(2ème Chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 3 août 1994, présentée pour la CONGREGATION DES SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES - Clinique Saint Paul, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; la CONGREGATION DES SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n°s 91/225 et 91/264 en date du 14 juin 1994 par lequel le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe professionnelle au titre des années 1988 à 1990 et de l'imposition forfaitaire annuelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1987, à raison d'un établissement médical dénommé "Clinique Saint-Paul" qu'elle exploite ;
2°) de la décharger des impositions litigieuses ;
3°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 octobre 1996 :
- le rapport de Mme ALBANEL, conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour la CONGREGATION DES SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES,
- et les conclusions de M. MENDRAS, commissaire du Gouvernement ;
En ce qui concerne l'imposition forfaitaire annuelle :
Considérant que si la CONGREGATION DES SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES, qui a accusé réception de la décision de rejet de sa réclamation le 1er août 1991, soutient que ses conclusions relatives à cette imposition étaient recevables, sa demande ayant été enregistrée au greffe du tribunal dès le 26 septembre 1991, il ressort des termes mêmes de cette dernière que la congrégation s'y est bornée à demander le dégrèvement de cotisations de taxe professionnelle ; que ce n'est que par un mémoire enregistré le 14 novembre 1991, soit après l'expiration du délai de deux mois prévu à l'article R.199.1 du livre des procédures fiscales, que l'intéressée a sollicité le dégrèvement de l'imposition forfaitaire annuelle ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cayenne a rejeté ses conclusions relatives à cette imposition ;
En ce qui concerne la taxe professionnelle :
Quant à la recevabilité des conclusions dirigées contre la cotisation établie au titre de l'année 1988 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas contesté, que la CONGREGATION DES SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES a présenté, avant le 31 décembre 1989, une réclamation au directeur des services fiscaux de Guyane, en vue d'obtenir la décharge de la taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1988 ; que cette réclamation, introduite dans le délai imparti à l'article R.196-2 du livre des procédures fiscales, n'était donc pas tardive ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Cayenne a rejeté les conclusions relatives à cette imposition comme irrecevables ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté lesdites conclusions et de statuer immédiatement sur cette demande, par voie d'évocation ;
Quant au principe de l'assujettissement :
Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts : "La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée" ; qu'eu égard à la généralité des termes de cette disposition, les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, lorsqu'elles exercent habituellement une activité rémunérée de même nature que celle qui est exercée par des entreprises assujetties à la taxe professionnelle, ne sont placées en dehors du champ d'application de cette taxe que si, en raison de l'absence de but lucratif et du caractère effectivement désintéressé de leur gestion, elles n'exercent pas cette activité dans les mêmes conditions que lesdites entreprises ;
Considérant, en premier lieu, que, si la CONGREGATION DES SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES concourt à l'équipement sanitaire du département de la Guyane et apporte, notamment, une contribution utile dans les domaines de la pédiatrie et de la radiologie, il ne résulte pas de l'instruction que son développement se soit effectué dans des secteurs de la santé qui ne seraient pas ou seraient moins bien couverts par les autres établissements sanitaires du département ;
Considérant, en deuxième lieu, que, si la congrégation emploie dans son personnel les membres d'une communauté religieuse féminine non rémunérés, il n'est pas établi par la requérante que les mêmes actes et les mêmes prestations que ceux proposés par les cliniques à caractère lucratif y étaient, au cours des années d'imposition litigieuse, effectués à des prix inférieurs, même en tenant compte des différences de classification entre les établissements ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'association n'a pas conclu, avec les organismes compétents, de convention en vue de donner, dans la limite des places disponibles, des soins aux bénéficiaires de l'aide sociale ; que si elle fait valoir l'existence d'un montant de factures non acquittées pour lesquelles elle n'a engagé aucune procédure de recouvrement, et fait état de la prise en charge de deux jeunes enfants sans couverture sociale pendant une période de 49 jours en 1992, elle n'apporte pas suffisamment d'éléments permettant d'établir l'importance et les conditions particulières d'octroi de ses prestations aux personnes en difficulté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conditions d'exploitation par la CONGREGATION DES SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES de la clinique Saint Paul ne peuvent être regardées comme présentant le caractère non lucratif exigé par les dispositions précitées du code général des impôts ; que, dès lors, la requérante, alors même que sa gestion était désintéressée ainsi qu'il n'est pas contesté, n' est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande en décharge de la taxe professionnelle ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cayenne est annulé en tant qu'il a rejeté comme irrecevables celles des conclusions présentées par la CONGREGATION DES SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES relatives à la taxe professionnelle établie à son nom au titre de l'année 1988.
Article 2 : Les conclusions de la demande relatives à la taxe professionnelle au titre de l'année 1988 et la requête de la CONGREGATION DES SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES sont rejetées.