Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2001 au greffe de la cour, présentée pour M. X... X élisant domicile ... par Me, LE CAMUS, avocat ; M. X... X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9509559/1 en date du 12 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988 et 1989 mises en recouvrement le 30 novembre 1992 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) de prononcer le sursis à exécution du jugement attaqué ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu à l'audience publique du 7 octobre 2005 :
- le rapport de Mme Evgenas, rapporteur,
- les observations de Me Christophe Z..., pour M. X... X,
- et les conclusions de M. Bataille, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'EURL DYEDRE qui exerce une activité de marchand de biens a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos le 30 septembre 1987, 30 septembre 1988, 30 septembre 1989 et 30 novembre 1989, date de la dissolution de la société ; que M. X... X, associé unique de l'EURL, soumise au régime des sociétés de personnes, demande la décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988 et 1989 ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision en date du 8 juillet 2005, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des résidents à l'étranger et des services généraux a prononcé le dégrèvement d'une somme de 2 763 774,61 euros en droits et pénalités au titre des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles M. X a été assujetti au titre de l'année 1989 ; que par suite, les conclusions du requérant sont, à due concurrence, devenues sans objet ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne le débat oral et contradictoire :
Considérant que les opérations de contrôle s'étant déroulées au siège de l'EURL DYEDRE, il incombe à M. X... X d'établir que la société a été privée d'un débat oral et contradictoire ;
Considérant, en premier lieu, que le gérant de l'EURL DYEDRE, M. Y... X, a été régulièrement informé de l'engagement des opérations de vérification par l'avis adressé le 19 janvier 1990 au siège social de l' entreprise ; que si le gérant n'était présent à aucune des deux interventions sur place, cette circonstance, qui n'incombe pas au vérificateur, ne démontre pas que celui-ci se serait refusé à tout échange de vues avec le représentant légal de la société ou se serait mépris sur son identité ; que si, lors de la première intervention sur place du 6 février 1990, seul l'expert comptable était présent, le vérificateur a rencontré lors de la 2ème intervention du 6 mars 1990 M. X... X, associé unique de l'EURL DYEDRE, avec lequel il a débattu, comme le reconnaît d'ailleurs le requérant dans ses écrits devant les premiers juges, du redressement envisagé portant sur la remise en cause du régime d'exonération des entreprises nouvelles ; qu'en tout état de cause, la circonstance que la doctrine administrative DB 13 O 2133 ne prévoit pas que l'associé unique d'une EURL puisse légalement représenter la société, ne constitue pas une interprétation formelle de la loi fiscale dont M. X... X pourrait utilement se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80.A du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'eu égard au nombre réduit des opérations immobilières menées par l'EURL DYEDRE, l'administration ayant relevé que, seules, cinq opérations avaient été réalisées sur la période vérifiée dont aucune avant le 31 décembre 1986 et quatre le même jour le 28 novembre 1989, la circonstance que le contrôle, limité à la remise en cause du régime d'exonération d'impôt prévu à l'article 44 quater du code général des impôts au motif que la société avait débuté effectivement son activité après le 31 décembre 1986, n'ait donné lieu qu'à deux interventions sur place ne démontre pas que la société a été privée d'un débat oral et contradictoire ; qu'enfin, les circonstances que le vérificateur ait pu écrire à sa hiérarchie le 13 février 1990, quelques jours après la première intervention sur place que l'EURL DYEDRE n'avait exercé aucune activité entre le 17 décembre 1986 et le 18 juin 1987 et, qu'ainsi, elle ne pouvait pas bénéficier des exonérations d'impôt prévues par l'article 44 quater du code général des impôts et que cet agent ait ensuite demandé des justifications à la société sur l'opération immobilière du 18 décembre 1986 dont elle faisait état dans sa réponse à la notification de redressements en date du 22 mars 1990 ne suffisent pas à établir, comme le soutient M. X... X, que le vérificateur, aurait décidé des redressements dès le début du contrôle et se serait, par la suite, refusé à tout échange de vues ; que le moyen tiré du défaut de débat oral et contradictoire doit donc être écarté ;
En ce qui concerne la régularité de la notification de redressements du 22 mars 1990 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales : Sous réserve des dispositions de l'article L. 56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts, les redressements correspondants sont effectués suivant la procédure de redressement contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A ;
Considérant que si M. X... X fait valoir qu'une notification de redressements lui a été adressée le 22 mars 1990 avant que n'expire le délai limite de déclaration de ses revenus pour l'année 1989, il résulte de l'instruction que cette notification de redressements mentionnant les résultats du contrôle de l'EURL DYEDRE a été expédiée au domicile de l'associé unique, M. X... X, pour l'EURL DYEDRE et que la notification de redressements tirant les conséquences à l'impôt sur le revenu de l'associé lui a été adressée le 19 décembre 1991, soit après l'expiration de ce délai ; que l'argumentation selon laquelle cette dernière notification de redressements serait entachée d'irrégularités est inopérante au soutien de la contestation de la notification de redressements du 22 mars 1990 qu'elle n'a pas eu pour objet de régulariser ; que par suite, le moyen tiré de ce que la notification de redressements du 22 mars 1990 méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales doit être écarté ;
Sur le bien fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article 44 quater du code général des impôts :
Considérant que l'administration a refusé à l'EURL DYEDRE le bénéfice de l'article 44 quater du code général des impôts au motif qu'ayant été créée après le 31 décembre 1986, elle n'entrait pas dans le champ d'application dudit article ;
Considérant qu'aux termes de l'article 44 quater du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable issue de l'article 13-III de la loi n° 84-1208, du 29 décembre 1984, portant loi de finances pour 1985 : Les entreprises créées du 1er janvier 1983 au 31 décembre 1986, soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et répondant aux conditions prévues aux 2 et 3 du II et III de l'article 44 bis, sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés en raison des bénéfices industriels et commerciaux qu'elles réalisent à compter de la date de leur création jusqu'au terme du trente-cinquième mois suivant celui au cours duquel cette création est intervenue ... ; que, pour l'application de ces dispositions, la date à laquelle une entreprise a été créée s'entend de celle à laquelle elle a effectivement commencé à exercer son activité ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'EURL DYEDRE qui exerçait une activité de marchand de biens n'a procédé à sa première acquisition d'un bien immobilier que le 18 juin 1987 ; que si M. X... X soutient qu'elle aurait été admise à participer à hauteur de 1/7ème à l'opération immobilière ayant donné lieu à la promesse de vente conclue le 18 décembre 1986 en vue de l'acquisition d'un ensemble immobilier situé à Eze-sur-Mer d'un montant de 6 600 000 F, il résulte de l'instruction que ladite promesse de vente a été signée par la seule société ARTE dont aucun document probant n'atteste qu'elle aurait agit pour le compte de l'EURL DYEDRE ; que l'attestation sous seing privé de la gérante de la société ARTE établie le 14 avril 1990, postérieurement aux opérations de contrôle, indiquant que l'EURL DYEDRE aurait participé à cette opération immobilière est sans valeur probante ; que si M. X... X fait également état des garanties signées par la gérante de l'EURL DYEDRE le 7 janvier 1987 afin d' obtenir un financement de 600 000 F pour la société, aucun des documents bancaires produits n'établit que ces démarches seraient en relation avec l'opération immobilière alléguée ; que la copie du recto d'un chèque de 400 000 F établie le 14 janvier 1987 à l'ordre de la société ARTE n'apporte pas davantage cette preuve ; que dans ces conditions, l'EURL DYEDRE doit être regardée comme ayant effectivement commencé à exercer son activité postérieurement au 31 décembre 1986 ; que par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur la reprise d'une activité préexistante, c'est à bon droit que l'administration lui a refusé le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 44 quater du code général des impôts ;
Considérant, en deuxième lieu, que si M. X... X invoque l' instruction en date du 16 mars 1984 reprise à la documentation administrative de base prévoyant, à titre de règle pratique, qu'une entreprise sera considérée comme créée avant le 31 décembre 1986, au sens des dispositions législatives précitées, si la déclaration d'existence, qu'elle est tenue de souscrire conformément à l'article 286 du code général des impôts, est parvenue au service avant le 16 janvier 1987, cette instruction, qui contient seulement des recommandations aux services, et qui d'ailleurs prévoit expressément que le service des impôts peut établir, à partir des éléments dont il dispose, la date réelle de création de l'entreprise, ne comporte aucune interprétation formelle de la loi fiscale dont le requérant pourrait se prévaloir sur le fondement de l'article L.80-A du livre des procédures fiscales ;
En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article 244 bis du code général des impôts :
Considérant, en premier lieu, que M. X... X soutient que, n'ayant pas d'établissement en France dès lors qu'il est résident suisse, il aurait dû être soumis au prélèvement de 50% prévu par l'article 244 bis du code général des impôts et non à l'impôt sur le revenu au taux progressif ;
Considérant qu'aux termes de l'article 244 bis du code général des impôts : Les profits mentionnés à l'article 35 donnent lieu à la perception d'un prélèvement de 50% lorsqu'ils sont réalisés par des contribuables ou par des sociétés, quelle qu'en soit la forme, qui n'ont pas d'établissement en France (...) ;
Considérant toutefois, que les profits résultant de l'activité de marchand de biens ont été réalisés par l'EURL DYEDRE et non par le requérant qui, bien qu'associé unique de l'EURL, n'est imposé qu'à raison des droits qu'il détient dans la société ; qu'il est constant que l'EURL DYEDRE dispose d'un établissement en France constitué par son siège social situé à Nice ; que par suite, M. X... X ne saurait prétendre qu'il aurait dû être soumis au prélèvement prévu par l'article 244 bis du code général des impôts ;
Considérant, en deuxième lieu que M. X... X fait valoir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, que la circulaire du 18 février 1964 prévoit que le prélèvement est dû par les personnes qui, n'ayant pas leur domicile réel en France, ont réalisé les profits par l'intermédiaire de sociétés visées à l'article 8 du code général des impôts ;
Considérant, qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause d'un rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ;
Considérant que M. X... X qui a fait l'objet d'une imposition primitive à l'impôt sur le revenu ne saurait utilement se prévaloir des termes des paragraphes 97 et 176 de la circulaire du 18 février 1964 sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales qui s'applique aux seuls rehaussements d'une imposition antérieure ; qu'il ne saurait davantage utilement se fonder sur le deuxième alinéa de l'article L. 80 A du livre précité dès lors qu'il n'a pas fait application dans ses déclarations des prescriptions de la doctrine invoquée ; que, par suite, le requérant ne peut, en tout état de cause, se prévaloir des interprétations ou des appréciations contenues dans cette circulaire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation à l'impôt sur le revenu de l'année 1988 ;
Sur les conclusions de M. X... X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à M. X... X une somme de 5000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement attaqué :
Considérant que le présent arrêt statue sur le fond de l'affaire ; que par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement attaqué ;
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer à hauteur des dégrèvements prononcés au titre de l'année 1989 pour un montant de 2 763 774, 61 euros en droits et pénalités.
Article 2 : l'Etat est condamné à verser à M. X... X une somme de 5000 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
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N° 01PA00863