Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2006, présentée pour M. Sikina X, élisant domicile chez M. Y, ..., par Me Aumont ; M. X demande à la cour d'annuler le jugement du 1er décembre 2005, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 juillet 2002 par laquelle le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'il sollicitait, confirmée par décision du 15 novembre 2002, et à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
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Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde droit de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifié relatif aux conditions d'entrée de séjour des étrangers en France ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié, réglementant les conditions d'entrée de séjour des étrangers en France ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2007 :
- le rapport de M. Treyssac, rapporteur,
- les observations de Me Aumont pour M. X,
- et les conclusions de Mme Desticourt, commissaire du gouvernement ;
Sur le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifié et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) » ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et des pièces du dossier que M. X est venu rejoindre en France à l'âge de vingt ans, sa mère de nationalité sénégalaise qui y résidait régulièrement depuis plus de dix ans, son beau-père de nationalité française, ses six demi frères et soeurs nés entre 1985 et 1994 dont seul le premier est de nationalité sénégalaise alors que les cinq autres sont de nationalité française ; que s'il a vécu au Sénégal alors que sa mère est entrée en France dès 1986, il a été confié à sa grand-mère du fait que ses parents s'étaient séparés dès sa naissance en 1980 et que son père est décédé en juillet 1998 ; que sa grand-mère âgée représente sa seule famille au Sénégal ; que sa mère a entrepris des démarches pour le faire venir en France au titre du regroupement familial et que sa démarche a échoué pour des raisons matérielles, car elle ne disposait pas alors d'un logement adapté et de ressources suffisantes ; que peu avant l'arrivée en France de M. X, sa famille a acquis un logement susceptible de l'accueillir et conforme à la réglementation située à Paris XVIIe et que sa mère a pris un emploi de femme de ménage pour subvenir aux besoins de sa famille, son mari étant par ailleurs salarié en qualité de chauffeur livreur ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la décision du préfet de police rejetant la demande de titre de séjour de M. X est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et porte au droit au respect de la vie privée et familiale de M. X une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, au regard des dispositions de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945, et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde droit de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il s'ensuit que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision qui lui fait grief ; que ledit jugement doit être annulé ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 911-1 et 2 du code de justice administrative, M. X est recevable dans ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de réexaminer sa situation et de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une mesure d'astreinte ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'il y a lieu de condamner l'Etat à verser à l'avocat de M. X, qui bénéfice de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 000 euros en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 1er décembre 2005 est annulé.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. X un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à Me Agathe Aumont, avocat de M. X, la somme de 1 000 euros en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991.
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N° 06PA02796