(4ème chambre A)
VU, enregistrés au greffe de la cour les 28 juillet 1998 et 10 février 2000, la requête et le mémoire complémentaire présentés pour Mme Marie-Laure de X..., , par Me TOSONI, avocat ; Mme de X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 951277-n 95-1441 du 10 mars 1998 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à la condamnation de la commune de Breuillet et de l'Etat, à raison de leur refus d'exécuter une décision de justice, à lui verser la somme de 1.500.000 F chacun en réparation du préjudice résultant de leur carence ;
2 ) de condamner la commune de Breuillet et l'Etat à lui verser, à titre de dommages-intérêts, la somme de 3.000.000 F majorée des intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 1989 ;
3 ) subsidiairement, d'ordonner une expertise pour déterminer le montant de son préjudice et, dans cette hypothèse, de lui allouer une provision de 1.500.000 F ;
4 ) de condamner la commune de Breuillet et l'Etat à lui verser, au titre des frais irrépétibles, la somme de 20.000 F ;
5 ) de condamner la commune de Breuillet et l'Etat à supporter les dépens ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de l'urbanisme ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 décembre 2001 :
- le rapport de Melle PAYET, premier conseiller,
- les observations de Me TOSONI, avocat, pour Mme de X... ,
- et les conclusions de M. HEU, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la cour d'appel de Paris a, par un arrêt en date du 6 avril 1990 confirmant un jugement correctionnel du 12 octobre 1989 du tribunal de grande instance d'Evry, ordonné la démolition du chalet édifié à Breuillet par Mme Y... en contravention avec les règles de l'urbanisme et la remise en état des lieux dans un délai de deux mois sous peine d'une astreinte à compter du jour de son relogement par les soins de la commune ; qu'estimant avoir subi un préjudice du fait de l'inexécution de ces décisions de justice, Mme de X... , dont la propriété se trouve dans le voisinage immédiat du chalet édifié par Mme Y... , a formé contre la commune de Breuillet et contre l'Etat deux demandes d'indemnisation qui ont été rejetées par jugement du tribunal administratif de Versailles du 10 mars 1998 ; que, par la requête susvisée, elle fait appel de ce jugement ;
Sur la responsabilité de la commune :
Considérant qu'il résulte des articles L.480-4 et L.480-5 du code de l'urbanisme qu'en cas de condamnation pour édification d'une construction sans permis de construire, le juge pénal peut, à la demande du ministère public, ordonner à titre de réparation civile la démolition des ouvrages ; que selon l'article L.480-9 du même code, si, à l'expiration du délai fixé par le jugement, la démolition n'est pas complètement achevée, le maire agissant au nom de l'Etat ou le fonctionnaire compétent peut faire procéder d'office à tous travaux nécessaires à l'exécution de la décision de justice ; qu'il s'ensuit que les fautes éventuellement commises par le maire dans la mise en oeuvre des pouvoirs qu'il tient de cette dernière disposition ne sont susceptibles d'engager que la responsabilité de l'Etat et non celle de la commune ; que Mme de X... n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté comme mal dirigée sa demande tendant à la condamnation de la commune de Breuillet à réparer son préjudice ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
Considérant, d'une part, que les dispositions ci-dessus rappelées du code de l'urbanisme ne font pas obligation au maire de prendre les mesures qu'elles prévoient ; que le maire dispose à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation ; qu'en l'espèce, le maire de Breuillet a recherché sans relâche une solution au relogement de la famille propriétaire de la construction à démolir et n'a fait preuve dans l'exercice de ses compétences ni de carence ni d'erreur d'appréciation ; qu'aucune carence fautive du préfet n'est non plus établie, ni même d'ailleurs sérieusement invoquée ; que, dès lors, la responsabilité de l'Etat ne peut être retenue sur le fondement de la faute ;
Considérant, d'autre part, que le préjudice allégué par Mme de X... , et qu'elle impute à la présence à proximité de sa propriété du chalet de 35 m2 d'emprise au sol dont la démolition a été ordonnée, ne présente pas un caractère de gravité suffisante pour permettre de condamner l'Etat sur le fondement de la responsabilité sans faute ;
Considérant, enfin, que le stationnement de caravanes sur le terrain jouxtant la propriété de la requérante, à supposer qu'il soit à l'origine d'un préjudice et notamment de la perte de la valeur vénale de cette propriété, n'est pas susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat pour non exécution d'une décision de justice, dès lors que les décisions judiciaires susmentionnées n'ont pas ordonné l'évacuation de ces caravanes ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner l'expertise sollicitée, que Mme de X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'indemnisation dirigée contre l'Etat ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que Mme de X... est la partie perdante dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que la commune de Breuillet et l'Etat soient condamnés à lui verser, au titre des frais irrépétibles, la somme de 20.000 F doit, en conséquence, être rejetée ;
Article 1er : La requête de Mme de X... est rejetée.