(5ème chambre)
VU, enregistrée au greffe de la cour le 20 août 1998, la requête présentée pour les sociétés à responsabilité limitée SARIM et SOMEDEC, ayant leur siège l'une ..., et l'autre ..., par Me X..., avocat ; les sociétés SARIM et SOMEDEC demandent à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 2 juillet 1998 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes dirigées contre les décisions par lesquelles la direction nationale des enquêtes fiscales a refusé de leur communiquer l'intégralité des documents se rapportant aux vérifications dont elles ont fait l'objet ;
2 ) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3 ) d'ordonner à la direction nationale des enquêtes fiscales de communiquer les documents demandés ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n 78-753 du 17 juillet 1978 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2000 :
- le rapport de M. DUPOUY, premier conseiller,
- et les conclusions de M. HAÏM, commissaire du Gouvernement ;
Sur la communication de pièces manquantes des dossiers de vérification :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 susvisée : "Sous réserve des dispositions de l'article 6, les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande ..." ; et qu'aux termes de l'article 2 du décret du 28 avril 1988 relatif à la procédure d'accès aux documents administratifs : "Le silence gardé pendant plus d'un mois par l'autorité compétente, saisie d'une demande de communication de documents en application du titre Ier de la loi n 78-753 du 17 juillet 1978, vaut décision de refus. En cas de refus exprès ou tacite, l'intéressé dispose d'un délai de deux mois à compter de la notification du refus ou de l'expiration du délai fixé au premier alinéa du présent article pour saisir la commission instituée à l'article 5 de la loi n 78-753 du 17 juillet 1978. La saisine de la commission, dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent article, est obligatoire préalablement à tout recours contentieux. La commission notifie, dans un délai d'un mois à compter de sa saisine, son avis à l'autorité compétente qui informe la commission, dans le mois qui suit la réception de cet avis, de la suite qu'elle entend donner à la demande. Le silence gardé par l'autorité compétente pendant plus de deux mois à compter de la saisine de la commission par l'intéressé vaut décision de refus. Le délai de recours contentieux est prorogé jusqu'à la notification à l'intéressé de la réponse de l'autorité compétente" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par courriers en date du 28 février 1996, la direction nationale d'enquêtes fiscales a adressé à M. Claude Y..., gérant de la société SARIM, et à M. Charles Y..., gérant de la société SOMEDEC, à la suite de l'avis favorable émis par la commission d'accès aux documents administratifs, les documents relatifs aux vérifications de comptabilité engagées à l'égard de ces deux sociétés ; que si lesdites sociétés estimaient que la totalité des pièces de leur dossier ne leur avait pas été transmise, il leur appartenait de formuler une nouvelle demande auprès de l'administration compétente tendant à la communication des pièces manquantes et, en cas de refus, de saisir à nouveau la commission d'accès aux documents administratifs ; qu'en l'absence de ces formalités, les sociétés requérantes n'étaient pas recevables à saisir directement le juge de l'excès de pouvoir du refus de communication qu'aurait constitué, selon elles, la communication incomplète des dossiers demandés ; que, dès lors, les sociétés SARIM et SOMEDEC ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation du refus de communication des documents sollicités ;
Sur la communication des rapports de vérification :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 bis de la loi du 17 juillet 1978 : "Les personnes qui le demandent ont droit à la communication ... des documents de caractère nominatif les concernant, sans que des motifs tirés du secret de la vie privée, du secret médical ou du secret en matière commerciale et industrielle, portant exclusivement sur des faits qui leur sont personnels, puissent leur être opposés ..." ; que si, en application de ces dispositions, le rapport de vérification doit être communiqué au contribuable qui a fait l'objet de la vérification, s'il en fait la demande, cette communication ne peut intervenir que sous réserve des dispositions de l'article 6 de cette même loi aux termes desquelles, notamment : "Les administrations ... peuvent refuser de laisser consulter ou de communiquer un document administratif dont la consultation ou la communication porterait atteinte : ... - à la recherche, par ses services compétents, des infractions fiscales et douanières ..." ;
Considérant que pour s'opposer à la communication de l'intégralité des rapports établis à la suite des vérifications de comptabilité dont ont fait l'objet les sociétés SARIM et SOMEDEC, le ministre, en se prévalant d'un arrêté du 20 novembre 1983 pris en application de l'article 6 précité, soutient que cette communication porterait atteinte à la recherche, par les services compétents, des infractions fiscales et douanières ;
Considérant que l'état de l'instruction ne permettant pas d'apprécier si, comme le soutient le ministre, certains des passages des rapports de vérification litigieux entrent dans le champ d'application de l'une des exceptions prévues par l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978, il y a lieu d'ordonner avant-dire-droit, tous droits et moyens des parties étant réservés, la production desdits rapports à la chambre de la cour chargée de l'instruction de l'affaire, sans que communication de ces pièces soit donnée aux sociétés SARIM et SOMEDEC, pour être ensuite statué ce qu'il appartiendra sur leurs conclusions relatives à la communication de ces rapports ;
Article 1er : Les conclusions de la requête des sociétés SARIM et SOMEDEC relatives à la communication de pièces manquantes de leur dossier de vérification sont rejetées.
Article 2 : Est ordonnée, avant-dire-droit, tous droits et moyens des parties étant réservés, la production par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie à la 5ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris, dans les conditions précisées dans les motifs du présent arrêt, de l'intégralité des rapports de vérification de comptabilité des sociétés SARIM et SOMEDEC, auxquels celles-ci ont demandé à avoir accès. Cette production devra intervenir dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.