( 1ère Chambre) VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 25 septembre 1995, présentée pour la SOCIETE COOPERATIVE AGRICOLE CEREPY, dont le siège social est BP 23, avenue Marcellin Berthelot 89330 Saint-Julien de Sault, venant également aux droits de la Coopérative agricole de vente et de stockage de céréales de Flogny-la-Chapelle (89360), par la SCP LESOURD-BAUDIN, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la SOCIETE COOPERATIVE AGRICOLE CEREPY demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n s 9208070/3, 9208071/3, 9208072/3, 9208073/3 et 9208074/3 du 21 décembre 1994 en tant que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 11 mars 1992 du directeur général de l'Office national interprofessionnel des céréales (ONIC), rendant exécutoires les titres de perception n s 250 et 251 mettant à sa charge une somme de 688.338,89 F au titre du prélèvement de coresponsabilité ainsi que les titres de perception n s 266 et 269 mettant à la charge de la Coopérative agricole de vente et de stockage de céréales de Flogny-la-Chapelle une somme de 611.844 F au titre du même prélèvement ;
2 ) d'annuler les titres exécutoires litigieux ;
3 ) subsidiairement, de saisir la Cour de justice des communautés européennes, par voie préjudicielle, des deux questions de droit posées par le présent litige ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le règlement n 2727/75 du 29 octobre 1975 du Conseil des communautés européennes, modifié par le règlement de la même commission n 1097/88 du 25 avril 1988 ;
VU le règlement n 1432/88 du 26 mai 1988 de la Commission des communautés européennes, modifié par le règlement de la même commission n 2324/88 du 26 juillet 1988 ;
VU le décret n 86-1139 du 24 octobre 1986, modifié par les décrets n s 88-65 du 15 janvier 1988 et 88-1011 du 27 octobre 1988 ;
VU, notamment, l'arrêt n 265/87 du 11 juillet 1989 de la Cour de justice des communautés européennes ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 novembre 1997 :
- le rapport de Mme MASSIAS, conseiller,
- les observations de la SCP LESOURD-BAUDIN, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la SOCIETE COOPERATIVE AGRICOLE CEREPY et celles de la SCP CORDELIER et associés, avocat, pour l'Office national interprofessionnel des céréales,
- et les conclusions de Mme PHEMOLANT, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 4 du règlement du Conseil des communautés européennes du 29 octobre 1975 modifié susvisé : "Un prélèvement de coresponsabilité est dû par les producteurs de céréales ... mises sur le marché ... Ce régime est applicable pour les campagnes 1988/1989 à 1991/1992." ; que le paragraphe 2 de l'article 1er du règlement de la Commission des communautés européennes du 26 mai 1988 modifié susvisé, dispose : " ... on entend par "mise sur le marché" les ventes ... par les producteurs ... aux entreprises de collecte ..." ; que le paragraphe 1 de l'article 4 du même règlement précise : "Les prélèvements ... sont perçus par les acheteurs" et que le 1 de l'article 9 du même règlement prévoit : "Les Etats membres prennent les mesures complémentaires nécessaires -pour assurer la perception du prélèvement de coresponsabilité conformément au présent règlement ..." ; qu'enfin, aux termes de l'article 1er du décret du 24 octobre 1986 modifié susvisé : "L'office national interprofessionnel des céréales (ONIC) est chargé de collecter, à compter du 1er juillet 1988, les sommes perçues au titre du prélèvement de coresponsabilité ... lors de la livraison des céréales par un producteur à un collecteur agréé ..." ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions citées ci-dessus que si le prélèvement de coresponsabilité est supporté par les producteurs de céréales, les acheteurs sont, du seul fait de la livraison des céréales, redevables de son versement à l'Office national interprofessionnel des céréales ; que la société CEREPY en sa qualité de collecteur agréé est redevable des prélèvements correspondant aux céréales qui lui ont été livrées ; que dès lors, elle ne peut utilement se prévaloir de l'impossibilité dans laquelle elle se serait trouvée de percevoir lesdits prélèvements des producteurs ;
Considérant, en deuxième lieu, que si le 1 de l'article 9 du règlement du 26 mai 1988 dispose qu'il appartient aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires pour assurer la perception du prélèvement de coresponsabilité, il ne résulte d'aucune disposition que l'Office national interprofessionnel des céréales qui, en vertu de l'article 1er du décret du 24 octobre 1986 modifié, a pour mission d'assurer le recouvrement des sommes perçues au titre du prélèvement de coresponsabilité lors de la livraison des céréales par les producteurs aux collecteurs agréés, soit tenu de pallier les carences de ces derniers en exerçant des poursuites contre les producteurs qui refusent de supporter ce prélèvement ;
Considérant, en troisième lieu, qu'en réclamant à la société requérante les sommes correspondant aux prélèvements de coresponsabilité que, conformément à ce qui vient d'être dit, elle était tenue de lui reverser, l'Office national interprofessionnel des céréales ne saurait être regardé comme portant atteinte à son droit de propriété tel qu'il est garanti par l'article 1 du protocole additionnel de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en quatrième lieu, que les moyens tirés du non-respect par l'Office national interprofessionnel des céréales de la procédure contradictoire de perception des prélèvements de coresponsabilité et de ce que, ces prélèvements ayant la nature d'une taxe fiscale, cette perception doit obéir au régime des impositions internes, ne sont assortis d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant, enfin, que si la SOCIETE COOPERATIVE AGRIGOLE CEREPY soutient que les prélèvements de coresponsabilité litigieux sont dépourvus de fondement légal en raison de l'absence de la concertation sur leur utilisation prévue par l'article 4-6 du règlement du 29 octobre 1975, ce moyen doit être écarté dès lors que cette circonstance, à la supposer établie, est sans influence sur le bien-fondé desdits prélèvements dont la Cour de justice des communautés européennes rappelle de façon constante que leur objectif est de limiter, par eux-mêmes, les excédents structurels de céréales sur le marché ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que l'Office national interprofessionnel des céréales est en droit de réclamer à la SOCIETE COOPERATIVE AGRICOLE CEREPY le versement des sommes correspondant aux prélèvements de coresponsabilité dus à raison des quantités de céréales qui lui ont été livrées par des producteurs au cours de la campagne 1990/1991 ainsi que les sommes dues au même titre par la Coopérative agricole de vente et de stockage de céréales de Flogny-la-Chapelle aux droits de laquelle elle se trouve désormais ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice des communautés européennes aux fins d'interprétation des règlements cités lesquels sont suffisamment clairs, la SOCIETE COOPERATIVE AGRICOLE CEREPY n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des titres exécutoires émis par l'Office national interprofessionnel des céréales aux fins de paiement par elle des sommes de 688.338,89 F et 611.814 F dont les montants ne sont pas contestés ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, en application de ces dispositions, de condamner la SOCIETE COOPERATIVE AGRICOLE CEREPY à verser à l'Office national interprofessionnel des céréales une somme de 8.000 F ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE COOPERATIVE AGRICOLE CEREPY est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE COOPERATIVE AGRICOLE CEREPY versera à l'Office national interprofessionnel des céréales une somme de 8.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.