VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 12 février 1997, présentée pour M. Cyr Z..., demeurant chez Mme Y..., ... le-Roi, par Me X..., avocat ; M. Z... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n s 9511814 - 9511815, en date du 20 novembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne, en date du 20 avril 1995, lui refusant la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant ;
2 ) d'annuler ledit arrêté ;
3 ) de prescrire au préfet du Val-de-Marne, en application des dispositions des articles L.8-2, 1er alinéa, et L.8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de lui délivrer une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant dans les trente jours de la décision à intervenir, sous astreinte de 1.000 F par jour de retard ;
4 ) de condamner le préfet du Val-de-Marne à lui payer la somme de 5.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU l'ordonnance n 45-2441 du 2 novembre 1945 modifiée ;
VU le décret n 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 octobre 1998 :
- le rapport de M. LAURENT, premier conseiller,
- et les conclusions de M. BROTONS, commissaire du Gouvernement ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne en date du 20 avril 1995 :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :
Considérant que M. Z..., ressortissant congolais entré en France le 22 novembre 1994 muni d'un visa de long séjour pour poursuivre ses études, soutient, sans être contredit, avoir sollicité, dès le 5 décembre 1994, une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant à la préfecture des Yvelines, puis, dans les derniers jours de décembre 1994, en raison de son déménagement à Choisy-le-Roi, à la préfecture du Val-de-Marne ; que la circonstance qu'il n'ait pas été en mesure de produire toutes les pièces requises avant le 20 mars 1995, ne permet pas de le regarder comme n'ayant pas respecté les dispositions de l'article 3 du décret du 30 juin 1946 susvisé qui lui imposaient de présenter sa demande dans les deux mois de son entrée en France ; qu'ainsi, en se fondant sur le non respect par l'intéressé de ces dispositions pour rejeter sa demande de carte de séjour temporaire, le préfet de police a entaché son arrêté du 20 avril 1995 d'une erreur de droit ; que, dès lors, M. Z... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de ladite décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des arti-cles L.8-2, 1er alinéa, et L.8-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L.8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution par le même jugement ou le même arrêt" ; qu'aux termes de l'article L.8-3 du même code : "Saisi de conclusions en ce sens, le tribunal ou la cour peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application de l'article L.8-2 d'une astreinte qu'il prononce dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L.8-4 et dont il fixe la date d'effet" ;
Considérant que si l'année universitaire pour laquelle M. Z... a sollicité une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant est à ce jour révolue, cette seule circonstance ne prive pas de tout objet les conclusions susanalysées, dès lors que la délivrance d'un tel titre, modifiant, fût-ce rétroactivement, la situation de droit de l'étranger à qui elle a été illégalement refusée, est susceptible de produire des effets quant à l'appréciation par l'administration de la situation ultérieure de l'intéressé dans le cadre soit de l'ordonnance du 2 novembre 1945 soit de procédures de régularisation ; que, par conséquent, un ressortissant étranger peut utilement demander qu'il soit enjoint à l'administration de lui délivrer un titre de séjour, fût-ce pour une période révolue, sous réserve que les conditions prévues par l'article L.8-2, 1er alinéa, précité soient réunies ;
Considérant que l'annulation, par le présent arrêt, de l'arrêté en date du 20 avril 1995, implique nécessairement que le préfet du Val-de-Marne délivre à M. Z... le titre de séjour en qualité d'étudiant qu'il sollicitait pour l'année universitaire 1994-1995, dès lors que l'intéressé établit, sans que cela soit d'ailleurs contesté par l'administration, qu'il remplissait à l'époque toute les conditions requises pour la délivrance d'un tel titre ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de délivrer à M. Z... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt le titre susmentionné pour l'année universitaire 1994-1995 ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions tendant à ce que cette injonction soit assortie d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'arti-cle L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, en l'espèce, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de condamner l'Etat à verser à M. Z... la somme de 5.000 F ;
Article 1er : Le jugement en date du 20 novembre 1996 et la décision du 20 avril 1995 du préfet du Val-de-Marne sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de délivrer à M. Z... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt une carte de séjour temporaire en qualité d'étudiant pour l'année universitaire 1994-1995.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. Z... la somme de 5.000 F au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Z... est rejeté.