VU la requête présentée pour M. Raoul X... demeurant, ..., par Me HEMMET, avocat à la cour ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 17 juillet 1991 ; M. X... demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 8811576/1 du 18 avril 1991 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, au titre des années 1981, 1982 et 1983 dans les rôles de la ville de Paris ;
2°) de lui accorder la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 30.000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 décembre 1993 :
- le rapport de M. DUHANT, conseiller,
- et les conclusions de Mme ALBANEL, commissaire du Gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que par une décision en date du 10 septembre 1991, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Paris-Nord a accordé à M. X... un dégrèvement de 29.355 F de droits et pénalités correspondant à la taxation à l'impôt sur le revenu de distributions relatives aux amortissements et loyers excédentaires de la société à responsabilité limitée Montjoie Art Transactions ; que dans cette mesure les conclusions de la requête sont devenues sans objet ;
Sur les cotisations demeurant en litige :
Sur la régularité de la procédure et le principe de la transaction :
Considérant, en premier lieu que si transmission a été faite par la Brigade nationale d'enquêtes économiques au service des impôts d'un procès-verbal en date du 27 juin 1983, faisant notamment état de l'existence au domicile de M. X... de trente deux tableaux, ce fut dans le cadre de l'exercice du droit de communication que l'article L.83 du livre des procédures fiscales confère à l'administration fiscale et sans qu'il résulte de l'instruction et notamment des termes du mémoire en défense de 1ère instance que cette transmission n'ait pas été précédée d'une demande préalable ; qu'aucune des dispositions contenues aux articles L.100 et L.101 dudit livre n'obligeait à ce que cette demande transitât par le ministère public ou l'autorité judiciaire ; qu'il résulte de l'instruction que, dans la notification de redressements en date du 27 juin 1985, le service a fait référence au procès-verbal en cause, dont le requérant n'a pas sollicité la communication avant la mise en recouvrement des impositions litigieuses ; qu'ainsi M. X... n'est en tout état de cause pas fondé à se prévaloir d'un exercice irrégulier du droit de communication du service ou de ce que ce dernier l'aurait privé de débat contradictoire ;
Considérant, en deuxième lieu, que si M. X... fait état de ce que les demandes de justification n° 2172 lui ont été adressées en 1984 avant que ne lui aient été restitués des documents qu'il avait confiés au vérificateur, il est constant que le service n'a pas donné de suite à ces demandes ni aux réponses qui lui ont été apportées, et que de nouvelles demandes ont été adressées à l'intéressé le 14 mars 1985 soit après qu'il eût récupéré lesdits documents ; que dès lors le moyen ne saurait en tout état de cause être accueilli ;
Considérant en troisième lieu qu'il résulte de l'instruction que M. X... expert et marchand de tableaux gérant de la SARL Montjoie Art a fait l'objet d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble puis de demandes de justifications au titre de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ; qu'en réponse aux demandes le requérant justifiait que les sommes dont l'origine indéterminée était en cause provenaient de ventes de tableaux effectuées à titre personnel par commissaire priseur en 1981 et 1983 ; qu'une première notification de redressement en date du 22 juin 1985 adressée néanmoins pour taxation dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ne fut pas suivie d'effet ; qu'une seconde notification en date du 22 octobre 1985 taxa les ventes dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux aux motifs : "en 1981 et 1983 vous avez procédé à la vente de tableaux (14 en 1981 et 46 en 1983). Compte tenu de la fréquence de ces ventes le résultat est imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux" ; que le jour même dans les locaux du service M. X... accepta les redressements par la mention "bon pour accord" ; que cette seule acceptation ne le prive pas toutefois devant le juge de la possibilité de faire valoir, comme il le fait, qu'il n'exerçait pas une activité commerciale à titre personnel et que dès lors les conditions de l'évaluation d'office pour défaut de déclaration n'étaient pas remplies, alors surtout qu'il a constamment fait valoir avant et après cette acceptation que les tableaux vendus en 1981 et 1983 à titre personnel provenaient de la succession de sa mère, célèbre collectionneuse ;
Considérant que l'activité commerciale de marchand de tableaux suppose l'achat et la revente, qu'à aucun moment le service des impôts n'établit que les tableaux ayant fait l'objet de la taxation litigieuse à titre d'activité commerciale ont été achetés par M. X... en vue de les revendre ; que si le service se prévaut des éléments ressortant du dossier ayant donné lieu à des poursuites pénales pour fraude fiscale, ceux-ci concernent - non d'ailleurs pour 1981 - des agissements intéressant la société à responsabilité limitée Montjoie Art pour lesquels le requérant es-qualités a été condamné pour fraude fiscale et qui donnent lieu à imposition pour le montant fraudé dans la catégorie des revenus à lui distribués par ladite société ; que dans ces circonstances ni ces agissements, ni l'acceptation donnée aux redressements dans les termes et les conditions susrappelés ne sont de nature à établir une activité personnelle d'achat et revente de tableaux exercée à titre habituel ;
Mais considérant qu'à titre subsidiaire le ministre entend justifier l'imposition dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée ; qu'il ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier que les tableaux mêmes ayant fait l'objet des ventes litigieuses étaient dans le patrimoine personnel du requérant, important marchand de tableaux au 1er janvier 1981 pour avoir, notamment été acquis de la succession de sa mère en 1977 tout en n'ayant pas été expressément déclarés à ce titre ; que dans ces conditions le ministre est fondé dans sa demande, à titre subsidiaire, de substitution de base légale, dès lors que le requérant qui n'avait pas dans ses réponses aux demandes de justifications fourni d'éléments sur l'origine des tableaux de nature à imposer de nouvelles demandes, n'a été en fait privé d'aucune des garanties de procédure afférente à la taxation dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée et aurait été susceptible, compte tenu de ce qu'il reconnaissait lui-même dans ses réponses ne pas pouvoir justifier la propriété des tableaux, de faire légalement l'objet d'une telle taxation et qu'ainsi il lui appartient de prouver l'exagération des bases d'impositions litigieuses ;
Sur le bien fondé des impositions :
Considérant que M. X... ne démontre pas en faisant état des qualités de collectioneuse de sa mère et de son grand-père maternel et en soutenant que l'administration eût dû, au lieu de procéder comme elle l'a fait, rehausser les droits de la succession, que les soixante tableaux à la vente desquels il a procédé au cours des deux années en cause provenaient de la succession de sa mère décédée en 1977 ; qu'il ne saurait non plus apporter la preuve qui lui incombe en faisant état de ce que l'administration n'a pas elle-même prouvé qu'il avait acquis des toiles à titre personnel et d'un arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 21 avril 1988 dont ni le dispositif ni les motifs ne soutiennent aucun fait qui, revêtu de l'autorité de la chose jugée, contribuerait à apporter la preuve qui incombe à M. X... en la présente instance ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 29.355 F dont le dégrèvement a été prononcé en cours d'instance, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X... devenues, dans cette mesure, sans objet.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.