Vu la requête, enregistrée le 16 août 2006, présentée pour M. C...A...demeurant..., par MeB... ; M. A...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0311917/5 du 15 juin 2006 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris a limité à la somme de 2 000 euros le montant de l'indemnité qu'il a condamné l'Etat à lui verser au titre de la réparation des troubles dans ses conditions d'existence ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 73 200 euros en réparation de son préjudice ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient qu'il a dû attendre près de sept ans avant l'intervention de la décision du Conseil d'Etat annulant la décision le plaçant illégalement en disponibilité dans l'intérêt du service ; qu'il est resté durant toute cette période dans une situation précaire tant sur le plan financier que psychologique qui a eu des répercussions sur sa vie privée puisqu'il a divorcé ; qu'il a ainsi subi un préjudice moral justifiant l'allocation d'une somme de 20 000 euros ; que la réparation de son préjudice financier a été insuffisante notamment en ce qu'il n'a perçu que le montant minimal des primes entre 1995 et 2006 ; qu'il y a lieu de condamner l'Etat de ce chef à lui verser la somme de 33 200 euros ; enfin, qu'il a perdu une chance d'évolution professionnelle justifiant le versement d'une somme de 20 000 euros ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 juillet 2007, présenté par le ministre de la défense ; le ministre conclut au rejet de la requête à titre principal pour irrecevabilité, à titre subsidiaire au fond ; il soutient que la requête ne comporte pas de moyens d'appel ; que M. A... ne démontre pas la réalité de son préjudice moral ; que le préjudice financier du requérant pour la période où il a été évincé a été intégralement réparé par le versement d'une somme de 100 664,86 euros correspondant à la perte de son traitement et de ses primes et que ses droits à pension ont été régularisés ; que le montant des primes versées entre 2003 et 2005 est lié à la manière de servir du requérant et leur contestation constitue un préjudice financier distinct de celui indemnisé par l'administration ; qu'il a bénéficié d'une reconstitution de carrière avantageuse puisqu'il a été reclassé dans le corps des agents techniques de l'électronique sans avoir à passer l'examen professionnel permettant d'accéder à ce corps s'il était resté en fonction ; que le requérant ne s'étant jamais présenté à un concours interne avant sa mise en disponibilité alors qu'il remplissait les conditions pour le faire, il ne saurait se prévaloir de la perte d'une chance sérieuse de réussir un concours interne pour accéder à la catégorie B ;
Vu le mémoire, enregistré le 10 août 2007, présenté pour M. A... tendant aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ; il soutient en outre que sa requête était motivée et par suite recevable ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2007 :
- le rapport de M. Marino, rapporteur,
- et les conclusions de M.Coiffet, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.A..., agent des transmissions au ministère de la défense depuis 1985 a été placé en position de disponibilité dans l'intérêt du service pour une durée de deux ans à compter du 15 octobre 1995 par un arrêté ministériel du 11 octobre 1995 ; que cette position a été renouvelée pour une durée identique par un arrêté du 9 octobre 1997 ; que, par un dernier arrêté du 8 mars 1999, M. A...a été radié des contrôles et admis d'office à faire valoir ses droits à la retraite ; que, par une décision du 24 juin 2002, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, a annulé l'arrêté du 11 octobre 1995 ; que les deux autres arrêtés précités ont été annulés par un jugement devenu définitif du Tribunal administratif de Paris du 30 mai 2002 ; que M. A...a été réintégré dans le grade d'agent technique de l'électronique à compter du 6 janvier 2003 ; que son administration de tutelle lui a versé une somme de 100 664,86 euros à titre d'indemnité compensatrice des pertes de revenus pour la période comprise entre le 15 octobre 1995 et le 6 janvier 2003 et a reconstitué ses droits à pension ; que M. A...a sollicité le paiement d'une somme de 106 714,31 euros en réparation de son préjudice matériel et moral ; que, par le jugement du 15 juin 2006 dont M. A... fait appel, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser au requérant la somme de 2 000 euros au titre des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence et a rejeté le surplus de la demande ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la défense :
Considérant que la présente requête énonce des critiques précises à l'encontre du jugement attaqué et de la décision prise par l'administration refusant d'indemniser le préjudice de M.A... ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre et tirée de ce que la requête ne comporterait pas de moyens d'appel et serait irrecevable doit être écartée ;
Sur les conclusions à fin d'indemnisation :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A...a été évincé illégalement de ses fonctions pendant près de sept années ; que cette mesure lui a causé des troubles dans ses conditions d'existence ; qu'eu égard à la durée de cette éviction, les premiers juges ont fait une appréciation insuffisante du préjudice subi par le requérant en limitant à 2 000 euros l'indemnité qu'ils lui ont accordée ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l'évaluant à 10 000 euros ;
Considérant en revanche que M. A...ne démontre ni que la somme de 100 664,86 euros qui lui a été versée au titre des pertes de revenus était insuffisante pour réparer intégralement son préjudice financier, ni qu'il aurait perdu une chance sérieuse d'évolution professionnelle par la réussite à un concours interne de catégorie B ;
Considérant enfin, que si M. A...conteste le taux de primes qui lui est servi depuis sa réintégration, ces conclusions relèvent d'un litige distinct et doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La somme de 2 000 euros que l'Etat a été condamné à payer à M. A...par l'article 1er du jugement susvisé du 15 juin 2006 du Tribunal administratif de Paris est portée à 10 000 euros..
Article 2 : Le jugement du 15 juin 2006 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de la défense.
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N° 06PA03008