Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 13 juillet 1999 sous le n° 99PA02263, présentée pour l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, dont le siège est situé ... RP - représentée par son directeur général, par Me X..., avocat ; l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance rendue le 30 juin 1999 par le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter les conclusions des consorts ;
3°) de condamner les consorts à lui verser la somme de 6.030 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
4°) subsidiairement, de réformer l'article 2 de l'ordonnance attaquée et de décider, pour l'hypothèse où elle confirmerait l'octroi d'une provision à M. , que l'éventuelle astreinte mise à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris ne courra qu'à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la plus postérieure des dates à laquelle l'ordonnance lui a été notifiée et à laquelle elle a reçu les informations bancaires nécessaires au mandatement ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 2003 :
- le rapport de Mme DESCOURS-GATIN, premier conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris,
- et les conclusions de Mme FOLSCHEID, commissaire du Gouvernement ;
Sur l'appel incident de Mlle Z :
Considérant que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, a, par les articles 1er et 2 de l'ordonnance attaquée, condamné l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris à verser à M. une provision de 10 000 F sous astreinte de 500 F par jour de retard à compter d'un délai de deux mois suivant la notification de l'ordonnance, et par l'article 4, rejeté le surplus des conclusions de la requête ; que l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris demande la réformation de cette ordonnance en tant qu'elle l'a condamnée à verser une provision de 10 000 F sous astreinte ; que les conclusions de l'appel incident de Mlle dirigées contre le dispositif de l'ordonnance rejetant sa propre demande de provision soulèvent un litige différent de celui qui résulte de l'appel principal ; que ces conclusions étant, en outre, présentées après l'expiration du délai d'appel contre cette ordonnance, elles ne sont pas recevables et doivent être rejetées ;
Sur la responsabilité de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 667 du code de la santé publique, issues de la loi n° 52-854 du 21 janvier 1952 et modifiées par la loi n° 61-846 du 2 août 1961, les centres de transfusion sanguine ont le monopole des opérations de collecte du sang et ont pour mission d'assurer le contrôle médical des prélèvements, le traitement, le conditionnement et la fourniture aux utilisateurs, des produits sanguins ; qu'eu égard tant à la mission qui leur est ainsi confiée par la loi qu'aux risques que présente la fourniture de produits sanguins, les centres de transfusion sont responsables, même en l'absence de faute, des conséquences dommageables de la mauvaise qualité des produits fournis ;
Considérant qu'aux termes de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : En cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur. Cette disposition est applicable aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que M. a été opéré le 25 mars 1977 à l'Hôpital Laennec qui dépend de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, en vue de la mise en place d'une prothèse aortique ; qu'au cours de cette intervention, il a reçu six concentrés de globules rouges et quatre unités de plasma frais ; qu'un bilan médical réalisé en mars 1995 a mis en évidence une sérologie positive au virus de l'hépatite C ; que l'enquête transfusionnelle qui a été menée n'a pas permis de conclure à l'innocuité de l'ensemble des produits sanguins transfusés ; que, dans ces conditions, et en l'absence d'identification d'autres modes de contamination propres à la victime, nonobstant le délai de dix-huit ans qui s'est écoulé entre les transfusions en cause et la révélation de la contamination, le lien de causalité entre les transfusions massives dont M. a fait l'objet à l'Hôpital Laennec et sa contamination par le virus de l'hépatite C, doit être tenu pour établi ; que, contrairement à ce que soutient l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris en appel, il résulte de l'instruction, et notamment de l'enquête transfusionnelle concernant M. , que les produits sanguins litigieux provenaient du poste de transfusion sanguine de l'hôpital Laennec, relevant de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a jugé qu'en l'état du dossier son obligation de réparer les conséquences dommageables de la contamination de M. n'était pas sérieusement contestable et l'a condamnée à verser à ce dernier une provision de 10 000 F ;
Sur les conclusions subsidiaires présentées par l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public... prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles... et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ; qu'aux termes de l'article L. 911-4 dudit code : En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte... ;
Considérant qu'en dehors des cas ci-dessus rappelés, le juge administratif ne peut adresser à une personne publique une injonction assortie d'une astreinte ; que l'ordonnance en date du 30 juin 1999 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a fixé à 10 000 F le montant de la provision due à M. par l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris était exécutoire de plein droit sans qu'il fût justifié de soumettre immédiatement le versement de cette provision au respect d'un délai et au paiement d'une astreinte ; que, dès lors, en assortissant son ordonnance d'un délai d'exécution de deux mois à compter de sa notification sous astreinte de 500 F par jour de retard, le juge des référés a méconnu les dispositions sus-rappelées ; qu'il suit de là que l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris est fondée à demander l'annulation de l'article 2 de l'ordonnance attaquée ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à M. et Mlle la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. et Mlle , par application des mêmes dispositions, à payer à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris la somme qu'elle demande, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : L'article 2 de l'ordonnance du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 30 juin 1999 est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris est rejeté.
Article 3 : L'appel incident présenté par Mlle est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de M. et de Mlle tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées
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N° 99PA02263
Clasement CNIJ : 60-02-01-01
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