(5ème chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 15 janvier 1998, présentée pour M. Pierre Y..., par Me X..., avocat ; M. Y... demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n° 9605075 en date du 13 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Melun ne lui a accordé qu'une décharge partielle de l'obligation de payer la somme de 730.647,22 F résultant du procès-verbal de saisie-vente qui lui a été signifié le 11 octobre 1995 ;
2 ) de prononcer la décharge de la somme restant en litige ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu à l'audience publique du 27 janvier 2000 :
- le rapport de M. BOSSUROY, premier conseiller,
- et les conclusions de M. HAIM, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que le receveur des impôts de Maisons-Alfort a engagé le 11 octobre 1995 une procédure de saisie-vente à l'encontre de M. Y..., pour avoir paiement d'une somme de 730.647,22 F sur le fondement d'un engagement de caution souscrit par ce dernier le 21 juin 1991 au profit de la société anonyme Marbrerie d'Art et Installation dont il était le président du conseil d'administration ; que M. Y... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif ne l'a déchargé de l'obligation de payer cette somme que pour la partie excédant 712.754,52 F ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que les premiers juges ont répondu de façon suffisamment motivée au moyen tiré de la prescription du droit de recouvrement du comptable public ; que le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier sur ce point doit dès lors être écarté ;
Sur la régularité en la forme de l'acte de poursuite :
Considérant qu'aux termes de l'article L.281 du livre des procédures fiscales : "Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L.252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt, tel qu'il est prévu à l'article L.199" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le moyen tiré de ce que le procès-verbal de saisie-vente du 11 octobre 1995 serait irrégulier dès lors qu'il n'indique pas si la somme visée comporte des pénalités et intérêts de retard, qui conteste la régularité en la forme de l'acte et ne peut, par suite, être soumis qu'au juge de l'exécution, est irrecevable devant le juge administratif, juge de l'impôt ;
Sur l'existence de l'obligation de payer :
Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient M. Y..., il résulte de l'instruction que la somme de 712.754,52 F, sur le total de 730.647,22 F visé par le procès-verbal de saisie-vente, dont l'obligation de payer a été maintenue à sa charge par le jugement attaqué, correspond aux cotisations de taxe sur la valeur ajoutée visées par l'engagement de caution du 21 juin 1991, soit une somme de 440.433,52 F restant à payer sur l'avis de mise en recouvrement n° 893145 du 20 décembre 1989 et une somme de 272.321 F résultant de l'avis de mise en recouvrement n° 893487 du 20 février 1990 ;
Considérant, d'autre part, que si l'article L.282 du livre des procédures fiscales dispose : "Lorsqu'une tierce personne mise en cause en vertu de dispositions autres que celles du code général des impôts, conteste son obligation d'acquitter la dette, le tribunal administratif, lorsqu'il est compétent, attend pour statuer que la juridiction civile ait tranché la question de l'obligation", la validité de l'acte de cautionnement souscrit par M. Y... le 21 juin 1991 au profit de la société Marbrerie d'Art et Installation ne saurait être affectée par le fait qu'il indique porter sur des cotisations de taxe sur la valeur ajoutée ayant fait l'objet de l'octroi par l'administration de délais de paiement alors que les impositions dont s'agit en l'espèce avaient fait l'objet, de la part de la société, d'un engagement de payer selon un échéancier déterminé, ni par le fait que ledit engagement porte la date du 9 juillet 1991, postérieure à celle de l'acte de cautionnement, dès lors qu'il résulte de l'instruction, et notamment d'une lettre du 21 juin 1991 produite au dossier, que la date du 9 juillet 1991 résulte d'une simple erreur de plume et que l'engagement de payer a, en réalité, été signé le 21 juin 1991 ; que le moyen ainsi invoqué par le requérant, s'il conteste son obligation d'acquitter sa dette en vertu de dispositions autres que celles du code général des impôts, ne soulève pas une difficulté sérieuse de nature à justifier que le juge administratif sursoie à statuer jusqu'à ce que la juridiction civile ait tranché la question de l'obligation, en application des dispositions précitées de l'article L.282 du livre des procédures fiscales ;
Sur l'exigibilité des sommes réclamées :
Considérant qu'aux termes de l'article L.275 du livre des procédures fiscales : "La notification d'un avis de mise en recouvrement interrompt la prescription courant contre l'administration et y substitue la prescription quadriennale. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa est interrompu dans les conditions indiquées à l'article L.274" et qu'aux termes de l'article L.274 du même livre : "Les comptables qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous actes interruptifs de la prescription" ;
Considérant, d'une part, que le délai de prescription du droit du comptable public de poursuivre le recouvrement des cotisations de taxe sur la valeur ajoutée en litige, ouvert par les notifications des avis de mise en recouvrement précités, intervenues le 28 décembre 1989 et le 22 février 1990, a été suspendu par le jugement du 23 janvier 1992 prononçant la mise en liquidation judiciaire de la société redevable, puis interrompu par la production le 9 mars 1993 de la créance de l'Etat au passif de la liquidation ; que le nouveau délai de prescription de quatre ans ouvert le 18 novembre 1992, date du jugement de clôture de la liquidation, n'était expiré à la date de l'acte de poursuite contesté, ni à l'égard du débiteur principal, ni, en vertu des dispositions de l'article 2250 du code civil, à l'égard de la caution ;
Considérant, d'autre part, que le jugement du 16 septembre 1997 du tribunal d'instance de Neuilly-sur-Seine rejetant la demande de saisie-arrêt des rémunérations de M. Y... formulée le 26 avril 1996 par le receveur des impôts de Maisons-Alfort au motif que, le demandeur n'ayant pas justifié d'une production de créance dans les formes légales non plus que son admission, le droit de recouvrement serait frappé de prescription, n'est, en tout état de cause, pas revêtu de l'autorité de la chose jugée à l'égard du juge administratif ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif ne lui a accordé qu'une décharge partielle de l'obligation de payer la somme de 730.647,22 F résultant du procès-verbal de saisie-vente qui lui a été signifié le 11 octobre 1995 ;
Sur les conclusions de M. Y... tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. VILLA la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.