juin 1983 la vérification de sa comptabilité et pour notifier les redressements en découlant dès lors qu'aucune vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble n'avait été engagée à l'encontre de ses associés ;
Considérant que, si l'administration soutient que l'inspecteur de la direction susvisée était compétent, en vertu du dernier alinéa de l'article 2 de l'arrêté du 17 mars 1983, pour effectuer le "contrôle de tous impôts dus par les personnes physiques et morales", il résulte toutefois des termes mêmes de l'ensemble des dispositions de cet article 2 que le "contrôle" prévu à son dernier alinéa ne saurait comporter la vérification de comptabilité d'une entreprise dont un dirigeant de droit ou de fait n'a pas fait l'objet d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble ; que l'administration n'établit ni même n'allègue que l'un des dirigeants de la société requérante ait fait l'objet d'un contrôle de sa situation fiscale d'ensemble ; que les redressements contestés procèdent, dès lors, d'une vérification réalisée par un service qui n'avait pas compétence pour l'effectuer ; que si, au titre de la période litigieuse, la société était en situation de taxation d'office, il résulte de l'instruction que celle-ci a été révélée par des investigations faites par l'administration lors de cette vérification irrégulière ; que, dans ces conditions, la société requérante est fondée à soutenir, par ce moyen soulevé pour la première fois en appel, que les rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er mars 1980 au 31 décembre 1982 et des pénalités y afférentes ont été établis selon une procédure irrégulière ; que, par suite, il y a lieu d'en prononcer la décharge ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société civile de moyens LIBERT-SOUCHON est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 21 juin 1990 est annulé.
Article 2 : Il est accordé à la société civile de moyens LIBERT-SOUCHON décharge des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 411.616 F ainsi que des pénalités y afférentes auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er mars 1980 au 31 décembre 1982.