(2ème chambre B)
VU la requête enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1997, présentée pour M. et Mme Léonard X..., par la SCP LECAT, CORNEVAUX et ASSOCIES, avocat, sise 56/60 rue de la Glacière 75640 Paris cedex 13 où les requérants font élection de domicile ; les requérants demandent à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n s 9404645/1 et 9415317/1 en date du 10 octobre 1996 en tant que le tribunal administratif de Paris en premier lieu a rejeté la demande de M. X... tendant d'une part à l'annulation des notifications de redressement en date des 3 novembre 1992 et 9 décembre 1992, d'autre part à la décharge de l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1989 ainsi que des pénalités dont il a été assorti, et en second lieu n'a pas admis l'intervention de Mme X... tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant du commandement décerné à son encontre le 24 mars 1995 pour le recouvrement de cette imposition ;
2 ) de prononcer l'annulation des notifications de redressement litigieuses, la décharge de l'imposition litigieuse et de l'obligation de payer résultant du commandement décerné à l'encontre de Mme X... ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 modifiée ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 octobre 2001 :
- le rapport de M. BATAILLE, premier conseiller,
- les observations de la SCP LECAT, CORNEVAUX, avocat, pour M. et Mme X...,
- et les conclusions de Mme KIMMERLIN, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. et Mme X... demandent l'annulation du jugement en date du 10 octobre 1996 en tant que le tribunal administratif de Paris en premier lieu a rejeté la demande de M. X... tendant d'une part à l'annulation des notifications de redressement en date des 3 novembre 1992 et 9 décembre 1992, d'autre part à la décharge de l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1989 ainsi que des pénalités dont il a été assorti, et en second lieu n'a pas admis l'intervention de Mme X... tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant du commandement décerné à son encontre le 24 mars 1995 ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation des notifications de redressement des 3 novembre 1992 et 9 décembre 1992 :
Considérant qu'ainsi qu'en ont décidé les premiers juges, les notifications litigieuses ne constituent pas des actes susceptibles d'être contestés par la voie du recours pour excès de pouvoir ; que par suite les conclusions tendant à leur annulation doivent être rejetées comme irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à la décharge de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1989 :
Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article 6 du code général des impôts : "1. Chaque contribuable est imposable à l'impôt sur le revenu, tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels que de ceux de ses enfants et des personnes considérées comme étant à sa charge au sens des articles 196 et 196 A bis ..." ; et qu'aux termes de l'article 12 du même code : "L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un jugement en date du 22 juin 1989, le tribunal de district de Lausanne a prononcé la faillite de M. X... et ordonné la liquidation sommaire de cette faillite ; que, par un jugement en date du 22 mai 1990, le tribunal de grande instance de Créteil a déclaré le jugement du tribunal de district de Lausanne exécutoire en France ; que les requérants, qui ne contestent pas que les revenus retirés par M. X... de l'exploitation d'un immeuble lui appartenant situé en France sont imposables en France par application tant des dispositions de l'article 4 bis du code général des impôts que des stipulations du 1 de l'article 6 de la convention fiscale franco-helvétique du 9 septembre 1966 modifiée, font toutefois valoir que M. X... n'avait plus la disposition patrimoniale de l'immeuble et n'a pu ainsi en percevoir les revenus directement appréhendés par l'office des faillites de Lausanne ; qu'ils entendent ainsi soutenir que M. X... n'a pas eu la disposition de ces revenus au sens de l'article 12 du code général des impôts et qu'il convient d'imposer la masse représentée par l'office ; que, toutefois, une personne physique n'est pas privée de la disposition, au sens de l'article 12 du code général des impôts, des revenus acquis même postérieurement au jugement de liquidation personnelle, même si ces revenus ne sont pas libres d'emploi du fait de leur affectation obligatoire à l'extinction des créances de la masse ; qu'ainsi le moyen soulevé par les requérants doit être écarté ;
Considérant en second lieu que les requérants soutiennent que le jugement du tribunal du district de Lausanne prononçant la faillite personnelle de M. X... en date du 22 juin 1989 fait obstacle au paiement de la créance de l'administration fiscale française qui est forclose ; que, toutefois, ce moyen qui a trait au recouvrement de l'imposition litigieuse est irrecevable à l'appui d'une contestation relative à l'assiette de cette imposition et ne peut donc qu'être écarté ;
Sur les conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant du commandement du 24 mars 1995 :
Considérant qu'aux termes de l'article 1685 du code général des impôts : "2. Chacun des époux est tenu solidairement au paiement de l'impôt sur le revenu ..." ; que Mme X... tenue solidairement, en application de ces dispositions, au paiement de l'impôt sur le revenu assigné, au titre de l'année 1989, tant à elle-même qu'à son mari en vertu de l'article 6-1 du même code, était recevable, en qualité de débitrice solidaire, à se joindre à l'instance engagée par son mari en vue d'obtenir la décharge de l'imposition litigieuse et à y présenter, sous réserve du respect des règles de procédure propres au contentieux du recouvrement, des conclusions connexes tendant à la décharge de l'obligation de payer cette imposition ; qu'il suit de là que les requérants sont fondés à demander l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué par lequel le tribunal administratif a refusé d'admettre la prétendue intervention de Mme X... tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant du commandement décerné à son encontre le 24 mars 1995 ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif ;
Considérant que Mme X..., passible comme son mari de l'imposition litigieuse, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ne peut utilement invoquer la législation suisse pour faire échec à la mise en recouvrement d'une imposition soumise à la seule loi française ; que la circonstance que le jugement susmentionné du tribunal de district de Lausanne ait été rendu exécutoire en France, si elle a pour effet, ainsi que l'a admis le receveur général des finances, trésorier-payeur général d'Ile-de-France dans une décision du 11 mai 1994, de suspendre les poursuites à l'encontre de M. X..., est en revanche sans portée à l'égard de Mme X... qui n'était pas partie à cette instance ; que le fait que les requérants soient mariés sous le régime de la séparation de biens est sans incidence sur la solidarité prévue à l'article 1685-2 précité du code général des impôts ; qu'il suit de là et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'exception de tardiveté invoquée par le ministre, que Mme X... n'est pas fondée à demander la décharge de l'obligation de payer résultant du commandement décerné à son encontre le 24 mars 1995 pour le recouvrement de l'imposition litigieuse ;
Article 1er : L'article 2 du jugement n s 9404645/1 et 9415317/1 du tribunal administratif de Paris en date du 10 octobre 1996 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande n 9415317/1 de Mme X... tendant à la décharge de l'obligation de payer l'impôt sur le revenu de l'année 1989 et le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X... sont rejetés.